BGE 68 II 308
49. Arrêt de la Ire Section civile du 2 décembre 1942 en la cause Banque
commerciale de Soleure S. A. contre Etat de Genève.
Regeste:
1. Constitutionnalité des arrêtés du Conseil fédéral.
Les arrêtés rendus par le Conseil fédéral en vertu des pouvoirs qui lui ont
été conférés par l'art. 3 de l'arrêté fédéral du 30 août 1939 sur les mesures
propres à assurer la sécurité du pays et le maintien de sa neutralité
échappent au contrôle constitutionnel du Tribunal fédéral (consid. 2).
2. Ordonnance sur la communauté des créanciers dans les emprunts par
obligations.
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L'art. 8 bis in fine, qui interdit que In procédure prévue dans l'ordonnance
soit requise plus d'une fois dans le délai d'un an n'est applicable qu'au
débiteur qui veut abuser, en renouvelant sa demande, des effets moratoires
attachés à la convocation (consid. 3 litt. b).
Art. 6: notion du délai convenable pour la convocation (litt. c).
Le débiteur peut présider l'assemblée des obligataires (litt. d).
La participation à un vote d'une personne dont la qualité est contestée ne
peut en permettre l'annulation que si cette coopération a exercé une influence
sur le résultat de la votation. Cf. art. 691 al. 3
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 691 - 1 Il est interdit d'abandonner des actions pour permettre au représentant d'exercer le droit de vote à l'assemblée générale si cet abandon a pour but de rendre illusoire une restriction apportée à ce droit. |
|
1 | Il est interdit d'abandonner des actions pour permettre au représentant d'exercer le droit de vote à l'assemblée générale si cet abandon a pour but de rendre illusoire une restriction apportée à ce droit. |
2 | Tout actionnaire peut protester auprès du conseil d'administration contre une participation illicite à l'assemblée générale ou faire inscrire son opposition au procès-verbal de l'assemblée. |
2bis | Les membres du conseil d'administration et de la direction ont le droit de prendre part à l'assemblée générale.502 |
3 | Lorsque des personnes qui n'ont pas le droit de participer à l'assemblée générale coopèrent à l'une de ses décisions, chaque actionnaire peut l'attaquer en justice, même faute de toute protestation préalable, à moins que la preuve ne soit faite que cette coopération n'a exercé aucune influence sur la décision prise. |
Pour le calcul de la majorité du capital en circulation, il faut déduire les
obligations du créancier exclu du vote non seulement du montant des voix
acceptantes mais aussi du montant des obligations en circulation (litt. e).
1. Verfassungsmässigkeit von BRB.
Die Beschlüsse, die der Bundesrat erlassen hat auf Grund der ihm durch Art. 3
BB vom 30. August 1939 betr. Massnahmen zum Schutze des Landes und zur
Aufrechterhaltung der Neutralität übertragenen Vollmachten können vom
Bundesgericht nicht auf ihre Verfassungsmässigkeit hin überprüft werden (Erw.
2).
2. Vo über die Gläubigergemeinschaft bei Anleihensobligationen.
Art. 8 bis i. f., der untersagt, das in der Vo vorgesehene Verfahren innert
Jahresfrist mehr als einmal anzurufen, ist nur auf solche Schuldner anwendbar,
die durch die Erneuerung des Begehrens die mit der Einberufung verbundenen
Stundungswirkungen missbrauchen wollen (Erw. 3 b).
Art. 6: Begriff der angemessenen Frist für die Einberufung (Erw. 3 c).
Der Schuldner kann bei der Obligationärversammlung den Vorsitz führen (Erw. 3
d).
Nimmt an einer Abstimmung jemand teil, dessen Befugnis hiezu streitig ist, so
ist die Ungültigerklärung der Abstimmung nur gerechtfertigt, wenn diese
Mitwirkung auf das Abstimmungsresultat von Einfluss gewesen ist; vgl. Art. 691
Abs. 3 OR.
Für die Berechnung der Mehrheit des im Umlauf befindlichen Kapitals müssen die
Obligationen eines vom Stimmrecht ausgeschlossenen Gläubigers nicht nur vom
Betrag der annehmenden Stimmen, sondern auch vom Betrag des im Umlauf
befindlichen Kapitals abgezogen werden (Erw. 3 e).
1. Costituzionalità delle ordinanze del Consiglio federale.
Le ordinanze emanate dal Consiglio federale in vertù dei poteri conferitigli
dall'art. 3 del decreto federale 30 agosto 1939 sulle misure da prendere per
la protezione del paese e il mantenimento della sua neutralità sfuggono al
sindacato sulla loro costituzionalità da parte del Tribunale federale (consid.
2).
2. Ordinanza sulla comunione dei creditori nei prestiti per obbligazioni.
L'art. 8 bis, in fine, secondo cui la procedura prevista dall'ordinanza non
può essere richiesta che una volta entro il termine di un anno, è applicabile
soltanto al debitore che voglia abusare, rinnovando la sua domanda, degli
effetti moratori inerenti alla convocazione (consid. 3 lett. b).
Art. 6 . nozione di congruo termine per la convocazione (lett. o).
Il debitore può presiedere l'assemblea degli obbligazionisti (lett. d).
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Il fatto che una persona, la cui qualità è contestata, partecipa ad una
votazione può condurre all'annullamento della votazione soltanto se sul
risultato di quest'ultima ha influito una tale partecipazione. Cfr. 691 cp. 3
CO.
Pel calcolo della maggioranza del capitale in circolazione le obbligazioni
d'un creditore escluso dal voto debbono essere dedotte non soltanto
dall'ammontare dei voti accettanti, ma anche dall'ammontare delle obbligazioni
in circolazione (lett. e).
A. - La Banque de Genève était une société anonyme au capital de vingt
millions de francs. Entreprise de droit privé, elle avait pourtant un certain
caractère officiel. L'Etat de Genève participait pour six millions au
capitalactions. Les statuts l'autorisaient à avoir deux délégués - il est
vrai, sans droit de vote ni de veto - au Conseil d'administration et un
délégué à l'assemblée générale, et à nommer un vérificateur adjoint. La Banque
devait soumettre au Conseil d'Etat toute décision importante et, avant
l'assemblée générale, le bilan annuel. Elle portait sur son papier à lettres
les armes de Genève et figurait à l'annuaire officiel.
En été 1931, la Banque de Genève suspendit ses paiements et déposa son bilan.
Après ajournement de la déclaration de faillite par le juge conformément à
l'art. 857 al. 3 a
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 857 - 1 Les associés peuvent signaler les évaluations douteuses à l'organe de révision et demander les explications nécessaires.731 |
|
1 | Les associés peuvent signaler les évaluations douteuses à l'organe de révision et demander les explications nécessaires.731 |
2 | Ils ne peuvent consulter les livres et la correspondance qu'en vertu d'une autorisation expresse de l'assemblée générale ou d'une décision de l'administration, et à la condition que le secret des affaires ne soit pas compromis. |
3 | Le tribunal peut obliger la société à renseigner ses membres, par des extraits certifiés conformes de ses livres ou de sa correspondance, sur des faits précis qui sont importants pour l'exercice du droit de contrôle. De telles communications ne doivent pas compromettre les intérêts de la société. |
4 | Le droit de contrôle des associés ne peut être supprimé ou restreint ni par les statuts, ni par une décision d'un organe social. |
d'un sursis concordataire, les organes de liquidation, avec l'appui des
pouvoirs publics, mirent sur pied un projet de concordat. Par arrêté
législatif du 21 janvier 1932, le Grand Conseil de Genève autorisa le Conseil
d'Etat à adhérer au projet et à exécuter les prestations que ce projet mettait
à la charge du canton.
Le concordat comportait essentiellement: abandon des actifs de la Banque de
Genève à ses créanciers, qui les rétrocédaient à une société de gestion
chargée d'exécuter le concordat; apport ou abandon de 15 millions par l'Etat
de Genève, par des établissements créanciers de la banque et par les
administrateurs, enfin délivrance, pour le montant intégral de chaque créance
chirographaire, d'obligations garanties par l'Etat de Genève, portant un
intérêt - payable annuellement - de 2% l'an et remboursables en 25 ans dès
l'homologation du concordat. L'Etat de
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Genève, outre les 6 millions d'actions passées par profits et pertes,
abandonnait une créance contre la Banque de 10 millions, estimée alors 7
millions et versait en outre 3 millions sous la forme d'annuités de 212857 fr.
38, correspondant à l'intérêt au 5% et à l'amortissement de ces 3 millions
pendant 25 ans. Le concordat fut homologué par les autorités compétentes.
La Société de gestion de la Banque de Genève, société anonyme au capital de
13000 fr., dont 11000 avancés par l'Etat de Genève, reprit les actifs de la
banque et se mit en devoir d'assurer l'exécution du concordat. Elle émit pour
68391550 fr. d'obligations 2%. En contrepartie, son bilan d'entrée accusait
des actifs pour environ 35 millions et un compte «différence à amortir sur
obligations concordataires» de 28198378 fr. 19. Cet actif représentait la
différence entre le taux de 2% des intérêts passifs pendant 25 ans et le taux
présumé de 5% des intérêts actifs pendant la même période.
Dès le début de la gestion, et malgré les amortissements considérables
effectués au bilan d'entrée, les actifs durent en subir de nouveaux. Au bilan
de 1934, il fallut faire des amortissements s'élevant à 8500000 fr. D'autre
part, le compte de profits et pertes fut déficitaire de 300000 fr. dès le
premier exercice, et cette perte s'accrut encore les années suivantes. Dès
1937, le Conseil d'administration reconnaît «la rupture du plan
concordataire». Le paiement du coupon 1938 ne fut exécuté que sous réserve et
prélevé sur l'actif. Au 31 décembre 1940, le bilan de la Société de gestion
accusait une insuffisance d'actifs de 17 millions sur un bilan total de
41500000 fr., ramené de 70 millions à ce chiffre par suite du rachat, au fur
et à mesure des disponibilités, de 30 millions environ d'obligations
concordataires.
Le 5 juillet 1940, un avis parut dans la Feuille officielle suisse du
commerce, convoquant pour le 13 novembre 1940 à Genève les porteurs
d'obligations 2% 1932 en assemblée d'obligataires, conformément à l'ordonnance
sur la communauté des créanciers du 20 février 1918. L'ordre du jour
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était le suivant: Exposé de la situation. - Ajournement du payement du coupon
1940. Dans l'intervalle à la suite de démarches entreprises par les autorités
genevoises qui exposaient la charge intolérable que constituerait pour le
canton, dont le passif s'élevait déjà à 295 millions, l'exécution intégrale du
concordat (40 millions de capitalobligations à rembourser et 13 millions
d'intérêts, dont à déduire les actifs estimés 11 millions, soit une perte
sèche de plus de 40 millions) et l'impossibilité d'obtenir l'assentiment de la
majorité des obligataires exigée par l'OCC, le Conseil fédéral rendit, le 8
novembre 1940, un arrêté qui approuvait un plan d'assainissement de la Société
de gestion et le rendait obligatoire pour tous les obligataires. Ce plan
libérait ladite société et l'Etat de Genève de tous leurs engagements
moyennant, au choix des obligataires, délivrance d'une obligation à prime
contre l'Etat de Genève, remboursable au plus tard dans les 80 ans, avec
intérêt différé de 2%, ou versement comptant, pour solde de tout compte, de 40
fr. par obligation de 100 fr. La convocation à l'assemblée du 13 novembre 1940
fut annulée.
Cet arrêté souleva des protestations dans la presse. Une assemblée
d'obligataires groupés sous le nom d'«Interessenverband» et représentant 15
millions de capital-obligations se réunit à Zurich. Entre-temps, des
poursuites pour le paiement du coupon 1940 avaient commencé contre la Société
de gestion, et un créancier avait attaqué directement l'Etat de Genève. Le 10
mars 1941 toutefois, la Société de gestion informa les obligataires que le
coupon du 11 juillet 1940 était payable immédiatement.
A la suite de ces réactions, comme aussi de réserves faites par les deux
commissions des pouvoirs extraordinaires des Chambres fédérales, le Conseil
fédéral invita les parties à soumettre l'affaire à un nouvel examen. Un
arrangement intervint avec les principaux groupes d'obligataires et, le 24
mars 1941, le Conseil fédéral rendit un arrêté modifiant l'ordonnance du 20
février 1918 sur la communauté des créanciers dans les emprunts par
obligations. Les dispositions essentielles de cet arrêté sont les suivantes:
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L'art. 1er rend applicable l'OCC, sous réserve des modifications qui suivent,
aux obligations d'entreprises qui ont pour but exclusif la liquidation
d'autres entreprises et pour lesquelles un canton a donné sa garantie. L'art.
2 modifie la majorité prévue par l'OCC pour l'acceptation d'un arrangement.
Cette majorité sera des deux tiers du capital représenté à l'assemblée et de
la moitié du capital en circulation. Les décisions prises par l'assemblée
peuvent prescrire la renonciation à la garantie cantonale. L'art. 4 restreint
le droit de recours dans la procédure et l'art. 5 limite la validité de l'ACF
au 31 décembre 1941.
Les 18, 21 et 22 avril 1941, parut dans la Feuille officielle suisse du
commerce et dans la Feuille des avis officiels de Genève, ainsi que dans les
journaux genevois, la convocation des obligataires à une assemblée générale,
en vertu de l'OCC et de l'ACF du 24 mars 1941, pour le 5 mai 1941. L'ordre du
jour comportait entre autres un exposé du conseil d'administration de la
Société de gestion et des propositions de remboursement transactionnel et pour
solde des obligations 2 % de 1932, avec votation y relative. Auparavant déjà,
dans une assemblée du 2 décembre 1940, l'Interessenverband s'était rallié à la
proposition du payement pour solde de 45 fr. par obligation de 100 fr. plus le
coupon 1940, décision à la suite de laquelle la Banque demanderesse déclara se
retirer de ce groupement.
L'assemblée du 5 mai 1941 désigna comme président M. Charles Rosselet. La
liste de présence fit constater que le capital-obligations représenté était de
27720450 fr., dont 3025550 fr. appartenaient à l'Etat de Genève ou à des
personnes morales gérées par l'Etat. Le Président donna lecture de l'exposé de
la situation financière de la Banque de Genève et de celle de l'Etat de
Genève, du bilan de la société au 30 avril 1941 et des propositions de
remboursement transactionnel et pour solde des obligations 2% 1932. Ces
propositions étaient les suivantes:
a) payement à titre transactionnel et pour solde de 45 fr. pour 100 fr.
nominal d'obligation;
b) payement d'un intérêt de 2% sur 100 fr. nominal
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d'obligation du 1er décembre 1940 jusqu'à la date fixée pour la mise en
payement;
c) renonciation par les obligataires, tant à l'égard de la Société de gestion
qu'à l'encontre de l'Etat de Genève à tous droits autres que ceux stipulés
sous litt. a et b.
La mise en payement devra intervenir dans les 30 jours dès la date de la
ratification par le Grand Conseil de Genève des décisions qui seront prises
par l'assemblée.
Après discussion, l'assemblée vota les propositions ci-dessus. Le résultat du
vote fut proclamé comme suit:
Oui: 23057000
Non: 3858700
Blancs: 69000.
D'après le bilan au 30 avril 1941, le capital-obligations en circulation étant
de 39981350 fr., la majorité simple était de 19990700 fr. Les organes de la
Société de gestion et de l'Etat de Genève estimèrent que cette majorité était
atteinte, de même que la majorité des 2/3 du capital représenté à l'assemblée,
soit
27720450 x 2
= 18480300.
3
En conséquence, considérant que les propositions soumises à l'assemblée
étaient acceptées par la majorité des obligataires, la Société de gestion les
mit à exécution. Sur les 40 millions environ d'obligations en circulation lors
de l'assemblée, il n'y en aurait plus actuellement - sans compter les titres
détenus par le canton de Genève - que 2 485 100 fr., les porteurs de 35
millions environ ayant accepté le remboursement transactionnel.
L'ACF du 24 mars 1941 a été, en vertu de l'art. 5 de l'arrêté fédéral du 30
août 1939, soumis aux Chambres fédérales et approuvé par elles dans leur
session d'été 1941.
B. - La Banque commerciale de Soleure S. A. était en relations d'affaires avec
la Banque de Genève. Lors du sursis concordataire, la banque demanderesse se
prétendit créancière de 603783 fr. 40, en garantie desquels elle détenait un
certain nombre d'effets. Selon transaction postérieure
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à l'acceptation du concordat, la Banque de Soleure se fit en particulier
remettre par la Société de gestion 617000 fr. d'obligations concordataires.
Par demande du 26 juin 1941, la Banque commerciale de Soleure a intenté action
directement devant le Tribunal fédéral contre l'Etat de Genève. Elle conclut à
ce qu'il plaise au Tribunal:
1) prononcer que la décision prise le 5 mai 1941 par l'assemblée des porteurs
d'obligations concordataires 2% émises par la Société de gestion de la Banque
de Genève en 1932 est nulle et dépourvue d'effets;
2) dire que le canton de Genève, en cas de non-paiement par la Société de
gestion à la date du 11 juillet 1941, est tenu de payer à la demanderesse la
somme de 12340 fr., représentant le montant des coupons afférents aux
obligations dont elle est porteuse;
La demanderesse fait valoir en substance:
L'Etat de Genève est codébiteur solidaire de la dette obligataire de la
Société de gestion. Cela découle de tout l'historique de l'affaire, de
l'attitude de l'Etàt de Genève dans le concordat de la Banque de Genève, ainsi
que des engagements pris par lui. L'arrêté du Conseil fédéral (ACF) du 24 mars
1941, qui a rendu possible la réorganisation financière de la Société de
gestion, ne saurait lier le Tribunal fédéral. Le Conseil fédéral, en le
rendant, a manifestement outrepassé la délégation conférée par les Chambres le
30 août 1939. Si l'on admet même que la sauvegarde des finances d'un canton
rentre dans les mesures que peut prendre le Conseil fédéral pour assurer le
crédit du pays, la demanderesse conteste formellement que les finances de
Genève auraient été sérieusement compromises par l'exécution du concordat.
Genève avait d'autres moyens de se relever, p. ex. la compression de ses
dépenses, l'augmentation de ses impôts, etc. Même, au reste, si la situation
de Genève était aussi précaire qu'on le dit, il est contraire aux principes
les plus élémentaires du droit et à l'art. 4 de la Constitution fédérale de
faire supporter la carence d'un
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canton à une catégorie seulement de ses créanciers et non pas à l'ensemble de
ceux-ci. Une loi d'exception telle que l'ACF critiqué, est quelque chose
d'inouï dans l'histoire de notre législation fédérale et même dans les mesures
prises en vertu des pouvoirs extraordinaires. Subsidiairement, pour le cas où
l'ACF serait jugé valable, la demanderesse attaque en nullité la décision du 5
mai 1941 pour violation des art. 2, 5, 6, 8 bis, 10 et 18 de l'OCC.
C. - Le canton de Genève a conclu au rejet de la demande, éventuellement à la
suspension de l'affaire jusqu'à solution du procès introduit à Genève contre
la Société de gestion et ayant le même objet. Le défendeur invoque en résumé:
L'ACF a été rendu dans le cadre de la délégation des Chambres. Le Tribunal
fédéral n'a d'ailleurs pas le droit d'examiner la constitutionnalité d'un ACF
rendu en vertu des pouvoirs extraordinaires. Les Chambres ont, d'autre part,
ratifié ledit arrêté, ce qui, en tout état de cause, fait obstacle à un examen
par le Tribunal fédéral de la conformité de cette mesure avec la délégation.
Pour le surplus, l'action en annulation de la décision du 5 mai 1941 est mal
dirigée. L'Etat de Genève a bien garanti les obligations 2 % de la Société de
gestion, mais seulement en qualité de caution simple; il n'est ni le débiteur
principal, ni le débiteur solidaire, ni la caution solidaire de la Société de
gestion. Au reste, la demande est matériellement mal fondée, aucune
prescription de fond ni de forme de l'OCC ni de l'ACF du 24 mars 1941 n'ayant
été violée.
Considérant en droit:
1.- L'action tend au paiement de 12340 fr., montant des coupons échus le 11
juillet 1941, afférents aux 617000 fr. d'obligations dont la demanderesse est
porteur de l'aveu du défendeur. Cette demande suppose que la décision prise le
5 mai 1941 par l'assemblée des porteurs d'obligations concordataires soit
nulle ou annulée, soit que l'arrêté du Conseil fédéral du 24 mars 1941 qui a
rendu
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possible l'acceptation de l'arrangement ne soit pas valable en droit, soit que
la décision de l'assemblée soit entachée d'irrégularités. Mais, de toute
façon, l'action ne pourrait être admise, du moins en l'état, que si le
défendeur doit être considéré comme débiteur principal ou solidaire de la
dette de la Société de gestion, et non simplement comme caution simple, ainsi
qu'il le prétend. Cette question, préjudicielle aussi pour la recevabilité de
l'action en annulation fondée sur l'OCC, pourra toutefois demeurer indécise si
le Tribunal fédéral admet d'emblée la validité de l'ACF et la régularité de la
décision des obligataires.
2.- Validité de l'ACF du 24 mars 1941.
a) Aux termes de l'art. 113 CF, le Tribunal fédéral applique les lois votées
par l'Assemblée fédérale et les arrêtés de cette assemblée qui ont une portée
générale. Il n'est pas lié par les arrêtés ordinaires des Chambres fédérales,
ni par les arrêtés et ordonnances du Conseil fédéral. En ce qui concerne ces
derniers, le Conseil fédéral peut les édicter en vertu des attributions
propres qu'il tient de la Constitution et dans ce cas ils sont en principe
soumis sans restrictions au contrôle du Tribunal fédéral, même s'ils reçoivent
après coup l'approbation des Chambres fédérales (RO 64 I 365). Mais le Conseil
fédéral peut aussi agir en vertu d'une délégation des Chambres fédérales,
contenue dans une loi ou un arrêté de portée générale, et qui l'autorise à
poser non seulement des règles d'exécution, mais aussi des normes de caractère
législatif. Le Tribunal fédéral n'a pas le pouvoir d'examiner la
constitutionnalité d'une semblable délégation, en tant qu'elle résulte d'un
acte soustrait à son contrôle, à savoir d'un arrêté fédéral de portée générale
que les Chambres ont toute latitude de qualifier de la sorte comme aussi de
munir de la clause d'urgence (art. 2 LF du 17 juin 1874; RO 61 I 365 /6; cf.
encore 62 I 79; 63 I 326; 67 II 95). C'est en vain qu'on objecterait, devant
le Tribunal fédéral, que les Chambres fédérales ne peuvent se dessaisir d'un
pouvoir qu'elles sont constitutionnellement tenues d'exercer sous réserve
d'ailleurs
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du referendum populaire, et que la délégation législative vise à modifier
l'ordre de compétence fixé par la Constitution entre les organes de l'Etat.
Quant aux arrêtés rendus par le Conseil fédéral en vertu d'une délégation des
Chambres fédérales, ils lient le Tribunal fédéral en tant qu'ils restent dans
le cadre tracé, car, dans cette mesure, ils participent à l'autorité de
l'arrêté de délégation et échappent comme lui à la censure constitutionnelle,
même s'ils s'écartent des règles de la constitution. Ils cessent en revanche
de lier le juge s'ils sortent des limites des pouvoirs concédés, et c'est ce
que le Tribunal s'est en principe déclaré compétent pour rechercher (RO 67 I
24; 62 I 79; 57 I 451). Toutefois, s'agissant du moins des pouvoirs étendus en
matière économique ou financière conférés par les arrêtés fédéraux du 14
octobre 1933 (défense économique contre l'étranger) et du 31 janvier 1936
(programme financier), la jurisprudence a reconnu au Conseil fédéral un large
pouvoir d'appréciation pour décider de la nécessité ou de l'opportunité des
mesures à prendre; le Tribunal fédéral ne saurait ici se substituer à
l'autorité politique, et il ne peut qu'examiner si les dispositions édictées
sont capables d'atteindre le but visé par la délégation ou si au contraire
elles sortent manifestement du cadre de cette dernière (RO 64 I 223; 61 I 369;
arrêt de la Cour de droit public du 8 novembre 1940 en la cause von Büren,
consid. 1).
D'autre part, le Tribunal fédéral s'est refusé un droit de contrôle, même
ainsi limité, dans deux cas. La Cour de droit public a d'abord jugé (arrêt
Bassanesi RO 56 I 413, arrêt Bat'a 61 I 362) que, lorsque les Chambres ont
approuvé ultérieurement une mesure prise par le Conseil fédéral en vertu d'une
délégation législative, l'Assemblée fédérale déclarait par là que cette mesure
rentrait bien dans le cadre des pouvoirs délégués et donnait une manière
d'interprétation authentique de l'arrêté fédéral de délégation; si
l'approbation n'est pas donnée dans la forme d'un arrêté de portée générale,
l'arrêté conférant les pouvoirs - qui est lui de portée générale - autorise
les Chambres à approuver
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et à maintenir en vigueur les mesures du Conseil fédéral au moyen d'une simple
décision et sans respecter les formes prévues pour la législation fédérale.
Cette jurisprudence n'a cependant pas été suivie par la Cour de cassation qui,
dans un arrêt du 19 décembre 1939 en la cause Quartier, a déclaré que le
Tribunal fédéral n'est pas lié par l'approbation des Chambres. Dans divers
arrêts non publiés, notamment dans un arrêt von Büren du 8 novembre 1940, la
Cour de droit public a récemment réservé la question de son droit de contrôle
à l'égard d'arrêtés du Conseil fédéral qui avaient pourtant été approuvés par
les Chambres fédérales en vertu de l'art. 5 de l'arrêté fédéral du 30 août
1939.
En second lieu, et d'une façon toute générale, le Tribunal fédéral a, pendant
la guerre de 1914 à 1918, refusé de rechercher si les dispositions prises par
le Conseil fédéral en vertu de l'arrêté fédéral du 3 août 1914 sur les mesures
propres à assurer la sécurité du pays et le maintien de sa neutralité
rentraient dans le cadre de la délégation des Chambres; il a considéré dans
plusieurs arrêts (RO 41 I 44, 41 I 553; 44 I 87; 46 I 308; 56 I 416) que le
Conseil fédéral exerçait en fait la fonction de législateur («materiell die
Funktion des Gesetzgebers ausübte», 44 I 90) et que, partant, ses ordonnances
liaient le juge à l'égal des lois ou des arrêtés fédéraux de portée générale
votés par les Chambres fédérales (art. 113 al. 3 CF).
b) L'arrêté du Conseil fédéral du 24 mars 1941 modifiant l'ordonnance du 20
février 1918 sur la communauté des créanciers dans les emprunts par
obligations a été rendu en vertu de l'arrêté fédéral du 30 août 1939 sur les
mesures propres à assurer la sécurité du pays et le maintien de sa neutralité.
Aux termes de l'art. 3 de cet arrêté, l'Assemblée fédérale donne au Conseil
fédéral pouvoir et mandat de prendre les mesures nécessaires pour maintenir la
sécurité, l'indépendance et la neutralité de la Suisse, pour sauvegarder le
crédit et les intérêts économiques du pays et pour assurer l'alimentation
publique. Bien que les
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mots de «pouvoir illimité» figurant dans l'AF du 3 août 1914 ne se retrouvent
pas dans l'arrêté de 1939, il ressort tant du message du Conseil fédéral que
de l'exposé des rapporteurs aux deux Chambres que l'étendue de la délégation
était tout aussi vaste et qu'en réalité l'Assemblée fédérale reconnaissait au
Conseil fédéral le droit, si besoin était, de ne s'en tenir ni aux lois
fédérales, ni à la Constitution fédérale (Message du CF, FF II p. 217; Bull.
stén. 1939, Cons. des Et. p. 544, Cons. nat. p. 522). Les Chambres ont
«délégué» par là au Conseil fédéral des pouvoirs plus étendus que ceux
qu'elles tiennent elles-mêmes de la Constitution; elles se sont appuyées pour
le faire, comme l'a dit le rapporteur au Conseil national, M. Nietlispach,
«sur la lex non scripta, sur la loi non écrite du droit de nécessité, qui est
aussi ancienne que la doctrine du droit public», et elles ont donné une
expression à cette idée en supprimant la clause d'urgence que le Conseil
fédéral proposait d'insérer dans l'arrêté, comme on avait fait en 1914. Elles
se sont d'ailleurs, comme dans la précédente guerre, réservé le droit de
contrôler l'exercice des pouvoirs extraordinaires, tout en organisant ce
contrôle d'une manière différente (rapport bi-annuel du CF à l'AF, institution
de commissions parlementaires permanentes, art. 5 et 6 de l'arrêté).
Selon la jurisprudence rappelée ci-dessus (litt. a), le Tribunal fédéral est
lié par l'arrêté fédéral du 30 août 1939, et il l'est nonobstant le fait que
cet arrêté n'a pas été muni de la clause d'urgence, car il ne s'en agit pas
moins, faute d'une déclaration contraire (art. 2 LF du 17 juin 1874), d'un
arrêté de portée générale, délibérément soustrait, en tant que «loi de
nécessité», au referendum populaire («le présent arrêté entre immédiatement en
vigueur», art. 7). La délégation échappe ainsi, dans sa légitimité et sa
portée, au contrôle constitutionnel. Le Tribunal fédéral ne peut revoir non
plus les arrêtés rendus par le Conseil fédéral sur la base des pouvoirs qu'il
tient de l'AF de 1939, dans toute la mesure en tout cas où les dispositions
prises n'excèdent pas manifestement le cadre de la délégation
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(cf. arrêts non publiés de la Cour de droit public du 8 novembre 1940 dans la
cause von Büren, du 24 janvier 1941 dans la cause Rietschi, du 2 mai 1941 dans
la cause Hürzeler, du 8 mai 1942 dans la cause Glauser). Dans cette mesure
même, le contrôle du Tribunal fédéral serait exclu, selon la jurisprudence des
arrêts Bassanesi et Bat'a (ci-dessus litt. a), à l'endroit des arrêtés du
Conseil fédéral que les Chambres ont approuvés après coup, ce qui est le cas
de l'ACF du 24 mars 1941. Mais cette jurisprudence, qui n'est pas uniformément
suivie par le Tribunal fédéral, n'échappe pas à la critique. En donnant son
approbation à un arrêté du Conseil fédéral qui excéderait le cadre de la
délégation, les Chambres fédérales élargiraient en réalité les pouvoirs
concédés à l'origine; mais elles ne devraient pouvoir le faire que dans la
même forme, c'est-à-dire dans la forme d'un arrêté de portée générale; ce
n'est qu'à cette condition qu'on pourrait parler d'interprétation authentique.
Or c'est par une simple décision que les Chambres statuent sur le maintien en
vigueur des mesures prises; cette décision n'est pas rendue au terme d'une
procédure législative qui garantisse un examen approfondi de la question; elle
n'est pas portée au recueil officiel. A vrai dire, le Tribunal fédéral ne
pourrait discuter, du point de vue constitutionnel, l'institution par les
Chambres, dans l'arrêté du 30 août 1939, d'une procédure de contrôle
extraordinaire qui aboutirait à accorder force de loi à des arrêtés du Conseil
fédéral qui auraient été rendus en marge des pouvoirs délégués. Toutefois, il
n'est pas sur que, dans l'intention de l'Assemblée fédérale, l'acte de
ratification ait véritablement cette portée, et non pas seulement celle de
l'approbation par les Chambres de la gestion du Conseil fédéral dans le sens
de l'art. 85 ch. 11 CF; il s'agirait alors d'une simple décharge, qui
relèverait le gouvernement de sa responsabilité politique mais qui,
juridiquement, n'ajouterait rien aux mesures prises. Ce point peut cependant
demeurer indécis, car le Tribunal fédéral doit tout à fait s'interdire de
revoir les arrêtés du
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conseil fédéral rendus en vertu des pleins pouvoirs de guerre.
Telle était la jurisprudence de la guerre précédente (ci-dessus, litt. a), à
laquelle la Cour de droit administratif du Tribunal fédéral s'est déjà ralliée
pour la guerre actuelle (arrêts non publiés Gesellsch. für Transportwerte du
28 novembre 1941; Andreae du 29 mai 1942; Honig du 22 juin 1942), tandis que
la Cour de droit public a jusqu'à présent réservé la question (cf. notamment
arrêt non publié von Büren du 8 novembre 1940). L'arrêté fédéral du 30 août
1939 a conféré au Conseil fédéral des pouvoirs législatifs; ceux-ci ne sont
pas restreints à un domaine déterminé -comme les pouvoirs économiques ou
financiers de 1933 ou de 1936 - mais embrassent en fait tout le champ
d'activité de l'Etat. Cela même exclut un contrôle judiciaire, qui ne pourrait
porter que sur un dépassement matériel de compétence, et non sur la nécessité
de prendre telle ou telle mesure. Le Conseil fédéral apprécie, dans la
plénitude de l'autorité législative dont il est investi, si, en présence d'une
situation donnée, la sécurité, l'indépendance et la neutralité de la Suisse,
ou la sauvegarde du crédit et des intérêts économiques du pays (art. 3 de
l'arrêté) ordonnent qu'il intervienne en édictant des règles de droit. Il ne
peut, à cet égard, dans un régime de séparation des pouvoirs, relever que
d'une autorité politique. De fait, il exerce sa fonction de législateur sous
le contrôle des Chambres fédérales, qui conservent leur propre pouvoir de
légiférer. Le Tribunal fédéral ne saurait s'immiscer dans le rapport de
compétence entre ces deux organes législatifs; c'est au second d'entre eux
qu'il appartient de fixer une limite aux pouvoirs du premier (art. 85 ch. 13
CF). L'Assemblée fédérale s'acquitte de cette tâche en décidant, selon l'art.
5 de l'arrêté fédéral du 30 août 1939, si les mesures prises par le Conseil
fédéral doivent être maintenues en vigueur. Mais ces mesures ont dès l'abord
force de loi, et, même dans l'hypothèse d'un excès de pouvoir, s'imposeraient
au Tribunal fédéral aussi longtemps qu'elle n'auraient pas été rapportées à la
suite d'une décision de
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l'Assemblée fédérale. Tel n'a pas été le cas pour l'arrêté du Conseil fédéral
du 24 mars 1941, qui a au contraire été expressément approuvé par les
Chambres. En conséquence, le point de savoir si l'arrêté incriminé sort des
limites des pouvoirs délégués au Conseil fédéral en 1939 ne se pose pas pour
le Tribunal fédéral, qui est purement et simplement lié par cet arrêté.
3.- Action en annulation de la décision du 5 mai 1941.
a) Subsidiairement, pour le cas où le Tribunal fédéral considérerait comme
valable l'ACF du 24 mars 1941, la demanderesse attaque la décision prise le 5
mai 1941 par l'assemblée des obligataires, en ce qu'elle aurait été rendue en
violation de certaines prescriptions de l'OCC du 20 février 1918.
Il faut remarquer en premier lieu que l'ACF du 24 mars 1941 a modifié aussi
les prescriptions de l'OCC concernant le droit d'attaquer la procédure
d'assainissement. D'après l'art. 22 OCC, on peut demander l'annulation en
justice des décisions de l'assemblée pour les motifs suivants: violation des
prescriptions de l'ordonnance sur les décisions de l'assemblée, décision
rendue non dans l'intérêt commun des créanciers, ni pour sortir le débiteur
d'une situation critique, décision obtenue par des moyens dolosifs, et enfin
tous les motifs qui permettent, d'après le CO, d'attaquer un contrat pour vice
du consentement. De tous ces moyens, l'ACF du 24 mars 1941, dans son art. 4,
n'en retient plus qu'un seul: la violation des prescriptions de l'ordonnance,
en tant qu'elles concernent la décision de l'assemblée des obligataires. Si on
interprète largement cet art. 4, les prescriptions visées sont celles qui
figurent sous lettres C et D de l'ordonnance, art. 5 à 22. Si on interprète
ledit article à la lettre, ces dispositions sont celles qui figurent sous
lettre D, art. 11 à 22. En tout état de cause, le motif suivant lequel la
décision prise ne sauvegarderait pas les intérêts communs des créanciers ne
saurait ainsi faire l'objet d'une action en annulation; dans cette mesure,
l'action intentée est irrecevable.
b) La demanderesse attaque la décision parce qu'il y
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aurait eu violation de l'art. 8 bis OCC. Aux termes de cette disposition,
introduite par l'ACF du 28 décembre 1940, la procédure prévue par l'ordonnance
ne peut être requise qu'une fois dans le délai d'un an. Convoquée déjà par
publication du 5 juillet 1940 pour la date du 13 novembre de la même année,
l'assemblée ne pouvait ainsi plus l'être avant le 5 juillet 1941.
L'art. 8 bis ne concernant pas la décision de l'assemblée, mais bien sa
convocation, la recevabilité de ce grief est douteuse. L'irrégularité ne
saurait en tout cas justifier l'annulation des décisions de l'assemblée.
L'art. 8 bis, pour mieux assurer l'égalité de traitement des créanciers, a
attaché à la convocation de l'assemblée des obligataires les effets d'un
sursis; mais il s'agissait en même temps d'éviter que le débiteur, en
renouvelant sa demande, ne se servît du sursis comme d'un moyen pour ajourner
indéfiniment le règlement de ses comptes avec les créanciers; tel est le sens
de la règle formulée à la fin de l'article (cf. RO 47 III 40).
En l'espèce, la nouvelle convocation n'a pas eu pour conséquence de prolonger
un sursis. La demanderesse ne le prétend pas elle-même. De fait, la
convocation à l'assemblée du 13 novembre 1940 ne prévoyait pas d'autre
décision à l'ordre du jour que l'ajournement du payement du coupon échu le 11
juillet 1940. Or ce coupon a été payé en mars 1941. Dès ce moment, la Société
de gestion débitrice était de nouveau en règle avec ses créanciers; elle
n'était plus au bénéfice ni d'un moratoire, ni d'un sursis. Il n'y aurait donc
eu aucun motif de l'empêcher de convoquer à nouveau l'assemblée des
obligataires en vue de statuer sur l'arrangement définitif qu'elle proposait à
ses créanciers. L'art. 8 bis OCC ne peut être invoqué contre un débiteur qui
ne pouvait même pas avoir l'intention d'abuser des effets moratoires attachés
à la convocation. Au reste, tout ce qui s'est passé depuis la convocation du 5
juillet 1940 jusqu'à l'assemblée du 5 mai 1941 apparaît comme une seule et
même procédure d'assainissement, dont les
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incidents - en particulier l'arrêté du Conseil fédéral du 8 novembre 1940
rapporté par la suite - ont eu pour effet la double convocation du 5 juillet
1940 et des 18/22 avril 1941.
c) La demanderesse conteste que l'assemblée des créanciers ait été convoquée
dans le délai convenable prescrit par l'art. 6 OCC. Cette critique n'est pas
fondée. Les convocations ont été faites les 18, 21 et 22 avril 1941 pour le 5
mai, soit à 15 jours d'intervalle. La fixation d'une nouvelle assemblée
n'avait rien d'inattendu. Chaque intéressé savait que de nouvelles
propositions étaient faites par la Société de gestion et par l'Etat de Genève.
Le 2 décembre 1940 déjà, l'Interessenverband avait discuté l'offre
transactionnelle de 45% et la demanderesse était sortie de ce groupement. Elle
était donc, plusieurs mois auparavant, au courant de ce qui se passait et de
ce qui serait proposé. Au reste, elle n'a pas établi ni offert d'établir que
ce délai de 15 jours aurait été si court qu'elle-même ou des tiers eussent été
empêchés de prendre part à l'assemblée, à laquelle elle a en réalité assisté
sans soulever aucune objection quant au délai de convocation.
d) La demanderesse attaque la désignation de M. Rosselet, président du Conseil
d'administration de la Société de gestion, comme président de l'assemblée. Or
non seulement M. Rosselet n'était pas le débiteur, mais aucune disposition de
l'OCC n'interdit au débiteur de présider l'assemblée. Le commentateur BECK, à
l'art. 12 OCC, admet même explicitement cette possibilité.
e) La demanderesse attaque en outre la validité des décisions prises, en
raison du fait que l'Etat de Genève, qu'elle considère comme le débiteur
principal, a pris part au vote.
Il n'est pas nécessaire, à cet égard non plus, de décider si l'Etat de Genève
est débiteur principal ou encore caution solidaire de la Société de gestion.
En effet, en vertu des principes généraux du droit applicables en matière
d'annulation de décisions et consacrés par l'art. 691 al. 3
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 691 - 1 Il est interdit d'abandonner des actions pour permettre au représentant d'exercer le droit de vote à l'assemblée générale si cet abandon a pour but de rendre illusoire une restriction apportée à ce droit. |
|
1 | Il est interdit d'abandonner des actions pour permettre au représentant d'exercer le droit de vote à l'assemblée générale si cet abandon a pour but de rendre illusoire une restriction apportée à ce droit. |
2 | Tout actionnaire peut protester auprès du conseil d'administration contre une participation illicite à l'assemblée générale ou faire inscrire son opposition au procès-verbal de l'assemblée. |
2bis | Les membres du conseil d'administration et de la direction ont le droit de prendre part à l'assemblée générale.502 |
3 | Lorsque des personnes qui n'ont pas le droit de participer à l'assemblée générale coopèrent à l'une de ses décisions, chaque actionnaire peut l'attaquer en justice, même faute de toute protestation préalable, à moins que la preuve ne soit faite que cette coopération n'a exercé aucune influence sur la décision prise. |
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CO, la participation à un vote d'une personne dont la qualité est contestée ne
peut en permettre l'annulation que si cette participation a exercé une
influence sur le résultat de la votation.
Or l'Etat de Genève, d'après les pièces du dossier qui n'ont pas été
contestées, détenait pour 3025550 fr. d'obligations. Si l'on ne tient pas
compte de ces obligations, la majorité se calcule de la manière suivante:
Majorité à l'assemblée:
Capital représenté: 27720450
- 3025550
= 24694900
dont les 2/3 représentent = 16463300
Les voix acceptantes étant de 23057000 (montant admis par la demanderesse), si
l'on en déduit les 3025500 fr. appartenant à l'Etat de Genève, on trouve
encore une majorité de 20031450 fr., dépassant d'environ 4 millions la
majorité des 2/3 prévue par l'ACF.
D'autre part, la majorité simple des représentants du capital en circulation
est également acquise. Ce capital était de 39981350 fr. On doit en déduire,
pour le calcul de la majorité simple, les 3025550 fr. d'obligations de l'Etat
de Genève. La demanderesse voudrait ne déduire ces obligations que du chiffre
des voix acceptantes et non pas du montant des obligations en circulation;
mais c'est fausser le calcul et faire rentrer automatiquement le représentant
de ce capital parmi les opposants. Or, si l'on déduit du capital en
circulation les obligations de l'Etat de Genève, on obtient 36995800 fr., dont
la moitié, soit 18477900 fr., donne une marge de près de 2 millions aux
acceptants...
Par ces motifs, le Tribunal fédéral
rejette la demande.