Bundesverwaltungsgericht
Tribunal administratif fédéral
Tribunale amministrativo federale
Tribunal administrativ federal


Cour VI

F-4338/2018

Arrêt du 14 janvier 2020

Yannick Antoniazza-Hafner (président du collège),

Composition Fulvio Haefeli, Gregor Chatton, juges,

Claudine Schenk, greffière.

A._______,

représenté par Me Liza Sant'Ana Lima,

Parties avocate en l'Etude Neves Sant'Ana Avocats,

69, rue de Lausanne, 1202 Genève,

recourant,

contre

Secrétariat d'Etat aux migrations SEM,

Quellenweg 6, 3003 Berne,

autorité inférieure,

Objet Interdiction d'entrée.

Faits :

A.

Par décision du 24 avril 2017, le Secrétariat d'Etat aux migrations (ci-après: SEM ou autorité inférieure), a prononcé à l'endroit d'A._______ (ressortissant brésilien, né en 1989) une interdiction d'entrée en Suisse et au Liechtenstein d'une durée d'un peu moins de trois ans (valable jusqu'au 23 mars 2020) pour avoir séjourné illégalement sur le territoire helvétique pendant plusieurs mois et y avoir exercé une activité lucrative sans autorisation. Par la même décision, il a ordonné la publication de cette mesure d'éloignement dans le Système d'information Schengen (SIS) et a retiré l'effet suspensif à un éventuel recours.

Cette décision, qui n'avait pas pu être notifiée à l'intéressé lors de son prononcé faute d'adresse valable, a été portée à sa connaissance, pour la première fois, par courrier du SEM du 19 juillet 2018.

B.

Le 26 juillet 2018, le prénommé (agissant par l'entremise de sa mandataire) a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif fédéral (ci-après: TAF ou Tribunal de céans), en concluant à l'annulation pure et simple de cette décision, autrement dit à la levée immédiate de cette mesure d'éloignement. Il a également requis la restitution de l'effet suspensif.

Il a expliqué que, depuis le mois d'août 2017, il avait fait ménage commun en France avec une ressortissante française, qu'ils s'étaient mariés dans ce pays le 3 février 2018, qu'il était ensuite retourné au Brésil en compagnie de son épouse pour y passer des vacances et y déposer une demande de visa de long séjour auprès du Consulat général de France, mais que les autorités françaises avaient jusque-là refusé d'autoriser son retour en France et de régulariser ses conditions de séjour sous prétexte que son intention de mener une vie commune avec sa conjointe n'avait pas été démontrée à satisfaction. Il a fait valoir que, même si l'interdiction d'entrée prononcée à son endroit par les autorités helvétiques n'avait pas été invoquée par les autorités françaises comme motif de refus d'autorisation d'entrée et de séjour, cette mesure d'éloignement et, en particulier, l'inscription de celle-ci dans le SIS y avaient "certainement contribué".

C.

Invitée à présenter sa réponse, l'autorité inférieure a, par acte du 22 août 2018, indiqué qu'elle avait, en reconsidération partielle de sa décision, supprimé avec effet immédiat le signalement de cette interdiction d'entrée dans le SIS en raison du mariage contracté par le recourant postérieurement au prononcé de cette mesure d'éloignement, tout en maintenant l'interdiction d'entrée querellée sur le plan national en raison des infractions que celui-ci avait commises en Suisse. Elle a également complété la motivation qu'elle avait développée dans sa décision.

D.

Par décision incidente du 20 septembre 2018 (qui a été expédiée sous pli recommandé et notifiée le 24 septembre suivant), le Tribunal de céans a transmis la réponse de l'autorité inférieure au recourant et invité celui-ci à présenter sa réplique. Il a également rejeté la demande de restitution de l'effet suspensif et invité l'intéressé à verser une avance de frais.

E.

Le recourant a versé l'avance de frais requise dans le délai imparti, mais n'a pas répliqué.

F.

Les autres faits et moyens de la cause seront évoqués, si nécessaire, dans les considérants qui suivent.

Droit :

1.

1.1 Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 LTAF (RS 173.32), le Tribunal de céans, en vertu de l'art. 31 LTAF, connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 PA (RS 172.021) prises par les autorités mentionnées à l'art. 33 LTAF. Les décisions d'interdiction d'entrée rendues par le SEM sont donc susceptibles de recours au Tribunal de céans, qui statue de manière définitive lorsque, comme en l'espèce, le recourant ne peut se prévaloir de l'ALCP (cf. art. 1 al. 2 LTAF, en relation avec l'art. 33 let. d LTAF et l'art. 83 let. c ch. 1 LTF [RS 173.110]; cf. consid. 6.5.2 infra, ainsi que l'arrêt du Tribunal fédéral [TF] 2C_135/2017 du 21 février 2017 consid. 5 a contrario).

1.2 A moins que la LTAF n'en dispose autrement, la procédure devant le Tribunal de céans est régie par la PA (cf. art. 37 LTAF).

1.3 Le recourant a qualité pour recourir (cf. art. 48 al. 1 PA). Présenté dans la forme et dans les délais prescrits par la loi (sur ce dernier point, cf. let. A supra), son recours est recevable (cf. art. 50 et art. 52 PA).

1.4 Compte tenu du fait que l'autorité inférieure a supprimé le signalement de l'interdiction d'entrée querellée dans le SIS au stade de la réponse, en raison du mariage contracté dans l'intervalle par le recourant avec une ressortissante française, force est de constater que le recours, en tant qu'il est dirigé contre ce signalement, est devenu sans objet.

2.

La partie recourante peut invoquer devant le Tribunal de céans la violation du droit fédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation, la constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents et, à moins qu'une autorité cantonale n'ait statué comme autorité de recours, l'inopportunité de la décision entreprise (cf. art. 49 PA). Le Tribunal de céans examine les décisions qui lui sont soumises avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit. Conformément à la maxime inquisitoire, il constate les faits d'office (cf. art. 12 PA); appliquant d'office le droit fédéral, il n'est pas lié par les motifs invoqués à l'appui du recours (cf. art. 62 al. 4 PA), ni par l'argumentation développée dans la décision entreprise. Il peut donc s'écarter aussi bien des arguments des parties que des considérants juridiques de la décision querellée, fussent-ils incontestés (cf. ATF 140 III 86 consid. 2; arrêt du TF 1C_454/2017 du 16 mai 2018 consid. 4.1; ATAF 2014/1 consid. 2, et la jurisprudence citée).

3.

3.1 Dans le cas particulier, la décision querellée a été rendue le 24 avril 2017. Or, le 1er janvier 2019 sont entrées en vigueur les dernières dispositions de la modification partielle du 16 décembre 2016 de la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr, RO 2007 5437), laquelle s'intitule nouvellement loi fédérale sur les étrangers et l'intégration (LEI, RS 142.20, RO 2018 3171). Quant à l'ordonnance relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité lucrative du 24 octobre 2007 (OASA, RO 2007 5497), elle a, elle aussi, fait l'objet d'une modification partielle en date du 15 août 2018, qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2019 (OASA, RS 142.201, RO 2018 3173).

3.2 En l'absence de dispositions transitoires réglementant ce changement législatif et compte tenu du fait que les dispositions applicables à la présente cause n'ont pas subi de modifications susceptibles d'influer sur l'issue de celle-ci, le Tribunal de céans doit, à défaut d'intérêt public prépondérant à même de commander une application immédiate des nouvelles dispositions, appliquer le droit en vigueur au jour où l'autorité de première instance a statué (cf. ATF 141 II 393 consid. 2.4, 139 II 470 consid. 4.2, et la jurisprudence citée). Dans le présent arrêt, il appliquera donc la loi sur les étrangers dans sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2018, en utilisant l'ancienne dénomination (LEtr), et citera l'OASA selon sa teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2018 (dans le même sens, cf. notamment l'arrêt du TAF F-3300/2017 du 14 mai 2019 consid. 2.2, et la jurisprudence citée).

4.

4.1 Selon l'art. 67 al. 2 let. a LEtr, le SEM peut interdire l'entrée en Suisse à un étranger lorsque ce dernier a attenté à la sécurité et à l'ordre publics en Suisse ou à l'étranger ou les a mis en danger. En vertu de l'alinéa 3 de cette disposition, l'interdiction d'entrée est prononcée pour une durée maximale de cinq ans (phrase 1), mais elle peut être prononcée pour une plus longue durée lorsque la personne concernée constitue une menace grave pour la sécurité et l'ordre publics (phrase 2).

En vertu de l'art. 80 al. 1 let. a OASA, il y a notamment atteinte à la sécurité et à l'ordre publics en cas de violation de prescriptions légales ou de décisions d'autorités. Tel est le cas, en particulier, lorsqu'il y a eu violation importante ou répétée de prescriptions légales (y compris de prescriptions du droit en matière d'étrangers) ou de décisions d'autorités (cf. Message du Conseil fédéral concernant la loi sur les étrangers [ci-après: Message LEtr] du 8 mars 2002, FF 2002 3469, p. 3564 ad art. 61 du projet, et p. 3568 ad art. 66 du projet).

4.2 L'interdiction d'entrée au sens du droit des étrangers (art. 67 LEtr) ne constitue pas une peine sanctionnant un comportement déterminé. Il s'agit d'une mesure (administrative) de contrôle visant à prévenir une atteinte à la sécurité et à l'ordre publics, en empêchant - durant un certain laps de temps - un étranger dont le séjour en Suisse (ou dans l'Espace Schengen) est indésirable d'y pénétrer ou d'y retourner à l'insu des autorités et d'y commettre à nouveau des infractions (cf. ATAF 2017 VII/2 consid. 4.4 et 4.5, et 2008/24 consid. 4.2, et les références citées).

Le prononcé d'une interdiction d'entrée implique par conséquent que l'autorité procède à un pronostic en se fondant sur l'ensemble des circonstances du cas concret et, en particulier, sur le comportement que l'administré a adopté par le passé. La commission antérieure d'infractions constitue en effet un indice de poids permettant de penser qu'une nouvelle atteinte à la sécurité et à l'ordre publics sera commise à l'avenir (cf. ibidem).

4.3 C'est ici le lieu de rappeler que, pour interdire l'entrée en Suisse pour une durée maximale de cinq ans (en application de l'art. 67 al. 2 let. a et al. 3 1ère phrase LEtr) à un ressortissant d'un pays tiers (qui est soumis au régime ordinaire de droit interne), il suffit que celui-ci ait porté atteinte à l'ordre et la sécurité publics ou les ait mis en danger, alors que le ressortissant d'un Etat partie à l'ALCP (qui est soumis à un régime plus favorable) doit représenter une menace d'une certaine gravité pour l'ordre et la sécurité publics pour se voir interdire d'entrée en Suisse pour une durée maximale de cinq ans (cf. ATF 139 II 121 consid. 5.4 et 6.1).

5.

5.1 En l'espèce, il appert du dossier que le recourant a été intercepté en Suisse, le 31 janvier 2017, lors d'un contrôle de la circulation. Lors de son audition du même jour par la police cantonale vaudoise, il a expliqué être entré en Suisse le 22 juillet 2016, sans autorisation idoine, en vue d'y travailler et de se constituer de meilleures conditions d'existence, et avoir depuis lors vécu et gagné sa vie sur le territoire helvétique en effectuant de "petits boulots de gauche à droite" (travaux de nettoyage, de montage de meubles et de déménagement) pour un salaire compris entre CHF 1'500 et 2'000.- par mois. A raison de ces faits, son renvoi de Suisse a été prononcé le 8 mars 2017, et le Ministère public de l'arrondissement de La Côte l'a condamné, par ordonnance pénale du 22 mars 2017 (entrée en force), à une peine pécuniaire ferme de 90 jours-amende, en fixant le jour-amende à CHF 30.- (sur le contenu de cette ordonnance pénale, cf. consid. 6.4 infra).

Certes, selon la législation en vigueur, les ressortissants brésiliens (tel le recourant) ne sont pas soumis à l'obligation du visa pour pouvoir pénétrer sur le territoire helvétique ou dans l'Espace Schengen en vue d'un séjour (sans activité lucrative) n'excédant pas 90 jours sur toute période de 180 jours (cf. le règlement [CE] no 539/2001 du Conseil du 15 mars 2001 fixant la liste des pays tiers dont les ressortissants sont soumis à l'obligation de visa pour franchir les frontières extérieures des Etats membres et la liste de ceux dont les ressortissants sont exemptés de cette obligation [JO L 81 du 21 mars 2001, p. 1 ss], qui a été remplacé dans l'intervalle par le règlement éponyme [UE] 2018/1806 du Parlement européen et du Conseil du 14 novembre 2018 [JO L 303 du 28 novembre 2018 p. 39 ss], et l'annexe II de ces règlements, en relation avec l'art. 10 al. 1 LEtr; cf. également l'art. 4 al. 3 de l'ordonnance sur l'entrée et l'octroi de visas [OEV] dans sa teneur en vigueur jusqu'au 14 septembre 2018 [RO 2008 5441] et l'art. 8 al. 3 OEV en vigueur depuis le 15 septembre 2018 [RS 142.204, RO 2018 3087], qui renvoient à l'annexe II de ces règlements). Dans la mesure où l'intéressé est entré en Suisse dans l'intention d'y séjourner durablement et d'y exercer une activité lucrative, il lui incombait toutefois de solliciter l'octroi d'une autorisation de séjour (avec activité lucrative) avant sa prise d'emploi (cf. art. 11 al. 1 et art. 12 al. 1 LEtr), voire même avant son entrée en Suisse (cf. art. 10 al. 2 LEtr), raison pour laquelle le Ministère public de l'arrondissement de La Côte a retenu le caractère illégal de son séjour dès son arrivée sur le territoire helvétique, en date du 22 janvier 2016 (cf. consid. 6.4 infra; dans le même sens, cf. ATAF 2017 VII/2 consid. 5.1, ainsi que l'arrêt du TAF F-4822/2016 et F-4823/2016 du 3 avril 2018 consid. 6.5).

5.2 Selon la jurisprudence constante, le seul fait d'entrer, respectivement de séjourner et/ou de travailler ponctuellement en Suisse sans autorisation idoine - un comportement qui est réprimé par le droit pénal administratif et est passible d'une peine privative de liberté d'un an au plus (cf. art. 115 al. 1 let. a à c LEtr) - représente une violation grave des prescriptions du droit des étrangers susceptible de justifier le prononcé d'une interdiction d'entrée nationale (cf. ATAF 2017 VII/2 consid. 6.2, et la jurisprudence citée; Message LEtr du 8 mars 2002, p. 3568 ad art. 66 du projet).

5.3 Dans la mesure où le recourant a été condamné pénalement pour avoir séjourné et travaillé en Suisse pendant plusieurs mois, autrement dit pour avoir violé de manière importante des prescriptions légales (du droit des étrangers) ayant été édictées dans le but de maintenir la sécurité et l'ordre publics, il réalise manifestement les conditions d'application de l'art. 67 al. 2 let. a LEtr (en relation avec l'art. 80 al. 1 OASA). L'interdiction d'entrée querellée est donc parfaitement fondée dans son principe.

6.

6.1 Il reste encore à déterminer si l'interdiction d'entrée prononcée à l'endroit du recourant (valable du 24 avril 2017 au 23 mars 2020), d'une durée de deux ans et onze mois, satisfait aux principes de proportionnalité et d'égalité de traitement (cf. ATAF 2016/33 consid. 9.1 et 9.2; Dubey/Zufferey, Droit administratif général, Bâle 2014, p. 215 ss; Thierry Tanquerel, Manuel de droit administratif, Genève/Zurich/ Bâle 2011, p. 187 ss).

6.2 Toute mesure d'éloignement doit notamment respecter le principe de la proportionnalité (cf. art. 96 LEtr, en relation avec les art. 5 al. 2 et 36 al. 3 Cst. [RS 101]), principe constitutionnel qui implique une pesée des intérêts privés et publics en présence (cf. ATF 142 I 76 consid. 3.5.1, 140 I 168 consid. 4.2.1; ATAF 2017 VII/2 consid. 4.5, 2016/33 consid. 9.1 à 9.3, 2014/20 consid. 8.1 et 8.3.1; arrêt du TAF F-3300/2017 précité consid. 7.1 et 7.2, et la jurisprudence citée).

Dans ce contexte, on ne saurait perdre de vue que l'intérêt public à lutter contre le travail au noir revêt une importance non négligeable, car non seulement le travail au noir représente une menace pour la protection des travailleurs (en termes de conditions de travail et de dumping salarial), mais il engendre également des pertes de recettes pour l'administration fiscale et les assurances sociales (en ce sens que les recettes fiscales et cotisations sociales doivent être financées par une partie toujours plus réduite de la population et que, par conséquent, ceux qui respectent les règles fiscales et sociales en vigueur paient pour ceux qui fraudent), ainsi que des distorsions de la concurrence, sans compter qu'il constitue (en raison du non-respect des lois qu'il implique) un facteur de désorganisation susceptible d'affecter la crédibilité de l'Etat et d'alimenter la méfiance générale des administrés à l'égard de leurs institutions, ainsi que le Conseil fédéral l'a souligné dans son Message du 16 janvier 2002 concernant la loi fédérale sur le travail au noir (LTN, RS 822.41) entrée en vigueur le 1er janvier 2008 (cf. ledit Message, FF 2002 3371, spéc. p. 3372 et 3375; ATF 141 II 57 consid. 5.3 et 7, 137 IV 153 consid. 1.4 et 1.7; cf. en particulier l'arrêt du TF 2P.77/2005 du 26 août 2005 consid. 6.2; ATAF 2017 VII/2 consid. 6.2).

6.3 Ainsi que le Tribunal de céans a eu l'occasion de le préciser, le seul fait qu'une personne ait séjourné illégalement en Suisse peut justifier le prononcé d'une mesure d'éloignement d'une durée de trois ans en présence de circonstances aggravantes, telles un séjour illicite de durée prolongée ou allant de pair avec une activité lucrative sans autorisation, ou en cas de récidive (cf. ATAF 2017 VII/2 consid. 6.2, ainsi que l'arrêt du TAF F-4822/ 2016 et F-4823/2016 précité consid. 6.3; cf. également l'arrêt du TAF F-7153/2018 du 7 octobre 2019 consid. 5.3.4, où le Tribunal de céans a considéré qu'une interdiction d'entrée d'une durée de quatre ans pouvait exceptionnellement se justifier en cas de séjour illégal de durée particulièrement prolongée allant de pair avec une activité lucrative sans autorisation).

6.4 Dans le cas particulier, il appert de l'ordonnance pénale du 22 mars 2017 (qui se fonde sur les déclarations faites par le recourant lors de son audition du 31 janvier 2017 par la police cantonale vaudoise) que les infractions dont l'intéressé s'est rendu coupable (séjour et travail sans autorisation) ne se résument pas à un acte isolé, mais ont été commises pendant plusieurs mois (entre le 22 juillet 2016 et le 31 janvier 2017), un comportement - à lui seul - susceptible de justifier le prononcé d'une mesure d'éloignement d'une durée de trois ans, selon la jurisprudence.

Il ressort également de cette ordonnance pénale que le Ministère public de l'arrondissement de La Côte a refusé de mettre le recourant au bénéfice du sursis au regard de ses antécédents judiciaires, estimant qu'il ne pouvait être émis un pronostic favorable quant à son comportement futur. A cet égard, il s'est référé à une ordonnance pénale du Ministère public du canton de Genève du 19 septembre 2012, par laquelle celui-ci avait infligé à l'intéressé une peine pécuniaire de 100 jours-amende avec sursis (pendant trois ans) et une amende de CHF 500.- à titre de sanction immédiate pour avoir séjourné et travaillé illégalement en Suisse pendant plus d'un an et demi (entre le 30 juin 2010 et le 27 janvier 2012) et pour avoir, le 27 janvier 2012 (date de son interpellation), circulé au volant d'un véhicule automobile sans permis de conduire et en état d'ébriété (avec un taux d'alcoolémie qualifié) et violé ses devoirs en cas d'accident, après avoir heurté le portail d'un garage souterrain et l'avoir endommagé.

En retournant en Suisse le 22 juillet 2016 dans le but d'y travailler une nouvelle fois au noir, le recourant a donc clairement montré qu'il ne tirait aucun enseignement de ses condamnations pénales antérieures et n'avait pas la volonté de se conformer à l'ordre juridique suisse.

Au regard de la gravité des infractions pour lesquelles le recourant a été condamné pénalement en date du 22 mars 2017 (séjour illégal de durée prolongée, allant de pair avec une activité lucrative sans autorisation) et de la persistance de celui-ci à transgresser la législation helvétique, l'intérêt public à l'éloignement de l'intéressé de Suisse doit assurément être qualifié d'important.

6.5 Dans le cadre du droit d'être entendu qui lui avait été conféré préalablement au prononcé de l'interdiction d'entrée querellée, le recourant n'a pas invoqué d'intérêts privés s'opposant au prononcé de cette mesure d'éloignement ou justifiant à tout le moins une réduction de la durée de celle-ci (cf. le procès-verbal de son audition du 31 janvier 2017 par la police cantonale, p. 3). Dans son recours, il a toutefois nouvellement fait valoir, à ce titre, que la décision attaquée l'empêchait de s'installer en France auprès de son épouse (de nationalité française), se prévalant d'une violation de l'art. 8 CEDH (RS 0.101) et de l'ALCP (RS 0.142.112.681).

6.5.1 En l'occurrence, comme le Tribunal de céans l'a observé dans sa décision incidente du 20 septembre 2018 (qui est demeurée incontestée), la mise en oeuvre de la protection de la vie familiale garantie par l'art. 8 par. 1 CEDH suppose que la décision querellée ait pour effet de séparer l'étranger concerné d'un membre de sa famille (au sens étroit) bénéficiant d'un droit de présence assuré en Suisse, ce qui est en particulier le cas si ce dernier jouit de la nationalité suisse, d'une autorisation d'établissement ou d'une autorisation de séjour à la prolongation de laquelle l'ordre juridique confère un droit (cf. ATF 144 I 266 consid. 3.3, 137 I 351 consid. 3.1, 135 I 143 consid. 1.3.1, et la jurisprudence citée). Dans la mesure où le recourant indique que son épouse est établie en France (cf. recours, p. 10 et 11) et n'invoque pas (ni, a fortiori, ne démontre) que celle-ci disposerait d'un droit de présence assuré sur le territoire helvétique, l'interdiction d'entrée en Suisse prononcée à son endroit ne saurait porter atteinte à la norme conventionnelle précitée.

6.5.2 La mesure d'éloignement querellée ne saurait non plus consacrer une violation de l'ALCP, dès lors que le recourant n'est pas un ressortissant d'un pays membre de l'Union européenne (UE), que son épouse (de nationalité française) n'est pas établie en Suisse et que l'autorité inférieure a supprimé le signalement de l'interdiction d'entrée querellée dans le SIS au stade de la réponse (après avoir eu connaissance du mariage contracté dans l'intervalle par les intéressés), de sorte que les effets de cette mesure d'éloignement se limitent désormais à la Suisse et au Liechtenstein et ne s'étendent plus à l'ensemble de l'Espace Schengen.

On relèvera à ce propos que le signalement de l'interdiction d'entrée querellée dans le SIS était parfaitement justifié au moment du prononcé de cette décision, compte tenu du fait que le recourant est un ressortissant d'un pays tiers au sens de l'art. 3 let. d du règlement (CE) n° 1987/2006 du Parlement européen et du Conseil du 20 décembre 2006 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen (SIS) de deuxième génération (règlement SIS II [JO L 381 du 28 décembre 2006, p. 4 à 23], entré en vigueur le 9 avril 2013 [JO L 87/10 du 27 mars 2013]) et qu'il représente potentiellement une menace pour l'ordre et la sécurité publics (cf. art. 24 par. 1 et 2 du règlement SIS II, en relation avec l'art. 16 al. 2 let. b et al. 4 let. g LSIP [RS 361]) au regard de la gravité des infractions pour lesquelles il a été condamné pénalement en Suisse et de sa persistance à transgresser la législation sur les étrangers (dans le même sens, cf. les notamment les arrêts du TAF F-1130/2017 du 18 octobre 2018 consid. 5.5, F-7146/2017 du 30 mai 2018 consid. 8 et F-2670/ 2017 du 20 avril 2018 consid. 8.2), sachant que la Suisse, dans le cadre de l'application des accords d'association à Schengen, se doit de préserver les intérêts de tous les Etats membres (cf. ATAF 2011/48 consid. 6.1).

6.5.3 Il sied de relever, par surabondance, que si l'autorité inférieure a accepté de supprimer le signalement de l'interdiction d'entrée querellée dans le SIS au stade de la réponse, elle n'était pas tenue de le faire (ainsi qu'elle l'a observé dans sa réponse), puisque les autorités françaises n'avaient pas requis de sa part le retrait de ce signalement.

En effet, contrairement à ce que soutient le recourant, le signalement de l'interdiction d'entrée querellée dans le SIS n'empêchait pas les autorités françaises de lui délivrer - pour des motifs sérieux, d'ordre humanitaire, d'intérêt national ou résultant d'obligations internationales (telles celles découlant du droit au regroupement familial consacré par l'art. 8 CEDH et la jurisprudence y relative, par exemple) - un titre de séjour (cf. art. 25 par. 1 CAAS [JO L 239 du 22 septembre 2000], disposition qui demeure applicable en vertu de l'art. 52 par. 1 SIS II a contrario) ou un visa à validité territoriale limitée (cf. art. 25 par. 1 let. a [ii] du code des visas [JO L 243 du 15 septembre 2009 p. 1ss]; sur ces questions, cf. également l'art. 14 par. 1, en relation avec l'art. 6 par. 5 let. c du code frontières Schengen, texte codifié [JO L 77 du 23 mars 2016 p. 1ss]). Or, la législation européenne préconise en principe le maintien du signalement d'une interdiction d'entrée nationale dans le SIS jusqu'à ce qu'un autre Etat membre sollicite de l'Etat signalant le retrait de ce signalement, du fait qu'il a décidé - en dépit des motifs ayant donné lieu à ce signalement - de délivrer un titre de séjour à l'étranger concerné ou de maintenir (respectivement de ne pas révoquer) le titre de séjour qu'il lui a délivré (cf. art. 25 par. 1 et 2 CAAS; dans ce sens, cf. notamment les arrêts du TAF F-4949/2015 du 30 mai 2017 consid. 7.5 et C-6184/2014 du 6 avril 2016 consid. 4.1 in fine et 8.1 in fine, et la jurisprudence citée).

L'impossibilité pour le recourant de s'installer dans le pays de résidence de son épouse (la France) ne résultait donc pas du signalement de l'interdiction d'entrée querellée dans le SIS, mais bien du fait que les autorités françaises avaient refusé, pour des motifs qui leur étaient propres, de lui délivrer un titre de séjour, respectivement un visa de long séjour (cf. notamment l'arrêt du TAF F-5969/2018 du 24 octobre 2019 consid. 6.2).

6.6 Enfin, le Tribunal de céans ne décèle pas, à l'analyse du dossier, de raisons humanitaires ou d'autres motifs importants qui auraient justifié, à la lumière de l'art. 67 al. 5 LEtr, de s'abstenir de prononcer l'interdiction d'entrée querellée ou de la suspendre, provisoirement ou définitivement.

6.7 Dans ces conditions, au regard de l'ensemble des circonstances afférentes à la présente cause, en particulier de la durée prolongée pendant laquelle les infractions à la législation sur les étrangers ont été commises par le recourant et de la persistance de celui-ci à transgresser l'ordre juridique suisse, le Tribunal de céans considère que le prononcé, en date du 24 avril 2017, d'une interdiction d'entrée d'une durée d'un peu moins de trois ans (respectivement de deux ans et onze mois) à son endroit était parfaitement justifié et opportun. La mesure d'éloignement querellée n'est ni disproportionnée, ni arbitraire. Sa durée correspond en outre à celles prononcées dans des cas analogues (cf. notamment les arrêts du TAF précités F-1130/2017 consid. 5.4 et F-2670/2017 consid. 7.2).

7.

7.1 Au vu de ce qui précède, le Tribunal de céans est amené à conclure que la décision d'interdiction d'entrée querellée du 24 avril 2017 est conforme au droit (cf. art. 49 PA).

7.2 Partant, le recours ayant été formé contre cette décision, dans la mesure où il n'est pas devenu sans objet (cf. consid. 1.4 supra), doit être rejeté.

7.3 Lorsque la procédure devient sans objet sans que cela soit imputable aux parties, les frais et dépens sont fixés au vu de l'état des faits existant avant la survenance du motif de liquidation (cf. art. 5 et art. 15 FITAF [RS 173.320.2]).

En l'espèce, il s'avère que le recours est partiellement devenu sans objet en raison de la survenance - postérieurement au prononcé de la décision d'interdiction d'entrée querellée du 24 avril 2017 - de circonstances externes à la procédure (en l'occurrence, le mariage contracté le 3 février 2018 par le recourant avec une ressortissante française) et que le signalement dans le SIS opéré au moment du prononcé de cette mesure d'éloignement était parfaitement justifié (cf. consid. 6.5.2 in fine supra). A cela s'ajoute que le motif de liquidation est imputable au recourant, puisque celui-ci a quitté la Suisse après avoir été avisé que le prononcé d'une "interdiction d'entrée valable dans l'ensemble de l'Espace Schengen" pouvait être envisagé (cf. le procès-verbal de son audition du 31 janvier 2017 par la police cantonale, p. 3) sans en informer les autorités helvétiques et sans leur communiquer sa nouvelle adresse (cf. dossier SYMIC, act. 15 à 21, dont il ressort que la décision cantonale de renvoi du 8 mars 2017, qui avait été envoyée à l'adresse indiquée par l'intéressé lors de son audition du 31 janvier 2017, avait été restituée à son expéditeur avec la mention "introuvable à l'adresse indiquée"). Le recourant ne saurait dans ces conditions prétendre à une indemnité à titre de dépens, d'autant moins que la production de pièces attestant de la survenance d'un fait nouveau tel celui-ci invoqué (soit de copies de l'acte de mariage et d'une pièce d'identité de l'épouse) ne saurait, en soi, constituer une démarche rendant "nécessaire", voire "indispensable" la constitution d'un mandataire professionnel et, partant, l'engagement de "frais relativement élevés", seuls susceptibles de justifier l'octroi de dépens (cf. art. 64 al. 1 PA, en relation avec l'art. 7 al. 1 et 4 et l'art. 8 al. 2 FITAF).

Pour les mêmes motifs, une réduction du montant des frais de procédure perçus à titre d'avance par décision incidente du 20 septembre 2018 - soit postérieurement au retrait par l'autorité inférieure du signalement de la décision querellée dans le SIS - ne saurait se justifier. Ces frais doivent donc être mis à la charge du recourant dans leur intégralité (cf. art. 63 al. 1 1ère phrase PA, en relation avec les art. 1 à 3 FITAF).

(dispositif page suivante)

Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :

1.
Le recours, dans la mesure où il n'est pas devenu sans objet, est rejeté.

2.
Les frais de procédure, d'un montant de Fr. 1'000.-, sont mis à la charge du recourant. Ils sont prélevés sur l'avance de frais du même montant versée le 2 octobre 2018 par l'intéressé.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est adressé :

- au recourant, par l'entremise de sa mandataire (Recommandé);

- à l'autorité inférieure, avec dossier SYMIC ... en retour.

Le président du collège : La greffière :

Yannick Antoniazza-Hafner Claudine Schenk

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