Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
5A 366/2015
Arrêt du 20 octobre 2015
IIe Cour de droit civil
Composition
MM. les Juges fédéraux von Werdt, Président,
Herrmann et Bovey.
Greffière : Mme Mairot.
Participants à la procédure
A.A.________,
représentée par Me Susannah Maas Antamoro de Céspedes,
avocate,
recourante,
contre
B.A.________,
représenté par Me Astrid von Bentivegni Schaub, avocate,
intimé.
Objet
mesures protectrices de l'union conjugale,
recours contre l'arrêt du Juge délégué de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 4 mars 2015.
Faits :
A.
B.A.________, né en 1948, de nationalité suédoise, et A.A.________, née en 1952, de nationalité américaine, se sont mariés le 8 août 2003 à Coppet. Aucun enfant n'est issu de cette union.
Par requête du 24 mars 2014, l'épouse a sollicité des mesures protectrices de l'union conjugale et d'extrême urgence. Ces dernières ont été rejetées par décision du 26 mars suivant. A l'audience du 16 avril 2014, les conjoints ont signé une convention, ratifiée séance tenante par la Présidente du Tribunal civil de l'arrondissement de La Côte (ci-après: Tribunal civil d'arrondissement) pour valoir prononcé partiel de mesures protectrices de l'union conjugale.
Par réponse du 5 mai 2014, le mari a déposé des conclusions tendant à l'allocation d'une contribution d'entretien et au versement d'une provisio ad litem.
B.
Par prononcé de mesures protectrices de l'union conjugale du 11 novembre 2014, la Présidente du Tribunal civil d'arrondissement a mis à la charge de l'épouse une contribution d'entretien en faveur du mari d'un montant de 4'300 fr. par mois dès et y compris le 1er mai 2014 et rejeté toutes autres ou plus amples conclusions.
L'épouse a appelé de ce prononcé, concluant à sa réforme en ce sens qu'elle ne doit aucune contribution pour l'entretien de son mari. Par arrêt du 4 mars 2015, notifié en expédition complète le 30 mars 2015, le Juge délégué de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud (ci-après: Cour d'appel civile) a partiellement admis l'appel en ce sens que le montant de la contribution d'entretien est fixé à 1'750 fr. par mois dès et y compris le 1er mai 2014. Le prononcé a été confirmé pour le surplus.
C.
Par acte posté le 1er mai 2015, l'épouse exerce un recours en matière civile au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 4 mars 2015. Elle conclut, principalement, à son annulation et à sa réforme en ce sens que l'intimé est débouté de toutes prétentions en paiement d'une contribution d'entretien sur mesures protectrices de l'union conjugale. Subsidiairement, elle demande le renvoi de la cause au Juge délégué de la Cour d'appel civile pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
Des réponses n'ont pas été requises.
Considérant en droit :
1.
1.1. Le présent recours a été déposé en temps utile (art. 100 al. 1










1.2. Dès lors que la décision attaquée porte sur des mesures protectrices de l'union conjugale, lesquelles sont considérées comme des mesures provisionnelles au sens de l'art. 98


1.3. Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1




consid. 3.3).
2.
La recourante se plaint en premier lieu d'une application arbitraire des art. 125



2.1. Le principe et le montant de la contribution d'entretien due selon l'art. 176 al. 1 ch. 1





n'est pas possible de conserver ce niveau de vie, les époux ont droit à un train de vie semblable (ATF 119 II 314 consid. 4b/aa; arrêt 5A 823/2014 du 3 février 2015 consid. 5.1 et la référence). Le juge peut donc devoir modifier la convention conclue pour la vie commune, afin de l'adapter à ces faits nouveaux. C'est dans ce sens qu'il y a lieu de comprendre la jurisprudence consacrée dans l'arrêt paru aux ATF 128 III 65, qui admet que le juge doit prendre en considération, dans le cadre de l'art. 163


2.2. Dans la mesure où la recourante soutient, au demeurant de manière appellatoire (art. 106 al. 2



Dans le cadre du même moyen, la recourante prétend en outre que l'autorité cantonale a arbitrairement établi le train de vie de l'intimé en se fondant sur celui qu'il mènerait en Suisse, alors qu'il habite en Suède. Sur ce point, le juge précédent a considéré qu'à l'audience d'appel, le mari avait expliqué qu'il n'avait pas de domicile fixe en Suisse et qu'il vivait chez des amis en France voisine ou en Suisse, où son domicile légal se trouvait toujours. Il avait ajouté qu'il se rendait en Suède environ une fois par mois, sa société y louant des bureaux depuis février 2014. L'autorité cantonale en a déduit qu'en l'état, rien ne permettait de retenir que l'intéressé aurait quitté la Suisse depuis 2013 et qu'il serait à nouveau établi en Suède. La recourante se borne essentiellement à contredire ces constatations, en exposant sa propre version des faits et son appréciation personnelle des preuves, sans indiquer de façon précise en quoi elles seraient entachées d'arbitraire (art. 9


3.
Selon la recourante, l'autorité cantonale aurait aussi arbitrairement apprécié le revenu et les charges de l'intimé. Se référant en outre à l'art. 129

3.1. En ce qui concerne les revenus de l'intimé, la Cour d'appel civile a considéré que le premier juge aurait également dû prendre en considération ceux qu'il retirait de l'exploitation de sa société, dès lors qu'il en était l'actionnaire unique et que le bénéfice net tiré de l'activité de cette société était assimilable à un revenu, au même titre que le dividende perçu par les actionnaires d'une société anonyme. L'intéressé avait d'ailleurs confirmé en audience d'appel que le prélèvement du bénéfice, qui n'avait pas été effectué pour des motifs fiscaux, aurait cependant été possible. Cela étant, ladite société avait réalisé un bénéfice net de 22'391 fr. en 2011, 10'796 fr. en 2012, 2'729 fr. en 2013 et 20'385 fr. en 2014, soit un revenu moyen de 14'075 fr. par année ou de 1'175 fr. par mois. Cette somme devait être ajoutée aux pensions de retraite que percevait le mari, à hauteur de 3'096 fr. 20 par mois. Ses revenus mensuels devaient ainsi être arrêtés à 4'270 fr. en chiffres ronds.
La recourante soutient que le montant précité de 1'175 fr. par mois résulte d'une appréciation insoutenable, dès lors qu'il n'est basé que sur les comptes produits par l'intimé. De plus, selon elle, il est permis de s'interroger sur la façon dont il rémunère les deux avocats dont il bénéficie et finance ses déplacements en Suède, si ses revenus correspondent à ceux qui ont été retenus dans l'arrêt attaqué et qu'aucune contribution d'entretien ne lui a été versée depuis son départ de Suisse, en juin 2013: une telle argumentation, de nature appellatoire, ne répond en rien aux exigences de l'art. 106 al. 2

3.2. Quant à une éventuelle prise en charge des frais personnels du mari par sa société, et notamment de ses déplacements, l'autorité cantonale a estimé que les pièces financières et comptables produites conformément aux réquisitions de l'épouse ne permettaient pas de conclure à l'existence de dépenses privées financées exclusivement par le biais de cette société. Conformément à la maxime des débats applicable en deuxième instance, il n'y avait pas lieu d'instruire d'office au-delà des faits figurant déjà au dossier. Interrogé à l'audience d'appel conformément à l'art. 191

acceptée par l'autorité fiscale. On ne pouvait dès lors reprocher au premier juge d'avoir retenu, au stade des mesures protectrices de l'union conjugale, que l'intimé ne retirait de sa société aucun autre revenu que le bénéfice net réalisé chaque année, aucun élément ne justifiant en l'état de s'écarter des montants ressortant à ce titre de la comptabilité produite par le mari.
La recourante prétend, en bref, que son conseil, qui lit le suédois, est en mesure d'affirmer que ces conclusions ne ressortent pas des pièces produites. Elle soutient que la comptabilité fournie par l'intimé n'a pas été auditée et que, contrairement à ce que retient l'arrêt attaqué, il en ressort que la société concernée paie certains frais de transports de son actionnaire ainsi qu'un loyer commercial. Or, l'examen des comptes ne révélerait aucun remboursement du mari à la société pour ces postes. Selon la recourante, il ne serait pas contesté que pendant la durée du mariage, l'intimé avait transféré des fonds de sa société en Suède, sur son compte à elle, au titre de "loyer professionnel" pour la pièce qu'il occupait à ce titre dans la maison conjugale, transferts qu'il n'a plus effectués après son départ en septembre 2013, sa société réglant depuis lors le loyer de l'appartement qu'il occupe en Suède. Par cette argumentation, en grande partie appellatoire, la recourante se contente d'opposer son opinion à celle de l'autorité cantonale, sans en démontrer l'arbitraire. Le grief doit ainsi être rejeté, dans la mesure où il est suffisamment motivé (art. 106 al. 2

Par ailleurs, en tant qu'elle soutient que le mari n'a pas rendu vraisemblables les dépenses nécessaires à son train de vie, elle n'établit pas non plus en quoi la décision attaquée serait insoutenable. Dès lors que la recourante ne conteste pas, du moins explicitement, que celui-ci peut prétendre au maintien de son train de vie antérieur, l'autorité cantonale ne saurait se voir reprocher d'être tombée dans l'arbitraire en considérant que, faute d'informations plus précises, il convenait d'arrêter les charges du mari en se basant sur celles retenues pour l'épouse (sous réserve de l'amortissement de la dette hypothécaire), soit de s'en tenir à un montant de 6'005 fr. 25 par mois, quand bien même l'intéressé avait conclu à l'allocation d'une contribution mensuelle de 8'000 fr.
3.3. Enfin, la recourante soutient qu'il était arbitraire de se fonder sur les pièces comptables produites par l'intimé le 25 août 2014 alors que celles-ci étaient rédigées en suédois, langue que les deux magistrats cantonaux n'ont pas admis maîtriser. Elle invoque également sur ce point l'art. 129

Il ne ressort pas de l'arrêt attaqué, et la recourante ne prétend pas, que cette critique aurait été soulevée en appel, ni que l'une des exceptions à l'irrecevabilité de moyens nouveaux dans le recours en matière civile au sens de l'art. 98



4.
En conclusion, le recours doit être rejeté, dans la faible mesure de sa recevabilité. La recourante supportera dès lors les frais de la présente procédure (art. 66 al. 1



Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et au Juge délégué de la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Lausanne, le 20 octobre 2015
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : von Werdt
La Greffière : Mairot