BGE 71 III 1
1. Arrêt du 8 Janvier 1945 dans la cause Greffier et Bolliger.
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Regeste:
Insaisissabilité, meuble de prix: Lorsqu'un meuble indispensable en soi est
néanmoins saisi ù cause de sa valeur (objet de pris) l'office procède à une
saisie conditionnelle qui ne deviendra parfaite et ne permettra de procéder à
la réalisation qu'après que le meuble servant au remploi aura été fourni.
Insaisissabilité d'un miroir.
Unpfändbarkeit, kostbares Möbel: Findet sich ein an und für sich unpfändbarer
Gegenstand in einem kostbaren Stücke vor, so ist dieses bedingt zu pfänden.
Nur und erst nach Lieferung eines genügenden Ersatzstückes wird die Pfändung
unbedingt und die Verwertung zulässig.
Unpfändbarkeit eines Spiegels.Art. 92 Ziff. 2 SchKG.
Impignorabilità, mobile di valore: Se un mobile per se stesso indispensabile,
è nondimeno pignorato a causa del suo valore (mobile prezioso), l'ufficio
procede ad un pignoramento condizionato che diventa perfetto e permette di
procedere alla realizzazione solo quando l'oggetto pignorato sia sostituito
con altro meno pregevole.
Impignorabilità di uno specchio.Art. 92 cifra 2 LEF.
A.Le 4 novembre 1944, agissant à la requête de la S. I. Bon Air Monrepos J,
l'Office des poursuites de Genève a frappé d'un droit de rétention, dans
l'appartement pris à bail par Bluette Greffier et Julius Bolliger, notamment,
sous le no 2, une armoire à glace, trois portes, glace ovale
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bois dur, teinte claire, taxée 250 fr. L'office a ajouté au procès-verbal
d'inventaire la remarque suivante: « En cas de réalisation, il sera distrait
sur le produit de vente de l'objet inventorié sous no 2 une somme de 70 fr.
pour permettre aux débiteurs l'achat d'un meuble plus modeste de même usage ».
Les débiteurs formèrent un recours devant l'autorité cantonale en demandant
que l'armoire à glace portée sur le procès-verbal d'inventaire fût déclarée
insaisissable, que la décision de l'Office des poursuites réservant une somme
de 70 fr. sur le produit de la réalisation de cette armoire à glace fût
annulée, subsidiairement que cette somme fût déclarée insuffisante.
Le 1er décembre 1944, l'Autorité de surveillance des offices de poursuite pour
dettes et de faillite rejeta le recours dans la mesure où il tendait à
l'insaisissabilité de l'armoire à glace, l'admit pour le surplus et porta à
100 fr. la somme allouée aux recourants en cas de réalisation de cet objet
pour leur permettre l'achat d'un meuble plus modeste et de même usage.
B.Contre cette décision, les débiteurs ont formé, en temps utile, un recours
devant la Chambre des poursuites et des faillites du Tribunal fédéral. Ils
concluent à ce que l'armoire soit déclarée insaisissable.
Considérant en droit:
1.L'Office des poursuites a estimé que l'armoire dont les recourants
revendiquent l'insaisissabilité leur est effectivement indispensable au sens
de l'art. 92 ch. 2
SR 281.1 Loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP) LP Art. 92 - 1 Sont insaisissables: |
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1 | Sont insaisissables: |
1 | les objets réservés à l'usage personnel du débiteur ou de sa famille, tels que les vêtements, effets personnels, ustensiles de ménage, meubles ou autres objets mobiliers, en tant qu'ils sont indispensables; |
1a | les animaux qui vivent en milieu domestique et ne sont pas gardés dans un but patrimonial ou de gain; |
10 | les droits aux prestations de prévoyance et de libre passage non encore exigibles à l'égard d'une institution de prévoyance professionnelle; |
11 | les biens appartenant à un État étranger ou à une banque centrale étrangère qui sont affectés à des tâches leur incombant comme détenteurs de la puissance publique; |
2 | les objets et livres du culte; |
3 | les outils, appareils, instruments et livres, en tant qu'ils sont nécessaires au débiteur et à sa famille pour l'exercice de leur profession; |
4 | ou bien deux vaches laitières ou génisses, ou bien quatre chèvres ou moutons, au choix du débiteur, ainsi que les petits animaux domestiques, avec les fourrages et la litière pour quatre mois, en tant que ces animaux sont indispensables à l'entretien du débiteur et de sa famille ou au maintien de son entreprise; |
5 | les denrées alimentaires et le combustible nécessaires au débiteur et à sa famille pour les deux mois consécutifs à la saisie, ou l'argent liquide ou les créances indispensables pour les acquérir; |
6 | l'habillement, l'équipement, les armes, le cheval et la solde d'une personne incorporée dans l'armée, l'argent de poche d'une personne astreinte au service civil ainsi que l'habillement, l'équipement et l'indemnité d'une personne astreinte à servir dans la protection civile; |
7 | le droit aux rentes viagères constituées en vertu des art. 516 à 520 CO192; |
8 | les prestations d'assistance et subsides alloués par une caisse ou société de secours en cas de maladie, d'indigence, de décès, etc.; |
9 | les rentes, indemnités en capital et autres prestations allouées à la victime ou à ses proches pour lésions corporelles, atteinte à la santé ou mort d'homme, en tant qu'elles constituent une indemnité à titre de réparation morale, sont destinées à couvrir les frais de soins ou l'acquisition de moyens auxiliaires; |
9a | les rentes au sens de l'art. 20 de la loi fédérale du 20 décembre 1946 sur l'assurance-vieillesse et survivants196, ou de l'art. 50 de la loi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité197, les prestations au sens de l'art. 12 de la loi fédérale du 19 mars 1965 sur les prestations complémentaires à l'assurance-vieillesse, survivants et invalidité198 et les prestations des caisses de compensation pour allocations familiales; |
2 | Ne sont pas non plus saisissables les objets pour lesquels il y a lieu d'admettre d'emblée que le produit de leur réalisation excéderait de si peu le montant des frais que leur saisie ne se justifie pas. Ils sont toutefois mentionnés avec leur valeur estimative dans le procès-verbal de saisie.201 |
3 | Les objets mentionnés à l'al. 1, ch. 1 à 3, sont saisissables lorsqu'ils ont une valeur élevée; ils ne peuvent cependant être enlevés au débiteur que si le créancier met à la disposition de ce dernier, avant leur enlèvement, des objets de remplacement qui ont la même valeur d'usage, ou la somme nécessaire à leur acquisition.202 |
4 | Sont réservées les dispositions spéciales sur l'insaisissabilité figurant dans la loi fédérale du 2 avril 1908 sur le contrat d'assurance203 (art. 79, al. 2, et 80 LCA), la loi fédérale du 9 octobre 1992 sur les droits d'auteur204 (art. 18 LDA) et le code pénal (CP)205 (art. 378, al. 2, CP).206 |
frappés du droit de rétention, c'est qu'à son avis, il s'agissait d'un objet
de prix. Les recourants le contestent. L'Office a taxé l'armoire 250 fr. et
l'autorité cantonale estime qu'il faudrait une somme de 100 fr. pour acheter
un meuble plus simple, mais propre à rendre les mêmes services. Il s'agit là
d'estimations qui ressortissent à l'appréciation souveraine de l'autorité
cantonale et que le Tribunal fédéral
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ne saurait revoir. La différence entre la valeur vénale et le coût du remploi
(150 fr.), somme qui représente l'intérêt de la créancière à la réalisation,
justifie suffisamment la saisie de l'armoire et son remplacement par un meuble
plus simple, même si l'on tient compte des tendances nouvelles et favorables
au débiteur de la jurisprudence relative à l'obligation du remplacement.
2.Lorsqu'un meuble indispensable en soi est néanmoins saisi à cause de sa
valeur (objet de prix), il doit être remplacé par un meuble de même espèce,
mais moins coûteux. Pour ce faire, il ne suffit pas à l'office de remettre au
débiteur une somme d'argent destinée au remploi, car cette somme pourrait se
révéler insuffisante. Le remplacement aura donc lieu en nature. En outre, il
aura lieu au plus tard lors de l'enlèvement du meuble, afin que le débiteur ne
soit pas privé, ne fût-ce que momentanément, d'un objet indispensable. A ces
fins, l'office procédera à une saisie conditionnelle, qui ne deviendra
parfaite et ne permettra de procéder à la réalisation qu'après que le meuble
servant au remploi aura été fourni. Par conséquent, l'office ne saurait se
contenter de réserver au débiteur, lors de la saisie, une certaine somme à
prélever sur le produit de la réalisation.
3. Si le miroir encastré dans l'armoire portée sur l'inventaire était le
seul que possèdent les recourants, la créancière devrait fournir en remploi
non seulement une armoire plus simple, mais encore un miroir, car on doit
admettre que, dans un ménage, un tel objet est indispensable. Toutefois, les
recourants n'ont pas allégué n'avoir pas d'autre miroir; on ne saurait
notamment admettre qu'ils l'aient allégué implicitement en affirmant que
l'armoire leur était indispensable.
Par ces motifs, la Chambre des poursuites et des faillites admet partiellement
le recours...