Bundesverwaltungsgericht
Tribunal administratif fédéral
Tribunale amministrativo federale
Tribunal administrativ federal


Cour III

C-2618/2018

Arrêt du 28 novembre 2019

Christoph Rohrer (président du collège),

Composition Viktoria Helfenstein, Michela Bürki Moreni, juges,

Julien Theubet, greffier.

A._______, (...),

Parties représenté par Maître Regina Andrade Ortuno, Avocate,

recourant,

contre

Département de la santé et de l'action sociale, (...),

autorité inférieure.

Objet Assurance maladie, autorisation à pratiquer à charge de l'assurance obligatoire des soins
(décision du 29 mars 2018).

Faits :

A.
Le Dr A._______ (ci-après : le recourant ou l'intéressé), né le (...) 1966, est au bénéfice d'un diplôme de médecin délivré par les autorités syriennes le 18 avril 1998 et reconnu par les autorités françaises en 2014. Le (...) 2014, il a obtenu en France un titre postgrade en neurochirurgie. Ces diplômes ont été reconnus en Suisse par la Commission des professions médicales MEBEKO le (...) 2016 (TAF pce 1 annexe 10 nos 2, 3, 5, 7-9 et 14 ; TAF pce 1 annexe 1).

A.a En septembre 2016, l'intéressé a déposé auprès du Département de la santé et de l'action sociale du canton de Vaud (ci-après : l'autorité inférieure ou le Département) une demande d'autorisation de pratiquer à titre indépendant la profession de neurochirurgien, exposant avoir l'intention de pratiquer à charge de l'assurance-maladie obligatoire (TAF pce 9 annexe 1). A cet effet, il s'est notamment prévalu d'une correspondance du Centre B._______, dont il ressort qu'il viendrait remplacer au sein de cette institution la Dresse C._______, qui a déplacé l'essentiel de son activité sur (...) (TAF pce 9 annexe 2).

Dans un courriel du 21 décembre 2016, la Société Vaudoise de Médecine (ci-après : SVM) a exprimé un préavis négatif quant à la demande de l'intéressé, expliquant notamment que la densité des médecins pratiquant la neurochirurgie dans le district D.______ est supérieure à la moyenne cantonale (TAF pce 9 annexe 4).

A.b Par décision du 30 janvier 2017, le Chef du Département a refusé de délivrer au Dr A._______ « une autorisation de facturer à charge de l'assurance obligatoire des soins ». A suivre l'autorité précédente, l'intéressé tombe en effet sous le coup de la clause du besoin au sens de l'art. 55a LAMal. Or, il ne peut se prévaloir d'une exception à la limitation d'admission, dès lors qu'il ne dispose pas d'une expérience de trois ans dans un établissement suisse de formation reconnu, qu'il ne reprend pas l'activité d'un médecin admis à pratiquer à charge de l'assurance obligatoire de soins et qu'il ne pallie à une insuffisance de la couverture des besoins de la population, la densité vaudoise des médecins neurochirurgiens étant supérieure à celle de la Suisse (TAF pce 9 annexe 5).

Réservant un éventuel recours, l'intéressé a signifié son désaccord quant à cette décision (correspondance de l'intéressé du 5 février 2017, TAF pce 9 annexe 6).

B.

B.a Par courrier du 13 juillet 2017, l'intéressé a déposé une nouvelle « demande d'autorisation d'exercer à la charge de la LAMal » la profession de médecin, ce en remplacement du Dr E._______, qui - comme celui-ci en atteste dans un courriel du 9 juin 2017 - a cessé toute activité clinique et ne fait ainsi plus usage de l'autorisation dont il est titulaire (TAF pce 9 annexes 10 et 11).

B.b Cette demande a été rejetée par décision du Service vaudois de la santé publique (ci-après : SSP) du 24 juillet 2017. Saisi d'un recours, le Tribunal de céans a constaté la nullité de cette dernière décision en raison de l'incompétence de l'autorité qui l'a rendue, renvoyant ainsi la cause au Département afin qu'il se prononce sur l'admission de l'intéressé à pratiquer à charge de la LAMal (arrêt du TAF C-4855/2017 du 23 novembre 2017, TAF pce 9 annexe 20).

B.c Cela étant, par décision du 29 mars 2018 le chef du Département a rejeté « la demande d'autorisation de pratiquer à titre indépendant et de facturer à charge de l'assurance des soins du Dr A._______ en remplacement du Dr E._______ » (TAF pce 9 annexe 21). En substance, l'autorité précédente a observé ne pas être en mesure de retirer l'autorisation du Dr E._______ de facturer à la charge de l'assurance obligatoire de soins, quand même celui-ci décidait de ne plus pratiquer ou de réduire son taux d'activité. Pour le surplus, vu le préavis négatif de l'association professionnelle représentative des médecins (ci-après : SVM ; TAF pce 4) ainsi que les indices de densité des différentes régions du canton et de la Suisse, l'intéressé ne saurait prétendre pallier une insuffisance de la couverture des besoins de la population du district D.______.

C.

C.a Par mémoire du 4 mai 2018 (timbre postal), l'intéressé interjette recours contre la décision susmentionnée, dont il demande l'annulation, concluant principalement à ce qu'il soit mis au bénéfice d'une autorisation d'exercer à la charge de la LAMal sur sol vaudois et, subsidiairement, à ce que la cause soit renvoyée à l'autorité de première instance pour nouvelle décision. Au titre de mesures d'instruction, il requiert la production par l'autorité précédente de l'attestation RC délivrée en faveur du Dr E._______ ainsi que de toutes les pièces attestant de ce qu'elle a procédé à un « contrôle concret de l'utilisation des autorisations délivrées à tous les neurochirurgiens du [canton de Vaud] » (TAF pce 1).

C.b L'autorité précédente conclut au rejet du recours et au maintien de la décision contestée (TAF pce 6). Dans une écriture du 26 juin 2018, elle a expliqué ne pas être en mesure de faire suite aux réquisitions de preuve du recourant (TAF pce 9).

C.c Par ordonnance du 3 juillet 2018, le Tribunal a clos l'échange d'écritures sous réserve d'autres mesures d'instruction (TAF pce 10).

Droit :

1.
Sont attaquables devant le Tribunal administratif fédéral les décisions des gouvernements cantonaux concernant l'admission à pratiquer à la charge de l'assurance-maladie obligatoire des soins dans le cadre de la clause du besoin au sens de l'art. 55a LAMal (RS 832.10 ; cf. art. 53 al. 1 et 90a LAMal). Selon la jurisprudence, le Tribunal administratif fédéral est aussi compétent lorsque la décision a été rendue par une direction ou un département cantonal (ATF 134 V 45 rendu sous l'art. 34 LTAF, remplacé depuis le 1er janvier 2009 par l'art. 53 LAMal ; arrêt du TF 9C_447/2012 du 18 juin 2014 ; arrêt du TAF C-3997/2014 du 16 décembre 2016 consid. 1.1).

1.1 En l'occurrence, il ne fait pas de doute que le Tribunal de céans est compétent pour connaître du recours contre la décision attaquée en tant qu'elle rejette, en application de l'art. 55a LAMal, la demande d'autorisation du recourant de facturer à charge de la LAMal.

Cela étant, vu son dispositif - qui fait référence à « [...] la demande d'autorisation de pratiquer à titre indépendant [...] » - on peut se demander si cette décision a également pour effet de refuser au recourant l'autorisation au sens de la LPMéd d'exercer la profession de médecin dans le canton de Vaud, cet objet ne revenant pas à la compétence du Tribunal administratif fédéral.

Une telle éventualité peut toutefois être écartée d'emblée. En effet, la procédure menée devant l'autorité précédente a été initiée par la demande du recourant du 13 juillet 2017. Or, cette demande tend exclusivement et sans équivoque possible à l'obtention d'une autorisation de facturer à charge de l'assurance maladie obligatoire. Aussi, en bonne compréhension de la maxime de disposition qui régit les procédures d'autorisation au sens des art. 34ss LPMéd et 55a LAMal, on doit bien admettre que l'autorité précédente a statué exclusivement sur l'objet dont elle a été saisie (Thierry Tanquerel, Manuel de droit administratif, 2018, n° 1523ss). Ainsi, lorsqu'elle rejette, dans le dispositif attaqué, « la demande d'autorisation de pratiquer à titre indépendant », l'autorité fait bel et bien référence à la demande de facturer à charge de la LAMal en qualité de médecin exerçant à titre indépendant. D'ailleurs, sous réserve d'un renvoi général aux dispositions de la LPMéd, la motivation développée à l'appui de cette décision concerne uniquement l'art. 55a LAMal et ses dispositions d'application. Interprété à la lumière des considérants, le dispositif attaqué doit ainsi être compris comme concernant le droit de facturer à la charge de l'assurance obligatoire de soins exclusivement (dans ce contexte, cf. notamment TF 5G_4/2017 du 8 janvier 2018 consid. 3).

Il s'ensuit que le Tribunal de céans est seul compétent pour trancher du recours contre la décision du 29 mars 2017, qui ne désigne au demeurant que les voies de droit au sens de l'art. 53 LAMal.

1.2 Pour le surplus, le recours a été déposé en temps utile - soit dans les 30 jours dès l'arrivée à échéance du délai de garde postale (art. 53 LAMal et 20 ss PA ; ATF 134 V 49) - dans les formes requises par la loi (art. 60 LPGA et 50 al. 1 PA ; art. 52 al. 1 PA) et l'avance de frais a dûment été payée (TAFpces 2 ss ; art. 63 al. 4 PA). Par ailleurs, dans la mesure où la décision attaquée empêche, avec effets durables, au recourant de facturer à charge de l'assurance obligatoire de soins, celui-ci a manifestement un intérêt digne d'être protégé à ce qu'elle soit annulée ou modifiée (art. 48 al. 1 PA). Le recours est ainsi recevable.

2.
Dans le cadre de l'examen de la régularité formelle de l'acte attaqué, le Tribunal administratif fédéral vérifie librement si les conditions de recevabilité étaient réunies devant l'autorité précédente (ATF 140 V 22 consid. 4 et les références). Cela étant, on pourrait en l'occurrence se demander si le Département pouvait valablement entrer en matière sur la demande du 13 juillet 2017. Son objet a en effet d'ores-et-déjà été tranché par la décision entrée en force du 30 janvier 2017. Faute de disposition de droit cantonal soumettant à conditions la reconsidération de décisions entrées en force, on ne saurait toutefois reprocher à l'autorité précédente d'avoir traité la nouvelle demande du recourant : sous réserve d'une atteinte aux droits de tiers protégés par la décision en force, il s'agit en effet là d'une faculté laissée à l'appréciation de l'autorité (ATAF 2010/5 consid. 2.1.1 ; Thierry Tanquerel, op.cit., 2018, n° 1418). Dans ces conditions, il se justifie d'examiner le bien-fondé matériel de la décision attaquée.

3.
A l'appui de son recours, l'intéressé fait valoir des réquisitions de preuve. Pour autant, il ne soutient pas que celles-ci résultent de l'acte attaqué, ni ne se prévaut d'une violation de son droit d'être entendu en rapport avec le droit à la preuve. Or, selon la jurisprudence relative à l'art. 53 al. 2 let. a LAMal - qui trouve ici application (art. 1er al. 2 let. b et 53 LAMal ; arrêt du TAF C-3997/2014 du 16 décembre 2016 consid. 1.2 et les réf. cit.) - les faits et moyens de preuve n'ayant pas été allégué devant l'autorité précédente sont irrecevables en procédure de recours (arrêt du TAF C-5914/2016 du 30 janvier 2019 consid. 3, destiné à la publication ; cf. également : ATAF 2015/39 consid. 10.3.2, 2014/36 consid. 1.5.2, 2014/3 consid. 1.5.4 s, 2012/12 consid. 3.2.2 ; arrêt du TAF C-6229/2011 du 5 mai 2014 consid. 5, C-220/2012 du 4 juin 2012 consid. 2.2, C-5642/2010 du 6 mai 2013 consid. 3.2.2). Cela étant, vu l'issue du litige, la question de la recevabilité de ces réquisitions de preuve peut rester indécise.

4.
Au fond, le litige porte sur la question de savoir si l'autorité inférieure pouvait refuser au recourant toute autorisation de pratiquer à charge de l'assurance-maladie obligatoire en tant que neurochirurgien exerçant à titre indépendant dans le canton de Vaud.

5.
En matière d'autorisations, le droit déterminant est celui en vigueur le jour où l'autorité statue, cette législation étant en principe applicable à toutes les affaires pendantes (arrêt du TAF C-5914/2016 précité consid. 5 et réf. cit.; cf. également : arrêt du TAF C-1837/2014 du 26 novembre 2014 p. 11 s). Il s'agit par conséquent d'appliquer au cas concret les dispositions en vigueur au 29 mars 2018, soit au jour de la décision attaquée.

6. Le chapitre 4, section 1 de la LAMal règlemente l'admission des fournisseurs de prestations à pratiquer à la charge de l'assurance obligatoire des soins. Selon les art. 35 et 36 LAMal, sont ainsi admis les médecins titulaires du diplôme fédéral et d'une formation postgraduée reconnue par le Conseil fédéral.

6.1 Par exception à ce principe et afin d'empêcher l'augmentation du nombre de fournisseurs de prestations et la hausse des coûts de la santé qui y est liée, le législateur a adopté l'art. 55a LAMal, qui limite - pour une période transitoire courant du 17 juin 2016 au 30 juin 2019 - l'admission à pratiquer à charge de l'assurance-maladie (RO 2016 2265). S'agissant des médecins exerçant à titre indépendant (ci-après : les médecins), cette disposition donne la possibilité au Conseil fédéral de faire dépendre de l'établissement d'un besoin l'admission à pratiquer à charge de l'assurance obligatoire des soins (art. 55a al. 1 let. a LAMal). Toutefois, les médecins qui ont été admis en vertu de l'art. 36 LAMal et ont pratiqué dans leur propre cabinet à la charge de l'assurance obligatoire des soins avant l'entrée en vigueur de cette disposition sont dispensés de la preuve du besoin (dispositions transitoires du 17 juin 2016 relatives à l'art. 55a LAMal, RO 2016 2265). Il revient au Conseil fédéral de fixer les critères permettant d'établir la preuve du besoin (art. 55a al. 3 LAMal) et aux cantons de désigner les personnes concernées par la limitation (art. 55a al. 4 LAMal).

6.2 Faisant usage de la compétence prévue à l'art. 55a LAMal, le Conseil fédéral a édicté l'ordonnance du 3 juillet 2013 (Etat le 1er juillet 2016) sur la limitation de l'admission des fournisseurs de prestations à pratiquer à la charge de l'assurance-maladie obligatoire (OLAF).

6.2.1 A teneur de l'art. 1 OLAF, les médecins ne sont admis à pratiquer à la charge de l'assurance obligatoire des soins que si le nombre maximum fixé à l'annexe 1 OLAF pour le canton et le domaine de spécialité concernés n'est pas atteint.

6.2.2 Si un canton estime qu'un besoin subsiste pour tous ou certains domaines de spécialités, il peut toutefois, en se fondant sur les art. 3 let. a et 4 OLAF, décider de lever les limitations pour ces catégories de prestations ou de spécialités qui ne seraient dès lors plus soumises à la limitation de pratiquer (ATF 140 V 574 consid. 6.2). Si, au contraire, un canton considère que les nombres maximaux indiqués dans l'annexe 1 sont trop élevés par rapport aux densités médicales dans sa région ou en Suisse, il peut décider de renoncer à toute nouvelle admission en vertu de l'art. 3 let. b OLAF (Rapport explication de l'Office fédéral de la santé publique du 15 janvier 2013 en vue de la mise en consultation de l'OLAF [ci-après : rapport explicatif OLAF], ad. art. 3 ).

6.3 Basées sur les registres de santésuisse, les valeurs de l'annexe 1 OLAF correspondent à l'état au 21 novembre 2012 des personnes pratiquant des professions médicales dans les cantons (rapport explicatif OLAF, ad. art. 1 ). Le système mis en place initialement par le Conseil fédéral, puis repris dans la version de l'OLAF en vigueur dès le 1er juillet 2016, revient ainsi à faire correspondre le besoin - désigné par les plafonds fixés à l'annexe 1 OLAF - au nombre de praticiens qui étaient effectivement autorisés à pratiquer lors des travaux d'adoption de cette ordonnance.

Cela étant, lorsqu'ils tranchent les demandes d'admission qui leur sont soumises - soit notamment lorsqu'ils examinent si les maximaux de l'annexe 1 OLAF sont atteintes -, les cantons sont tenus de prendre en compte les critères liés au besoin figurant à l'art. 5 OLAF, à savoir en particulier le taux d'activité des fournisseurs exerçant dans le domaine de spécialité concerné au moment de la demande (art. 55a al. 3 LAMal ; art. 5 al. 2 OLAF ; rapport explicatif OLAF, ad. art. 5 ; cf. également arrêt du TAF C-3572/2017 du 10 octobre 2018 consid. 12.3 et C-6866/2016 du 18 mai 2018 consid. 9.3.3). Ainsi, sauf à prévoir un régime excluant toute nouvelle admission - ce qui est envisageable dans les limites des art. 55a LAMal et 3 let. b OLAF (ATF 140 V 574 consid. 6.3) -, le canton devra dans tous les cas être en mesure d'évaluer l'offre médicale existant sur son territoire, afin de déterminer si les valeurs de l'annexe 1 OLAF sont ou non atteintes (arrêt du TAF C-5914/2016 précité, consid. 8.1). La possibilité de refuser de nouvelles admissions en raison de la clause du besoin n'est en effet donnée que si le nombre de médecins fixé à cette annexe est dépassé, de sorte que l'on peut conclure à une couverture sanitaire suffisante (contra : Stéphane Rossini, Le gel de l'admission des cabinets médicaux et la cohérence du processus de décision, in Réflexions romandes en droit de la santé, 2016, p. 79 ss, 147).

6.4 Au plan cantonal, l'Arrêté du 29 juin 2016 sur la limitation de l'admission des fournisseurs de prestations à pratiquer à la charge de l'assurance-maladie obligatoire - dans sa teneur au moment de la décision attaquée (RSVD 832.05.1 ; ci-après : aAVOLAF ; arrêt du TAF C-3997/2014 du 16 décembre 2016 consid. 6 et 7 ; arrêt du TAF C-3385 du 29 mai 2019, consid. 3.3) - aménage les modalités d'application des dispositions fédérales ci-avant (art. 1 aAVOLAF).

Posant le principe, l'art. 2 aAVOLAF soumet les médecins à la limitation à pratiquer à charge de l'assurance-maladie obligatoire (al. 1). Le département est toutefois chargé d'augmenter de manière adéquate les limites fixées à l'annexe 1 de l'OLAF (al. 2). En guise d'exception à la clause du besoin, sont admis à pratiquer sans limitation à charge de l'assurance-maladie obligatoire notamment le médecin palliant à une insuffisance de la couverture des besoins de la population dans une région et/ou dans une spécialité donnée (art. 4 let. b aAVOLAF), de même que celui qui reprend l'activité d'un médecin admis à pratiquer à charge de l'assurance-maladie, soit à titre individuel, soit dans une institution de soins ambulatoires ou dans un hôpital (art. 4 let. a aAVOLAF).

6.5 Par directive d'application de l'aAVOLAF du 22 décembre 2016 (aDirective), le Département vaudois de la santé et de l'action social a explicité les critères sur lesquels se fondent ses décisions en matière d'admission à pratiquer à charge de l'assurance maladie obligatoire (ch. I aDirective). Singulièrement, il a développé une méthodologie revenant à trancher l'admission à pratiquer à charge de l'assurance obligatoire en fonction essentiellement de la densité de l'offre médicale dans le canton, ses régions ainsi que la Suisse (ch. IV aDirective).

6.6 Dans une annexe à cette directive, le Département explique qu'il lui est à l'heure actuelle impossible de disposer d'informations fiables et documentées sur le taux d'activité des médecins par spécialité. Faute de données probantes, il estime que « la façon la plus appropriée de tenir compte de la donnée « taux d'activité », telle que prévue à l'art. 5 al. 1 let. d OLAF, est de considérer que ce taux d'activité est identique d'une spécialité à l'autre et d'une région à l'autre et de faire des comparaisons, sur ce point, à l'échelle suisse ». Aussi conclut-il « qu'une densité supérieure selon les chiffres des annexes OLAF correspond bien à une densité supérieure dans la réalité », de sorte que « la comparaison des taux d'activité équivaut à la comparaison des densités « par tête » telles que figurant dans les annexes OLAF ».

7.

7.1 Par un premier grief - rapporté tantôt à une « violation du principe de la légalité », tantôt à une « violation de l'interdiction d'arbitraire » -, le recourant reproche à l'autorité précédente de ne pas avoir retiré, à titre préjudiciel et en vue de l'en mettre au bénéfice, les autorisations fondées sur la LAMal et le LPMéd dont bénéficie le Dr E._______, qui n'en fait plus usage. À ses yeux, les art. 55a al. 4 LAMal, 6 OLAF et 10 aAVOLAF entraînent en effet la caducité de telles autorisations.

7.2 Ce moyen est infondé. Comme l'explique à juste titre l'autorité précédente, l'expiration, au sens des dispositions précitées, d'une admission de pratique à la charge de l'assurance obligatoire ne saurait concerner que les fournisseurs de prestations tombant sous le coup de la clause du besoin. Tel n'est toutefois pas le cas du Dr E._______ qui, comme l'expliquent les parties, pratiquait à charge de la LAMal bien avant l'entrée en vigueur de la clause du besoin, à laquelle il ne saurait dès lors être soumis (consid. 6.1).

Quoiqu'il en soit, le point de savoir s'il se justifie de retirer au Dr E._______ son autorisation au sens de l'art. 36 LAMal est étranger à l'objet matériel de la contestation, qui concerne exclusivement le droit du recourant à une telle autorisation. Ainsi, si l'étendue de la pratique de ce médecin à charge de la LAMal constitue un fait pertinent pour l'examen des valeurs figurant aux annexes 1 et 2 de l'OLAF, il ne saurait être ici question d'examiner le bien-fondé des autorisations dont bénéficie le Dr E._______. Faute pour ce dernier médecin d'avoir manifesté l'intention de remettre son activité au recourant, un examen du droit à l'autorisation requise au regard de l'art. 4 let. a aAVOLAF ne se justifie au demeurant pas.

8.
L'intéressé reproche ensuite à l'autorité précédente d'avoir exclu, sur la base de statistiques erronées et non représentatives, que sa demande ne vienne pallier à une insuffisance de la couverture sanitaire dans son domaine de spécialité. Singulièrement, il fait grief au Département d'inclure dans ses calculs de densités médicales les praticiens ne faisant pas usage de leurs autorisations de facturer à la charge de l'assurance-maladie.

8.1 On doit donner raison au recourant. Comme énoncé ci-avant (consid. 6.2), le Conseil d'état vaudois n'a pas fait usage de la possibilité aménagée par l'art. 3 let. b OLAF de limiter l'admission de nouveaux fournisseurs de prestations dans une mesure plus large que celle résultant de l'art. 1 al. 1 OLAF en relation avec l'annexe 1 OLAF. Au contraire, l'art. 2 al. 2 aAVOLAF charge expressément le Département « d'augmenter de manière adéquate les limites fixées à l'annexe 1 de l'OLAF » (cf. art. 3 let. a OLAF). En cela, avant de faire appel au critère de la densité pour trancher les demandes d'admission - comme le prévoit le ch. IV aDirective, en faisant référence de manière erronée à l'art. 3 let. b OLAF -, l'autorité cantonale se doit d'examiner si les valeurs de l'annexe 1 OLAF sont atteintes dans un cas donné. Or, pour ce faire, il lui appartient bel et bien de déterminer la couverture sanitaire, en tenant compte notamment du taux d'activité des fournisseurs dans le domaine de spécialité concerné, comme l'exige l'art. 5 al. 2 OLAF, renvoyant à l'art. 5 al. 1 let. d OLAF. Ainsi, contrairement à ce que suggère l'autorité dans ses écritures et dans l'annexe à la Directive d'application de l'aAVOLAF, il est décisif de connaître l'activité déployée par les praticiens dans un secteur donné : ce n'est effectivement que par ce biais que l'on pourra déterminer si les valeurs de l'annexe 1 sont atteintes (arrêts du TAF C-5914/2016 précité, consid. 8.2 e 12 ; C-6866/2016 du 18 mai 2018, consid. 9.3.3 et 13.2). Dans ce contexte, comme l'explique le recourant, il n'y a évidemment lieu de prendre en considération que l'activité effectivement déployée à charge de l'assurance obligatoire, ce qui exclut bel et bien les autorisations de facturer dont il n'est effectivement pas fait usage.

Certes, cette démarche - qui revient à évaluer la manière dont un médecin organise effectivement son activité - peut se confronter aux difficultés pratiques évoquées par l'autorité précédente (consid. 5.6 ci-avant ; cf. également : Stéphane Rossini, op. cit., p. 79 ss, p. 83 s). Comme déjà précisé à l'arrêt TAF C-6866/2016 du 18 mai 2018, elle n'en demeure pas moins nécessaire pour que la clause du besoin parvienne à son objectif, soit de limiter l'admission des fournisseurs de prestations au regard de critères liés à la notion de besoin (rapport explicatif OLAF, ad. art. 5 ; arrêts du TAF C-5914/2016 précité, consid. 8 et 12 : C-6866/2016 précité, consid. 13.2). Aussi, si l'on peut déplorer le manque de représentativité des valeurs figurant aux annexes de l'OLAF, on ne saurait pour autant écarter le système mis en place par cette ordonnance, qui mène à bien les tâches consacrées par l'art. 55a LAMal. Par conséquent, on doit attendre des cantons qu'ils se munissent des outils nécessaires à la mise en oeuvre de l'art. 55a LAMal, soit notamment de ceux leur permettant de requérir des fournisseurs de prestations qu'ils renseignent, du moins globalement, sur la part de leur activité déployée à la charge de l'assurance obligatoire (rapport explicatif OLAF, ad. art. 5, qui exclut de l'examen tout critère complexe » et fait références à des « données généralement accessibles »).

8.2 Cela étant, le recours est admis en ce sens que la décision attaquée - qui repose sur un établissement incomplet des faits et contrevient ainsi au droit fédéral - est annulée.

8.2.1 Aussi, la cause sera renvoyée à l'autorité précédente pour qu'elle évalue, dans un premier temps, si l'intéressé peut prétendre à une autorisation de pratiquer à charge de l'assurance maladie en se fondant sur l'art. 1 al. 1 OLAF en lien avec les valeurs de l'annexe 1 OLAF en matière de neurochirurgie. Dans ce contexte, il s'agira pour l'autorité compétente d'évaluer la couverture sanitaire dans le canton de Vaud eu égard notamment au taux d'activité des personnes exerçant effectivement dans ce domaine de spécialité.

8.2.2 Dans un second temps, et à supposer que le nombre maximum de fournisseurs de prestations au sens l'annexe 1 OLAF soit au cas d'espèce atteint ou dépassé, il s'agira pour l'autorité cantonale d'examiner la demande de l'intéressé selon la méthodologie définie par la Directive cantonale d'application de l'art. 2 al. 2 aAVOLAF. Là aussi, les critères de l'art. 5 OLAF devront être pris en compte.

8.2.3 Dans l'hypothèse où la clause du besoin ne devait pas faire échec à l'octroi d'une autorisation de facturer au sens des art. 35 ss et 55a LAMal, il s'agira encore pour l'autorité cantonale de se prononcer sur le droit du recourant à pratiquer une profession médicale au sens de la LPMéd. A la connaissance du Tribunal de céans, le recourant - s'il est titulaire d'autorisations d'exercer une profession médicale dans les cantons de (...) et de (...)(registre des professions médicales MedReg, https://www.medregom.admin.ch/, consulté le 12 novembre 2019) - n'a pas fait l'objet d'une décision correspondante s'agissant du canton de Vaud, en dépit de sa demande du 12 septembre 2016 (TAF pce 9 annexe 1). Or, une telle autorisation apparaît effectivement nécessaire à la facturation de prestations à la charge de l'assurance obligatoire de soins.

9. En règle générale, les frais de procédure sont mis à la charge de la partie qui succombe (art. 63 al. 1 , 1 ère phrase, PA). Aucun frais de procédure n'est mis à la charge des autorités inférieures, ni des autorités fédérales recourantes et déboutées (art. 63 al. 2 , 1 ère phrase, PA). D'après la jurisprudence, la partie qui a formé recours est réputée avoir obtenu gain de cause lorsque l'affaire est renvoyée à l'administration pour instruction complémentaire et nouvelle décision (ATF 132 V 215 consid. 6.2).

En l'occurrence, il n'y a pas lieu de percevoir de frais de procédure, dès lors que le recourant a obtenu gain de cause par le renvoi de l'affaire à l'autorité inférieure (arrêt du TAF C-1837/2014 du 26 novembre 2014) et qu'aucun frais de procédure n'est mis à la charge de l'autorité inférieure. Partant, l'avance de frais présumée versée par le recourant à hauteur de Fr. 3'000.- (TAF pces 3 ss) lui sera restituée dès l'entrée en force du présent arrêt.

10. Selon l'art. 14 FITAF, les parties qui ont droit aux dépens et les avocats commis d'office doivent faire parvenir au tribunal, avant le prononcé, un décompte de leurs prestations (al. 1). A défaut de décompte, le tribunal fixe l'indemnité sur la base du dossier (al. 2, 2e phrase). Les honoraires du représentant sont fixés, selon l'appréciation de l'autorité, en raison de l'importance et de la difficulté du litige, ainsi que d'après le travail et le temps que le représentant a dû y consacrer.

En l'espèce, à défaut de décompte, il se justifie d'allouer au recourant une indemnité à titre de dépens fixée à Fr. 2'800.- à charge de l'autorité inférieure. Dite indemnité tient compte du fait que l'intéressé a obtenu gain de cause par le renvoi du dossier à l'autorité inférieure pour complément d'instruction.

11.
La présente décision n'est pas sujette à recours, conformément à l'art. 83 let. r de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF, RS 173.110), étant précisé que l'art. 34 LTAF, auquel l'art. 83 let. r LTF renvoie, a été abrogé, avec effet au 1er janvier 2009, par le ch. II de la loi fédérale du 21 décembre 2007 (Financement hospitalier) et remplacé par les art. 53 al. 1 et 90a LAMal (introduits selon le ch. I de la loi fédérale du 21 décembre 2007). Le présent arrêt entre en force dès sa notification (arrêt du TAF C-3997/2014 du 16 décembre 2016 consid. 11 et les réf. cit.).

Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :

1.
Dans la mesure de sa recevabilité, le recours est admis en ce sens que la décision du 29 mars 2018 est annuléeet la cause renvoyée à l'autorité inférieure pour complément d'instruction au sens des considérants et nouvelle décision.

2.
Il n'est pas perçu de frais de procédure. L'avance sur les frais de procédure de Fr. 3'000.- versée par le recourant lui sera remboursée dès l'entrée en force du présent arrêt.

3.
Une indemnité de dépens de Fr. 2'800.- est allouée au recourant et mise à la charge de l'autorité inférieure.

4.
Le présent arrêt est adressé :

- au recourant (acte judiciaire ; annexe : formulaire de paiement) ;

- à l'autorité inférieure (n° de réf. [...] ; acte judiciaire) ;

- à l'Office fédéral de la santé publique (recommandé).

Le président du collège : Le greffier :

Christoph Rohrer Julien Theubet

Expédition :