S. 238 / Nr. 51 Prozessrecht (f)

BGE 65 II 238

51. Arrêt de la IIe Section civile du 12 octobre 1939 dans la cause Altorfer
contre Gétaz et Altorfer

Regeste:
La règle prévue par l'art. 8 de la loi fédérale sur les rapports de droit
civil des citoyens établis ou en séjour, pour la solution des conflits de
juridiction en matière de filiation est applicable

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même si dans le cas donné les deux législations cantonales s'accordent pour
attribuer la compétence au même juge (conflit virtuel).
Der Gerichtsstand für Streitigkeiten über den Familienstand bestimmt sich nach
Art. 8 NAG, auch wenn sich im einzelnen Fall bei Anwendung der Normen der
beiden in Frage stehenden Kantone kein Konflikt ergäbe.
La norma, che l'art. 8 della legge federale sui rapporti di diritto civile dei
domiciliati e dei dimoranti stabilisce per risolvere i conflitti di
giurisdizione in materia di filiazione, è applicabile anche se nel caso
concreto le due legislazioni cantonali sono concordi nell'attribuire la
competenza al medesimo giudice (conflitto virtuale).

A. - Henri Altorfer, ressortissant zurichois, domicilié à Lausanne, a épousé
Elisabeth Gétaz en 1935. En 1936, il a demandé son divorce et il l'a obtenu
par jugement du Tribunal du district de Lausanne du 28 juin 1937. Moins de 300
jours après la dissolution du mariage, soit le 25 février 1938, Dame Gétaz a
accouché d'une fille, Gabrielle, qui a été inscrite comme enfant légitime des
époux Altorfer.
Altorfer a ouvert action en désaveu à son ex-femme et à sa fille - domiciliées
comme lui à Lausanne - à la fois à Lausanne et à Zurich, mais en faisant
suspendre le procès zurichois jusqu'à droit connu sur la compétence du juge
vaudois.
Dans le procès intenté à Lausanne, les défenderesses ont soulevé le
déclinatoire. Le Tribunal du district de Lausanne s'est déclaré compétent,
mais, sur recours des défenderesses, le Tribunal cantonal a admis le
déclinatoire et a renvoyé le demandeur à mieux agir, c'est-à-dire à poursuivre
le procès introduit à Zurich.
B. - Altorfer a recouru en réforme et pour le cas où le recours en réforme
serait jugé irrecevable, il a simultanément et subsidiairement formé un
recours de droit civil par lequel il a conclu à l'annulation de l'arrêt du
Tribunal cantonal et à la reconnaissance de la compétence du Tribunal de
Lausanne.
Il soutient en résumé que l'art. 8 de la loi de 1891 sur les rapports des
citoyens établis ou en séjour n'est applicable que dans le cas d'un conflit
entre les deux législations en

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présence, ce qui ne se produit pas en l'espèce puisque la loi zurichoise et la
loi vaudoise attribuent l'une et l'autre la compétence au juge du domicile de
la partie défenderesse et que ce domicile est à Lausanne.
Les défenderesses ont conclu au rejet du recours de droit civil.
Considérant en droit:
1.- Le recours en réforme est irrecevable, car l'arrêt attaqué n'est pas un
jugement au fond. La prétention litigieuse n'est pas liquidée par lui; il est
simplement jugé que le tribunal vaudois qui en a été saisi n'est pas compétent
pour en connaître.
Cette décision se fondant sur l'art. 8 de la loi de 1891 sur les rapports de
droit civil des citoyens établis ou en séjour, que le recourant prétend avoir
été appliqué à tort, le recours de droit civil déposé à titre subsidiaire est
recevable (art. 87 ch. 2 OJ).
2.- Pour les matières qu'elle régit (droit des personnes, droit de famille,
droit successoral), la loi de 1891 a eu pour objet de déterminer dans les
rapports intercantonaux, d'une part, le droit applicable, d'autre part, la
juridiction compétente. C'est ainsi que l'art. 8 dont il s'agit en l'espèce
prescrit que la filiation est soumise à la fois à la législation (de droit
matériel) et à la juridiction du lieu d'origine. Le droit civil ayant été
unifié (sous d'infimes réserves), il est clair que cette loi est devenue sans
objet en ce qui concerne les conflits intercantonaux de droit matériel. S'il
en est de même en ce qui concerne les conflits de juridiction dans les
matières où le code civil institue une règle de for, il n'y a en revanche
aucune raison d'exclure l'application de la loi lorsque le code civil ne
détermine pas le juge compétent. C'est aussi bien ce que le Tribunal fédéral a
jugé en jurisprudence constante (v. entre autres RO 42 II 309, 55 II 323, 60
II 387
et sv.), et cette jurisprudence doit être maintenue.
Quant à savoir s'il faut limiter l'application de la loi et de la règle posée
à l'art. 8 au cas où les deux lois cantonales

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en présence fixent réellement des fors différents et par conséquent de
l'exclure quand au contraire elles concordent pour désigner le même juge, le
juge du domicile des défendeurs par exemple, comme en l'espèce, ou celui du
domicile du demandeur, sous le prétexte qu'il n'y a pas de conflit au sens
propre du mot, une réponse négative s'impose. Ainsi que le Tribunal fédéral
l'a jugé dans l'arrêt Reimann contre Reimann du 5 décembre 1929 (RO 55 II
327
), l'art. 8 doit être tenu pour applicable non pas seulement en cas de
conflits véritables, mais même en cas de conflits virtuels, c'est-à-dire de
conflits qui peuvent résulter de la coexistence de deux lois, lors même qu'en
fait ils ne se produisent pas, parce que ces lois s'accordent pour désigner le
même juge. Cette solution est au surplus conforme aux principes du droit
international. Si un traité international pose une règle de for, elle est
applicable quand bien même les législations internes des deux Etats
contractants seraient d'accord pour désigner un for différent. De même la
règle de l'art. 59 Const. féd. prévaudrait sur une règle contraire qui serait
posée par la législation concordante de deux cantons. De même la règle de
l'art. 8 doit l'emporter en l'espèce sur la règle de la législation zurichoise
et de la loi vaudoise qui n'ont et ne peuvent avoir qu'une portée
intracantonale.
Les considérations d'ordre pratique qu'invoque le recourant pour combattre
cette opinion ne sont certes pas dénués de valeur. Il est de fait qu'en
l'espèce il pourrait paraître plus normal d'attribuer la compétence au juge du
domicile des parties défenderesses. Cependant ce qui importe surtout, c'est
d'avoir une règle précise. Si l'on déclare l'art. 8 applicable chaque fois que
les parties ne sont pas domiciliées dans leur canton d'origine, on sait à quoi
s'en tenir. Il en serait tout autrement si, pour fixer sa compétence, le juge
devait d'abord résoudre la question parfois délicate de savoir si le for prévu
par la loi de procédure du canton d'origine est le même que le for prévu par
la loi de procédure du canton de domicile de la partie

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défenderesse (le cas échéant le même aussi que le for prévu par la loi du
canton du domicile du demandeur).
Quant à l'argument tiré du texte allemand de l'art. 59 du titre final du code
civil suisse et plus particulièrement du mot «verschiedenes», il n'est pas
décisif non plus. Ce mot peut s'appliquer non pas seulement au cas où les deux
lois cantonales ont un contenu différent, mais plus généralement aussi au cas
où les deux lois cantonales demeurent simultanément en vigueur et peuvent donc
différer et entre elles et du droit fédéral.
Le Tribunal fédéral prononce:
Le recours en réforme est irrecevable et le recours de droit civil est rejeté.
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 65 II 238
Date : 01. Januar 1938
Publié : 12. Oktober 1939
Source : Bundesgericht
Statut : 65 II 238
Domaine : BGE - Zivilrecht
Objet : La règle prévue par l'art. 8 de la loi fédérale sur les rapports de droit civil des citoyens...


Répertoire des lois
OJ: 87
Répertoire ATF
42-II-309 • 55-II-323 • 60-II-387 • 65-II-238
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
lausanne • droit civil • tribunal fédéral • rapport de droit • intercantonal • quant • filiation • tribunal cantonal • droit matériel • décision • code civil suisse • membre d'une communauté religieuse • traité international • garantie du juge du domicile • forme et contenu • champ d'application • action en désaveu • titre final • droit des personnes • lieu d'origine
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