S. 184 / Nr. 29 Erbrecht (f)

BGE 75 II 184

29. Arrêt de la IIe Cour civile du 7 juillet 1941 dans la cause Weiss et
Filipinetti contre Murith.


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Regeste:
Testament olographe. Disposition à cause de mort dans laquelle l'auteur s'est
servi des mots « je donne » au lieu de « je lègue ».
Rapports entre une telle disposition et la promesse de donner dont les effets
sont subordonnés au décès du donateur (art. 245 al. 2
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 245 - 1 Mit einer Schenkung können Bedingungen oder Auflagen verbunden werden.
1    Mit einer Schenkung können Bedingungen oder Auflagen verbunden werden.
2    Eine Schenkung, deren Vollziehbarkeit auf den Tod des Schenkers gestellt ist, steht unter den Vorschriften über die Verfügungen von Todes wegen.
CO).
L'objet d'un legs doit être déterminé ou tout au moins déterminable.
Eigenhändiges Testament. Verfügung von Todes wegen, in der es heisst « ich
gebe » statt « ich vermache ».
In welchem Verhältnis steht eine solche Verfügung zu einem
Schenkungsversprechen auf den Todesfall? (Art. 245 2 OR).
Der Gegenstand eines Vermächtnisses muss bestimmt oder wenigstens bestimmbar
sein.
Testamento olografo. Disposizione testamentaria in cui è detto « dò » invece
di « lego ».
Relazione tra una siffatta disposizione e la promessa di donazione in caso di
morte? (art. 245
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 245 - 1 Mit einer Schenkung können Bedingungen oder Auflagen verbunden werden.
1    Mit einer Schenkung können Bedingungen oder Auflagen verbunden werden.
2    Eine Schenkung, deren Vollziehbarkeit auf den Tod des Schenkers gestellt ist, steht unter den Vorschriften über die Verfügungen von Todes wegen.
cp. 2 CO).
L'oggetto di un legato dev'essere determinato o almeno determinabile.

A. ­ Adolphe Filipinetti est décédé à la Clinique de la Lignière, à Gland, le
10 mai 1946, laissant comme héritiers son fils Georges et sa fille Yvonne
mariée à un Sieur Weiss. Depuis la mort de sa femme, survenue en 1943, il
vivait maritalement avec Dlle Flavie Murith. Le 10 décembre 1944, il a remis à
cette dernière une feuille de papier sur laquelle il avait écrit, entièrement
de sa main, ce qui suit: « Genève, le dix décembre mille neuf cent
quarante-quatre. ­ Je donne à Flavie Murith le contenu de mon portefeuille.
Cela est ma volonté.
(signé) A. Filipinetti. »
Dans le courant de ce même mois, Adolphe Filipinetti qui sortait d'une grave
maladie avait demandé à son fils ce que ce dernier aurait fait pour Dlle
Murith s'il était

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B. ­ Par exploit du 15 septembre 1947, Dlle Murith a assigné Georges
Filipinetti et Dame Weiss en paiement de 7800 fr. avec intérêt à 5 % dès le 10
mai 1946. Elle alléguait qu'au moment du décès d'Adolphe Filipinetti le
portefeuille trouvé dans la poche de son veston par son fils contenait 15 600
fr. dont celui-ci lui avait remis la moitié.
Les défendeurs ont conclu à libération.
Par jugement du 3 février 1948, le Tribunal de première instance de Genève a
débouté la demanderesse de ses conclusions en considérant que l'acte du 10
décembre 1944 ne constituait pas, comme elle le soutenait, un acte de
disposition pour cause de mort, mais une promesse de donner, dans le sens de
l'art. 243
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 243 - 1 Das Schenkungsversprechen bedarf zu seiner Gültigkeit der schriftlichen Form.
1    Das Schenkungsversprechen bedarf zu seiner Gültigkeit der schriftlichen Form.
2    Sind Grundstücke oder dingliche Rechte an solchen Gegenstand der Schenkung, so ist zu ihrer Gültigkeit die öffentliche Beurkundung erforderlich.
3    Ist das Schenkungsversprechen vollzogen, so wird das Verhältnis als Schenkung von Hand zu Hand beurteilt.
CO. D'après le Tribunal, la donation avait pour objet le contenu du
portefeuille non pas au décès d'Adolphe Filipinetti, mais au 10 décembre 1944;
or Dlle Murith n'avait ni prouvé, ni offert de prouver qu'à cette date le
portefeuille contenait plus que les 7800 fr. qu'elle avait reçus.
C. ­ Sur appel de la demanderesse et après avoir fait procéder à un
interrogatoire des parties, au cours duquel Georges Filipinetti déclara qu'au
moment du décès le portefeuille de son père contenait 15100 fr., la Cour de
Justice de Genève, par arrêt du 8 avril 1949, a réformé le jugement du
Tribunal de première instance et condamné les défendeurs conjointement et
solidairement à payer à la demanderesse la somme de 7300 fr. avec intérêt à 5
% dès le 14 juillet 1947.
La Cour admet que l'acte du 10 décembre 1944 est une disposition pour cause de
mort par laquelle Adolphe Filipinetti a fait un legs à la demanderesse.
D. ­ Les défendeurs ont recouru en réforme en reprenant leurs conclusions
libératoires. Ils soutiennent que l'acte du 10 décembre 1944 est une donation
dans le sens de l'art. 245 al. 2
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 245 - 1 Mit einer Schenkung können Bedingungen oder Auflagen verbunden werden.
1    Mit einer Schenkung können Bedingungen oder Auflagen verbunden werden.
2    Eine Schenkung, deren Vollziehbarkeit auf den Tod des Schenkers gestellt ist, steht unter den Vorschriften über die Verfügungen von Todes wegen.
CO, ayant pour objet le contenu du
portefeuille à cette date et qui, pour être valable, aurait dû être faite en
la forme d'un pacte successoral.

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E. ­ Dlle Murith a conclu au rejet du recours et à la confirmation de l'arrêt
de la Cour.
Considérant en droit:
1. ­ Ecrit entièrement, daté et signé de la main de feu Adolphe Filipinetti,
l'acte du 10 décembre 1944 remplit, quant à la forme, les conditions prévues
par la loi pour les testaments olographes.
Il n'est pas douteux, d'autre part, qu'il contient une disposition pour cause
de mort et plus exactement un legs en faveur de l'intimée. Peu importe à cet
égard que Filipinetti ait employé l'expression « je donne » et non « je lègue
». Ce qui est déterminant, en effet, c'est la réelle intention de l'auteur de
l'acte et l'un des exemples le plus fréquemment cités de l'emploi d'une
expression incorrecte dont le sens doit être redressé est précisément le cas
du testateur qui utilise le mot donner au lieu du mot léguer (cf. p. ex.
DALLOZ, Répertoire, au mot: testament, no 11). Dans l'arrêt Meyer-Heymoz
contre Fabrique de l'Eglise de Sierre (RO 55 II 169 et suiv.), le Tribunal
fédéral a jugé qu'un acte dans lequel une personne se bornait à déclarer
qu'elle donnait une certaine somme à quelqu'un constituait un legs lorsqu'en
tenant compte des circonstances prises en dehors de l'acte on pouvait établir
l'intention de son auteur de tester et non de faire une donation. En l'espèce,
il n'est même pas nécessaire de recourir à des preuves extrinsèques pour se
convaincre qu'il s'agit d'un acte de dernières volontés. Le fait que les mots:
« Je donne à Flavie Murith le contenu de mon portefeuille » sont suivis des
mots: « Cela est ma volonté » indique sans aucun doute possible qu'Adolphe
Filipinetti n'entendait pas seulement, comme les parties sont aujourd'hui
d'accord pour l'admettre, disposer pour après sa mort, mais voulait en outre
le faire par un acte ayant le caractère d'un acte unilatéral de dernières
volontés. Ainsi que l'expérience l'enseigne, il ne viendra pratiquement jamais
dans l'idée d'une personne même ignorante de la loi de se servir d'une telle

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formule dans un contrat. Si Filipinetti l'a employée, c'est certainement pour
que ceux qui s'occuperaient de la dévolution de ses biens et notamment ses
héritiers sachent que l'argent qui se trouverait dans son portefeuille à son
décès était destiné à Dlle Murith. Cette formule lui a été sans doute inspirée
par l'idée qu'elle correspondait à la terminologie usuelle en matière de
testament.
A supposer, au surplus, que la moindre hésitation pût exister à ce sujet, il
suffirait pour la dissiper de se reporter aux circonstances dans lesquelles,
d'après les constatations faites par la Cour cantonale, l'acte a été fait. En
effet, d'après ces constatations, qui lient le Tribunal fédéral, Adolphe
Filipinetti, à l'époque où il a rédigé et signé cet acte, était malade et il
s'inquiétait de l'avenir de l'intimée dans le cas où il mourrait avant elle.
Il avait eu une conversation à ce sujet avec son fils, et la Cour tient pour
établi que c'est après cette entrevue qu'il a rédigé l'acte litigieux pour
être certain que sa volonté d'assurer une situation à l'intimée serait
exécutée. Il est donc indifférent, du point de vue des droits que l'intimée
fait actuellement valoir, que, dans l'idée de Filipinetti et de son amie,
l'acte du 10 décembre 1944 comportât peut-être aussi l'idée d'un engagement du
premier envers la seconde. On doit admettre en effet que la volonté de
Filipinetti a été en tout cas, et pour le moins, que Dlle Murith bénéficiât
d'un legs après sa mort, et il a manifesté cette volonté dans les formes
requises pour le testament olographe. La question de la validité de l'acte
comme donation pour cause de mort n'aurait dès lors présenté d'intérêt que
dans le cas où Dlle Murith aurait voulu faire valoir soit contre Adolphe
Filipinetti, soit contre les héritiers de ce dernier les droits spéciaux
pouvant découler d'une donation de cette espèce et qui la distinguent d'un
legs.
Il peut arriver d'ailleurs que l'intention première du disposant soit de faire
une donation et qu'à cet effet il compte sur l'acceptation du donataire, mais
qu'il soit néanmoins sous-entendu dans son esprit que la disposition

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sera maintenue même à défaut d'acceptation, et l'on no voit pas pourquoi, dans
cette hypothèse, la promesse de donner ne serait pas alors considérée comme
une disposition pour cause de mort s'il est constant que, de toute façon
l'acte doit produire effet seulement après son décès. On pourrait même se
demander s'il ne faut pas, le cas échéant, considérer comme un legs valable
l'acte que le défunt aurait conçu comme un acte de donation pour cause de
mort, sans se rendre compte que cet acte, comme tel, ne remplissait pas les
conditions de forme exigées par la loi. En effet, suivant les circonstances,
il serait légitime de partir de l'idée que si le défunt avait connu le vice
qui entachait l'acte en tant que donation, il l'aurait néanmoins maintenu
comme disposition testamentaire. Le cas pourra se présenter, par exemple,
lorsque le défunt a fait une donation dans une lettre entièrement écrite,
datée et signée de sa main et répondant ainsi aux conditions de forme du
testament olographe mais non pas à celles prévues pour la donation pour cause
de mort, pour laquelle les conditions de forme sont les mêmes que pour le
pacte successoral (art. 245 al. 2
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 245 - 1 Mit einer Schenkung können Bedingungen oder Auflagen verbunden werden.
1    Mit einer Schenkung können Bedingungen oder Auflagen verbunden werden.
2    Eine Schenkung, deren Vollziehbarkeit auf den Tod des Schenkers gestellt ist, steht unter den Vorschriften über die Verfügungen von Todes wegen.
CO).
Toutefois, en l'espèce, il n'est pas nécessaire de faire intervenir une
volonté supposée du défunt. Les formes mêmes de l'acte et les circonstances
dans lesquelles il a été fait permettent de conclure de toute façon que
Filipinetti a voulu faire un legs, et la seule chose qu'on puisse se demander
est si, en plus de cette intention, il n'aurait pas eu celle de se lier
également par une promesse de donation pour cause de mort, en raison notamment
de la remise de l'acte à Dlle Murith, encore que cette remise puisse fort bien
s'expliquer même dans l'hypothèse d'un simple legs.
2. ­ Pour qu'un legs soit valable, il faut que son objet soit déterminé ou
tout au moins déterminable. Il faut, en d'autres termes, qu'il « désigne
suffisamment » l'objet légué (RO 47 II 37). Il peut s'agir d'un objet se
trouvant déjà dans le patrimoine du testateur au moment où il

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fait le legs, ou d'un objet qui n'y doit entrer qu'ultérieurement. C'est ainsi
qu'il a été jugé qu'on pouvait valablement léguer le contenu d'un meuble (RO
47 II 37) et qu'exception faite des modifications dues au pur hasard ou
survenues contre la volonté du testateur (hypothèses auxquelles il y aurait
lieu d'assimiler le cas où le testateur aurait modifié le contenu du meuble à
un moment où il n'était plus capable de discernement), le testateur devait
être censé avoir étendu sa Libéralité à tous ceux des biens légués existant au
jour de son décès. Ainsi que le dit justement la Cour cantonale, il n'y a
aucune raison de juger différemment quand le testateur a indiqué comme objet
du legs le contenu d'un portefeuille.
Les recourants ne se plaignent d'ailleurs pas, dans leur recours, de
l'indétermination du legs; ils soutiennent seulement que celui-ci avait pour
objet le contenu du portefeuille le 10 décembre 1944, date de l'acte. Mais
cela est insoutenable et en contradiction avec l'affirmation selon laquelle
leur père aurait fait une donation pour cause de mort. Il n'aurait pu, à la
rigueur, être question de considérer que le legs se rapportait aux valeurs
contenues dans le portefeuille le 10 décembre 1944 que s'il s'était agi d'un
portefeuille spécial que le testateur ne devait pas continuer à utiliser et
qui devait normalement rester déposé ou enfermé en un certain lieu ou en un
certain meuble. Or il n'a rien été allégué de semblable et il ressort au
contraire des circonstances de la cause que le portefeuille en question était
celui dont le défunt se servait et qu'il portait habituellement sur lui. Les
recourants ont prétendu, il est vrai, que l'intimée avait déclaré à Dame
Weiss-Filipinetti, le jour du décès, que le portefeuille ne devait contenir
qu'une somme de 2 à 300 francs. Mais, à supposer que l'intimée ait réellement
fait cette déclaration, il n'en résulterait pas encore que l'importance de la
somme trouvée dans le portefeuille le jour du décès ait été due à un pur
hasard et qu'elle ait été hors de toute proportion avec la libéralité dont le
testateur entendait

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faire bénéficier l'intimée La preuve du contraire résulte déjà du fait que,
sur la somme de 15 600 fr. qu'il déclare avoir trouvée dans le portefeuille,
Georges Filipinetti a immédiatement remis la moitié à Dlle Murith, et cela,
selon lui, dans la complète ignorance de l'existence de l'acte du 10 décembre
1944 et dans l'intention uniquement de se conformer au désir de son père
d'assurer après son décès une certaine situation à Dlle Murith.
Le Tribunal fédéral prononce:
Le recours est rejeté et l'arrêt attaqué est confirmé.