Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A 558/2012

Arrêt du 18 février 2013
Ire Cour de droit civil

Composition
Mmes et M. les Juges fédéraux Klett, Présidente,
Kolly et Niquille.
Greffière: Mme Monti.

Participants à la procédure
X.________ SA, représentée par Me Pascal Moesch,
recourante,

contre

Y.________, représenté par Me Monica Zilla,
intimé.

Objet
contrat de travail; congé abusif,

recours en matière civile contre l'arrêt rendu le 21 août 2012 par la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.

Faits:

A.
Par contrat du 17 août 1998, Y.________, né le 25 avril 1947, a été engagé en qualité d'agent d'exploitation par une entreprise qui est devenue ultérieurement X.________ SA. Par lettre du 13 janvier 2011, l'employeuse a résilié le contrat de travail pour le 30 avril 2011. L'employé était alors âgé de 64 ans et avait accompli un peu plus de douze années de service; il a fait opposition au congé.

B.
B.a Le 29 septembre 2011, l'employé a actionné l'employeuse en paiement de 47'385 fr. à titre d'indemnité pour licenciement abusif. Par jugement du 30 mars 2012, le Tribunal civil du Littoral et du Val-de-Travers a retenu que le congé était abusif; il a condamné l'employeuse à verser une indemnité de 31'590 fr., correspondant à quatre mois de salaire.
B.b L'employeuse a déféré cette décision à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal neuchâtelois. Dite autorité a confirmé le jugement attaqué par arrêt du 21 août 2012. Son raisonnement peut se résumer comme il suit: l'employé manquait de motivation. Toutefois, ses évaluations pour les années 2008, 2009 et même 2010, à l'instar des années précédentes, retenaient une moyenne de 3, soit des résultats correspondant aux attentes de l'employeuse. Lorsqu'elle avait fixé les objectifs pour 2011 quelque deux mois avant le licenciement, l'employeuse avait précisé qu'il ne fallait pas décrocher, qu'elle avait toujours besoin de l'employé, si bien que l'intéressé ne pouvait objectivement pas en déduire un risque de licenciement. Les offres de l'employé étaient faites aussi bien et aussi vite que celles de son collègue; son rendement par rapport à un autre collègue était inférieur d'un cinquième environ, mais ce collègue était nettement plus jeune et particulièrement performant. Dans ces circonstances, le licenciement une année avant la retraite était abusif.

C.
L'employeuse (ci-après: la recourante) interjette un recours en matière civile; invoquant uniquement une violation de l'art. 336
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 336 - 1 Le congé est abusif lorsqu'il est donné par une partie:
1    Le congé est abusif lorsqu'il est donné par une partie:
a  pour une raison inhérente à la personnalité de l'autre partie, à moins que cette raison n'ait un lien avec le rapport de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l'entreprise;
b  en raison de l'exercice par l'autre partie d'un droit constitutionnel, à moins que l'exercice de ce droit ne viole une obligation résultant du contrat de travail ou ne porte sur un point essentiel un préjudice grave au travail dans l'entreprise;
c  seulement afin d'empêcher la naissance de prétentions juridiques de l'autre partie, résultant du contrat de travail;
d  parce que l'autre partie fait valoir de bonne foi des prétentions résultant du contrat de travail;
e  parce que l'autre partie accomplit un service obligatoire, militaire ou dans la protection civile, ou un service civil, en vertu de la législation fédérale, ou parce qu'elle accomplit une obligation légale lui incombant sans qu'elle ait demandé de l'assumer.
2    Est également abusif le congé donné par l'employeur:
a  en raison de l'appartenance ou de la non-appartenance du travailleur à une organisation de travailleurs ou en raison de l'exercice conforme au droit d'une activité syndicale;
b  pendant que le travailleur, représentant élu des travailleurs, est membre d'une commission d'entreprise ou d'une institution liée à l'entreprise et que l'employeur ne peut prouver qu'il avait un motif justifié de résiliation.
c  sans respecter la procédure de consultation prévue pour les licenciements collectifs (art. 335f).
3    Dans les cas prévus à l'al. 2, let. b, la protection du représentant des travailleurs dont le mandat a pris fin en raison d'un transfert des rapports de travail (art. 333) est maintenue jusqu'au moment où ce mandat aurait expiré si le transfert n'avait pas eu lieu.197
CO, elle conclut au rejet de l'ensemble des conclusions en paiement prises par l'employé (ci-après: l'intimé). Ce dernier conclut au rejet du recours. L'autorité précédente se réfère à son arrêt.

Considérant en droit:

1.
Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 105 Faits déterminants - 1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente.
1    Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente.
2    Il peut rectifier ou compléter d'office les constatations de l'autorité précédente si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95.
3    Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente.99
LTF). A teneur de l'art. 105 al. 2
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 105 Faits déterminants - 1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente.
1    Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente.
2    Il peut rectifier ou compléter d'office les constatations de l'autorité précédente si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95.
3    Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente.99
LTF, il ne peut s'en écarter que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - c'est-à-dire arbitraire (ATF 135 III 127 consid. 1.5) -, ou en violation du droit au sens de l'art. 95
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 95 Droit suisse - Le recours peut être formé pour violation:
a  du droit fédéral;
b  du droit international;
c  de droits constitutionnels cantonaux;
d  de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires;
e  du droit intercantonal.
LTF. La partie recourante qui entend s'écarter des constatations de l'autorité précédente doit expliquer de manière circonstanciée en quoi les conditions d'une exception prévue par l'art. 105 al. 2
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 105 Faits déterminants - 1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente.
1    Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente.
2    Il peut rectifier ou compléter d'office les constatations de l'autorité précédente si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95.
3    Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente.99
LTF seraient réalisées, faute de quoi il n'est pas possible de tenir compte d'un état de fait qui diverge de celui contenu dans la décision attaquée (ATF 136 I 184 consid. 1.2; 133 IV 286 consid. 1.4 et 6.2).

En l'espèce, à défaut de tout grief en ce sens, les faits ressortant de l'arrêt attaqué sont seuls déterminants. Dans la mesure où la recourante invoque d'autres faits, il ne saurait en être tenu compte.

2.
Dans le cas concret, l'intimé, depuis plus de dix ans au service de la recourante, était à une année environ de l'âge de la retraite; bien que souffrant d'un manque de motivation, il continuait à fournir, comme par le passé, un travail correspondant aux attentes de la recourante, c'est-à-dire suffisant. Deux mois après avoir fait l'objet d'une évaluation plus ou moins satisfaisante, il a reçu son congé. L'arrêt attaqué ne constate pas que les prestations de l'intimé se seraient sensiblement dégradées entre les dates de la dernière évaluation et du congé, ni qu'il y aurait eu une mise en demeure préalable, ou que les personnes responsables au sein de la recourante auraient recherché une solution moins incisive avec l'intimé.

La situation de fait diffère sensiblement de celle de l'arrêt 4A 419/2007 invoqué par la recourante, où le travailleur n'était âgé que de 55 ans et avait reçu plusieurs admonestations de nature à lui faire prendre conscience du risque de licenciement s'il n'améliorait pas ses performances; il n'avait pas non plus été en mesure de fournir des prestations suffisantes à un autre poste de travail où il avait été muté. Les faits du cas d'espèce sont en revanche très similaires à ceux jugés dans l'arrêt publié aux ATF 132 III 115, où le congé abusif a été retenu: il y allait d'un travailleur à 14 mois de la retraite légale qui, bien que lent, fournissait des prestations satisfaisantes et avait été licencié sans qu'on recherche une solution moins dure.
En suivant ce précédent très similaire, la Cour d'appel n'a pas violé le droit fédéral. On ne saurait en particulier parler, comme le fait la recourante, de "prime à la nonchalance". Il est dans le cours ordinaire de la vie qu'un travailleur se trouvant à une année de la retraite puisse être moins motivé qu'un jeune; cela ne dispense pas l'employeur d'avoir des égards envers une personne depuis longtemps à son service, tant que celle-ci accomplit ses tâches de manière objectivement satisfaisante.

3.
La recourante succombe. Elle supporte les frais et dépens de la procédure (art. 66
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
1    En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
2    Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis.
3    Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés.
4    En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours.
5    Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement.
et 68
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 68 Dépens - 1 Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
1    Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
2    En règle générale, la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige.
3    En règle générale, aucuns dépens ne sont alloués à la Confédération, aux cantons, aux communes ou aux organisations chargées de tâches de droit public lorsqu'ils obtiennent gain de cause dans l'exercice de leurs attributions officielles.
4    L'art. 66, al. 3 et 5, est applicable par analogie.
5    Le Tribunal fédéral confirme, annule ou modifie, selon le sort de la cause, la décision de l'autorité précédente sur les dépens. Il peut fixer lui-même les dépens d'après le tarif fédéral ou cantonal applicable ou laisser à l'autorité précédente le soin de les fixer.
LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.

3.
La recourante versera à l'intimé une indemnité de 2'500 fr. à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à la Cour d'appel civile du Tribunal cantonal du canton de Neuchâtel.

Lausanne, le 18 février 2013

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Klett

La Greffière: Monti