96 I 714
108. Extrait de l'arrêt du 7 octobre 1970 dans la cause Baudat et Baumann contre Office de Paix du cercle de Lausanne et Tribunal cantonal du canton de Vaud.
Regeste (de):
- Derogatorische Kraft des Bundesrechts. Erbbescheinigung.
- 1. Voraussetzungen, unter denen die Kantone das Anwendungsgebiet des Bundeszivilrechts durch öffentlich-rechtliche Vorschriften beschränken dürfen (Erw. 3).
- 2. Sicherungs- und Zwangsmassnahmen, durch welche öffentlichrechtliche Ansprüche mit Hilfe von Einrichtungen des Bundeszivilrechts geschützt werden sollen, können nur im Wege der Gesetzgebung eingeführt werden (Erw. 4).
Regeste (fr):
- Force dérogatoire du droit fédéral. Certificat d'héritier.
- 1. Conditions auxquelles les cantons peuvent restreindre le champ d'application du droit civil fédéral par des règles de droit public (consid. 3).
- 2. Voie législative nécessaire pour instaurer, en se servant d'institutions du droit civil fédéral, des mesures de sûreté et de contrainte destinées à garantir des créances de droit public (consid. 4).
Regesto (it):
- Forza derogatoria del diritto federale. Certificato ereditario.
- 1. Presupposti perchè i cantoni possano limitare il campo d'applicazione del diritto civile federale mediante regole di diritto pubblico (consid. 3).
- 2. Via legislativa necessaria per instaurare, servendosi di istituzioni del diritto civile federale, provvedimenti di sicurezza e coercitivi destinati a garantire crediti di diritto pubblico (consid. 4).
Sachverhalt ab Seite 714
BGE 96 I 714 S. 714
A.- Les enfants de dame Emma Pfister, décédée à Lausanne le 28 septembre 1960, ont requis de l'Office de paix du cercle de Lausanne, le 5 février 1965, l'établissement d'un certificat d'hérédité en leur faveur. Le juge de paix leur a demandé à quel usage était destiné ce certificat. Cette demande de renseiments paraît être restée sans réponse. Le 1er mai 1969, les héritiers ont requis à nouveau la délivrance d'un certificat d'héritiers, en précisant cette fois qu'il était destiné à "l'inscription d'un bail à loyer à charge des immeubles de la succession J. Pfister, à Yverdon, dans laquelle était intéressée la défunte"; un extrait a été délivré pour le but indiqué. Par lettre du 23 décembre 1969, les héritiers ont remis à
BGE 96 I 714 S. 715
l'office de paix un livret d'épargne au nom de dame Pfister, en le priant de délivrer un certificat d'héritiers en leur faveur. L'office de paix a alors adressé aux héritiers, pour qu'ils la contresignent, une lettre destinée à la banque et autorisant cet établissement à fournir à l'office de paix l'inventaire et le relevé de toutes les valeurs, comptes et titres de la défunte. Le mandataire des héritiers a répondu que tous les actifs de la succession avaient été indiqués à l'office, qu'une intervention auprès de la banque était inutile et occasionnerait des frais qu'on pouvait éviter; il a rappelé la demande de délivrance du certificat d'héritiers. L'office de paix a fait savoir que le certificat d'héritiers ne pourrait être délivré avant que la lettre destinée à la banque ait été dûment signée et que l'office ait reçu la réponse de cet établissement.
B.- Saisie d'un recours des héritiers, la Chambre des recours du Tribunal cantonal l'a rejeté par arrêt du 8 mai 1970. Elle s'est fondée notamment sur les dispositions des art. 40 ss. de la loi du 27 février 1963 "concernant le droit de mutation sur les transferts immobiliers et l'impôt sur les successions et donations" (LDM), qui prévoient d'une part l'obligation pour les héritiers de fournir au juge de paix tous les renseignements nécessaires pour l'établissement de l'inventaire des biens du défunt (art. 43 LDM), d'autre part l'obligation pour les juges et greffiers de paix de refuser la délivrance de toutes attestations, documents ou pièces permettant le transfert de biens dont ils n'ont pas pu s'assurer qu'ils ont été portés à l'inventaire de la succession, les extraits et expéditions du certificat d'héritiers devant être assimilés, selon la Cour, aux attestations permettant le transfert de biens. Elle a relevé d'autre part que l'exigence de l'office n'était pas contraire aux dispositions sur le secret bancaire, du moment qu'il ne s'agissait pas d'obtenir des renseignements de la banque sans le consentement des intéressés.
C.- Agissant par la voie du recours de droit public, les héritiers de dame Pfister requièrent le Tribunal fédéral d'annuler l'arrêt rendu le 8 mai 1970 par la Chambre des recours et d'inviter la juridiction cantonale compétente à rendre un nouvel arrêt dans les sens des considérants, soit donner instructions au Juge de paix de délivrer aux recourants l'attestation de leur qualité d'héritiers de feue dame Pfister. La Chambre des recours du Tribunal cantonal, comme l'Office de paix du cercle de Lausanne, déclare s'en tenir aux considérants de l'arrêt attaqué.
BGE 96 I 714 S. 716
Erwägungen
Considérant en droit:
3. Selon l'art. 559
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 559 - 1 Après l'expiration du mois qui suit la communication aux intéressés, les héritiers institués dont les droits n'ont pas été expressément contestés par les héritiers légaux ou par les personnes gratifiées dans une disposition plus ancienne peuvent réclamer de l'autorité une attestation de leur qualité d'héritiers; toutes actions en nullité et en pétition d'hérédité demeurent réservées. |
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1 | Après l'expiration du mois qui suit la communication aux intéressés, les héritiers institués dont les droits n'ont pas été expressément contestés par les héritiers légaux ou par les personnes gratifiées dans une disposition plus ancienne peuvent réclamer de l'autorité une attestation de leur qualité d'héritiers; toutes actions en nullité et en pétition d'hérédité demeurent réservées. |
2 | Le cas échéant, l'administrateur de la succession sera chargé en même temps de leur délivrer celle-ci. |
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 559 - 1 Après l'expiration du mois qui suit la communication aux intéressés, les héritiers institués dont les droits n'ont pas été expressément contestés par les héritiers légaux ou par les personnes gratifiées dans une disposition plus ancienne peuvent réclamer de l'autorité une attestation de leur qualité d'héritiers; toutes actions en nullité et en pétition d'hérédité demeurent réservées. |
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1 | Après l'expiration du mois qui suit la communication aux intéressés, les héritiers institués dont les droits n'ont pas été expressément contestés par les héritiers légaux ou par les personnes gratifiées dans une disposition plus ancienne peuvent réclamer de l'autorité une attestation de leur qualité d'héritiers; toutes actions en nullité et en pétition d'hérédité demeurent réservées. |
2 | Le cas échéant, l'administrateur de la succession sera chargé en même temps de leur délivrer celle-ci. |
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 6 - 1 Les lois civiles de la Confédération laissent subsister les compétences des cantons en matière de droit public. |
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1 | Les lois civiles de la Confédération laissent subsister les compétences des cantons en matière de droit public. |
2 | Les cantons peuvent, dans les limites de leur souveraineté, restreindre ou prohiber le commerce de certaines choses ou frapper de nullité les opérations qui s'y rapportent. |
4. En l'espèce, c'est l'intérêt fiscal de l'Etat que visent les prescriptions cantonales sur lesquelles se sont fondées les autorités vaudoises pour refuser de remettre aux recourants un extrait du certificat d'héritier. Or, dans de nombreux domaines du droit public, l'intérêt fiscal - au sens large - de l'Etat ou d'une commune n'est pas considéré comme un intérêt public qui puisse justifier une restriction des droits constitutionnels des citoyens, tels que la liberté d'établissement (cf. RO 53 I 434),
BGE 96 I 714 S. 717
la liberté du commerce et de l'industrie (cf. RO 95 I 150 consid. 4 b) ou la garantie de la propriété (cf. RO 88 I 253 et les arrêts cités). Sans doute peut-on se demander si la même conclusion se justifie lorsqu'il s'agit d'une restriction apportée, non pas à un droit garanti par la constitution, mais à un droit accordé simplement par la législation fédérale. Il faut relever à ce propos que le droit civil fédéral réserve lui-même la faculté, pour les cantons, de créer des hypothèques légales pour garantir des créances dérivant du droit public ou des obligations générales imposées aux propriétaires(art.836
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 836 - 1 Lorsque le droit cantonal accorde au créancier une prétention à l'établissement d'un droit de gage immobilier pour des créances en rapport direct avec l'immeuble grevé, ce droit est constitué par son inscription au registre foncier. |
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1 | Lorsque le droit cantonal accorde au créancier une prétention à l'établissement d'un droit de gage immobilier pour des créances en rapport direct avec l'immeuble grevé, ce droit est constitué par son inscription au registre foncier. |
2 | Si des hypothèques légales dépassant 1000 francs naissent sans inscription au registre foncier en vertu du droit cantonal et qu'elles ne sont pas inscrites au registre foncier dans les quatre mois à compter de l'exigibilité de la créance sur laquelle elles se fondent ou au plus tard dans les deux ans à compter de la naissance de la créance, elles ne peuvent être opposées, après le délai d'inscription, aux tiers qui se sont fondés de bonne foi sur le registre foncier. |
3 | Les réglementations cantonales plus restrictives sont réservées. |
BGE 96 I 714 S. 718
prévue par une disposition légale expresse, la faculté que revendiquent les autorités vaudoises pourrait être considérée comme compatible avec le droit fédéral. On observera simplement que les solutions légales et jurisprudentielles évoquées ci-dessus tendent à garantir des créances fiscales - actuelles ou futures - bien déterminées, tandis qu'en l'espèce il s'agit d'utiliser indirectement une institution du droit fédéral comme moyen d'investigation fiscale, ce qui est bien différent. La cour de céans n'a pas à examiner non plus si la faculté revendiquée par les autorités vaudoises est compatible avec l'institution du secret bancaire, envisagé comme un élément de la protection de la personnalité reconnue par la loi (art. 28
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 28 - 1 Celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité peut agir en justice pour sa protection contre toute personne qui y participe. |
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1 | Celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité peut agir en justice pour sa protection contre toute personne qui y participe. |
2 | Une atteinte est illicite, à moins qu'elle ne soit justifiée par le consentement de la victime, par un intérêt prépondérant privé ou public, ou par la loi. |
Dispositiv
Par ces motifs, le Tribunal fédéral:
Admet le recours dans la mesure où il est recevable; partant, annule la décision attaquée.