Tribunal administratif fédéral
Tribunale amministrativo federale
Tribunal administrativ federal
Cour VI
F-80/2020
Arrêt du 31 mai 2021
Jenny de Coulon Scuntaro (présidente du collège),
Composition Yannick Antoniazza-Hafner, Daniele Cattaneo, juges,
Georges Fugner, greffier.
A._______,
Parties
recourante,
contre
Secrétariat d'Etat aux migrations SEM,
Quellenweg 6, 3003 Berne,
autorité inférieure.
Objet Interdiction d'entrée.
Faits :
A.
Le 15 novembre 2019, A._______ (ci-après : A._______), ressortissante de St-Lucie née en 1996, a été interpellée par le corps des gardes-frontière de l'Aéroport de Genève - Cointrin, alors qu'elle s'apprêtait à quitter la Suisse par un vol à destination de Londres.
Dans le cadre du contrôle de ses conditions de séjour, le corps des garde-frontière a constaté que l'intéressée avait séjourné illégalement en Suisse depuis le 3 mars 2019, soit un dépassement (en d'autres termes un « overstay ») équivalent au total à 258 jours.
B.
Invitée à se déterminer à ce sujet, A._______ a admis les faits qui lui étaient reprochés et indiqué - dans les cases du formulaire qu'elle a été invitée à compléter - avoir séjourné en Suisse entre « 3 et 12 mois », y avoir travaillé à titre bénévole pour une période « inférieure à 1 mois » et exposé en outre s'être rendue en Allemagne durant son séjour en Suisse, mais ne pas se souvenir de sa dernière date de sortie de Suisse. Elle a par ailleurs justifié la prolongation de son séjour en Suisse par l'explication « I fractured my foot ».
L'intéressée a été informée qu'en raison des faits précités, une interdiction d'entrée pourraitêtre prise à son endroit par l'autorité suisse compétente.
C.
Par ordonnance pénale du 9 décembre 2019, le Ministère public de la République et canton de Genève a reconnu A._______ coupable d'infraction à l'art. 115 al. 1 let. b

D.
Le 18 novembre 2019, le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) a prononcé à l'endroit de A._______ une décision d'interdiction d'entrée sur le territoire suisse et du Liechtenstein valable jusqu'au 17 novembre 2021. Dans sa décision, le SEM a signalé que l'interdiction d'entrée entraînait une publication dans le système d'information Schengen (SIS), ayant pour conséquence d'étendre ses effets à l'ensemble des Etats membres de l'espace Schengen. En outre, l'autorité précitée a indiqué qu'un éventuel recours n'aurait pas d'effet suspensif.
Dite décision était motivée comme suit :
« Lors du contrôle du départ par l'Aéroport de Genève - Cointrin, le 15 novembre 2019, il a été constaté que l'intéressée avait séjourné illégalement dans l'espace Schengen, en Suisse en particulier, durant près de 258 jours après l'expiration de la durée du séjour non soumis à autorisation.
Selon la pratique et la jurisprudence constantes en la matière, elle a clairement attenté à la sécurité et à l'ordre publics, au sens de l'art. 67


Aucun intérêt privé susceptible de l'emporter sur l'intérêt public à ce que ses entrées en Suisse et dans l'espace Schengen soient dorénavant contrôlées ne ressort d'ailleurs du dossier, en particulier du droit d'être entendu qui lui a été octroyé ».
E.
A._______ a recouru contre cette décision par écrit du 23 décembre 2019, remis à la Poste le 6 janvier 2020, auprès du Tribunal administratif fédéral (ci-après : le TAF), en concluant à son annulation, ainsi qu'à l'annulation de la publication de refus d'entrée dans le système d'information Schengen (SIS II). Dans l'argumentation de son recours, l'intéressée a d'abord contesté avoir dépassé de 258 jours la durée de son séjour autorisé dans l'Espace Schengen, en exposant avoir été autorisée à séjourner en Grande-Bretagne pour une période de 6 mois depuis la date de son entrée dans ce pays le 3 décembre 2018, date attestée par un timbre apposé dans son passeport par le Service d'immigration de l'aéroport de
Gatwick. La recourante a affirmé en outre qu'elle n'avait jamais séjourné plus de trois mois en Suisse et indiqué qu'elle avait prévu de retourner dans son pays le 3 juin 2019, mais qu'elle avait dû prolonger son séjour en Europe en raison d'une fracture au pied diagnostiquée en Suisse le 20 juin 2019 et qu'elle avait finalement repoussé la date de son retour à St Lucie au 15 novembre 2019, afin de pouvoir participer le 26 octobre 2019 à une manifestation culturelle en Allemagne dans le cadre de l'Association B._______ qu'elle préside. La recourante a enfin contesté le contenu du document qu'elle avait signé à sa sortie de Suisse le 15 novembre 2019, en exposant avoir alors agi dans un état de stress provoqué par sa volonté de ne pas manquer son avion pour Londres, puis sa correspondance pour St-Lucie.
F.
Le 15 janvier 2020, le Tribunal a invité la recourante à établir qu'elle avait effectivement séjourné durant six mois en Grande-Bretagne comme elle l'avait prétendu.
G.
Le 9 mai 2020, la recourante a produit une déclaration écrite établie le 3 février 2020 par une habitante de Londres, dans laquelle celle-ci a confirmé l'avoir hébergée durant six mois à son domicile. Dans son écrit, cette personne a indiqué en outre que la recourante avait, durant cette période, « à plusieurs reprises et pour de courts séjours », rendu visite à sa famille en Allemagne et à ses amis en Suisse et qu'elle avait quitté la Grande-Bretagne en mai 2019 pour se rendre en Suisse, afin de retourner ensuite à St Lucie avant l'été 2019, ce qu'elle n'avait pas pu faire pour des raisons de santé.
Dans ses déterminations du 9 mai 2020, la recourante a exposé qu'elle n'avait jamais eu l'intention de s'établir en Suisse et qu'elle avait dépassé le temps de séjour autorisé dans l'Espace Schengen seulement pour des raisons de santé (produisant à cet égard l'original d'une radiographie de son pied blessé), ainsi pour donner suite à ses engagements associatifs.
H.
Appelé à se prononcer sur le recours, le SEM en a proposé le rejet. Dans sa réponse du 22 mai 2020, l'autorité intimée a relevé d'abord que la Grande-Bretagne n'avait jamais fait partie de l'Espace Schengen et que le visa de six mois octroyé à la recourante par les autorités britanniques n'avait aucune incidence sur la procédure. Le SEM a relevé en outre que les arguments du recours étaient en contradiction avec les déclarations de la recourante telles que consignées à la sortie de Suisse le 15 novembre 2019 et que, si des problèmes physiques l'empêchaient alors de se déplacer et de retourner dans son pays, il lui appartenait de s'adresser à l'autorité cantonale compétente et de régulariser ainsi ses conditions de séjour en Suisse.
I.
Invitée à se déterminer sur la réponse du SEM, la recourante a exposé, dans ses observations du 13 juillet 2020, qu'elle avait repoussé son retour dans son pays d'origine, d'abord en raison du prix élevé des billets d'avion durant les mois de juillet-août 2019, ensuite en raison d'engagements au sein de son association durant les deux mois suivants. Elle a par ailleurs repris l'argumentation liée aux conditions dans lesquelles elle avait été interrogée à son départ de Suisse le 15 novembre 2019 et a nouvellement conclu à l'annulation de l'ordonnance du Ministère public de la République et canton de Genève du 9 décembre 2019.
J.
Par ordonnance pénale du 7 décembre 2020, rendue sur opposition à l'ordonnance pénale du 9 décembre 2019, le Ministère public de la République et canton de Genève a déclaré A._______ coupable de séjour illégal (art. 115 al. 1 let. b

K.
Les autres éléments contenus dans les écritures précitées seront examinés, si nécessaire, dans les considérants en droit ci-dessous.
Droit :
1.
1.1 Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32




En particulier, les décisions en matière d'interdiction d'entrée prononcées par le SEM - lequel constitue une unité de l'administration fédérale telle que définie à l'art. 33 let. d



1.2 A moins que la LTAF n'en dispose autrement, la procédure devant le Tribunal est régie par la PA (cf. art. 37

1.3 L'intéressé a qualité pour recourir (cf. art. 48 al. 1



2.
Le Tribunal examine les décisions qui lui sont soumises avec un plein pouvoir d'examen en fait et en droit. Le recourant peut ainsi invoquer devant le Tribunal la violation du droit fédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation, la constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents ainsi que l'inopportunité de la décision entreprise, sauf lorsqu'une autorité cantonale a statué comme autorité de recours (art. 49


3.
A titre préalable, le Tribunal se doit de préciser que son pouvoir de décision ne porte que sur l'objet de la contestation ("Anfechtungsgegenstand") circonscrit par les questions tranchées dans le dispositif de la décision attaquée (cf. ATF 134 V 418 consid. 5.2.1 et ATF 131 II 200 consid. 3.2 ; cf. également Pierre Moor / Etienne Poltier, Droit administratif, vol. II : les actes administratifs et leur contrôle, 3ème édition, Berne 2011, p. 823).
Le Tribunal n'examinera ainsi, dans le cadre de la présente procédure, que les rapports de droit sur lesquels l'autorité inférieure s'est prononcée dans le dispositif de sa décision du 18 novembre 2019, à savoir l'interdiction d'entrée prononcée à l'endroit de A._______.
En considération de ce qui précède, les conclusions de la recourante dans ses observations du 13 juillet 2020, tendant à l'annulation de l'ordonnance du Ministère public de la République et canton de Genève du 9 décembre 2019, sont irrecevables, car extrinsèques à l'objet du présent litige.
4.
Le 1erjanvier 2019, la loi sur les étrangers du 16 décembre 2005 (LEtr) a connu une modification partielle comprenant également un changement de sa dénomination (modification de la LEtr du 16 décembre 2016, RO 2018 3171). Ainsi, la LEtr s'intitule nouvellement loi fédérale sur les étrangers et l'intégration du 16 décembre 2005 (LEI, RS 142.20).
En l'occurrence, bien que l'autorité inférieure cite la LEtr, force est de constater que la décision querellée a été prononcée le 18 novembre 2019, soit après l'entrée en vigueur au 1erjanvier 2019 des modifications de la LEtr, de sorte que c'est la LEI dans sa teneur actuelle qui s'applique au cas d'espèce. Quoiqu'il en soit, la disposition applicable, soit l'art. 67

5.
Conformément à l'art. 5 al. 1

(let. a), disposer des moyens financiers nécessaires à son séjour (let. b) et ne représenter aucune menace pour la sécurité et l'ordre publics ni pour les relations internationales de la Suisse (let. c). Cette disposition, relative à l'entrée en Suisse, n'est applicable que dans la mesure où les accords d'association à Schengen ne contiennent pas de dispositions divergentes
(art. 2 al. 4

S'agissant des conditions d'entrée en Suisse pour un court séjour (soit un séjour n'excédant pas 90 jours sur toute période de 180 jours), l'art. 3 al. 1

p. 1-7). Par ailleurs, en application de l'art. 7 al. 1

L'art. 6 par. 1 du code frontières Schengen, dont le contenu coïncide largement avec celui de l'art. 5 al. 1

L'art. 6 par. 2 du code frontières Schengen précise notamment que la date d'entrée est considérée comme le premier jour de séjour sur le territoire des États membres et que la date de sortie est considérée comme le dernier jour de séjour sur le territoire des États membres.
6.
6.1 L'interdiction d'entrée est régie par l'art. 67



6.2 S'agissant des notions de sécurité et d'ordre publics auxquelles se réfère l'art. 67 al. 2 let. a

En vertu de l'art. 77a al. 1


Une interdiction d'entrée peut notamment être prononcée lorsque l'étranger a violé les prescriptions du droit des étrangers (cf. Message LEtr,
FF 2002 3469, 3568). Selon la jurisprudence constante du Tribunal, le fait d'entrer, de séjourner ou de travailler en Suisse sans autorisation représente une violation grave des prescriptions de police des étrangers
(arrêts du TAF F-2581/2016 du 21 février 2018 consid. 5.3 et F-2164/2017
du 17 novembre 2017 consid. 5.2).
6.3 L'autorité compétente examine selon sa libre appréciation si une interdiction d'entrée doit être prononcée. Elle doit donc procéder à une pondération méticuleuse de l'ensemble des intérêts en présence et respecter le principe de la proportionnalité (ATF 139 II 121 consid. 6.5.1 ; ATAF
2017 VII/2 consid. 4.5).
L'interdiction d'entrée au sens du droit des étrangers vise à empêcher l'entrée ou le retour d'un étranger dont le séjour en Suisse (respectivement dans l'Espace Schengen) est indésirable (cf. notamment arrêt du TF 6B_173/2013 du 19 août 2013 consid. 2.3). Elle n'est pas considérée comme une peine sanctionnant un comportement déterminé, mais comme une mesure ayant pour but de prévenir une atteinte à la sécurité et à l'ordre publics (cf. Message LEtr, FF 2002 3469, 3568 ; voir également ATAF 2017 VII/2 consid. 4.4 et 6.4).
Le prononcé d'une interdiction d'entrée implique par conséquent que l'autorité procède à un pronostic en se fondant sur l'ensemble des circonstances du cas concret et, en particulier, sur le comportement que l'administré a adopté par le passé. La commission antérieure d'infractions constitue en effet un indice de poids permettant de penser qu'une nouvelle atteinte à la sécurité et à l'ordre publics sera commise à l'avenir (ATAF 2017 VII/2 consid. 4.4, 2008/24 consid. 4.2 ; arrêt du TAF C-6383/2014 du 6 juin 2016 consid. 5.2).
6.4 Si un jugement pénal ne lie en principe pas l'autorité administrative, la jurisprudence a admis, afin d'éviter dans la mesure du possible des contradictions, que l'autorité administrative ne devait pas s'écarter sans raison sérieuse des faits constatés par le juge pénal ni de ses appréciations juridiques qui dépendent fortement de l'établissement des faits (cf. notamment ATF 136 II 447 consid. 3.1; 124 II 103 consid. 1c; arrêt du TF 1C_585/2008 du 14 mai 2009 consid. 3.1).
Ainsi, l'autorité administrative ne peut s'écarter du jugement rendu que si elle est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de fait que le juge pénal ne connaissait pas ou qu'il n'a pas prises en considération, s'il existe des preuves nouvelles dont l'appréciation conduit à un autre résultat, si l'appréciation à laquelle s'est livré le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés ou si le juge pénal n'a pas élucidé toutes les questions de droit (cf. notamment ATF 136 II 447 consid. 3.1; 129 II 312 consid. 2.4; arrêt du TF 2A.391/2003 du 30 août 2004 consid. 3.5).
7.
7.1
Dans un premier temps, il convient d'examiner si le principe d'une interdiction d'entrée en Suisse et au Liechtenstein à l'endroit de la recourante se justifie.
L'autorité inférieure a prononcé cette mesure pour une durée de deux ans, soit jusqu'au 17 novembre 2021, au motif que l'intéressée « avait séjourné illégalement dans l'Espace Schengen, en Suisse en particulier, durant près de 258 jours après l'expiration de la durée du séjour non soumis à autorisation » et qu'elle avait ainsi « sérieusement attenté, par son comportement, à la sécurité et à l'ordre publics, au sens de l'art. 67

Dans son recours du 6 janvier 2020, A._______ a contesté avoir dépassé de 258 jours la durée de son séjour autorisé dans l'Espace Schengen, en alléguant avoir séjourné durant près de 6 mois en Grande-Bretagne depuis le 3 décembre 2018 et n'avoir ensuite jamais séjourné plus de trois mois en Suisse, mais avoir dû différer son départ de l'Europe pour son pays en raison d'une fracture au pied diagnostiquée en Suisse le 20 juin 2019.
7.2 L'examen des pièces du dossier amène le Tribunal à constater que la recourante est entrée dans l'Espace Schengen, soit à l'aéroport de Genève, le 3 décembre 2018 (cf. copie de son passeport) et qu'elle en est ressortie par le même aéroport le 15 novembre 2019.
Il apparaît certes que l'intéressée s'est directement rendue, le 3 décembre 2018, en Grande-Bretagne (pays non membre de l'Espace Schengen), où elle a apparemment séjourné jusqu'à la fin du mois de mai 2019, si l'on se réfère à ses allégations et à la déclaration écrite de sa logeuse à Londres, dont il n'y pas de raison de mettre en cause la crédibilité.
Si la recourante a certes rendu vraisemblable avoir séjourné durant plusieurs mois en Grande-Bretagne, il convient de remarquer qu'elle avait alors déjà accompli quelques périodes de séjour dans l'Espace Schengen, puisqu'elle se serait alors rendue « à plusieurs reprises et pour de courts séjours... en Allemagne et en Suisse », selon les termes mêmes de sa logeuse à Londres dans sa déclaration écrite du 3 février 2020.
Le Tribunal considère à cet égard que la durée exacte de ces séjours temporaires n'a pas besoin d'être davantage élucidée, dès lors qu'il n'est pas contesté que la recourante est revenue en Suisse au plus tard à la fin du mois de mai 2019 et qu'elle n'a, depuis lors, plus quitté l'Espace Schengen jusqu'au 15 novembre 2019.
7.3 Aussi, même dans l'hypothèse la plus favorable à l'intéressée, il est établi et non contesté que celle-ci a séjourné sans interruption en Suisse et en Allemagne à tout le moins entre la fin du mois de mai 2019 et le 15 novembre 2019 et qu'elle ainsi clairement dépassé (d'environ deux mois et demi) la période maximale de 90 jours consécutifs de séjour autorisé dans l'Espace Schengen.
Cela étant, même si la durée du séjour non autorisé imputé à la recourante par l'autorité inférieure (soit un dépassement de 258 jours de la durée de séjour autorisé) doit être fortement revu à la baisse, il n'en demeure pas moins que l'infraction retenue par le SEM est réalisée et que l'intéressée a ainsi, par son comportement, porté atteinte à la sécurité et à l'ordre publics au sens de l'art. 80 al. 1 let. a

La recourante se devait en effet de respecter la législation en vigueur, ce qu'elle n'a manifestement pas fait, étant rappelé que la méconnaissance ou la mésinterprétation de la réglementation en matière de visa ou de séjour ne constitue pas un motif de renonciation au prononcé d'une mesure d'éloignement (cf. arrêt du TAF F-6753/2017 du 3 août 2018 consid. 4.3).
Dans ces circonstances, l'argument tiré de la blessure au pied subie par la recourante ne saurait expliquer à lui seul le dépassement de séjour autorisé qui lui est reproché, ce d'autant moins que celle-ci a reconnu, dans ses observations du 13 juillet 2020, qu'elle avait prolongé son séjour dans l'Espace Schengen, d'abord en raison du prix élevé des billets d'avion durant les mois de juillet-août 2019, puis en raison d'engagements au sein de son association durant les deux mois suivants.
En conséquence, le Tribunal est amené à conclure que l'interdiction d'entrée prononcée par le SEM est parfaitement justifiée dans son principe.
8.
Il convient encore d'examiner si la mesure d'éloignement prise par l'autorité intimée satisfait aux principes de proportionnalité et de l'égalité de traitement.
8.1 Lorsque l'autorité administrative prononce une interdiction d'entrée, elle doit en effet respecter les principes susmentionnés et s'interdire tout arbitraire (cf. à ce sujet, à titre d'exemples, Thierry Tanquerel, Manuel de droit administratif, 2011, p. 187ss, p. 199ss et p. 204ss et Moor et al., Droit administratif, vol. I, 2012, p. 808ss, p. 838ss et p. 891ss). Pour satisfaire au principe de la proportionnalité, il faut que la mesure d'éloignement prononcée soit apte à produire les résultats escomptés (règle de l'aptitude), que ceux-ci ne puissent être atteints par une mesure moins incisive (règle de la nécessité) et qu'il existe un rapport raisonnable entre le but d'intérêt public recherché par cette mesure et les intérêts privés en cause, en particulier la restriction à la liberté personnelle qui en résulte pour la personne concernée (principe de la proportionnalité au sens étroit ; cf. notamment l'arrêt du Tribunal administratif fédéral F-5267/2015 consid. 6.1 et la jurisprudence citée).
8.2 En l'espèce, le Tribunal observe que les motifs retenus dans la décision attaquée, s'agissant d'un dépassement du séjour autorisé dans l'Espace Schengen, sont clairement établis.
Au vu du nombre élevé d'infractions commises dans ce domaine, les autorités sont contraintes d'intervenir avec sévérité afin d'assurer la stricte application des prescriptions édictées en la matière. Il en va de l'intérêt de l'Etat à voir respecter l'ordre établi et la législation en vigueur (cf. arrêt du TAF F-2677/2016 du 23 janvier 2017 consid. 7.2).
Cela étant, compte tenu de ce que le SEM a retenu dans son prononcé un dépassement de séjour autorisé (de 258 jours) nettement supérieur à la réalité, le Tribunal considère que l'interdiction d'entrée prononcée le 18 novembre 2019 apparaît quelque peu excessive et qu'il convient d'en limiter les effets à ce jour.
9.
Dans son prononcé du 18 novembre 2019, le SEM a par ailleurs ordonné l'inscription de l'interdiction d'entrée dans le SIS II. En raison de ce signalement, il est interdit à la recourante de pénétrer dans l'Espace Schengen.
9.1 Lorsqu'une décision d'interdiction d'entrée est prononcée - comme en l'espèce - à l'endroit d'une personne qui n'est ni un citoyen de l'Union européenne (UE), ni un ressortissant d'un pays tiers jouissant de droits de libre circulation équivalents en vertu d'accords conclus par ce pays avec la Communauté européenne (CE) et ses États membres (cf. art. 3 let. d du règlement [CE] n° 1987/2006 du Parlement européen et du Conseil du
20 décembre 2006 sur l'établissement, le fonctionnement et l'utilisation du système d'information Schengen de deuxième génération [SIS II, JO L 381/4 du 28 décembre 2006], en vigueur depuis le 9 avril 2013 [JO L 87/10 du 27 mars 2013]), cette personne est inscrite aux fins de non-admission dans le SIS si le cas est suffisamment important pour justifier l'introduction du signalement dans ce système (cf. art. 21 et 24 SIS II, qui ont remplacé les anciens art. 94 par. 1 et 96 de la Convention d'application de l'accord de Schengen [CAAS, JO L 239 du 22 septembre 2000], ainsi qu'il ressort de l'art. 52 par. 1 SIS II ; cf., également, l'art. 16 al. 2 let. b

N-SIS [RS 362.0]).
Le signalement dans le SIS II a pour conséquence que la personne concernée se verra refuser l'entrée dans l'Espace Schengen (cf. art. 14


9.2 Dans le cas d'espèce, ce signalement au SIS II est justifié par les faits retenus et satisfait au principe de la proportionnalité au vu des circonstances (cf. art. 21 en relation avec l'art. 24 al. 2 du règlement SIS II). Il l'est d'autant plus que la Suisse, dans le champ d'application des règles de Schengen, se doit de préserver les intérêts de tous les Etats parties aux accords d'association à Schengen (ATAF 2011/48 consid. 6.1).
10.
10.1 Il ressort de qui précède que le recours est partiellement admis et la décision du SEM du 18 novembre 2019 est réformée, en ce sens que les effets de l'interdiction d'entrée sont limités au jour du présent arrêt.
10.2 Dans la mesure où la recourante n'obtient que partiellement gain de cause, il y a lieu de mettre des frais réduits de procédure à sa charge (art. 63 al. 1



S'agissant de l'allocation d'éventuels dépens, le Tribunal constate que la recourante n'était pas représentée dans la présente cause et qu'elle n'a, ni allégué, ni établi, que la procédure de recours lui aurait occasionné des frais relativement élevés, de sorte qu'elle ne saurait prétendre à l'octroi de dépens (cf. l'art. 64 al. 1


dispositif page suivante
Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :
1.
Le recours est partiellement admis.
2.
Les effets de l'interdiction d'entrée prononcée le 18 novembre 2019 sont limités au jour du présent arrêt.
3.
Les frais réduits de procédure, s'élevant à 600 frs, sont mis à la charge de la recourante. Ils sont compensés par l'avance de 800 frs versée le 17 février 2020, dont le solde, par 200 frs, lui sera restitué par la caisse du Tribunal.
4.
Il n'est pas alloué de dépens.
5.
Le présent arrêt est adressé :
- à la recourante (recommandé ; annexes : formulaire « adresse de paiement » à retourner au Tribunal dûment rempli ; radiographie originale en retour)
- à l'autorité inférieure, dossier ...... en retour
La présidente du collège : Le greffier :
Jenny de Coulon Scuntaro Georges Fugner
Expédition :