117 II 563
104. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour civile du 22 octobre 1991 dans la cause B. S.A. contre X. (recours en réforme)
Regeste (de):
- Haftung des Anwalts (Art. 398 Abs. 2 OR).
- 1. Umfang der Sorgfaltspflicht des Rechtsanwalts (E. 2a).
- 2. Der Anwalt haftet grundsätzlich für jedes, auch für leichtes Verschulden (Präzisierung der Rechtsprechung; E. 2a und b).
- 3. Haftung des Anwalts für die Unterlassung, einen klar erkennbaren Irrtum in den Instruktionen zur Eintragung eines Bauhandwerkerpfandrechts zu berichtigen; der Auftraggeber hatte zwar die zu belastende Parzelle falsch bezeichnet; der Irrtum liess sich jedoch aufgrund der Abklärungen des Anwalts klar erkennen (E. 3).
Regeste (fr):
- Responsabilité civile de l'avocat (art. 398 al. 2
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 398 - 1 La responsabilité du mandataire est soumise, d'une manière générale, aux mêmes règles que celle du travailleur dans les rapports de travail.256
1 La responsabilité du mandataire est soumise, d'une manière générale, aux mêmes règles que celle du travailleur dans les rapports de travail.256 2 Le mandataire est responsable envers le mandant de la bonne et fidèle exécution du mandat. 3 Il est tenu de l'exécuter personnellement, à moins qu'il ne soit autorisé à le transférer à un tiers, qu'il n'y soit contraint par les circonstances ou que l'usage ne permette une substitution de pouvoirs. - 1. Etendue du devoir de diligence de l'avocat (consid. 2a).
- 2. L'avocat répond en principe de toute faute; sa responsabilité est donc aussi engagée pour une faute légère (précision de la jurisprudence; consid. 2a et b).
- 3. Responsabilité de l'avocat qui, ayant entrepris des démarches afin de déterminer la parcelle devant être grevée d'une hypothèque des artisans et entrepreneurs, démarches qui ont fait apparaître clairement l'erreur commise par le mandant dans la désignation de ladite parcelle, omet de rectifier cette erreur dans la réquisition d'inscription de l'hypothèque légale (consid. 3).
Regesto (it):
- Responsabilità civile dell'avvocato (art. 398 cpv. 2
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 398 - 1 La responsabilité du mandataire est soumise, d'une manière générale, aux mêmes règles que celle du travailleur dans les rapports de travail.256
1 La responsabilité du mandataire est soumise, d'une manière générale, aux mêmes règles que celle du travailleur dans les rapports de travail.256 2 Le mandataire est responsable envers le mandant de la bonne et fidèle exécution du mandat. 3 Il est tenu de l'exécuter personnellement, à moins qu'il ne soit autorisé à le transférer à un tiers, qu'il n'y soit contraint par les circonstances ou que l'usage ne permette une substitution de pouvoirs. - 1. Estensione dell'obbligo di diligenza dell'avvocato (consid. 2a).
- 2. In linea di principio, l'avvocato risponde per ogni colpa, anche per colpa leggera (precisazione della giurisprudenza; consid. 2a e b).
- 3. Responsabilità dell'avvocato che, dopo aver compiuto ricerche per stabilire la particella da gravare con un'ipoteca degli artigiani e imprenditori, ricerche dalle quali emergeva chiaramente l'errore compiuto dal mandante nella descrizione di tale particella, omette di correggere l'errore nell'istanza tendente ad ottenere l'iscrizione provvisoria dell'ipoteca legale (consid. 3).
Sachverhalt ab Seite 564
BGE 117 II 563 S. 564
A.- Du 26 avril au 21 juin 1984, B. S.A., agissant comme sous-traitant, a livré à l'entrepreneur général, la société C. S.A., des éléments en béton fabriqués spécialement pour un bâtiment en construction sur une parcelle sise à Meyrin et appartenant aux époux M. C. S.A., en proie à de sérieuses difficultés financières, ne versa qu'un acompte de 25'800 francs sur les 86'000 francs représentant le prix total de ces livraisons. Aussi, dans le courant du mois de juillet 1984, B. S.A. chargea-t-elle Me X., avocat à Genève, de requérir l'inscription d'une hypothèque des artisans et entrepreneurs d'un montant de 60'200 francs, en garantie du paiement du solde de sa créance. A cet effet, elle lui transmit une série de pièces qui faisaient toutes référence à un immeuble résidentiel situé 9, avenue X., à Meyrin. Au début du mois d'août 1984, Me X. confia à son stagiaire le soin d'effectuer des recherches afin de déterminer quel était le bien-fonds correspondant à l'adresse qui lui avait été indiquée par B. S.A. Il en ressortit que cette adresse était celle de la parcelle No 10.166, d'une contenance de 272 m2, copropriété des époux M., sur laquelle avait été construit un bâtiment occupant une surface
BGE 117 II 563 S. 565
de 147 m2. Le stagiaire se rendit ensuite sur place et y vit le bâtiment en question ainsi qu'un chantier à proximité. Le 5 septembre 1984, Me X. déposa une requête tendant à l'inscription provisoire, sur la parcelle No 10.166, d'une hypothèque légale d'un montant de 60'200 francs qui fut porté par la suite à 71'008 fr. 20, B. S.A. ayant procédé dans l'intervalle à une nouvelle livraison. Les époux M. ne s'opposèrent pas à l'augmentation du montant du gage et ne prirent pas de conclusions concernant cette requête qui fut admise le 20 septembre 1984 par le Tribunal de première instance du canton de Genève. Dans la procédure au fond qui s'ensuivit, ils s'opposèrent, en revanche, à l'admission de la demande de B. S.A. en alléguant que les matériaux livrés par le sous-traitant n'avaient pas engendré une plus-value susceptible de justifier l'inscription d'une hypothèque légale sur la parcelle No 10.166, du moment qu'aucun bâtiment nouveau n'avait été édifié sur ce bien-fonds. La procédure probatoire permit effectivement d'établir que les éléments en béton livrés par B. S.A. avaient été incorporés, non pas au bâtiment sis sur ladite parcelle, mais bien à celui qui était en cours de construction sur les parcelles voisines Nos 10.161, 10.160 et 13.091 (7-7A, avenue X.), appartenant également aux époux M. La demande de B. S.A. fut, en conséquence, rejetée par jugement du Tribunal de première instance du 20 juin 1985, que la Cour de justice du canton de Genève confirma le 28 février 1986 sur appel de B. S.A. Entre-temps, l'autorité compétente avait homologué le concordat proposé par C. S.A. à ses créanciers et B. S.A. avait obtenu finalement un dividende de 15%, soit la somme de 10'651 fr. 20.
B.- Le 18 décembre 1987, B. S.A. a introduit, contre Me X., une action en responsabilité en vue d'obtenir le paiement de la somme de 60'357 francs, représentant le montant non couvert de sa créance envers C. S.A., et la restitution de la provision de 4'000 francs qu'elle avait versée à cet avocat, le tout avec intérêts. Le défendeur a conclu au rejet de la demande et, reconventionnellement, au paiement de 12'746 fr. 50, plus intérêts, à titre de solde d'honoraires. Par jugement du 21 juin 1990, le Tribunal de première instance du canton de Genève, considérant que l'avocat avait certes violé son devoir de diligence, mais sans que l'on puisse le lui imputer à faute, a rejeté la demande principale et admis la demande reconventionnelle.
BGE 117 II 563 S. 566
Statuant le 19 avril 1991, sur appel de la demanderesse, la Cour de justice du canton de Genève a confirmé le rejet de la demande principale, mais ramené à 7'746 fr. 50, plus intérêts, le montant alloué au défendeur. Elle a estimé, à cet égard, que l'avocat n'avait commis qu'une faute légère, laquelle ne pouvait engager sa responsabilité mais commandait néanmoins une réduction de 50% de ses honoraires.
C.- La demanderesse a recouru en réforme au Tribunal fédéral en concluant à l'annulation de l'arrêt cantonal et à l'allocation d'un montant de 64'537 (recte: 64'357) francs en capital. Le Tribunal fédéral a admis partiellement le recours, annulé l'arrêt attaqué, dans la mesure où la demande principale avait été entièrement rejetée, et renvoyé la cause à la cour cantonale pour nouveau jugement dans le sens des considérants.
Erwägungen
Extrait des considérants:
2. a) L'activité de l'avocat relève du mandat. En tant que mandataire, l'avocat ne répond pas d'un résultat, mais de la bonne et fidèle exécution du mandat (art. 398 al. 2
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SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 398 - 1 La responsabilité du mandataire est soumise, d'une manière générale, aux mêmes règles que celle du travailleur dans les rapports de travail.256 |
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1 | La responsabilité du mandataire est soumise, d'une manière générale, aux mêmes règles que celle du travailleur dans les rapports de travail.256 |
2 | Le mandataire est responsable envers le mandant de la bonne et fidèle exécution du mandat. |
3 | Il est tenu de l'exécuter personnellement, à moins qu'il ne soit autorisé à le transférer à un tiers, qu'il n'y soit contraint par les circonstances ou que l'usage ne permette une substitution de pouvoirs. |
BGE 117 II 563 S. 567
telles que le respect de délais de péremption ou de prescription (arrêt non publié G. c. L., du 23 avril 1983, partiellement reproduit in JdT 1984 I 146ss, avec de nombreuses références; voir aussi: ATF 115 II 64 consid. 3a, 91 II 439/440, ATF 87 II 368 ss consid. 1). La violation, par l'avocat, de son devoir de diligence constitue, du point de vue juridique, une inexécution ou une mauvaise exécution de son obligation de mandataire et correspond ainsi, au plan contractuel, à la notion d'illicéité propre à la responsabilité délictuelle (cf. ATF 115 Ib 181 et les références). Elle entraîne la perte du droit aux honoraires et au remboursement des frais consentis pour l'exécution du mandat (art. 402 al. 1
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SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 402 - 1 Le mandant doit rembourser au mandataire, en principal et intérêts, les avances et frais que celui-ci a faits pour l'exécution régulière du mandat, et le libérer des obligations par lui contractées. |
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1 | Le mandant doit rembourser au mandataire, en principal et intérêts, les avances et frais que celui-ci a faits pour l'exécution régulière du mandat, et le libérer des obligations par lui contractées. |
2 | Il doit aussi l'indemniser du dommage causé par l'exécution du mandat, s'il ne prouve que ce dommage est survenu sans sa faute. |
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SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 97 - 1 Lorsque le créancier ne peut obtenir l'exécution de l'obligation ou ne peut l'obtenir qu'imparfaitement, le débiteur est tenu de réparer le dommage en résultant, à moins qu'il ne prouve qu'aucune faute ne lui est imputable. |
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1 | Lorsque le créancier ne peut obtenir l'exécution de l'obligation ou ne peut l'obtenir qu'imparfaitement, le débiteur est tenu de réparer le dommage en résultant, à moins qu'il ne prouve qu'aucune faute ne lui est imputable. |
2 | Les dispositions de la loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pour dettes et la faillite44 et du code de procédure civile du 19 décembre 2008 (CPC)45 s'appliquent à l'exécution.46 |
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SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 43 - 1 Le juge détermine le mode ainsi que l'étendue de la réparation, d'après les circonstances et la gravité de la faute. |
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1 | Le juge détermine le mode ainsi que l'étendue de la réparation, d'après les circonstances et la gravité de la faute. |
1bis | Lorsqu'un animal qui vit en milieu domestique et n'est pas gardé dans un but patrimonial ou de gain, est blessé ou tué, le juge peut tenir compte dans une mesure appropriée de la valeur affective de l'animal pour son détenteur ou les proches de celui-ci.26 |
2 | Des dommages-intérêts ne peuvent être alloués sous forme de rente que si le débiteur est en même temps astreint à fournir des sûretés. |
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SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 99 - 1 En général, le débiteur répond de toute faute. |
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1 | En général, le débiteur répond de toute faute. |
2 | Cette responsabilité est plus ou moins étendue selon la nature particulière de l'affaire; elle s'apprécie notamment avec moins de rigueur lorsque l'affaire n'est pas destinée à procurer un avantage au débiteur. |
3 | Les règles relatives à la responsabilité dérivant d'actes illicites s'appliquent par analogie aux effets de la faute contractuelle. |
BGE 117 II 563 S. 568
3. a) Le défendeur n'a pas violé fautivement son devoir de diligence du seul fait qu'il n'a pas procédé lui-même à la recherche des renseignements nécessaires à l'établissement des faits pertinents, mais en a confié le soin à son stagiaire. Il doit, toutefois, se laisser opposer le comportement de ce dernier en vertu de l'art. 101 al. 1
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SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 101 - 1 Celui qui, même d'une manière licite, confie à des auxiliaires, tels que des personnes vivant en ménage avec lui ou des travailleurs, le soin d'exécuter une obligation ou d'exercer un droit dérivant d'une obligation, est responsable envers l'autre partie du dommage qu'ils causent dans l'accomplissement de leur travail.47 |
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1 | Celui qui, même d'une manière licite, confie à des auxiliaires, tels que des personnes vivant en ménage avec lui ou des travailleurs, le soin d'exécuter une obligation ou d'exercer un droit dérivant d'une obligation, est responsable envers l'autre partie du dommage qu'ils causent dans l'accomplissement de leur travail.47 |
2 | Une convention préalable peut exclure en tout ou en partie la responsabilité dérivant du fait des auxiliaires. |
3 | Si le créancier est au service du débiteur, ou si la responsabilité résulte de l'exercice d'une industrie concédée par l'autorité, le débiteur ne peut s'exonérer conventionnellement que de la responsabilité découlant d'une faute légère. |
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SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 839 - 1 L'hypothèque des artisans et des entrepreneurs peut être inscrite à partir du jour où ils se sont obligés à exécuter le travail ou les ouvrages promis. |
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1 | L'hypothèque des artisans et des entrepreneurs peut être inscrite à partir du jour où ils se sont obligés à exécuter le travail ou les ouvrages promis. |
2 | L'inscription doit être obtenue au plus tard dans les quatre mois qui suivent l'achèvement des travaux. |
3 | Elle n'a lieu que si le montant du gage est établi par la reconnaissance du propriétaire ou par le juge; elle ne peut être requise si le propriétaire fournit des sûretés suffisantes au créancier. |
4 | Si l'immeuble fait incontestablement partie du patrimoine administratif et que la dette ne résulte pas de ses obligations contractuelles, le propriétaire répond envers les artisans et les entrepreneurs des créances reconnues ou constatées par jugement, conformément aux règles sur le cautionnement simple, pour autant que les créanciers aient fait valoir leur créance par écrit au plus tard dans les quatre mois qui suivent l'achèvement des travaux en se prévalant du cautionnement légal. |
5 | Si l'appartenance de l'immeuble au patrimoine administratif est contestée, l'artisan ou l'entrepreneur peut requérir une inscription provisoire de son droit de gage au registre foncier au plus tard dans les quatre mois qui suivent l'achèvement des travaux. |
6 | S'il est constaté sur la base d'un jugement que l'immeuble fait partie du patrimoine administratif, l'inscription provisoire du gage est radiée. Pour autant que les conditions prévues à l'al. 4 soient remplies, le cautionnement légal la remplace. Le délai est réputé sauvegardé par l'inscription provisoire du droit de gage. |
BGE 117 II 563 S. 569
encore et surtout du fait que le volume des livraisons effectuées par l'entrepreneur, tel qu'il ressortait des pièces en possession de l'avocat, excluait d'emblée la possibilité que ces éléments en béton (cadres de façade, dalles de balcons, sommiers, etc.) fussent destinés à un bâtiment à construire sur les 125 m2 restants de la parcelle No 10.166. Par conséquent, le fait d'avoir considéré que l'hypothèque légale pouvait être constituée sur cette parcelle équivaut objectivement à une violation du devoir de diligence incombant à l'avocat. c) A sa décharge, le défendeur met en évidence le caractère erroné des indications qui lui ont été fournies par la demanderesse. Cet état de choses ne suffit toutefois pas à infirmer, en l'espèce, la présomption de faute découlant de la mauvaise exécution du mandat. En effet, ce qui est décisif ici n'est pas de savoir si l'avocat aurait pu se reposer sur ces indications et se contenter, par exemple, de rechercher le numéro de la parcelle correspondant à l'adresse qui lui avait été indiquée, mais bien le fait qu'ayant entrepris des démarches supplémentaires en vue de clarifier la situation, démarches qui avaient fait apparaître clairement l'erreur commise par le mandant dans la désignation de la parcelle devant être grevée de l'hypothèque légale, le défendeur a omis de rectifier cette erreur. Il n'est du reste nullement établi qu'il n'ait pas disposé de suffisamment de temps pour le faire. Bien au contraire, c'est la conclusion inverse qui s'impose, selon l'expérience générale, à en juger par le fait que les premières démarches visant à déterminer l'objet du gage ont été entreprises au début du mois d'août 1984, alors que la requête tendant à l'inscription provisoire de l'hypothèque légale n'a été déposée que le 5 septembre de la même année. Il va sans dire que, dans l'intervalle, le défendeur aurait eu le temps de prendre contact avec son mandant pour obtenir tous les éclaircissements voulus. Sa responsabilité contractuelle est dès lors engagée en l'espèce puisqu'il a violé fautivement son devoir de diligence.