109 Ib 232
40. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour civile du 1er juillet 1983 dans la cause dame B. contre B. (recours de droit public).
Regeste (de):
- Abkommen zwischen der Schweizerischen Eidgenossenschaft und dem Deutschen Reich über die gegenseitige Anerkennung und Vollstreckung von gerichtlichen Entscheidungen und Schiedssprüchen vom 2. November 1929. Artikel 4 Absatz 1.
- Der schweizerische Ordre public steht der Abweisung eines Gesuches um Eheschutzmassnahmen nicht entgegen, wenn deutsche Staatsangehörige, die in der Schweiz Wohnsitz haben, von einem deutschen Gericht geschieden wurden, derweil vorher ein schweizerisches Gericht die Scheidungsklage abgewiesen hatte.
Regeste (fr):
- Convention entre la Confédération suisse et le Reich allemand relative à la reconnaissance et à l'exécution de décisions judiciaires et de sentences arbitrales, du 2 novembre 1929. Art. 4 alinéa premier.
- L'ordre public suisse ne s'oppose pas à ce que le juge suisse rejette une demande de mesures protectrices de l'union conjugale, s'agissant de ressortissants allemands, domiciliés en Suisse, dont le divorce a été prononcé par un tribunal allemand, alors que, auparavant, un tribunal suisse avait rejeté l'action en divorce introduite par l'une des parties.
Regesto (it):
- Convenzione tra la Confederazione Svizzera e il Reich Germanico circa il riconoscimento e l'esecuzione delle decisioni giudiziarie e delle sentenze arbitrali, del 2 novembre 1929, Art. 4 cpv. 1.
- L'ordine pubblico svizzero non si oppone a che il giudice svizzero respinga una domanda di misure protettrici dell'unione coniugale in un caso concernente cittadini germanici domiciliati in Svizzera, il cui divorzio è stato pronunciato da un tribunale germanico, dopo essere stato negato anni prima da un tribunale svizzero.
Sachverhalt ab Seite 233
BGE 109 Ib 232 S. 233
A.- a) B. et Irène E., tous deux de nationalité allemande, se sont mariés en 1956 à Constance (République fédérale d'Allemagne). Après leur mariage, ils se sont installés en Suisse, où ils vivent séparés depuis 1974. B. est actuellement domicilié à Clarens et Irène B. à Lausanne. b) B. a introduit action en divorce en 1964 devant le Tribunal civil du district de Lausanne. Statuant en dernier ressort, par arrêt du 2 mars 1972, le Tribunal fédéral a rejeté l'action, sur la base de l'art. 142 al. 2
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Dans une lettre datée du 5 juillet 1982, le défendeur a conclu au rejet des conclusions de la requérante. Le 7 juillet 1982, B. a demandé au Tribunal cantonal vaudois l'exequatur du jugement de l'Amtsgericht Schöneberg Berlin, prononçant le divorce des époux B. Par arrêt du 28 octobre 1982, la Chambre des exequatur du Tribunal cantonal vaudois a déclaré la demande irrecevable, par le motif que "le jugement de l'Amtsgericht Schöneberg déploie d'ores et déjà ses effets entre les parties, sans procédure particulière". A l'audience du Président du Tribunal du district de Lausanne, du
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9 novembre 1982, B. a confirmé ses conclusions tendant au rejet de la requête de mesures protectrices de l'union conjugale de dame B. Par prononcé du 26 novembre 1982, le Président du Tribunal civil du district de Lausanne a rejeté la requête du 5 juillet 1982, dit que la décision d'extrême urgence du 6 juillet 1982 devenait caduque et déclaré son prononcé immédiatement exécutoire. Il a considéré que le jugement de divorce prononcé par le Tribunal berlinois était définitif et exécutoire en Allemagne, qu'il n'importait pas que la demande d'exequatur présentée par B. eût été écartée par le Tribunal cantonal et que les mesures sollicitées apparaissaient ainsi dénuées de fondement au sens de l'art. 169
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SR 210 Schweizerisches Zivilgesetzbuch vom 10. Dezember 1907 ZGB Art. 169 - 1 Ein Ehegatte kann nur mit der ausdrücklichen Zustimmung des andern einen Mietvertrag kündigen, das Haus oder die Wohnung der Familie veräussern oder durch andere Rechtsgeschäfte die Rechte an den Wohnräumen der Familie beschränken. |
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1 | Ein Ehegatte kann nur mit der ausdrücklichen Zustimmung des andern einen Mietvertrag kündigen, das Haus oder die Wohnung der Familie veräussern oder durch andere Rechtsgeschäfte die Rechte an den Wohnräumen der Familie beschränken. |
2 | Kann der Ehegatte diese Zustimmung nicht einholen oder wird sie ihm ohne triftigen Grund verweigert, so kann er das Gericht anrufen. |
B.- Par arrêt du 1er janvier 1983, le Tribunal civil du district de Lausanne a rejeté l'appel formé par dame B. contre le prononcé présidentiel. Cette décision est motivée comme il suit: La Chambre des exequatur du Tribunal cantonal déclare que les jugements de divorce, notamment, produisent leurs effets en Suisse sans procédure particulière, si les règles du droit international privé suisse le permettent (HABSCHEID, Droit judiciaire privé suisse, 2e éd., p. 335) et que "le jugement allemand déploie donc d'ores et déjà ses effets entre parties". Au surplus, il ressort de l'arrêt Baumberger c. Conseil d'Etat du canton de Berne, rendu par le Tribunal fédéral le 6 juin 1963 (ATF 89 I 303 ss), que les autorités suisses doivent reconnaître le divorce obtenu dans son autre pays d'origine, contre son mari domicilié en Suisse, par une femme née étrangère qui a conservé sa nationalité lors de son mariage avec un ressortissant suisse. En l'espèce, les parties sont l'une et l'autre de nationalité allemande et leur divorce a été prononcé par un tribunal allemand, devant lequel dame B. a régulièrement agi dans la procédure ouverte par son mari. C'est, partant, à juste titre que le premier juge a rejeté la requête de dame B., dès lors qu'il n'y a plus d'union conjugale à protéger.
C.- Dame B. a formé un recours de droit public. Elle concluait à l'annulation de l'arrêt attaqué. Le Tribunal fédéral a rejeté le recours.
Erwägungen
Extrait des considérants:
2. Selon l'art. 4 al. 1 de la Convention entre la Confédération suisse et le Reich allemand relative à la reconnaissance et à
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l'exécution de décisions judiciaires et de sentences arbitrales, du 2 novembre 1929 (RS 0.276.191.361), la reconnaissance d'une décision passée en force de chose jugée sera refusée lorsque la décision aurait pour résultat la réalisation d'un rapport de droit dont la validité ou la poursuite est défendue sur le territoire de l'Etat où la décision est invoquée pour des motifs tirés de l'ordre public et des bonnes moeurs. La recourante fait valoir que l'ordre public suisse s'oppose à un double titre à la reconnaissance en Suisse du caractère exécutoire du jugement allemand prononçant le divorce des parties.
a) Elle se prévaut tout d'abord de ce que la juridiction allemande, en prononçant le divorce, s'est abstenue de régler, dans son jugement, "les effets pécuniaires de la séparation (recte: de la dissolution du mariage par le divorce), la laissant ainsi dans une situation critique". Une telle procédure, dit-elle, usuelle pendant longtemps en Allemagne (cf. DUMUSC, Le divorce par consentement mutuel dans les législations européennes, thèse Lausanne 1980, p. 161), contrevient directement à la règle, bien connue en Suisse, de l'unité du jugement de divorce, règle dont le Tribunal fédéral impose d'office le respect au juge (ATF 80 II 5 ss; cf. ATF 98 II 344 consid. 2 et les références). La notion d'incompatibilité avec l'ordre public suisse doit recevoir, en matière d'exécution de jugements étrangers, une interprétation plus étroite que lorsqu'il s'agit de l'application directe de la loi étrangère par le juge suisse; l'ordre public suisse s'oppose à l'exécution d'un jugement étranger lorsque ce jugement va, d'une manière intolérable, à l'encontre du sentiment du droit, tel qu'il existe généralement en Suisse, et viole les règles fondamentales de l'ordre juridique suisse (ATF 107 Ia 199 consid. 3, ATF 98 Ia 533 consid. 3 et les références). La teneur étroite de l'art. 4 al. 1 de la convention germano-suisse a pour objet d'empêcher que la réserve d'ordre public ne prenne une extension exagérée (Message du Conseil fédéral concernant la convention conclue avec l'Allemagne pour la reconnaissance et l'exécution de décisions judiciaires et de sentences arbitrales, du 9 décembre 1929, FF 1929 III p. 557 ss, sp. 563; cf. ATF 103 Ia 201 consid. b et les références). Dans cette optique, le principe de droit interne suisse de l'unité du jugement de divorce n'est pas une règle relevant de l'ordre public suisse: on ne saurait se fonder sur l'art. 4 al. 1 de la convention germano-suisse pour refuser de reconnaître un jugement de divorce rendu par un tribunal allemand et passé
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en force de chose jugée, par le motif qu'il n'y est pas statué sur le droit de l'épouse à une rente en même temps qu'est prononcée la dissolution du mariage. Dame B. ne conteste pas avoir été régulièrement citée devant le tribunal allemand saisi de l'action en divorce intentée par son mari, avoir défendu à cette action, avoir pu faire valoir tous les moyens utiles à la sauvegarde de ses intérêts; elle ne nie pas non plus que le jugement de divorce est entré en force de chose jugée et que, après la libération de B. de son obligation d'entretien envers elle par jugement de l'Amtsgericht Schöneberg Berlin, du 26 février 1982, elle a introduit une nouvelle instance en Allemagne aux fins d'obtenir l'allocation d'une pension alimentaire. La circonstance que l'intimé ne lui verse plus de pension, à la suite du jugement de divorce passé en force et du prononcé le libérant de toute obligation d'entretien, ne laisse pas, il est vrai, d'avoir pour conséquence qu'elle se trouve dans une situation précaire. Mais cela ne suffit pas pour faire échec au caractère exécutoire du prononcé de divorce et à sa reconnaissance en Suisse, en conformité de l'art. 3 de la convention germano-suisse relative à l'exécution des jugements, aucune des réserves prévues par cette disposition n'étant réalisée. b) La recourante fait valoir d'autre part que le jugement allemand prononçant le divorce des parties est incompatible avec l'ordre public suisse parce qu'il est en contradiction avec l'arrêt du Tribunal fédéral, du 2 mars 1972, rejetant l'action en divorce qu'avait intentée contre elle B. par exploit de citation en conciliation du 22 janvier 1964. Certes, dans l'arrêt ATF 46 I 464, cité par la recourante, le Tribunal fédéral a dit ce qui suit: "L'ordre public est intéressé ... à ce qu'entre les mêmes parties il ne puisse être fait état de deux décisions contradictoires sur la même contestation et il exige également qu'aucune entrave ne soit apportée à l'exécution d'une décision rendue par un tribunal suisse. Le principe que l'exequatur d'un jugement étranger doit être refusé s'il est en contradiction avec une sentence antérieurement rendue par une juridiction de l'Etat où cet exequatur est requis, est reconnu d'une façon générale en droit international privé, en dehors même de tout traité, et doit être également consacré pour ce qui concerne la Suisse..."
Il est vrai en outre que, dans l'arrêt ATF 58 II 324 /325, auquel la recourante se réfère également, le Tribunal fédéral a jugé qu'il serait contraire à l'ordre public, réservé par la convention germano-suisse, de donner la préférence au jugement étranger lorsque celui-ci est en contradiction avec un jugement suisse.
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La recourante ne peut cependant rien tirer de ces deux arrêts en faveur de sa thèse. L'arrêt du Tribunal fédéral du 2 mars 1972 rejetant l'action en divorce de B., introduite le 22 janvier 1964, a certes acquis l'autorité de la chose jugée dès son prononcé (art. 38
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SR 210 Schweizerisches Zivilgesetzbuch vom 10. Dezember 1907 ZGB Art. 169 - 1 Ein Ehegatte kann nur mit der ausdrücklichen Zustimmung des andern einen Mietvertrag kündigen, das Haus oder die Wohnung der Familie veräussern oder durch andere Rechtsgeschäfte die Rechte an den Wohnräumen der Familie beschränken. |
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1 | Ein Ehegatte kann nur mit der ausdrücklichen Zustimmung des andern einen Mietvertrag kündigen, das Haus oder die Wohnung der Familie veräussern oder durch andere Rechtsgeschäfte die Rechte an den Wohnräumen der Familie beschränken. |
2 | Kann der Ehegatte diese Zustimmung nicht einholen oder wird sie ihm ohne triftigen Grund verweigert, so kann er das Gericht anrufen. |
BGE 109 Ib 232 S. 238
divorce est contraire à l'ordre public suisse et en opposition avec un jugement suisse antérieur, rejetant une demande en divorce du défendeur. Il n'a pas le pouvoir de contrôler si le jugement allemand prononçant le divorce de ressortissants allemands et qui doit être reconnu en Suisse en vertu de la convention germano-suisse de 1929 serait en opposition avec un jugement suisse antérieur. Il ne lui appartient pas d'examiner si les faits sur la base desquels le tribunal allemand a prononcé le divorce sont identiques à ceux retenus par le tribunal suisse dans un jugement antérieur rejetant une action en divorce du défendeur.
Le juge suisse des mesures protectrices de l'union conjugale ne pouvait pas non plus refuser de reconnaître le jugement allemand parce que celui-ci prononce le divorce en dehors de toute considération de faute, alors que l'arrêt antérieur du Tribunal fédéral avait admis que l'action de B. se heurtait au moyen tiré de l'art. 142 al. 2
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