S. 1 / Nr. 1 Gleichheit vor dem Gesetz (Rechtsverweigerung) (f)

BGE 66 I 1

1. Arrêt du 19 janvier 1940 dans la cause Favre et consorts contre Conseil
administratif de la Ville de Genève.


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Regeste:
1. Epuisement préalable des instances cantonales. Ce principe, qui vaut
notamment pour les recours fondés sur les art. 4 et 31 CF, souffre une
exception lorsque les plaignants attaquent comme inconstitutionnelle
l'application d'une disposition qui émane de l'autorité cantonale de recours
elle-même ou qui a été approuvée par elle. (consid. 3).
2. Droits dus pour l'utilisation d'un service public.
a) L'autorité cantonale n'est pas liée par l'art. 31 CF lorsqu'elle accorde la
permission d'utiliser le domaine public dans une mesure passant l'usage
commun. L'interdiction de l'effet prohibitif ne s'applique pas aux droits dus
pour l'utilisation d'un service public tel qu'un marché ou une halle (taxes
dites d'utilisation), tant qu'elles conservent le caractère d'emoluments en
rapport avec la prestation publique fournie. (Consid. 4 et 5).
b) Un canton peut, sans violer l'art. 4 CF, réclamer aux personnes domiciliées
dans d'autres cantons des taxes d'utilisation plus élevées qu'aux personnes
demeurant sur son territoire. (Consid. 6).
Lorsque le droit fédéral ne prescrit pas un traitement égal de tous les
citoyens suisses, un canton peut décider qu'il traitera le ressortissant d'un
autre canton de la même manière que ses propres ressortissants sont traités
dans ce canton. (Consid. 7).
1. Erschöpfung des kantonalen Instanzenzuges: dieser insbesondere für
Beschwerden wegen Verletzung der Art. 4 und 31 BV geltende Grundsatz erleidet
eine Ausnahme, wenn die Anwendung einer Verfügung als verfassungswidrig
angefochten wird, die von der kantonalen Rekursbehörde selbst ausgeht oder
durch sie gebilligt wird (Erw. a);
2. Anstaltsgebühren:

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a) keine Bindung der kantonalen Behörde an Art. 31 BV, wenn sie die
Inanspruchnahme des öffentlichen Eigentums in einer den Gemeingebrauch
übersteigenden Weise bewilligt. Das Verbot prohibitiv wirkender Gebühren
bezieht sich nicht auf jene für die Benützung einer öffentlichen Anstalt
(Markthallen usw.), solange diese Gebühren ein Entgelt für die Leistungen der
öffentlichen Verwaltung darstellen (Erw. 4 und 5);
b) Von ausserhalb ihres Gebietes wohnenden Personen können die Kantone, ohne
Art. 4 BV zu verletzen, höhere Anstaltsgebühren verlangen, als von den im
Kanton ansässigen (Erw. 6).
Wenn nicht die Gleichbehandlung aller Schweizerbürger durch Bundesrecht
vorgeschrieben ist, dürfen die Kantone Ausserkantonale so behandeln, wie ihre
Angehörigen dort behandelt werden (Erw. 7).
1. Il principio che si debbono adire previamente tutte le istanze cantonali,
il quale vale in particolare per i ricorsi fondati sugli art. 4 e 31 CF,
soffre un'eccezione allorchè è impugnata come incostituzionale l'applicazione
di un disposto emanante dalla stessa autorità cantonale di ricorso o da essa
approvato (consid. 3).
2. Tasse dovute per l'utilizzazione di un servizio pubblico.
a) L'autorità cantonale non è vincolata dall'art. 31 CF allorchè accorda il
permesso di utilizzare i beni di dominio pubblico in misura eccedente l'uso
comune. Il divieto di tasse proibitive non si applica alle tasse dovute per
l'utilizzazione di un servizio pubblico (come ad es. un mercato coperto), in
quanto esse rappresentino il corrispettivo di una prestazione fornita (consid.
4 e 5).
b) Senza violare l'art. 4 CF, un cantone può esigere dalle persone domiciliate
in altri cantoni tasse dette di utilizzazione superiori a quelle domandate
agli abitanti del cantone (consid. 6).
Allorchè il diritto federale non prescrive la parità di trattamento di tutti i
cittadini svizzeri, un cantone può trattare il cittadino di un altro cantone
nella stessa maniera in cui i suoi propri cittadini sono trattati da questo
cantone (consid. 7).

A. ­ Par arrêté du 5 avril 1939, le Conseil administratif de la Ville de
Genève a complété les règlements sur les marchés et les halles. En adjonction
à la «Liste des marchés de gros et de détail ... et tarif des locations
d'emplacement» des 9 juin/24 novembre 1933, il a adopté sous No 29 un «tarif
spécial applicable aux locataires domiciliés effectivement dans les cantons
suisses ou départements français où sur tous les marchés et dans les halles,
le tarif de location le plus favorable n'est pas accordé aux vendeurs
domiciliés dans le Canton de Genève» (suit l'indication des prix de patentes).
De même l'art. 16 du «règlement concernant l'administration des Halles» du 10
octobre 1911 a été complété par une disposition portant qu'un tarif spécial
serait appliqué à la catégorie de

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vendeurs ci-dessus définie (mais sans indication des prix).
Ces deux adjonctions ont été approuvées, le 10 juin 1939, par le Conseil
d'Etat du Canton de Genève.
Le 20 juin 1939, le Chef du service des halles et marchés de la Ville de
Genève informa différents bouchers domiciliés dans le Canton de Vaud du
complément apporté au règlement des halles; il ajoutait que, faute par eux de
s'obliger dans les huit jours à payer dès le 1er octobre 1939 pour un banc aux
halles le prix de 1650 fr. par an fixé en application de la nouvelle
disposition, les «locations» dont ils bénéficiaient seraient résiliées pour
fin septembre 1939.
B. ­ Le 19 juillet 1939, René Favre à Gingins et sept autres bouchers
domiciliés dans le Canton de Vaud ont formé un recours de droit public tendant
à l'annulation de la décision du Conseil administratif du 5 avril 1939,
approuvée par le Conseil d'Etat le 10 juin 1939, complétant l'art. 16 du
règlement des halles. Ils font valoir en substance:
La décision des 5 avril/10 juin 1939 dont est recours n'a pas été attaquée
dans le délai légal. Le délai est toutefois observé en ce qui concerne
l'application de cette décision aux recourants. C'est cette application qui
est critiquée. L'art. 4 CF est violé dans la mesure où il est fait une
différence entre les citoyens domiciliés et les citoyens non domiciliés dans
le canton. Le fait que des prescriptions semblables sont en vigueur dans
d'autres cantons ne justifie pas la mesure prise. Un commerçant genevois qui
serait lésé dans un autre canton par une disposition de ce genre aurait la
faculté de recourir. D'autre part, les prix étant plus que triplés,
l'augmentation a un caractère prohibitif et viole l'art. 31 CF.
C. ­ Le Conseil administratif de la Ville de Genève a conclu à
l'irrecevabilité du recours et en tout cas à son rejet. Il expose en résumé:
Le Conseil administratif n'a fait qu'user de ses droits de souveraineté en
édictant, avec l'autorisation du Conseil

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d'Etat, des prescriptions sur l'utilisation des halles et marchés qui font
partie du patrimoine administratif de la ville. L'adjonction à l'art. 16 du
règlement des halles ne peut violer l'art. 31 CF, car cette disposition
constitutionnelle ­ ainsi que le Tribunal fédéral l'a décidé à plusieurs
reprises ne confère pas aux particuliers le droit d'obtenir la permission
d'utiliser le domaine public dans une mesure outrepassant l'usage commun; la
corporation publique n'est pas liée, dans l'octroi de pareilles permissions,
par le principe de la liberté du commerce et de l'industrie, mais elle doit
simplement éviter de commettre arbitraire ou de créer une inégalité de
traitement. ­ Sous ce rapport, le Conseil administratif n'a pas non plus violé
l'art. 4 CF, car cette disposition ­ comme le Tribunal fédéral l'a également
jugé ­ autorise une différence de traitement fondée sur le domicile,
lorsqu'elle se justifie par des raisons sérieuses. Or ces raisons existent.
C'est la population du Canton et de la Ville de Genève qui supporte en
première ligne les frais d'acquisition, d'entretien et de surveillance des
halles et marchés; il n'est dès lors que juste que les commerçants de Genève
paient, pour l'occupation des bancs, des taxes moins élevées que les usagers
venant du dehors. Ce traitement différent selon le domicile de l'intéressé est
d'ailleurs appliqué par la plupart des municipalités. Fribourg par exemple
distingue, pour les bouchers, suivant qu'ils sont établis dans la commune,
hors de la commune ou hors du canton. Lausanne fait une distinction analogue.
Actuellement, à Genève, un boucher établi dans le canton paie pour une case
aux halles 400 fr., tandis qu'un boucher établi hors du canton paie 1500 fr.
Pour apprécier ce dernier chiffre, il faut considérer que les étaux mis à
disposition sont de 3 m. 60 ou 4 m., qu'ils sont placés dans un bâtiment
fermé, confortable et bien entretenu, qu'ils comportent des comptoirs avec
dessus de marbre, catelles, crochets et enseignes; plusieurs locataires ont
installé le téléphone et disposent, moyennant un modique

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émolument, d'une loge frigorifique. - Quant à la procédure suivie,
l'adjonction à l'art. 16 du règlement des halles, approuvée le 10 juin 1939
par le Conseil d'Etat, ne pouvait guère être remise en question dans un
recours à cette autorité dirigé contre la communication faite aux recourants
le 20 juin. Toutefois le présent recours ne vise pas directement la
prescription du règlement, mais la manière dont celle-ci a été appliquée aux
plaignants. A cet égard, un recours au Conseil d'Etat eût été recevable, car
il incombe à ce dernier de surveiller et de diriger les autorités inférieures,
et de contrôler l'application des règlements de police (art. 84 et 86 Const.
gen.).
D. ­ En réplique, les recourants observent ce qui suit:
La fixation d'émoluments différents selon le domicile n'est pas justifiée. Les
recourants sont les fournisseurs réguliers de la Ville de Genève. Ils y paient
des impôts commerciaux et des impôts sur le revenu; la taxe d'abattoir est
pour eux plus élevée que pour les bouchers locaux. Genève forme le centre de
leur activité; c'est là également qu'ils font la plupart de leurs achats. En
revanche, ils ne grèvent que très peu le budget de la Ville et du Canton de
Genève, car ils ne bénéficient pas des institutions publiques, telles
qu'écoles, etc. Le Conseil administratif ne peut invoquer les tarifs
différentiels en vigueur dans d'autres cantons ou communes, car les rapports
entre Confédérés ne sauraient être soumis à la loi du talion. D'ailleurs à
Lausanne et à Fribourg, la différence de traitement n'est appréciable qu'entre
les commerçants établis dans la commune et ceux établis hors de la commune;
elle est des plus réduites entre ces derniers et les commerçants étrangers au
canton. A supposer même qu'un tarif spécial soit en soi justifié, la marge ne
saurait être aussi grande qu'elle l'est à Genève: de 400 à 1500 fr. Quant à la
procédure, les recourants n'auraient pu, en s'adressant au Conseil d'Etat,
faire valoir qu'une chose, à savoir que l'autorité communale n'aurait pas fait
une juste application à leur égard de

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la novelle du 10 juin 1939; or cela, les recourants ne le prétendent pas.
E. ­ Dans sa duplique, le Conseil administratif souligne les points suivants:
L'adjonction à l'art. 16 du règlement des halles ne parle pas du montant des
émoluments à payer par les commerçants habitant hors du canton. Or les
recourants attaquent le montant de ces émoluments. Sur ce point, le Conseil
d'Etat se fût saisi d'un recours. ­ Le Conseil administratif a dû augmenter
les taxes, car le service des halles était déficitaire. Si les recourants
paient la taxe professionnelle fixe ainsi que l'impôt sur le revenu afférent à
leurs opérations commerciales dans le Canton de Genève sous déduction d'un
«préciput» en faveur de leur canton de domicile, ils ne paient l'impôt ni sur
le revenu afférent à leurs autres gains, ni sur la fortune, ni sur les
successions, et n'acquittent pas non plus les autres contributions du système
fiscal genevois: taxe personnelle, taxe sur les domestiques, les voitures, les
chiens, etc. Il n'est en outre pas exact que les recourants fassent de façon
générale leurs achats à Genève. Enfin, les taux appliqués ne sont nullement
prohibitifs, étant donné le chiffre d'affaires des recourants.
Considérant en droit:
1 et 2. ­ Questions de forme. Le Tribunal constate que le recours tend en fait
à l'annulation des mesures notifiées le 20 juin 1939, en raison de
l'inconstitutionnalité de la prescription appliquée.
3. ­ Les recourants invoquent une violation des art. 4 et 31 CF. Le Tribunal
fédéral ne se saisit en principe de recours de ce genre qu'après que toutes
les instances cantonales ont été épuisées (RO 45 I 246; 46 I 274; 48 I 105).
Il est indifférent que les mesures par lesquelles le Chef du service des
halles et marchés a, en application de la novelle du 5 avril, porté à 1650 fr.
dés le 1er octobre 1939 le prix à payer par chacun des recourants, aient pu

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faire l'objet d'un recours au Conseil administratif. Même dans la négative,
c'est-à-dire si le Chef du service des halles avait agi sur l'ordre dudit
Conseil, ces mesures n'auraient pas un caractère définitif. En effet, ainsi
que cela découle des art. 84 et 86 al. 2 Const. gen. et que le Tribunal
fédéral l'a déjà constaté (cf. l'arrêt non publié du 8 novembre 1935 dans la
cause Peloux et consorts, consid. l), les décisions communales concernant les
marchés peuvent être déférées au Conseil d'Etat; ce droit de recours est tout
général; il ne suppose pas qu'on invoque un moyen déterminé, p.ex. la
violation d'une disposition d'un règlement.
Le Tribunal fédéral ne peut donc entrer en matière en l'espèce qu'autant que
la jurisprudence apporte une exception ­ même pour les recours basés sur les
art. 4 et 31 CF ­ au principe de l'épuisement des instances. Or c'est le cas
lorsque l'usage d'une voie de droit cantonale apparaît d'emblée inutile. Cette
condition est notamment remplie lorsque les plaignants attaquent comme
inconstitutionnelle l'application d'une disposition émanant de l'autorité de
recours elle-même ou approuvée par elle (RO 38 I 438; arrêt non publié du 8
novembre 1935 dans la cause Peloux, consid. 1). L'adjonction apportée par le
Conseil administratif à l'art. 16 du règlement des halles ayant été approuvée
par le Conseil d'Etat le 10 juin 1939, le Tribunal fédéral peut connaître du
recours dirigé contre les mesures du 20 juin 1939 pour autant que les
recourants invoquent l'inconstitutionnalité de la novelle.
En revanche, le Tribunal fédéral ne peut entrer en matière dans la mesure où
le recours vise le montant des taxes réclamées. Le Conseil d'Etat ne s'est pas
encore prononcé à ce sujet, car ­ à la différence du tarif spécial édicté pour
les marchés et également soumis à l'autorité cantonale ­ le nouvel article 16
du règlement des halles n'indique pas les prix à payer par les marchands
étrangers au canton. Le Conseil d'Etat a d'ailleurs déclaré, dans

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l'instruction, qu'il se serait saisi d'un recours critiquant les taux fixés
par les avis du 20 juin 1939.
4. ­ L'autorisation d'occuper un banc de marché ­ que ce soit sur une place
publique ou dans une halle municipale - constitue une permission spéciale
d'usage soumise au droit cantonal (cf. l'arrêt non publié du 10 décembre 1937
dans la cause Société coopérative suisse de consommation, consid. 4). Les
redevances perçues en retour représentent, en tant qu'elles ne sortent pas du
cadre d'une compensation équitable, des émoluments au sens technique du terme.
Le prix réclamé pour un banc de marché rentre dans la catégorie des émoluments
ou taxes d'utilisation (Benutzungsgebühr, Anstaltsgebühr), c'est-à-dire des
droits dus pour l'utilisation d'un service public, par opposition aux
émoluments dits administratifs (Verwaltungsgebühr), dus pour l'accomplissement
de certains actes officiels (cf. FLEINER, Institutionen des deutschen
Verwaltungsrechts, 8e éd., p. 378/9; RUCK, Schweizer. Verwaltungsrecht, I, p.
104/5), et par opposition aussi aux émoluments régaliens (Regalgebühr) que
l'Etat perçoit lorsqu'il concède à un particulier l'exploitation d'un droit
régalien (forces hydrauliques, mines, pêche, chasse). Les taxes de marché sont
des «Anstaltsgebühren» même lorsque les bancs cédés sont à ciel ouvert, car
dans ce cas également le marché est un service public (RO 48 I 295; arrêt
précité Société coopérative, consid. 7 p. 18/19)
Il n'est pas nécessaire de rechercher si, dans le cas particulier, la taxe
d'emplacement de 1650 fr. par an exigée des bouchers établis hors du canton
sort du cadre d'un émolument pour constituer un impôt, car ­ comme il a été
exposé ci-dessus (consid. 3) ­ le Tribunal fédéral n'a à se prononcer que sur
le principe d'un tarif spécial pour les commerçants du dehors. Or, à cet
égard, il importe uniquement de savoir si l'établissement d'un tel tarif
devait nécessairement entraîner l'adoption de taux qui ne fussent plus dans un
rapport équitable avec la prestation

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publique fournie. La réponse ne peut être que négative, même si l'on ne tient
compte, pour apprécier cette proportion, que des frais occasionnés à la
municipalité, sans considérer aussi, comme il le faudrait, l'intérêt qu'a
l'usager à l'accomplissement de l'acte soumis à redevance (RO 53 I 482 ss; 56
I 515
). Les taxes exigées des bouchers établis hors du canton auraient
nécessairement perdu leur caractère d'émoluments ­ l'augmentation fût-elle
même minime, ­ si avant la revision du règlement les taxes perçues de tous les
commerçants selon un tarif qui n'est pas critiqué avaient suffi à couvrir les
frais liés au service des halles. Or les recourants ne l'ont pas établi ni
même allégué, et le contraire résulte des indications fournies par le Conseil
administratif. L'ensemble des dépenses causées par l'exploitation des halles
(intérêts du capital engagé et amortissement, salaire du personnel de
surveillance, entretien, chauffage, éclairage et eau) s'élève à environ 60000
fr., tandis que les recettes ne se sont montées en 1938 qu'à 51901 fr. 15.
On n'a dès lors pas à décider si la corporation publique qui perçoit un impôt
professionnel peut frapper plus lourdement que les autres les commerçants
établis hors du canton (cf. d'ailleurs ci-dessous, consid. 6 litt. b), mais
uniquement si une pareille distinction, lorsqu'elle est faite pour les taxes
d'utilisation, se heurte à l'art. 4 ou à l'art. 31 CF.
5. ­ Le Tribunal fédéral a déclaré dans plusieurs arrêts que l'art. 31 CF ne
confère pas aux particuliers le droit d'utiliser les voies et places
publiques; ils ne peuvent notamment prétendre être autorisés à le faire dans
une mesure excédant l'usage commun; lorsqu'elles accordent de telles
permissions, les autorités cantonales ne sont pas lices par le principe de la
liberté du commerce et de l'industrie; elles doivent simplement, ici comme
partout, éviter de commettre arbitraire ou de procéder inégalement (RO 52 I 35
/36; 58 I 298 /90; 59 I 270 /1; 60 I 277; arrêts non publiés Wasescha du 13
janvier 1913, consid. 2;

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Bissig du 14 novembre 1930, consid. 2; Racine du 16 juillet 1927, consid. 3;
Manigley du 9 février 1934, consid. 1; Jenatton et consorts du 25 janvier
1934, consid. 3; Peloux et consorts du 8 novembre 1935, consid. 3). Le
Tribunal fédéral s'est toutefois demandé dans un arrêt postérieur (Société
coopérative suisse de consommation du 10 décembre 1937, consid. 7) si, eu
égard à l'art. 31 litt. e CF qui prévoit que les dispositions sur la police
des routes ne peuvent renfermer rien de contraire à la liberté du commerce et
de l'industrie, il y avait lieu de s'en tenir sans réserves au principe énoncé
ou s'il convenait d'en restreindre la portée en ce sens que seul un refus
d'autorisation fondé sur un motif d'intérêt général (sécurité de la
circulation, hygiène, esthétique, moralité) ou sur des considérations
découlant du but d'un service public serait légitime. Cette question peut,
comme alors, demeurer indécise, car même si cette atténuation du principe ne
concernait pas seulement les immeubles du domaine public (routes, places,
etc.), mais aussi les choses relevant du patrimoine administratif (halles,
etc.), le moyen tiré de l'art. 31 CF ne pourrait être admis.
En effet, les recourants ne voient une violation de cette disposition que dans
le fait qu'on leur réclame une taxe portée au triple de ce qu'elle était, et
qui aurait ainsi un caractère prohibitif. Ce grief vise le montant de la taxe
et est dès lors irrecevable (cf. consid. 3). Il devrait d'ailleurs être rejeté
au fond si l'on voulait admettre que les recourants auraient pu invoquer
l'interdiction des taxes prohibitives en ce qui concerne le principe même du
tarif différentiel. Cette interdiction ne s'applique en effet qu'aux impôts
professionnels et peut-être aussi aux émoluments administratifs (cf. en ce
sens RO 43 I 257 et 38 I 427, en sens contraire RO 54 I 81), mais en tous cas
pas aux taxes d'utilisation, surtout lorsque ­ comme c'est le cas en l'espèce
­ il n'y a pas obligation d'utiliser le service public (BURCKHARDT, Comment.,
3e édit., p. 252/3). Or rien ne permet en l'état de supposer (cf. consid. 4
ci-dessus)

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qu'une majoration des droits jusqu'alors perçus des marchands étrangers au
canton ne fût pas possible sans sortir du cadre d'un émolument et sans donner
partiellement à ces droits le caractère de taxes professionnelles. Au surplus,
les recourants n'ont pas établi qu'un droit annuel de 1650 fr. constituât pour
eux une charge telle qu'ils ne pourraient plus retirer de l'exploitation d'un
banc aux halles de Genève un profit raisonnable. Ils n'ont fourni aucune
indication sur les bénéfices réalisés ces dernières années. Or, pour prétendre
que le prix de 1650 fr. paralysait leur genre de commerce, ces précisions
eussent été indispensables.
6. ­ Les recourants se plaignent d'une violation de l'art. 4 CF résultant du
fait que les marchands étrangers au canton et notamment les marchands vaudois
sont moins bien traités que les marchands genevois, les premiers étant soumis
à un tarif spécial comportant des taxes plus élevées. Ce moyen ne vise pas le
montant des droits, mais le principe inscrit dans le nouvel article 16 du
règlement des halles. Il y a donc lieu d'entrer en matière.
a) Les cantons ne peuvent ­ dans la mesure où la Constitution ne statue pas
elle-même d'exceptions (p. ex. en matière d'assistance) ­ soumettre les
citoyens à un régime différent suivant qu'ils sont ou non leurs ressortissants
(art. 43 et 60 CF). En revanche, le domicile à l'intérieur ou en dehors du
canton ­ même si le traitement moins favorable des citoyens établis au dehors
devait frapper surtout des ressortissants d'autres cantons ­ peut former le
point de départ de distinctions juridiques. Il faut toutefois que la
discrimination repose sur des raisons sérieuses, c'est-à-dire qu'il existe une
relation naturelle entre la situation particulière et le traitement
différentiel. Si cette relation fait défaut, l'art. 4 CF se trouve violé (RO
51 I 77 et les arrêts cités; 53 I 349; arrêt non publié du 25 janvier 1935
dans la cause Jenatton).
b) En ce qui concerne les impôts professionnels, le Tribunal fédéral a jugé
récemment (arrêt Schulthess,

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RO 64 I 386 ss) que rien ne justifiait qu'ils fussent plus élevés pour les
personnes demeurant hors du canton; on ne saurait en particulier invoquer le
fait que ces personnes paient leurs impôts ordinaires sur la fortune et sur le
revenu dans un autre canton; tenir ce motif pour suffisant, reviendrait à
permettre aux cantons d'éluder la défense de la double imposition. En l'espèce
toutefois, il faut considérer ­ comme il a été exposé ci-dessus ­ que les
taxes exigées des marchands étrangers au canton n'ont pas le caractère
d'impôts mais celui d'émoluments.
c) Lorsque l'autorité qui accorde une patente professionnelle perçoit, outre
un impôt, un émolument administratif, elle a le droit, s'il s'agit d'étrangers
au canton, de leur réclamer un émolument supplémentaire qui corresponde au
surcroît de travail et de frais que représente dans ce cas l'octroi de
l'autorisation (RO 64 I 391). L'augmentation des taxes envisagées par le
Conseil administratif pour les marchands du dehors ne devait pas se tenir dans
ces limites, car la concession d'un banc aux halles ne peut guère occasionner
plus de frais ou de travail parce que le locataire exploite sa boucherie dans
le Canton de Vaud plutôt que dans le Canton de Genève. Il s'agit dès lors de
savoir si le canton ou la commune qui assujettit les citoyens du dehors à des
taxes d'utilisation plus élevées ne peut aussi le faire qu'à raison du
surcroît de frais et de travail résultant pour l'administration du domicile
extérieur des intéressés.
d) Selon une jurisprudence qui remonte à 1903, les autorités fédérales
admettent que les étrangers au canton soient astreints à payer pour les permis
de pêche et de chasse des prix (taxes régaliennes) plus élevés que les
habitants du canton, sans d'ailleurs que le supplément perçu doive
correspondre à un surcroît effectif de travail et de frais. On justifie cette
différence en considérant que la faune terrestre et aquatique d'un canton
constitue en quelque sorte un «bien inhérent au territoire cantonal, dont
l'exploitation, restreinte de par la nature des choses,

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doit être réservée de préférence aux citoyens du canton qui, en cette qualité,
contribuent aux charges publiques» (SALIS, Droit fédéral, 2e éd., t. V no
2111; SALIS-BURCKHARDT, t. III no 1092; RO 32 I 637; 36 I 676; 41 I 156; 64 I
390
; arrêt non publié du 23 janvier 1917 dans la cause Benz, reproduit dans la
Aarg. Vierteljahresschrift, 25 p. 105; NAPP, Zeitschr. f. schw. R. 35 p. 279).
e) Les mêmes considérations doivent s'appliquer aux taxes d'utilisation, là du
moins où l'étranger au canton n'est pas tenu de recourir au service public.
L'usage des institutions étatiques et communales (écoles, hôpitaux, halles,
etc.) est aussi limité par nature; d'autre part, ces institutions ne
représentent pas seulement un bien inhérent au territoire cantonal ou
communal, mais elles sont directement la propriété du canton ou de la commune
et, à ce titre, elles sont destinées en première ligne aux citoyens domiciliés
sur le territoire, qui supportent l'ensemble des charges publiques. L'art. 43
al. 4 CF, qui consacre l'égalité de traitement dans le domaine du droit
public, accorde uniquement au Suisse établi le droit de bénéficier des
institutions étatiques et communales aux mêmes conditions que les
ressortissants du canton et de la commune (RO 49 I 337). Cette limitation de
la garantie aux citoyens établis n'aurait pas de véritable sens si, de par
l'art. 4 CF, tous les Suisses, même non établis, pouvaient invoquer les mêmes
droits. Une corporation publique qui, pour l'utilisation d'un service public,
perçoit des habitants astreints au paiement des impôts généraux des taxes
moins élevées que ne comporterait la couverture des frais occasionnés par ce
service, n'est pas tenue, en vertu du droit fédéral, d'assurer le même
privilège aux personnes habitant au dehors. Les cantons et les communes ont
ainsi le droit, tant que le principe de la gratuité de l'enseignement inscrit
à l'art. 27 CF n'entre pas en jeu, d'exiger des écoliers non domiciliés sur
leur territoire un écolage plus élevé, voire de n'en percevoir un qu'à leur
égard (cf. IM HOF, Rechtserörterungen, Supplément

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à: MANGOLD, Die Erhebung von Schulgeld, Mitteilungen des statistischen Amtes
des Kantons Baselstadt, no 15, année 1908, notamment p. 84 et 88). On ne peut
non plus reprocher à un canton ou à une commune de réclamer aux malades admis
dans leurs hôpitaux des taxes plus ou moins élevées suivant qu'ils sont ou non
établis. A vrai dire, en ce qui concerne les halles et marchés, le Conseil
fédéral ­ après s'être d'abord prononcé en sens contraire (SALIS, III no 900)
­ a décidé dans un arrêté du 31 décembre 1900 (SALIS, no 821 a) qu'un marchand
ne pouvait pas être frappé d'une taxe d'emplacement plus élevée du fait de son
domicile hors de la commune. Toutefois, dans la mesure où il vise également la
taxe d'utilisation comprise dans le droit de patente, cet arrêté doit être
considéré comme dépassé par le changement de jurisprudence opéré quelques
années plus tard (1903) par le Conseil fédéral en ce qui concerne les
émoluments régaliens (cf. ci-dessus litt. d). En revanche, l'arrêté précité
conserve toute sa valeur en tant qu'il se rapporte à l'impôt professionnel
compris dans le droit de patente (RO 64 I 388). Lorsqu'il s'agit de marchés à
ciel ouvert tenus sur les voies et places publiques, cet impôt constitue
souvent l'élément principal, car les frais liés au service public (achat et
entretien des bancs, surveillance, etc.) ne justifient que la perception
d'émoluments très modérés. Il en est différemment lorsqu'il s'agit de halles,
car il faut faire rentrer dans le calcul de l'émolument les frais souvent
considérables de construction, d'installation et d'entretien. Enfin on ne peut
dénier à la Ville de Genève le droit de frapper les recourants d'une taxe plus
élevée, par le motif que ceux-ci paient à Genève certains impôts, à savoir la
taxe professionnelle et l'impôt sur le revenu afférent à leurs opérations
commerciales dans cette ville. Il faut en effet compter au nombre des
étrangers au canton tous ceux qui ont leur domicile hors de la Ville ou du
Canton de Genève et qui n'y ont donc pas leur domicile fiscal ordinaire.

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7. ­ Le principe que les étrangers au canton supportent des taxes
d'emplacement plus élevées ne s'applique pas, d'après le nouvel art. 16 du
règlement des halles, à tous les marchands, mais seulement à ceux qui sont
domiciliés dans un canton où sur tous les marchés et dans les halles le tarif
de location plus favorable n'est pas accordé aux vendeurs domiciliés dans le
Canton de Genève. Il y a ainsi deux catégories d'étrangers au canton, dont
l'une jouit du traitement réservé aux marchands domiciliés. Les recourants
n'ont pas prétendu, dans leur premier mémoire, que cette discrimination violât
l'égalité des citoyens devant la loi; tout au plus ont-ils critiqué, dans leur
réplique, l'application du système du talion. Mais, en tant que la réplique
est déposée après l'expiration du délai de recours de 30 jours (ce qui est le
cas en l'espèce), le recourant n'y peut pas introduire de nouveaux moyens; il
doit se borner à motiver plus complètement les moyens déjà invoqués (RO 36 I
533
). Le nouveau grief des recourants est donc tardif. Il n'est d'ailleurs pas
fondé.
Lorsque l'égalité de traitement des citoyens suisses est prévue par le droit
fédéral (art. 4, 43, 60 CF), un canton doit placer les citoyens qui relèvent
d'un autre canton par le droit de cité ou le domicile sur le même pied que ses
propres ressortissants établis. Il ne peut pas se contenter dans ce cas de
traiter le ressortissant d'un autre canton de la même manière que ses propres
ressortissants sont traités dans ce canton (rétorsion; RO 5 p. 31/2; 6 p. 204;
8 p. 41 ss). Toutefois, lorsque le droit fédéral ne prescrit pas un traitement
égal ­ et c'est le cas en l'espèce ­ le canton peut fort bien renoncer au
régime différentiel qu'il est en droit de pratiquer, à condition que l'autre
canton en fasse autant. C'est ainsi que dans le domaine de la chasse, où les
étrangers au canton ne peuvent pas non plus prétendre, en vertu du droit
fédéral, jouir du même traitement que les habitants du canton, le Conseil
fédéral a approuvé la conclusion d'un concordat qui prévoyait la mise sur le
même pied totale ou partielle des habitants

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des cantons signataires, malgré les différences qui en résultaient entre les
habitants des cantons concordataires et ceux des cantons non concordataires,
et même, en cas de conventions spéciales, entre les habitants de divers
cantons concordataires (SALIS-BURCKHARDT, III, no 1092). Or il doit aussi être
loisible à un canton de prévoir d'emblée, par voie légale ou réglementaire, à
quelles conditions il traitera les habitants d'autres cantons de la même
manière que ses propres habitants.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral
rejette le recours en tant qu'il est recevable.
Decision information   •   DEFRITEN
Document : 66 I 1
Date : 01. Januar 1940
Published : 19. Januar 1940
Source : Bundesgericht
Status : 66 I 1
Subject area : BGE - Verfassungsrecht
Subject : 1. Epuisement préalable des instances cantonales. Ce principe, qui vaut notamment pour les recours...


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