S. 176 / Nr. 35 Prozessrecht (f)

BGE 71 II 176

35. Arrêt de la Ire Cour civile du 11 Juillet 1945 dans la cause Ressorts S.
A. c. Société suisse des fabricants de ressorts.

Regeste:
Arbitrage. Société coopérative.
La clause compromissoire a un caractère procédural; sa validité doit être
jugée en vertu du droit cantonal; le recours en réforme est à cet égard
irrecevable (art. 43 ch. 1 er OJ, consid. 1).
Le droit fédéral n'empêche pas de soumettre à un tribunal arbitral le litige
relatif à l'expulsion d'un membre d'une société coopérative (art. 846 al. 3
CO; consid. 2).

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Schiedsgerichtsklausel; Genossenschaft.
Die Schiedsgerichtsklausel hat prozessualen Charakter, ihre Gültigkeit
beurteilt sich nach kantonalem Recht, die Berufung ist in dieser Hinsicht
unzulässig (Art. 43 Abs. 1 OG, Erw. 1).
Das Bundesrecht verbietet nicht, den Streit über den Ausschluss eines
Genossenschaftsmitgliedes (Art. 846 Abs. 2 OR) durch ein Schiedsgericht
entscheiden zu lassen (Erw. 2).
Clausola compromissoria, società cooperativa.
La clausola compromissoria ha carattere processuale; la sua validità
dev'essere giudicata sulla scorta del diritto cantonale; il ricorso per
riforma è, a tale riguardo, irricevibile (art. 43 cp. 1 OGF, consid. 1).
Il diritto federale non vieta di sottoporre ad un tribunale arbitrale la lite
concernente l'esclusione d'un socio d'una società cooperativa (art. 846 cp. 3
CO; consid. 2).

A. - La Société anonyme Ressorts, à Longeau, est membre de la Société suisse
des fabricants de ressorts, société coopérative, à La Chaux-de-Fonds (SSFR),
laquelle est à son tour membre de l'Union des branches annexes de l'horlogerie
(UBAH).
Aux termes de l'art. 6 des statuts de l'UBAH, «les statuts des groupements
sociétaires sont subordonnés à ceux de l'Union et doivent être mis en harmonie
avec ceux-ci». Les groupements affiliés à l'UBAH et leurs membres sont liés
par une convention collective du 29 mars 1938. Chaque membre reconnaît par sa
signature les statuts de l'UBAH et la convention (art. 2). L'art. 19 institue
un tribunal arbitral pour «juger toutes les contestations entre signataires de
la convention, relativement à son interprétation et à son exécution, de même
qu'à l'application des peines conventionnelles prévues à l'art. 20».
L'art. 9 des statuts de l'UBAH constate l'autonomie des groupements de
fabricants pour l'admission et la sortie de leurs membres, sous certaines
réserves. Ainsi, en vertu de l'art. 9 lettre f, «doivent être exclues des
groupements, les entreprises qui font, ou dont l'un des chefs fait d'autres
affaires pouvant entrer en opposition d'intérêts avec ceux dont l'Union a la
sauvegarde ou qui contreviennent délibérément aux règlements, décisions,
conventions ou aux mesures décrétées par l'Union». Selon le dernier alinéa
dudit article' «les contestations relatives à l'application

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du présent article ou à l'entrée ou à la sortie des membres des groupements ne
ressortissent pas aux tribunaux ordinaires et sont soumises au tribunal
arbitral institué par la convention collective des branches annexes de
l'horlogerie».
L'art. 19 ch. 10 des statuts de la Société suisse des fabricants de ressorts
permet à l'assemblée générale de prononcer l'exclusion de la société.
Le 8 mai 1943, Ressorts S. A. a signé une déclaration intitulée «carte de
signature» ainsi conçue:
«La maison soussignée, Ressorts S. A., membre de la société suisse des
fabricants de ressorts, après en avoir pris connaissance, signe par le présent
acte: 1° la convention collective de l'industrie horlogère suisse du 1 er
avril 1941 et 2° les statuts et règlements du susdit groupement et de l'UBAH.
Elle les signe en toutes leurs clauses, y compris les clauses pénales et
compromissoires. Elle reconnaît expressément ces dernières comme valables pour
toutes les conventions et conventions annexes, ainsi que statuts, convention
collective, règlements de l'UBAH et de son groupement, existants à ce jour ou
qui entreront en vigueur pendant cette durée, comme pour toutes les
dispositions de ces textes telles qu'elles existent à ce jour ou seront
modifiées pendant cette durée.»
B. - Le 4 avril 1944, Ressorts S. A. a été avisée que le comité de la SSFR
proposerait son exclusion à l'assemblée générale extraordinaire du 29 avril
1944. Malgré son opposition, l'intéressée fut exclue de la société et informée
de cette décision le 3 mai 1944.
Ressorts S. A. a demandé le 7 juillet 1944 au Tribunal cantonal neuchâtelois
d'annuler cette mesure. Elle la taxe d'arbitraire et conclut à sa
réintégration comme membre de la SSFR, ainsi qu'au payement d'une indemnité de
1000 francs.
La défenderesse a décliné la compétence du Tribunal cantonal, la demanderesse
devant saisir du litige le

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tribunal arbitral prévu par les art. 18 et sv. de la convention du 29 mars
1938.
La demanderesse a conclu au rejet du déclinatoire, en soutenant que l'art. 846
al. 3 CO était d'ordre public et que, d'après la théorie institutionnelle de
la société, le juge prévu par cette disposition légale ne pouvait être que le
juge ordinaire, à l'exclusion du juge arbitral, ce dernier juge ne pouvant en
tout cas pas connaître de la réclamation d'une indemnité.
Par jugement du 3 avril 1945, le tribunal s'est déclaré incompétent pour
statuer sur la demande et a renvoyé la demanderesse à agir devant le tribunal
arbitral prévu par la convention du 29 mars 1938.
C. - Contre ce jugement, la demanderesse a interjeté auprès du Tribunal
fédéral un recours de droit public pour violation de l'art. 58 CF et un
recours en réforme tendant au rejet du déclinatoire de la défenderesse.
Considérant en droit:
1.- Le Tribunal cantonal a jugé que le compromis arbitral contenu à l'art. 18
de la convention du 29 mars 1938 était opposable par la défenderesse à la
demanderesse dans le présent procès porté devant la juridiction ordinaire; et,
par conséquent, il a décliné sa compétence pour connaître du litige.
Suivant la jurisprudence du Tribunal fédéral, la clause compromissoire a un
caractère procédural et sa validité doit être jugée en vertu du droit cantonal
(RO 41 II 538; 59 II 187; 60 II 59; 67 II 148 consid. 2), ce qui exclut le
recours en réforme, d'après la nouvelle organisation judiciaire comme d'après
l'ancienne, puisque le recours n'est recevable que pour violation du droit
fédéral (art. 43 al. 1 OJ nouv., art. 57 al. 1 OJ anc.).
Le Tribunal fédéral ne saurait revoir l'interprétation de la clause
compromissoire par le juge cantonal, car l'interprétation d'un contrat
relevant du droit cantonal ne peut violer le droit fédéral. La recourante
s'adresse donc à une

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juridiction incompétente lorsqu'elle demande au Tribunal fédéral de dire que
le Tribunal cantonal neuchâtelois a faussement interprété l'art. 9 des statuts
de l'UBAH dans ce sens qu'il soumet au tribunal arbitral les contestations
entre un membre exclu d'un groupement de l'Union et son groupement.
Aussi bien la recourante a-t-elle eu raison de ne pas reprendre devant le
Tribunal fédéral son argumentation consistant à dénier au tribunal arbitral la
compétence pour statuer sur la réclamation d'une indemnité en raison de
l'exclusion taxée d'arbitraire. La valeur de ce moyen dépend également de
l'interprétation de la clause compromissoire et rentre ainsi dans le domaine
procédural.
2.- La recourante se place en revanche sur le terrain du droit fédéral en
prétendant que l'art. 846 al. 3 CO exclut la voie arbitrale. S'il en était
ainsi, la juridiction cantonale aurait méconnu un principe du droit fédéral et
le recours en réforme serait recevable (art. 43 al. 2 OJ).
Mais le grief de la recourante n'est pas fondé. Sans doute, selon l'art. 846
al. 3 CO, «l'associé exclu a la faculté d'en appeler au juge dans le délai de
trois mois». On trouve toutefois dans la législation fédérale nombre de
dispositions conférant au «juge» une compétence qui peut sans conteste être
reconnue aussi à un ou plusieurs arbitres: art. 538 , 672 al. 2 , 706 al. 2 , 717
al. 2 CC, art. 2 al. 2 , 43 , 44 , 46 al. 2 , 47 , 49 al. 2 . 50 al. 2. 52 al. 2
etc. CO, 83 al. 2 LP. Le Tribunal fédéral l'a relevé dans un arrêt récent (RO
69 II 119), suivant lequel le pouvoir d'exclure pour de justes motifs un
associé de la société en nom collectif peut être attribué à un tribunal
arbitral bien que l'art. 577 CO parle du «juge».
Quant à l'art. 846 al. 3 CO, ce qui importe, c'est de savoir si, vu la nature
et les effets de l'exclusion, il faut admettre que le législateur a voulu
réserver au juge ordinaire l'examen de cette mesure, en cas de contestation.
Il n'en serait ainsi que s'il s'agissait d'un litige portant sur un droit
auquel le titulaire ne peut renoncer ou au

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sujet duquel il ne peut passer une transaction extrajudiciaire, car si cette
faculté existe, elle implique celle de soumettre la contestation de ce droit
«au jugement d'un tiers qui lui paraît digne de confiance» (RO 69 II 121).
L'associé d'une société coopérative ne saurait sans doute renoncer valablement
par avance à la faculté «d'en appeler au juge» contre son exclusion, mais une
fois exclu il peut s'incliner devant cette mesure ou renoncer à l'attaquer, en
passant une transaction extrajudiciaire qui lui assure d'autres avantages. Il
lui est donc loisible de consentir à soumettre le cas à un ou plusieurs
arbitres; et si le compromis est admissible, la clause compromissoire, soit la
renonciation anticipée au juge ordinaire en faveur d'un ou plusieurs arbitres,
l'est aussi, la nature du droit de contester l'exclusion ne changeant pas
selon que la renonciation est antérieure ou postérieure à l'exclusion
elle-même.
La recourante se prévaut de la théorie «institutionnelle» qui seule serait
applicable, d'après elle, à la société coopérative, telle que la règle le CO
revisé: il n'y aurait, dans cette société, ni volonté contractuelle, ni
parties; il n'y aurait que la volonté sociale d'une personne juridique et des
sociétaires. On peut se dispenser de résoudre la question de doctrine ainsi
soulevée; car, même si l'on admettait la théorie institutionnelle, il n'en
resterait pas moins que la société coopérative, personne morale, d'une part,
et ses sociétaires, personnes physiques, d'autre part, peuvent s'engager
valablement à soumettre à la juridiction arbitrale tous les différends ou les
différends d'une certaine nature qui pourront surgir entre eux. La clause
compromissoire ne suppose pas, en d'autres termes, l'existence d'un autre
rapport contractuel entre ceux qui la signent. L'acceptation de la clause
arbitrale par la recourante résulte indiscutablement de la signature qu'elle a
apposée le 8 mai 1943 sur la «carte de signature».
La recourante se plaint que le Tribunal arbitral prévu par la convention du 29
mars 1938 ne lui donne pas les

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garanties voulues d'impartialité. S'il en était ainsi, elle aurait pu invoquer
la nullité de la clause compromissoire, soit en se fondant sur des
dispositions expresses du droit cantonal, soit en se prévalant d'une
application par analogie de l'art. 20 CO (cf. RO 41 II 539). Mais le droit
fédéral serait en ce cas appliqué à titre de droit cantonal supplétif et sa
violation ne rendrait pas le recours en réforme recevable, tout au plus le
recours de droit public pour arbitraire (art. 4 CF), question dont la Cour
civile n'a pas à connaître. De même, le recours de droit public est la voie à
suivre pour faire valoir le moyen tiré de la violation de l'art. 58 CF et
aussi pour s'opposer à l'exécution de la sentence arbitrale dans un autre
canton (art. 81 al. 2 LP et RO 57 I 205, 61 I 279 et 67 I 214).
Il appartiendra à la Chambre de droit public de se prononcer sur le bien-fondé
du recours qui lui a été adressé contre le jugement du Tribunal cantonal
neuchâtelois.
Vu l'art. 60 al. 1 lettre a et al. 2 OJ,
Par ces motifs, le Tribunal fédéral
rejette le recours en tant qu'il est recevable.
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 71 II 176
Date : 01 janvier 1945
Publié : 10 juillet 1945
Source : Tribunal fédéral
Statut : 71 II 176
Domaine : ATF - Droit civil
Objet : Arbitrage. Société coopérative.La clause compromissoire a un caractère procédural; sa validité doit...


Répertoire des lois
CC: 538  672  706  717
CO: 2  18  20  43  44  46  47  49  577  846
LP: 81
OJ: 43  57  60
Répertoire ATF
41-II-534 • 57-I-200 • 59-II-187 • 60-II-59 • 61-I-271 • 67-I-210 • 67-II-146 • 69-II-118 • 71-II-176
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
tribunal arbitral • tribunal fédéral • société coopérative • tribunal cantonal • droit fédéral • fabricant • droit cantonal • recours de droit public • convention d'arbitrage • transaction extrajudiciaire • doute • vue • assemblée générale • décision • violation du droit • clause pénale • personne physique • société anonyme • personne morale • juste motif • juridiction arbitrale • membre d'une communauté religieuse • autorisation ou approbation • loi fédérale d'organisation judiciaire • organisation • opposition • moyen de droit cantonal • nullité • industrie horlogère • analogie • construction annexe • sentence arbitrale • ordre public • droit public • viol • doctrine • quant • société en nom collectif • mois
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