Bundesverwaltungsgericht
Tribunal administratif fédéral
Tribunale amministrativo federale
Tribunal administrativ federal


Cour II

B-3662/2011

Arrêt du 30 août 2012

Jean-Luc Baechler (président du collège),

Composition Hans Urech et Bernard Maitre, juges ;

Fabienne Masson, greffière.

X._______,
Parties
recourant,

contre

Fonds National Suisse FNS,

Wildhainweg 3, case postale 8232, 3001 Berne,

autorité inférieure .

Objet Candidature à un subside Ambizione.

Faits :

A.
Le 15 février 2011, X._______ a déposé un dossier de candidature pour l'un des postes mis au concours par le Fonds national suisse de la recherche scientifique (ci-après : le FNS ou l'autorité inférieure) dans le cadre du programme Ambizione. Il a requis l'allocation d'un soutien financier de Fr. 599'966.- pour une durée de 36 mois à partir du 1er mai 2012 pour son projet intitulé (...).

B.
Par décision du 31 mai 2011, le FNS a rejeté la demande de X._______ au motif que son projet présentait certaines faiblesses dans sa conception. Il a jugé que des variables importantes n'étaient pas prises en compte, ce qui pouvait limiter la portée des résultats attendus (possible adaptation locale des individus au changement climatique, effets secondaires potentiels d'une diffusion large de la bactérie symbiotique choisie, pas d'étude du champignon lui-même prévue ni de sa possible adaptation au changement climatique). Par ailleurs, il a ajouté que la liste des publications s'avérait certes bien étoffée mais contenait surtout des articles parus dans des journaux au facteur d'impact relativement limité. Enfin, il a noté que, par comparaison avec les autres dossiers évalués, la candidature n'avait pas entièrement convaincu et n'avait pas été retenue pour la deuxième phase de l'évaluation.

C.
Par écritures du 27 juin 2011, mises à la poste le même jour, X._______ (ci-après : le recourant) a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral en concluant au réexamen de son projet de recherche. À l'appui de ses conclusions, il explique que les commentaires relatifs à l'évaluation de son projet contiennent des erreurs de compréhension montrant qu'il n'a pas été lu en profondeur et que les objectifs de la recherche proposés n'ont pas été compris par les réviseurs.

D.
Invité à se prononcer sur le recours, le FNS en a proposé le rejet au terme de ses remarques responsives du 30 août 2011. Il estime que, si le recourant se plaint implicitement d'une constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents, il semble que les griefs invoqués se dirigent plutôt sur la manière dont les faits ont été appréciés par le FNS. Par ailleurs, il se réfère expressément aux évaluations du rapporteur et du corapporteur. Enfin, le FNS explique se voir contraint, pour des raisons financières, d'opérer un tri sévère parmi les projets qui lui sont soumis et d'écarter des projets qui mériteraient, le cas échéant, d'être pris en considération ; dans ce contexte, il souligne que seules 79 des 229 requêtes Ambizione déposées en février 2011 ont été sélectionnées pour la seconde phase, l'allocation de 50 postes étant prévue à la fin de l'évaluation.

E.
Dans sa réplique du 21 septembre 2011, le recourant précise que ses griefs ne visent pas la manière dont les faits ont été appréciés ni le droit de jugement du FNS mais qu'ils portent spécifiquement sur la lecture incorrecte de son projet de la part du rapporteur. Donnant quelques exemples de ce qu'il considère comme une lecture erronée, il juge que celle-ci a indéniablement influencé de façon très négative l'évaluation globale de sa candidature, étant donné le poids attribué à l'avis du rapporteur au sein de la commission de sélection. Au demeurant, il souligne que le rapporteur a, dans son commentaire final, émis une considération subjective démontrant un préjugé défavorable à l'égard du type d'expérience de translocation à la base de son projet.

F.
Dans sa duplique du 25 octobre 2011, le FNS a rappelé la procédure en deux phases prévue par le règlement Ambizione, soulignant les rôles d'un rapporteur et d'un corapporteur, la décision finale incombant à l'ensemble de la commission d'évaluation. Il précise que des spécialistes ou des experts de certaines disciplines sont appelés à procéder au peer-review. Il retient que le rapporteur a correctement lu le projet et que ses déclarations dans le commentaire final servent avant tout de réflexions en vue de la discussion avec l'ensemble de la commission d'évaluation. Il estime que le recourant ne saurait prendre des courts passages, voire des extraits des réflexions dudit rapporteur, les sortir de leur contexte et les interpréter, voire utiliser ces réflexions à son avantage, sans risquer de les déformer. Enfin, il explique que les qualités du parcours ainsi que les compétences du recourant ont été explicitement relevées dans la décision du 31 mai 2011. Il ajoute que la commission a également tenu compte de la liste des publications du recourant ainsi que de la comparaison avec d'autres candidats.

G.
Dans ses remarques du 2 novembre 2011, le recourant confirme qu'à ses yeux, il y a bien eu une lecture incorrecte et préconçue de son projet de la part de l'un des rapporteurs à la base de l'établissement inexact voire incomplet des faits pertinents. Il note ne voir aucune trace, dans la décision du 31 mars 2011, d'une discussion de son projet au sein de la commission.

Les arguments avancés de part et d'autre au cours de la présente procédure seront repris plus loin dans la mesure où cela se révèle nécessaire.

Droit :

1.
Le Tribunal administratif fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (cf. ATAF 2007/6 consid. 1).

1.1 L'art. 13 al. 4 de la loi du 7 octobre 1983 sur l'encouragement de la recherche et de l'innovation (LERI, RS 420.1) prévoit que la procédure de recours est régie par les dispositions générales de la procédure fédérale. L'acte attaqué est une décision au sens de l'art. 5 al. 1 let. c de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA, RS 172.021) qui émane d'une autorité au sens de l'art. 33 let. h de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32). Aucune des clauses d'exception de l'art. 32 LTAF n'étant par ailleurs réalisée, le Tribunal administratif fédéral est donc compétent, en vertu de l'art. 31 LTAF, pour statuer sur le présent recours (voir également l'art. 31 du règlement du FNS du 14 décembre 2007 relatif aux octrois de subsides, approuvé le 13 février 2008 par le Conseil fédéral [ci-après : le règlement des subsides]).

1.2 Le recourant, qui a pris part à la procédure devant l'autorité inférieure, est spécialement atteint par la décision attaquée et a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification. La qualité pour recourir doit dès lors lui être reconnue (art. 48 al. 1 let. a à c PA).

1.3 Les dispositions relatives au délai de recours, à la forme et au contenu du mémoire de recours (art. 50 et 52 PA), ainsi que les autres conditions de recevabilité (art. 44 ss PA) sont respectées.

Le recours est donc recevable.

2.

2.1 Le FNS est une fondation au sens des art. 80 ss du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC, RS 210), ayant pour but d'encourager la recherche en Suisse (art. 7 al. 2 LERI et art. 1 al. 1 des statuts du FNS du 30 mars 2007, révisés et approuvés par le Conseil fédéral le 4 juillet 2007, publiés in : www.snf.ch, rubrique "Portrait/Statuts & bases juridiques"). Les institutions chargées d'encourager la recherche fixent la procédure régissant les décisions relatives aux subsides ; cette procédure doit répondre aux exigences des art. 10 et 26 à 38 PA (art. 13 al. 1 LERI). Les statuts et règlements du FNS - qui, conformément à l'art. 7 al. 2 LERI, doivent être approuvés par le Conseil fédéral lorsqu'ils règlent des tâches pour lesquelles des moyens de la Confédération sont utilisés - arrêtent de manière détaillée les conditions d'octroi des subsides. Plus précisément, ces conditions sont énumérées dans le règlement des subsides ainsi que, s'agissant du programme Ambizione, dans le règlement des subsides Ambizione, Ambizione-PROSPER et Ambizione-SCORE du 31 août 2010 (ci-après : le règlement Ambizione), qui constitue le règlement d'exécution édicté par le Conseil national de la recherche, organe scientifique du FNS (art. 21 des statuts du FNS) en application des art. 21 et 46 du règlement des subsides.

2.2 Conformément à l'art. 13 al. 2 LERI, le requérant peut former un recours pour violation du droit fédéral, y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents, mais non pour inopportunité de la décision attaquée. La cognition du Tribunal administratif fédéral est ainsi limitée en cette matière (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral B 3297/2009 du 6 novembre 2009 consid. 2) dans la mesure où il s'agit de subventions accordées selon le pouvoir d'appréciation de l'autorité. Dès lors, le Tribunal administratif fédéral ne saurait substituer ses propres vues à l'appréciation de l'autorité inférieure. Il convient en effet de ne pas perdre de vue qu'en qualité d'autorité judiciaire, le Tribunal n'est pas une autorité supérieure d'encouragement de la recherche scientifique ni une instance de surveillance en la matière, faute de disposer des connaissances techniques que requiert l'évaluation des projets soumis au FNS (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral B 6801/2007 du 2 juillet 2008 consid. 4.1 et les réf. cit.). De plus, l'autorité de recours ne connaît pas tous les facteurs d'évaluation des projets et n'est, en règle générale, pas à même de juger des qualités du projet du recourant par rapport à ceux des concurrents. Cette retenue n'est cependant admissible qu'à l'égard de l'évaluation proprement dite du projet présenté. Dans la mesure où le recourant conteste l'interprétation et l'application de prescriptions légales ou s'il se plaint de vices de procédure, l'autorité de recours doit examiner les griefs soulevés avec pleine cognition, sous peine de déni de justice formel (cf. ATAF 2007/37 consid. 2.2 et les réf. cit.).

2.3 Le Conseil de la recherche du FNS est compétent pour l'évaluation scientifique et la décision d'octroyer des subsides Ambizione. Le Conseil peut confier cette tâche à des organes d'évaluation spécialisés (art. 6 du règlement Ambizione). À teneur de l'art. 21 al. 1 des statuts du FNS, le Conseil national de la recherche est l'organe scientifique du FNS ; il procède, en particulier, à l'expertise scientifique des demandes de subsides remises au FNS et décide du soutien à leur accorder (let. e). L'examen matériel des requêtes de subsides est effectué au sein des organes chargés de l'évaluation, qui désignent les rapporteurs et les corapporteurs (art. 23 al. 1 du règlement d'organisation du Conseil national de la recherche du 14 novembre 2007). Si l'évaluation est effectuée par des experts externes individuels, c'est le rapporteur responsable qui les désignera (art. 23 al. 2 dudit règlement).

2.4 Aux termes de l'art. 7 du règlement Ambizione, les requêtes sont soumises à une évaluation scientifique, dans la mesure où elles remplissent les conditions formelles. Les critères d'évaluation sont les suivants :

a. qualité, originalité, actualité et autonomie du projet de recherche ;

b. indépendance scientifique du/de la requérant-e à l'institut d'accueil ;

c. accomplissements scientifiques du/de la requérant-e à ce jour, notamment les travaux de recherche réalisés et les publications qui en ont résulté ;

d. aptitude personnelle du/de la requérant-e à effectuer une carrière de haut niveau dans la recherche académique/clinique ;

e. mobilité du/de la requérant-e en fonction du lieu de travail prévu ;

f. possibilité d'intégration dans la place scientifique suisse.

La procédure du traitement des requêtes s'effectue en deux phases. Les organes d'évaluation retiennent les meilleures requêtes pour une seconde phase. Le rejet est notifié par écrit aux autres requérant-e-s et mentionne les motifs du refus (art. 8 al. 1 du règlement Ambizione). Les responsables des requêtes retenues à l'issue de la première phase d'évaluation sont invitée-s à un entretien personnel pour la seconde phase (art. 8 al. 2, 1ère phrase, dudit règlement).

3.
Le recourant se prévaut d'une constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents. Il estime que les commentaires relatifs à l'évaluation de son projet contiennent des erreurs de compréhension qui montrent qu'il n'a pas été lu en profondeur et que les objectifs de la recherche proposés non pas été compris. Si l'autorité inférieure a jugé que le grief porte davantage sur la manière dont les faits ont été appréciés que sur l'établissement des faits en général, le recourant a cependant expressément maintenu s'en prendre à la lecture préconçue et incorrecte de son projet de la part du rapporteur ; il estime qu'il y a ainsi eu un établissement manifestement erroné des faits.

Dès lors que ce grief ne porte pas sur l'évaluation proprement dite du projet présenté, il convient de l'examiner avec une pleine cognition (cf. supra consid. 2.2).

3.1 La constatation des faits est incomplète au sens de l'art. 49 PA lorsque toutes les circonstances de fait et les moyens de preuve déterminants pour la décision n'ont pas été pris en compte par l'autorité inférieure ; elle est inexacte lorsque l'autorité a omis d'administrer la preuve d'un fait pertinent, a apprécié de manière erronée le résultat de l'administration d'un moyen de preuve, ou a fondé sa décision sur des faits erronés, en contradiction avec les pièces par exemple (cf. Benoît Bovay, Procédure administrative, Berne 2000, p. 395 s.).

En matière d'établissement des faits, la procédure administrative est essentiellement régie par la maxime inquisitoire selon laquelle les autorités définissent les faits pertinents et les preuves nécessaires qu'elles ordonnent et apprécient d'office (art. 12 PA). La maxime inquisitoire doit néanmoins être relativisée par son corollaire : le devoir de collaborer des parties (art. 13 PA ; cf. Clémence Grisel, L'obligation de collaborer des parties en procédure administrative, Zurich/Bâle/Genève 2008, n° 142 p. 49 s.). Selon l'art. 13 al. 1 PA, les parties sont notamment tenues de collaborer à la constatation des faits dans une procédure qu'elles introduisent elles-mêmes (let. a). Aussi, celui qui introduit une demande de subside de recherche doit l'accompagner d'une motivation détaillée et complète (cf. décision de la Commission fédérale de recours en matière d'encouragement de la recherche du 31 octobre 2000 publiée dans la Jurisprudence des autorités administratives de la Confédération [JAAC] 67.11).

3.2 En l'espèce, l'autorité inférieure a, dans ses diverses écritures, émis des critiques à l'encontre du projet déposé par le recourant, énumérant les variables importantes qui, à ses yeux, n'ont pas été prises en compte. Il est vrai que les faits sur lesquels elle a à se prononcer ressortent logiquement et immanquablement du projet lui-même tel qu'il a été soumis par le recourant. Cela étant, force est toutefois de constater qu'elle n'expose, ni dans sa décision, ni dans les écritures déposées ultérieurement dans le cadre de la procédure de recours, les éléments ainsi que les caractéristiques spécifiques du projet qu'elle a jugés pertinents dans son appréciation et l'ayant conduite à formuler des critiques justifiant, à ses yeux, le rejet.

3.3 Dans ces circonstances, dès lors que les faits pertinents sont inconnus, il s'avère tout simplement impossible d'examiner si l'autorité s'est ou non rendue fautive d'une constatation inexacte ou incomplète de ces faits. Il en découle que c'est davantage sous l'angle de l'obligation de motiver la décision incombant au FNS qu'il sied de soupeser, avec pleine cognition (cf. supra consid. 2.2), le grief du recourant.

4.

4.1 Le devoir pour l'autorité de motiver sa décision afin que le destinataire puisse la comprendre, la contester utilement, s'il y a lieu, et que l'autorité de recours puisse exercer son contrôle a été déduit de la garantie du droit d'être entendu consacré à l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst., RS 101). Cette obligation est cependant définie avant tout par les dispositions spéciales de procédure et, en particulier, par l'art. 35 PA, applicable dans la présente procédure par renvoi de l'art. 13 al. 1 LERI. Selon l'art. 35 al. 1 PA, les autorités sont tenues de motiver leurs décisions écrites, même lorsqu'elles sont notifiées sous forme de lettre. Bien que cette norme juridique ne fixe pas les limites de cette obligation, la doctrine et la jurisprudence admettent que la motivation doit porter sur tous les points nécessaires et se prononcer sur tous les arguments pertinents soulevés par les parties ; sont nécessaires et pertinents non pas tous les arguments soulevés, mais seuls ceux qui sont de nature à influer de manière déterminante sur le contenu de la décision de telle sorte que l'intéressé puisse savoir pour quels motifs elle a été prise - et, dès lors, par quels moyens il peut la contester - et que l'autorité de recours puisse statuer en connaissance de cause sur le bien-fondé de la décision attaquée (cf. Pierre Moor/Etienne Poltier, Droit administratif, vol. II, Les actes administratifs et leur contrôle, 3e éd., Berne 2011, p. 348 et 350 et les réf. cit.). L'étendue de la motivation se définit selon les circonstances du cas particulier ; ainsi, l'obligation de motiver est d'autant plus stricte lorsque la décision repose sur un pouvoir de libre appréciation de l'autorité, lorsqu'elle fait appel à des notions juridiques indéterminées, lorsqu'elle porte gravement atteinte à des droits individuels, lorsque l'affaire est particulièrement complexe ou lorsqu'il s'agit d'une dérogation à une règle légale (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral B 3538/2010 du 3 février 2011 consid. 5.3.4 et C 322/2006 du 23 avril 2009 consid. 2.1 et les réf. cit. ; Moor/Poltier, op. cit., p. 351 et les réf. cit. ; Felix Uhlmann/Alexandra Schwank, in : Bernhard Waldmann/Philippe Weissenberger [éd.], Praxiskommentar zum Bundesgesetz über das Verwaltungsverfahren, Zurich 2009, n° 18 et 21 ss ad art. 35 PA).

La jurisprudence a admis que, sous réserve de l'indication minimale des motifs de refus, il était envisageable de se satisfaire d'une motivation sommaire quant aux décisions de refus du FNS en matière de subsides, en raison du grand nombre de requêtes auxquelles il devait faire face chaque année (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral B-2023/2011 du 2 février 2012 consid. 4.4.2 ; Jacques Matile in : Revue de droit administratif et de droit fiscal [RDAF], 1994, p. 421 ss, spéc. 428 et la réf. cit.). Dans le cadre d'un recours et, en particulier, de l'échange d'écritures, il appartient au FNS et aux autres institutions compétentes de préciser et de développer les motifs sur lesquels ils ont fondé la décision attaquée lorsque cela s'avère nécessaire au vu de leur devoir de motivation décrit ci-dessus (cf. notamment Moor/Poltier, op. cit., p. 355 s. ; ATF 116 V 28).

À cet égard, il sied de rappeler que, s'il n'est pas habilité à revoir l'opportunité d'une décision en matière de subsides, le Tribunal intervient pour sanctionner un excès ou un abus du pouvoir d'appréciation (cf. supra consid. 2.2). Or, l'exercice de ce pouvoir d'appréciation restreint présuppose que la décision attaquée repose sur une motivation suffisamment solide, le Tribunal ne pouvant se substituer à l'autorité inférieure pour en combler les lacunes sans porter atteinte au pouvoir d'appréciation de celle-ci (cf. notamment arrêt du Tribunal administratif B 3538/2010 du 3 février 2011 consid. 5.3.4 ; décision de l'ancienne Commission de recours en matière d'infrastructures et d'environnement du 27 juillet 2004 publié dans la JAAC 69.92 consid. 6).

4.2 En l'espèce, il faut bien reconnaître que la décision entreprise se révèle pour le moins sommairement motivée s'agissant d'un projet d'une certaine complexité. Le FNS y cite les appréciations formulées par le rapporteur puis reprises telles quelles par le Conseil national de la recherche. Sur cette base, il expose ainsi que le projet du recourant présente certaines faiblesses dans sa conception ; que des variables importantes ne sont pas prises en compte, ce qui pourrait limiter la portée des résultats attendus (possible adaptation locale des individus au changement climatique, effets secondaires potentiels d'une diffusion large de la bactérie symbiotique choisie, pas d'étude du champignon lui-même prévue ni de sa possible adaptation au changement climatique). Si le FNS rapporte de la sorte brièvement les raisons justifiant son rejet, il n'a pas pour autant expliqué le raisonnement l'ayant conduit à ces conclusions ni en quoi les variables qu'il a énumérées s'avèrent pertinentes dans le cadre du projet soumis par le recourant de sorte que l'on ignore au bout du compte ce qui a motivé ses critiques.

Une telle motivation sommaire serait pourtant admissible pour autant que le FNS précise ses motifs dans le cadre de l'échange d'écritures. Dans ce contexte, il lui incombait notamment de les rattacher précisément aux indications spécifiques figurant dans le projet et sur lesquelles il a fondé son raisonnement. Or, il ne l'a pas fait. De plus, le recourant a, dès ses écritures de recours, posé certaines questions apparaissant comme légitimes au regard de son projet ainsi que de la décision rendue et appelant des réponses de l'autorité inférieure. À titre d'indices quant à une mauvaise lecture de son projet, le recourant s'en prend d'abord à la mention, dans la décision, d'une possible adaptation locale des individus au changement climatique, expliquant que le but de son projet tend à évaluer les hypothèses récentes sur les changements climatiques comme cause de la disparition d'espèces d'amphibiens ; il ajoute que ces disparitions sont survenues dans un laps de temps de 10-20 ans, ce qui représente une période de temps trop courte pour que des processus évolutifs puissent produire des adaptations dans des organismes ayant des temps de génération relativement élevés. Ensuite, concernant les effets secondaires potentiels d'une diffusion large de la bactérie symbiotique choisie, il développe que son collaborateur et lui-même ont récemment détecté la présence de cette bactérie dans les populations d'amphibiens qui feront l'objet de ses recherches ; qu'il s'agit donc d'une bactérie naturellement présente sur la peau des amphibiens ; que des effets secondaires seraient envisageables au cas où la bactérie constituerait une espèce nouvellement introduite dans ces populations, ce qui ne s'avère pas le cas de son système. Quant à l'absence d'étude prévue du champignon lui-même ni de sa possible adaptation au changement climatique relevée dans la décision, il explique que l'espèce de champignons concernés a déjà été détectée à des altitudes qui vont du niveau de la mer en région tropicale à plus de 5200 m en bordure de glaciers ; que, pour un champignon avec une telle tolérance prouvée à de tels extrêmes de température et d'humidité, la question de savoir si l'espèce pourrait développer des adaptations au changement climatique n'est pas du tout prioritaire. Pour ce qui touche aux extraits des prises de position mis à sa disposition, le recourant souligne que le premier commentaire « translocation followed by reproduction may disturb local adaptation » ne se révèle pas pertinent puisqu'aucune reproduction des espèces d'amphibiens n'est envisagée dans le cadre de son projet ; de même, l'observation selon laquelle « it remains unclear how amphibians are to be protected in practice if the skin bacterium provides
important benefits, should solutions containing this bacterium be applied to all ponds/lakes every year? » n'est selon lui pas juste pour les espèces d'amphibiens considérées dans son projet de translocation qui sont à ponte terrestre et à développement direct (et qui ne fréquentent donc pas les mares et les lacs).

Sans préjuger de la pertinence des appréciations opérées par le FNS, il faut bien reconnaître que les remarques formulées par le recourant à leur sujet appelaient à tout le moins certaines précisions que l'on recherche en vain dans les écritures de l'autorité inférieure. Au contraire, dans sa réponse, celle-ci n'explique pas davantage les critiques formulées dans sa décision, renvoyant simplement à l'évaluation du rapporteur du 11 avril 2011. Dans sa réplique du 21 septembre 2011, le recourant a encore précisé ses griefs ; il expose que nulle part dans son projet il n'est prévu de procéder à une translocation des animaux par une reproduction, cette possibilité n'étant pas mentionnée dans le projet puisque ce dernier spécifie à l'opposé que chaque animal sera placé individuellement dans une cage, ce qui exclut toute possibilité de reproduction ; il rappelle en outre qu'il s'agit d'animaux non aquatiques et que la bactérie a déjà été trouvée dans la peau des amphibiens dans la même localité prévue pour l'expérience. Dans sa duplique du 25 octobre 2011, l'autorité inférieure ne se détermine pas plus avant sur les critiques du recourant. En revanche, elle rappelle le déroulement de la procédure de traitement des requêtes ; elle retient - sans toutefois le motiver - que le rapporteur a correctement lu le projet ; elle estime que le recourant ne saurait prendre des courts passages, voire des extraits de réflexion du rapporteur, les sortir de leur contexte et les interpréter, voire argumenter à son avantage les réflexions du rapporteur sans risquer de les déformer. Une telle remarque générale ne saurait toutefois exonérer l'autorité inférieure de fournir des explications quant au rejet de la requête du recourant, d'autant plus qu'elle n'a même pas exposé en quoi le recourant aurait mal interprété les extraits mis à sa disposition. Force est ainsi de constater l'absence de toute détermination - aussi brève soit-elle - de l'autorité inférieure sur les observations formulées par le recourant. Au demeurant, elle n'a pas non plus avancé que son appréciation reposerait sur le fait que le projet lui-même s'avérerait insuffisamment détaillé.

4.3 Sur le vu de ce qui précède, il y a lieu d'admettre que l'autorité inférieure n'a pas satisfait à son obligation - d'autant plus grande qu'elle disposait d'un large pouvoir d'appréciation (cf. supra consid. 4.1) - de motiver la décision, ce qui est constitutif d'une violation du droit d'être entendu garanti au recourant.

5.
Le droit d'être entendu représente une garantie constitutionnelle de caractère formel, dont la violation entraîne en principe l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès du recours sur le fond (cf. ATF 126 V 130 consid. 2b, ATF 125 I 113 consid. 3). Une telle violation peut cependant, à titre exceptionnel (cf. ATF 126 I 68 consid. 2), être considérée comme guérie lorsque la cognition de l'instance de recours ne se trouve pas limitée par rapport à celle de l'instance inférieure et qu'il n'en résulte aucun préjudice pour le recourant (cf. ATF 126 V 130 consid. 2b, ATF 124 II 132 consid. 2d ; arrêt du Tribunal administratif fédéral B-1621/2008 du 3 juillet 2008 consid. 6). En l'espèce, la violation du droit d'être entendu du recourant précédemment établie ne peut être guérie dans le cadre de la présente procédure de recours ; en effet, si tel était le cas, le recourant subirait un préjudice dès lors qu'il se verrait privé d'une instance de recours. Pour ce motif déjà, il se justifie d'annuler la décision attaquée et de renvoyer l'affaire au FNS afin qu'il rende une nouvelle décision conforme à la procédure administrative. Point n'est dès lors besoin, dans ces circonstances, de se prononcer sur les griefs du recourant touchant à ses publications ou la qualité de son parcours et ses compétences.

6.

6.1 En règle générale, les frais de procédure sont mis à la charge de la partie qui succombe (art. 63 al. 1 PA). Aucun frais de procédure n'est cependant mis à la charge des autorités inférieures, ni des autorités fédérales recourantes et déboutées (art. 63 al. 2 PA).

Le recourant ayant obtenu gain de cause, il y a lieu de lui restituer l'avance de frais de Fr. 800.- qu'il a versée le 6 juillet 2011.

6.2 Par ailleurs, l'autorité peut allouer, d'office ou sur requête, à la partie ayant entièrement ou partiellement gain de cause, une indemnité pour les frais indispensables et relativement élevés qui lui ont été occasionnés (art. 64 al. 1 PA et 7 al. 1 et 2 du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral [FITAF, RS 173.320.2]).

La procédure n'ayant pas occasionné de frais relativement élevés au recourant qui n'est pas représenté par un avocat, il n'y a pas lieu de lui allouer de dépens (art. 7 al. 4
SR 173.320.2 Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF)
FITAF Art. 7 Principe
1    La partie qui obtient gain de cause a droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige.
2    Lorsqu'une partie n'obtient que partiellement gain de cause, les dépens auxquels elle peut prétendre sont réduits en proportion.
3    Les autorités fédérales et, en règle générale, les autres autorités parties n'ont pas droit aux dépens.
4    Si les frais sont relativement peu élevés, le tribunal peut renoncer à allouer des dépens.
5    L'art. 6a s'applique par analogie.7
FITAF en relation avec l'art. 64 al. 1 PA).

7.
Le présent arrêt est définitif (art. 83 let. k
SR 173.320.2 Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF)
FITAF Art. 7 Principe
1    La partie qui obtient gain de cause a droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige.
2    Lorsqu'une partie n'obtient que partiellement gain de cause, les dépens auxquels elle peut prétendre sont réduits en proportion.
3    Les autorités fédérales et, en règle générale, les autres autorités parties n'ont pas droit aux dépens.
4    Si les frais sont relativement peu élevés, le tribunal peut renoncer à allouer des dépens.
5    L'art. 6a s'applique par analogie.7
de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110]).

Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :

1.
Le recours est admis. Partant, la décision du FNS du 31 mai 2011 est annulée et l'affaire renvoyée à l'autorité inférieure pour qu'elle rende une nouvelle décision dans le sens des considérants.

2.
Il n'est pas perçu de frais de procédure. L'avance sur les frais de procédure présumés de Fr. 800.- est restituée au recourant.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est adressé :

- au recourant (recommandé ; annexes : formulaire "adresse de paiement" et pièces en retour) ;

- à l'autorité inférieure (recommandé ; annexe : dossier en retour).

Le président du collège : La greffière :

Jean-Luc Baechler Fabienne Masson

Expédition : 4 septembre 2012
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : B-3662/2011
Date : 30 août 2012
Publié : 11 septembre 2012
Source : Tribunal administratif fédéral
Statut : Non publié
Domaine : science et recherche
Objet : candidature à un subside Ambizione


Répertoire des lois
CC: 80
Cst: 29
FITAF: 7
SR 173.320.2 Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF)
FITAF Art. 7 Principe
1    La partie qui obtient gain de cause a droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige.
2    Lorsqu'une partie n'obtient que partiellement gain de cause, les dépens auxquels elle peut prétendre sont réduits en proportion.
3    Les autorités fédérales et, en règle générale, les autres autorités parties n'ont pas droit aux dépens.
4    Si les frais sont relativement peu élevés, le tribunal peut renoncer à allouer des dépens.
5    L'art. 6a s'applique par analogie.7
LERI: 7  13  21  46
LTAF: 31  32  33
LTF: 83
PA: 5  10  12  13  26  35  38  44  48  49  50  52  63  64
Répertoire ATF
116-V-28 • 124-II-132 • 125-I-113 • 126-I-68 • 126-V-130
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
autorité inférieure • tribunal administratif fédéral • pouvoir d'appréciation • vue • champignon • procédure administrative • droit d'être entendu • examinateur • autorité de recours • quant • conseil national • violation du droit • conseil fédéral • d'office • incombance • constatation des faits • code civil suisse • avis • devoir de collaborer • fonds national • moyen de preuve • duplique • mention • maxime inquisitoire • motivation sommaire • décision • condition de recevabilité • constitution fédérale • opportunité • directive • calcul • révision • candidat • autorité judiciaire • avance de frais • partie à la procédure • organisation de l'état et administration • loi sur le tribunal administratif fédéral • membre d'une communauté religieuse • loi fédérale sur la procédure administrative • loi sur le tribunal fédéral • directeur • matériau • droit fondamental • la poste • modification • autorité administrative • copie • forme et contenu • berne • programme du conseil fédéral • science et recherche • bâle-ville • lieu • déclaration • périodique • mise au concours public • suisse • confédération • répartition des tâches • communication • titre • ordonnance administrative • condition • prestation d'assistance • formation continue • salaire • tribunal administratif • mois • notion juridique indéterminée • intérêt digne de protection • chances de succès • glacier • doctrine • montre • case postale • décision finale • délai de recours • déroulement de la procédure • droit fiscal • portrait • vice de procédure • commission de recours en matière d'infrastructures et d'environnement • tribunal fédéral • lieu de travail • proposition de candidat • autorité fédérale • clause d'exception • qualité pour recourir
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BVGE
2007/37 • 2007/6
BVGer
B-1621/2008 • B-2023/2011 • B-3297/2009 • B-3538/2010 • B-3662/2011 • B-6801/2007 • C-322/2006
VPB
69.92