110 Ia 59
11. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 16 avril 1984 dans la cause Y. contre X. (recours de droit public)
Regeste (de):
- Konkordat über die Schiedsgerichtsbarkeit; Ernennung eines Schiedsrichters, Gültigkeit der Schiedsabrede, Verweisungsklausel.
- 1. Befugnis der zuständigen richterlichen Behörde, die ordnungsgemässe Zusammensetzung des Schiedsgerichts zu prüfen (E. 2).
- 2. Analoge Anwendung der Art. 23 Abs. 2 und 12 des Konkordates, falls die von den Parteien beauftragte Stelle sich weigert, den Schiedsrichter zu ernennen (E. 3).
- 3. Gültigkeit der Schiedsabrede vorliegend bejaht, in Rücksicht auf den Willen der Parteien, sich selbst in einem solchen Fall an das Schiedsgericht zu wenden (E. 4a).
- 4. Verweisung auf die Vergleichs- und Schiedsordnung der IHK; aus dieser Ordnung ergibt sich durch Auslegung die Befugnis des Schiedsgerichts der IHK, nötigenfalls den Schiedsrichter zu ernennen (E. 4b).
Regeste (fr):
- Concordat intercantonal sur l'arbitrage; nomination d'un arbitre, validité de la convention d'arbitrage, clause de renvoi.
- 1. Pouvoir de l'autorité judiciaire compétente d'examiner la régularité de la constitution du tribunal arbitral (consid. 2).
- 2. Application par analogie des art. 23 al. 2
et 12
CIA à l'hypothèse où l'organe de nomination choisi par les parties refuse de désigner l'arbitre (consid. 3).
- 3. Validité de la convention d'arbitrage admise in casu, eu égard à la volonté des parties de compromettre même dans une telle éventualité (consid. 4a).
- 4. Clause de renvoi au règlement de conciliation et d'arbitrage de la CCI; interprétation des dispositions de ce dernier permettant, à titre supplétif, la désignation de l'arbitre par la Cour d'arbitrage (consid. 4b).
Regesto (it):
- Concordato intercantonale sull'arbitrato; nomina di un arbitro, validità del patto d'arbitrato, patto di rinvio.
- 1. Potere dell'autorità giudiziaria competente di esaminare la regolarità della costituzione del tribunale arbitrale (consid. 2).
- 2. Applicazione analogica degli art. 23 cpv. 2 e 12 del concordato nell'ipotesi in cui l'organo scelto dalle parti per la nomina rifiuti di designare l'arbitro (consid. 3).
- 3. Validità del patto d'arbitrato ammessa nella fattispecie, tenuto conto della volontà delle parti di compromettere anche in tale eventualità (consid. 4a).
- 4. Clausola di rinvio al regolamento di conciliazione e di arbitrato della CCI; interpretazione delle disposizioni di tale regolamento che permettono la designazione, a titolo suppletivo, dell'arbitro da parte della Corte d'arbitrato (consid. 4b).
Sachverhalt ab Seite 59
BGE 110 Ia 59 S. 59
A.- Le 22 avril 1975, X. a conclu avec Y. un accord en vertu duquel elle était chargée de concevoir, d'étudier et de soumettre à son cocontractant, dans un certain délai, les plans relatifs à la
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construction, la gestion et l'organisation, du point de vue du personnel, de cinq hôpitaux en Iran, pour le prix de 900'000 £. L'accord contient notamment la clause compromissoire suivante: (traduction)
"Tous différends découlant du présent "accord épistolaire", qui ne pourraient être réglés à l'amiable, seront tranchés définitivement suivant le Règlement de conciliation et d'arbitrage de la Chambre de Commerce internationale par un collège de trois arbitres. Chacune des parties désignera un arbitre; le troisième arbitre sera nommé par le directeur général de l'Organisation mondiale de la santé. Le siège du Tribunal arbitral est fixé à Genève, et la législation iranienne s'appliquera à tous les aspects du présent "accord épistolaire"." Estimant avoir exécuté ses obligations et n'obtenant pas le paiement du prix convenu, X. a mis en oeuvre la procédure arbitrale, en s'adressant, selon acte du 21 décembre 1978, à la Chambre de commerce internationale (CCI). Le directeur général de l'OMS ayant refusé de nommer le troisième arbitre, la Cour d'arbitrage a considéré que la clause arbitrale contenue dans le contrat du 22 avril 1975 était dépourvue d'effets à cet égard et que la lacune résultant de cette situation était comblée par les dispositions de l'art. 2.4 du règlement de la CCI, relatif à la nomination du président du tribunal arbitral. En conséquence, la Cour d'arbitrage a elle-même procédé à la désignation dudit arbitre.
B.- Par sentence du 17 février 1982, approuvée le 19 mai 1982 par la Cour d'arbitrage de la CCI et transmise ensuite aux parties, le tribunal arbitral a admis sa compétence pour trancher le litige et condamné Y. à payer 900'000 £ à X. La partie défenderesse avait contesté la validité de la nomination des arbitres et, partant, leur compétence. Par arrêt du 21 décembre 1983, la Cour de justice du canton de Genève a rejeté un recours en nullité formé contre cette sentence par Y.
C.- Contre cet arrêt, Y. interjette un recours de droit public. Se fondant sur l'art. 84 al. 1
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BGE 110 Ia 59 S. 61
X. propose le rejet du recours.
Erwägungen
Considérant en droit:
2. a) Les parties ayant fixé le siège du tribunal arbitral dans le territoire d'un des cantons concordataires, il est à juste titre incontesté que le contrat d'arbitrage litigieux est soumis au concordat (art. 1er al. 1
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BGE 110 Ia 59 S. 62
3. On doit examiner, d'une part, si le concordat contient des dispositions se rapportant à la caducité du contrat d'arbitrage dans l'hypothèse où l'organe de nomination refuse de désigner l'arbitre et, d'autre part, s'il règle, dans un tel cas de refus, à titre subsidiaire, la nomination de l'arbitre. a) L'art. 23 al. 2
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SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 20 - 1 Le contrat est nul s'il a pour objet une chose impossible, illicite ou contraire aux moeurs. |
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1 | Le contrat est nul s'il a pour objet une chose impossible, illicite ou contraire aux moeurs. |
2 | Si le contrat n'est vicié que dans certaines de ses clauses, ces clauses sont seules frappées de nullité, à moins qu'il n'y ait lieu d'admettre que le contrat n'aurait pas été conclu sans elles. |
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BGE 110 Ia 59 S. 63
effet, il convient d'interpréter la convention des parties - en tant que contrat de procédure (ATF 101 II 170) - selon les principes régissant la nullité partielle des contrats. On doit ainsi rechercher, en se plaçant au moment de la conclusion du contrat, ce dont les parties seraient convenues de bonne foi si elles avaient envisagé cette hypothèse; le juge s'inspire de l'économie du contrat et de son but et il tient compte de l'ensemble des circonstances (cf. ATF 107 II 149, 218, 414). b) L'art. 12
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Si la recourante admet, dans l'éventualité d'une caducité partielle de la clause compromissoire, une telle application analogique de l'art. 12
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BGE 110 Ia 59 S. 64
d'arbitrage de la CCI, permettant la désignation supplétive d'un arbitre par un autre organe. Un tel renvoi implique une convention des parties qui, selon l'art. 12
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Contrairement à ce que soutient la recourante, cette solution n'est pas contraire au caractère impératif de l'art. 12
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4. a) En l'occurrence, les parties ne se sont pas prononcées expressément sur le sort de la clause compromissoire au cas où l'organe choisi par elles ne désignerait pas le troisième arbitre. L'arrêt cantonal ne contient, lui non plus, aucune constatation relative à la volonté interne des parties à ce sujet. Aussi convient-il de déterminer la volonté hypothétique des parties selon les principes susmentionnés. La convention d'arbitrage a été conclue sous la forme d'une clause compromissoire (et non d'un compromis ad hoc) insérée dans un contrat économique important dont il y a tout lieu de penser que des partenaires raisonnables l'eussent conclu même s'ils avaient su que le directeur général de l'OMS ne pourrait pas désigner le troisième arbitre. Dans cette dernière hypothèse, on peut admettre que de tels partenaires eussent aussi inséré dans leur contrat une clause compromissoire. Du reste, dans la clause litigieuse, la volonté de compromettre apparaît au premier plan, tandis que la personne devant fonctionner comme troisième arbitre n'a apparemment pas semblé décisive aux parties; celles-ci n'ont en effet pas elles-mêmes désigné nommément à cette fonction une personne déterminée, mais elles s'en sont remises à la décision d'un tiers, alors qu'elles-mêmes se réservaient de nommer chacune un des deux premiers arbitres. Formellement, la volonté de compromettre et les règles relatives à la nomination des arbitres sont aussi exprimées dans deux phrases séparées, sans que la première soit subordonnée au respect des règles prévues dans la
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seconde. Dans une telle situation, la cour cantonale a admis à juste titre que, selon la volonté hypothétique des parties, l'impossibilité d'obtenir la désignation du troisième arbitre par le directeur général de l'OMS ne devait pas entraîner la caducité de la convention d'arbitrage (cf. JOLIDON, op.cit., n. 21 ad art. 23; WIGET, dans Sträuli-Messmer, par. 243 n. 4, 7, 11; RÜEDE-HADENFELDT, op.cit., p. 116; en droit allemand: sic REAT, Der Schiedsrichtervertrag, thèse Cologne 1983, p. 91; contra: FRENZ, Auswahl und Bestellung von Schiedsrichter durch Dritte, thèse Bonn 1980, pp. 68 ss et références).
b) La clause par laquelle les parties se sont référées au règlement de conciliation et d'arbitrage de la CCI doit être interprétée selon les règles de la bonne foi en affaires. Ainsi, ce renvoi implique l'application du règlement de la CCI selon le sens qui lui est donné au sein de cet organisme par les organes compétents, pour autant que ceux-ci n'agissent pas arbitrairement en prêtant à ses dispositions une signification à laquelle les parties ne pouvaient raisonnablement penser. Le règlement de la Cour d'arbitrage de la CCI prévoit notamment à l'art. 2 al. 3, à propos de la désignation d'un arbitre unique, que "faute d'entente entre les parties dans un délai de trente jours à partir de la notification de la demande d'arbitrage à l'autre partie, l'arbitre sera nommé par la Cour" et à l'art. 2 al. 4, à propos de la désignation de trois arbitres, pour l'arbitre à choisir par chaque partie: "Si l'une des parties s'abstient, la nomination est faite par la Cour" et pour la désignation du troisième arbitre: "Si, à l'expiration du délai fixé par les parties ou imparti par la Cour, les arbitres désignés par les parties n'ont pu se mettre d'accord, le troisième arbitre est nommé par la Cour." Enfin, l'art. 26 dudit règlement prévoit à titre de "règle générale": "Dans tous les cas non visés expressément ci-dessus, la Cour d'arbitrage et l'arbitre procèdent en s'inspirant de ce Règlement et en faisant tous leurs efforts pour que la sentence soit susceptible de sanction légale." Par ailleurs, il appert qu'interprétant par analogie l'art. 2 du règlement, selon l'art. 26, la Cour d'arbitrage procède également à la désignation de l'arbitre, faute d'accord des parties, lorsque l'organe choisi par celles-ci à cette fin ne peut ou ne veut y procéder (sic DERAINS, Journal de droit international 1975, p. 939). Au regard de ces dispositions réglementaires, une telle interprétation ne comporte rien d'insoutenable et d'inattendu.
BGE 110 Ia 59 S. 66
Aussi la désignation du surarbitre par la Cour d'arbitrage de la CCI, à défaut du directeur de l'OMS, était-elle conforme aux normes réglementaires de la CCI auxquelles se référait le contrat d'arbitrage (cf. idem ATF 102 Ia 502 ss dans le cadre d'un examen limité à l'arbitraire). Le recours se révèle dès lors mal fondé.