118 IV 233
42. Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation pénale du 3 juin 1992 dans la cause F. c. Procureur général du canton de Genève (pourvoi en nullité)
Regeste (de):
- Art. 113 StGB; Totschlag.
- Zur Annahme eines Totschlags genügt es nicht, dass der Täter unter grosser seelischer Belastung gehandelt hat, diese muss überdies nach den Umständen entschuldbar gewesen sein; die Frage der Entschuldbarkeit ist nicht notwendigerweise nach denselben Kriterien zu entscheiden, die im Falle der heftigen Gemütsbewegung erheblich sind.
Regeste (fr):
- Art. 113
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937
CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans.
- Pour qualifier un homicide de meurtre passionnel, il ne suffit pas que l'auteur ait été, au moment de l'acte, dans un état de profond désarroi, il faut encore que cet état soit rendu excusable par les circonstances; les critères permettant de trancher cette question ne seront pas nécessairement les mêmes que lorsqu'il s'agit d'une émotion violente.
Regesto (it):
- Art. 113
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937
CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans.
- Perché un omicidio possa essere qualificato come passionale non basta che l'autore abbia agito in stato di profonda prostrazione; occorre altresì che tale stato risulti scusabile in base alle circostanze; i criteri che permettono di decidere al riguardo non sono necessariamente gli stessi di quelli applicabili al caso della violenta commozione dell'animo.
Sachverhalt ab Seite 233
BGE 118 IV 233 S. 233
A.- F. a épousé Catherine X. le 10 octobre 1986; deux enfants sont nés de cette union. Déjà deux ans après le mariage, l'entente au sein du couple s'était progressivement dégradée. F. avait exercé des violences sur son épouse afin de l'obliger à subir l'acte sexuel et, au mois de février 1990, la police était intervenue, à la demande de celle-ci, et avait saisi une arme à feu. Le 5 juin 1990, après des violences exercées par F. sur son épouse et constatées par trois médecins, celle-ci avait quitté le domicile conjugal avec ses enfants et souhaité intenter une action en séparation de corps. Le 10 juillet 1990, en présence
BGE 118 IV 233 S. 234
de deux témoins, F. a proféré des menaces de mort contre sa femme. Le lendemain, 11 juillet 1990, il est allé chercher son épouse à son lieu de travail et l'a amenée chez lui, afin qu'elle signe un document en vue de la vente d'un véhicule (sur ce point l'arrêt cantonal, duquel il ressort que le couple se serait rendu au nouveau domicile de la victime, contient une inadvertance manifeste qui doit être rectifiée en application de l'art. 277bis
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans. |
B.- La cause fut appelée devant la Cour d'assises du canton de Genève le 15 octobre 1991. Sur requête de la défense, il fut demandé au jury si F. avait agi par négligence. La question posée contenait en particulier le passage suivant: "étant précisé que lorsqu'il a serré le cou de Catherine F. avec son bras, c'était sans l'intention de causer la mort, agissant sans se rendre compte ou sans tenir compte des conséquences de son acte". A cette question, le jury donna une réponse négative. Sur requête de la défense, il fut également demandé au jury si F. avait commis un meurtre passionnel en agissant dans un état de profond désarroi. La question posée contenait notamment le passage suivant: "étant précisé qu'au moment d'agir, F. se trouvait dans un état de profond désarroi découlant des rapports familiaux et conjugaux complètement perturbés". A cette question, le jury donna une réponse négative, en ajoutant la motivation suivante: "il n'est pas établi que l'éventuel désarroi de F. serait excusable au vu des circonstances ressortant du dossier, son acte apparaissant au contraire être la conséquence de son attitude égoïste et brutale." A la question de savoir si F. avait commis un meurtre au sens de l'art. 111
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 111 - Quiconque tue une personne intentionnellement est puni d'une peine privative de liberté de cinq ans au moins, en tant que les conditions prévues aux articles suivants ne sont pas réalisées. |
Retenant ainsi un meurtre sans circonstance atténuante, la Cour d'assises a condamné F. à la peine de 13 ans de réclusion et a révoqué par ailleurs un sursis antérieur.
BGE 118 IV 233 S. 235
Par arrêt du 13 février 1992, la Cour de cassation cantonale a rejeté le pourvoi formé par le condamné. Contrairement à la Cour d'assises, elle a jugé que le profond désarroi n'avait pas à être excusable pour que l'art. 113
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans. |
C.- Contre cet arrêt, F. s'est pourvu en nullité à la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral. Soutenant que la cour cantonale a méconnu la notion de "profond désarroi" contenue à l'art. 113
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans. |
D.- Invité à présenter des observations, le Ministère public a conclu au rejet du pourvoi, qu'il estime infondé.
Erwägungen
Considérant en droit:
2. a) Le recourant soutient que la cour cantonale a méconnu la notion de "profond désarroi" figurant à l'art. 113
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans. |
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans. |
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans. |
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans. |
BGE 118 IV 233 S. 236
Le message du Conseil fédéral cite l'exemple de la mère qui se résout à tuer son enfant incurable parce qu'elle n'en peut plus de le voir souffrir et, surtout, ne peut plus endurer la situation qui s'y rattache (FF 1985 II 1036). On constate donc que cette seconde alternative a trait à des situations différentes de la première, même s'il est concevable que certains cas se situent à la limite entre les deux. Ainsi, cet amendement de l'art. 113
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans. |
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans. |
BGE 118 IV 233 S. 237
conclure que la volonté du législateur n'était pas de mettre au bénéfice de l'art. 113
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans. |
BGE 118 IV 233 S. 238
mêmes suivant que l'on se trouve en présence d'une émotion violente ou d'un profond désarroi. On pourrait même concevoir dans certaines circonstances que ce caractère excusable résulte, avec l'écoulement du temps, de l'état dans lequel se trouvait l'auteur. Il n'est cependant pas nécessaire de définir avec précision les circonstances dans lesquelles le profond désarroi doit être considéré comme excusable, tant il apparaît évident que tel n'est pas le cas en l'espèce. Il faut relever tout d'abord que le caractère excusable de l'émotion violente ou du profond désarroi suppose un certain jugement porté sur les faits; il s'agit donc d'une question de droit, qui peut être librement examinée dans le cadre d'un pourvoi en nullité (voir CORBOZ, Le pourvoi en nullité, SJ 1991, p. 95 et les références citées). C'est néanmoins sur la base des faits constatés par l'autorité cantonale que la Cour de cassation doit examiner si ces notions ont été interprétées correctement. b) A la question de savoir si, en l'espèce, le recourant avait commis un meurtre passionnel, le jury de la Cour d'assises a répondu négativement, en motivant ainsi sa décision: "il n'est pas établi que l'éventuel désarroi de F. serait excusable au vu des circonstances ressortant du dossier, son acte apparaissant au contraire être la conséquence de son attitude égoïste et brutale". Le jury n'a considéré l'état de profond désarroi que comme une éventualité, renonçant à trancher la question, dès lors qu'il lui apparaissait que, de toute manière, cet état - s'il était réalisé - n'était pas excusable. Il a dénié le caractère excusable d'un éventuel profond désarroi en considérant que tout procédait en définitive de l'attitude égoïste et brutale de l'accusé. Etant rappelé que la Cour de cassation est liée par les constatations de fait de l'autorité cantonale, il faut observer que si le recourant se trouvait profondément perturbé par l'échec de son union conjugale, cette situation résultait surtout de ses brutalités envers son épouse. L'état dans lequel il se trouvait était donc principalement dû à sa faute. S'il était en proie à une émotion violente au moment des faits, cela résulte essentiellement de ce qu'il tentait d'imposer des relations sexuelles à son épouse, sans tenir compte de son refus lié à la séparation et à la détérioration du lien conjugal; il a ainsi provoqué son état d'excitation par ses exigences égoïstes, ne tenant pas compte de la personnalité et de la volonté de sa femme. Dans de telles circonstances, en déniant le caractère excusable, sous quelque forme que ce soit, d'un éventuel état de profond désarroi ou d'émotion violente,
BGE 118 IV 233 S. 239
l'autorité cantonale n'a pas fait une fausse interprétation des conditions posées par l'art. 113
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans. |
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans. |
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 113 - Si l'auteur tue alors qu'il est en proie à une émotion violente que les circonstances rendent excusable, ou qu'il est au moment de l'acte dans un état de profond désarroi, il est puni d'une peine privative de liberté d'un à dix ans. |