S. 97 / Nr. 20 Organisation der Bundesrechtspflege (f)

BGE 72 I 97

20. Extrait do l'arrêt du 15 avril 1946 dans la cause Société des cafetiers et
restaurateurs du canton de Genève contre Conseil d'Etat du canton de Genève.

Regeste:
Qualité pour agir par la voie du recoure de droit public (art. 4 et 32quater
CF, art. 88 OJ).
Les aubergistes et leurs associations professionnelles n'ont pas qualité pour
attaquer par la voie du recours de droit public, en alléguant l'absence de
besoin, la décision par laquelle l'autorité cantonale accorde la patente pour
l'ouverture d'une nouvelle auberge (changement de jurisprudence).
Legitimation zur staatsrechtlichen Beschwerde (Art. 4 und 32quater BV, 88 OG).
Wirte und Wirteverbände sind nicht legitimiert, die Erteilung des Patentes für
einen neuen Wirtschaftsbetrieb mit der staatsrechtlichen Beschwerde wegen
willkürlicher Annahme eines Bedürfnisses anzufechten (Änderung der
Rechtsprechung).
Veste per interporre ricorso di diritto pubblico (art. 4 e 32quater CF art. 88
OGF).
Gli albergatori e le loro associazioni professionali non hanno veste per
impugnare mediante ricorso di diritto pubblico, allegando l'assenza d'un
bisogno, la decisione con la quale l'autorità cantonale accorda la patente per
l'apertura d'un nnovo ristorante (cambiamento di giurisprudenza).

Résumé des faits:
Le 4 janvier 1946, ]e Conseil d'Etat du canton de Genève a autorisé la Société
coopérative suisse de consommation à ouvrir un restaurant populaire et à
servir des boissons alcooliques «aux personnes qui prendront le déjeuner ou le
dîner, mais cela exclusivement aux heures de ces deux repas».
Contre cette décision, la Société des cafetiers et restaurateurs du canton de
Genève a formé un recours de droit public. Elle allègue que le Conseil d'Etat
aurait appliqué arbitrairement la loi genevoise, selon laquelle l'ouverture de
nouveaux débits de boissons alcooliques ne peut être

Seite: 98
autorisée que si «le nombre des établissements du même genre déjà existant
dans la localité, la commune ou le quartier peut être augmenté sans
inconvénient».
Considérant en droit:
1. ­ D'après le texte français de l'art. 88 OJ, seul celui qui est «lésé» par
un arrêté ou une décision a qualité pour agir par la voie du recours de droit
public. Il faut même, selon les termes exprès du texte allemand, que l'arrêté
ou la décision attaqués lèsent le recourant dans ses droits
(«Rechtsverletzungen»), c'est-à-dire qu'ils l'atteignent dans ses intérêts
personnels juridiquement protégés. Tel était du reste le cas déjà sous
l'empire de l'art. 178 ch. 2 de l'ancienne loi d'organisation judiciaire, dont
les termes se retrouvent dans l'art. 88 actuel avec une simple modification de
forme (Message du 9 février 1943 à l'appui d'une nouvelle loi d'organisation
judiciaire, FF 1943 I p. 146; RO 27 I 492; 46 I 477; arrêt Wirteverein des
Kantons Schwyz et consorts, du 4 juin 1945, non publié). Il ne suffit donc pas
que la décision attaquée lèse des intérêts auxquels le droit n'accorde aucune
sanction (intérêts purement économiques ou moraux, par exemple). En outre,
celui qui n'est pas atteint dans ses intérêts personnels et n'invoque que
l'intérêt général n'a pas davantage qualité pour agir (RO 56 I 159, consid. 4;
59 I 77; 69 I 19, consid. 2 notamment).
D'après la jurisprudence du Tribunal fédéral, les personnes dont la profession
ne peut être exercée sans autorisation des pouvoirs publies étaient jusqu'ici
admises à attaquer par la voie du recours de droit public l'autorisation
accordée à des tiers (RO 33 I 16, consid. 3; 34 I 473).
Dans un arrêt du 15 novembre 1940, le Tribunal fédéral a relevé cependant une
certaine contradiction entre les principes rappelés plus haut et cette
jurisprudence (RO 66 I 263). En effet, celle-ci ne peut pas être maintenue, en
tout cas dans la mesure où elle touche à l'application des règles qui
subordonnent l'ouverture de nouvelles auberges à

Seite: 99
l'existence d'un besoin: (:J'est uniquement afin de combattre l'alcoolisme que
la Constitution fédérale (art. 31 lit. c et 32 quat.) autorise les cantons à
faire état du besoin- pour limiter le nombre des auberges. Les règles de la
législation cantonale prévoyant une telle limitation ne sauraient servir à
d'autres fins. En particulier, elles ne doivent pas servir à limiter la libre
concurrence entre les tenanciers de cafés ou d'auberges (RO 59 I 112; 61 I 162
ss.). Il ne peut donc s'agir là que de règles édictées exclusivement dans
l'intérêt public. Or le recours de droit public n'est pas ouvert au citoyen
pour sauvegarder cet intérêt.
L'association que les cafetiers et restaurateurs du canton de Genève ont
fondée afin de défendre leurs intérêts professionnels a bien, en principe,
qualité pour agir à cet effet par la voie du recours de droit public (RO 28 I
240
; 33 I 16, consid. 3; 54 I 146). Mais ce n'est que dans les limites tracées
par la loi, c'est-à-dire (art. 88 OJ) à condition que ses membres soient
«lésés» au sens de cette disposition légale. Or tel n'est précisément pas le
cas en l'espèce, puisque seul l'intérêt général est en jeu. Le présent recours
est donc irrecevable dans la mesure où il est fondé sur l'art. 5 ch. 3 de la
loi genevoise du 12 mars 1892 relative aux auberges, débits de boissons et
autres établissements analogues.
2 et 3 ­ .....