Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
6B 153/2017
Arrêt du 28 novembre 2017
Cour de droit pénal
Composition
M. et Mmes les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Jametti.
Greffier : M. Tinguely.
Participants à la procédure
X.________, représenté par Me Alain Lévy, avocat,
recourant,
contre
1. Ministère public de la République et canton de Genève,
2. A.________,
représentée par Me Jamil Soussi, avocat,
intimés.
Objet
Tentative de contrainte,
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision, du 19 décembre 2016 (P/13615/2014 AARP/517/2016).
Faits :
A.
Par jugement du 29 janvier 2016, rendu à la suite de l'opposition formée par X.________ contre l'ordonnance pénale du 30 septembre 2014, le Tribunal de police de la République et canton de Genève a condamné X.________ pour tentative de contrainte à une peine pécuniaire de 30 jours-amende, à 120 fr. le jour, avec sursis pendant 3 ans.
B.
Par arrêt du 19 décembre 2016, la Chambre pénale d'appel et de révision de la Cour de justice genevoise a rejeté l'appel de X.________ contre ce jugement.
En substance, la cour cantonale a retenu les faits suivants.
En 2001, A.________ était co-productrice et présentatrice de l'émission "B.________" diffusée sur la Télévision suisse romande (TSR), aujourd'hui dénommée Radio Télévision Suisse (RTS). Lors de l'émission du xx.xxx.xxxx, qui avait pour thème les élections au Grand Conseil genevois du xx.xxx.xxxx, X.________, invité de l'émission en sa qualité de candidat aux élections précitées, avait estimé avoir été injustement traité par la présentatrice, celle-ci ayant selon lui porté atteinte à son honneur en laissant entendre qu'il faisait l'objet d'une plainte pénale pour des actes de violence émanant d'une de ses anciennes employées. Il a alors fait notifier à la présentatrice un commandement de payer portant sur un montant de près d'un million de francs. Malgré l'opposition formée par A.________, X.________ n'a jamais engagé de procédure.
Le 23 mai 2014, X.________ lui a fait notifier un second commandement de payer à hauteur de 825'255 fr., avec intérêts à 5% l'an dès le 13 septembre 2001. La cause de l'obligation était libellée ainsi : "Dommage-intérêts pour tort moral (art. 28 ss
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 28 - 1 Celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité peut agir en justice pour sa protection contre toute personne qui y participe. |
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1 | Celui qui subit une atteinte illicite à sa personnalité peut agir en justice pour sa protection contre toute personne qui y participe. |
2 | Une atteinte est illicite, à moins qu'elle ne soit justifiée par le consentement de la victime, par un intérêt prépondérant privé ou public, ou par la loi. |
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 173 - 1. Quiconque, en s'adressant à un tiers, accuse une personne ou jette sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l'honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, |
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1 | Quiconque, en s'adressant à un tiers, accuse une personne ou jette sur elle le soupçon de tenir une conduite contraire à l'honneur, ou de tout autre fait propre à porter atteinte à sa considération, |
2 | L'auteur n'encourt aucune peine s'il prouve que les allégations qu'il a articulées ou propagées sont conformes à la vérité ou qu'il a des raisons sérieuses de les tenir de bonne foi pour vraies. |
3 | L'auteur n'est pas admis à faire ces preuves et il est punissable si ses allégations ont été articulées ou propagées sans égard à l'intérêt public ou sans autre motif suffisant, principalement dans le dessein de dire du mal d'autrui, notamment lorsqu'elles ont trait à la vie privée ou à la vie de famille. |
4 | Si l'auteur reconnaît la fausseté de ses allégations et les rétracte, le juge peut atténuer la peine ou renoncer à prononcer une peine. |
5 | Si l'auteur ne fait pas la preuve de la vérité de ses allégations ou si elles sont contraires à la vérité ou si l'auteur les rétracte, le juge le constate dans le jugement ou dans un autre acte écrit. |
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 174 - Sont réservées les règles spéciales auxquelles la loi soumet la cession de certains droits. |
Le 14 juillet 2014, A.________ a déposé plainte.
C.
X.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre l'arrêt du 19 décembre 2016. Il conclut, avec suite de frais et dépens, à son acquittement et au versement d'un montant de 43'037 fr. 59 à titre d'indemnité de procédure.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 105 Faits déterminants - 1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente. |
|
1 | Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente. |
2 | Il peut rectifier ou compléter d'office les constatations de l'autorité précédente si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95. |
3 | Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente.99 |
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 97 Établissement inexact des faits - 1 Le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause. |
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1 | Le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95, et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause. |
2 | Si la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire, le recours peut porter sur toute constatation incomplète ou erronée des faits.89 |
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 105 Faits déterminants - 1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente. |
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1 | Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente. |
2 | Il peut rectifier ou compléter d'office les constatations de l'autorité précédente si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95. |
3 | Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente.99 |
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 9 Protection contre l'arbitraire et protection de la bonne foi - Toute personne a le droit d'être traitée par les organes de l'État sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi. |
368).
2.
Le recourant débute son mémoire par une présentation personnelle des faits. Il n'invoque expressément aucun grief répondant aux exigences de motivation accrues précitées. Il n'y a dès lors pas lieu d'examiner plus avant ces questions.
3.
Le recourant fait grief à l'autorité précédente d'avoir considéré que son comportement à l'égard de l'intimée, à savoir la notification d'un commandement de payer, était constitutif d'une tentative de contrainte.
3.1. Se rend coupable de contrainte selon l'art. 181
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 181 - Quiconque, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux, ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'oblige à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. |
19). Il peut également y avoir contrainte lorsque l'auteur entrave sa victime "de quelque autre manière" dans sa liberté d'action. Cette formule générale doit être interprétée de manière restrictive. N'importe quelle pression de peu d'importance ne suffit pas. Il faut que le moyen de contrainte utilisé soit, comme pour la violence ou la menace d'un dommage sérieux, propre à impressionner une personne de sensibilité moyenne et à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d'action. Il s'agit donc de moyens de contrainte qui, par leur intensité et leur effet, sont analogues à ceux qui sont cités expressément par la loi (ATF 141 IV 437 consid. 3.2.1 p. 440 s.; 137 IV 326 consid. 3.3.1 p. 328; arrêt 6B 8/2017 du 15 août 2017 consid. 2.1).
Selon la jurisprudence, la contrainte n'est contraire au droit que si elle est illicite, soit parce que le moyen utilisé ou le but poursuivi est illicite, soit parce que le moyen est disproportionné pour atteindre le but visé, soit encore parce qu'un moyen conforme au droit utilisé pour atteindre un but légitime constitue au vu des circonstances, un moyen de pression abusif ou contraire aux moeurs (ATF 141 IV 437 consid. 3.2.1 p. 440 s.; 137 IV 326 consid. 3.3.1 p. 328; 134 IV 216 consid. 4.1 p. 218). Pour une personne de sensibilité moyenne, faire l'objet d'un commandement de payer d'une importante somme d'argent est, à l'instar d'une plainte pénale, une source de tourments et de poids psychologique, en raison des inconvénients découlant de la procédure de poursuite elle-même et de la perspective de devoir peut-être payer le montant en question. Un tel commandement de payer est ainsi propre à inciter une personne de sensibilité moyenne à céder à la pression subie, donc à l'entraver d'une manière substantielle dans sa liberté de décision ou d'action (arrêt 6B 70/2016 du 2 juin 2016 consid. 4.3.4 non publié aux ATF 142 IV 315). Certes, faire notifier un commandement de payer lorsqu'on est fondé à réclamer une somme est licite. En
revanche, utiliser un tel procédé comme moyen de pression est clairement abusif, donc illicite (cf. ATF 115 III 18 consid. 3, 81 consid. 3b; arrêt 6B 8/2017 précité consid. 2.1).
Lorsque la victime ne se laisse pas intimider et n'adopte pas le comportement voulu par l'auteur, ce dernier est punissable de tentative de contrainte (art. 22 al. 1
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 22 - 1 Le juge peut atténuer la peine si l'exécution d'un crime ou d'un délit n'est pas poursuivie jusqu'à son terme ou que le résultat nécessaire à la consommation de l'infraction ne se produit pas ou ne pouvait pas se produire. |
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1 | Le juge peut atténuer la peine si l'exécution d'un crime ou d'un délit n'est pas poursuivie jusqu'à son terme ou que le résultat nécessaire à la consommation de l'infraction ne se produit pas ou ne pouvait pas se produire. |
2 | L'auteur n'est pas punissable si, par grave défaut d'intelligence, il ne s'est pas rendu compte que la consommation de l'infraction était absolument impossible en raison de la nature de l'objet visé ou du moyen utilisé. |
3.2. Le recourant revient sur le caractère illicite du moyen de contrainte utilisé. L'envoi d'un commandement de payer ne constituait selon lui pas un procédé illicite, dès lors qu'il était en rapport raisonnable avec le but visé à savoir le paiement de sa créance par l'intimée. Le fait que la créance est prescrite, que son montant est démesuré et qu'il n'a pas entrepris d'action judiciaire ensuite de l'opposition formée par l'intimée n'y changeait rien.
3.2.1. L'autorité précédente a considéré que le moyen de contrainte utilisé était illicite dès lors que, dans les circonstances du cas d'espèce, l'envoi d'un commandement de payer était abusif. Elle a relevé, à ce propos, que le recourant n'avait pas fait usage des voies de droit légales - civiles ou pénales -, alors qu'il se prétendait victime d'une atteinte illicite à sa personnalité et qu'il s'en était tenu à la notification d'un commandement de payer, plus de 13 ans après les faits, portant sur une somme totalement fantaisiste et exorbitante, sans demander, par la suite, la levée de l'opposition formée par l'intimée à l'acte de poursuite. Dans ce contexte, elle a souligné que le recourant avait déjà agi de la sorte en 2001, pour un montant encore supérieur, sans procéder non plus, par la suite, par la voie judiciaire pour faire établir sa prétention. Pour l'autorité précédente, les justifications avancées par le recourant - interruption de la prescription et problèmes de santé - devaient être écartées. Elle a néanmoins retenu qu'il existait, outre la volonté de contraindre l'intimée à payer la somme réclamée, l'intention de lui nuire (cf. arrêt entrepris, consid. 2.2, p. 8).
3.2.2. En se bornant à affirmer que le commandement de payer litigieux ne visait que le paiement de la somme réclamée, le recourant s'écarte de manière inadmissible de l'état de fait de l'arrêt entrepris qui constate, bien au contraire, qu'il s'agissait également de nuire à l'intimée. Cela étant, en se limitant à opposer que la poursuite d'une créance prescrite ou d'un montant exagéré n'était pas illicite, pas plus que l'absence d'action judiciaire subséquente, le recourant ne développe aucune argumentation pertinente. Il perd de vue que, si chacune de ces propositions peut être correcte en elle-même d'un point de vue théorique, l'autorité précédente a jugé que concrètement, en l'espèce, le caractère exorbitant du montant en poursuite, l'absence de démarche judiciaire et le fait d'agir plus de 13 ans après les faits démontraient suffisamment l'intention du recourant de nuire à l'intimée.
3.3. Le recourant soutient en outre que les faits qui lui sont reprochés n'avaient entraîné aucun comportement induit de l'intimée. En se référant à un avis de droit, il relève qu'une atteinte au crédit de l'intimée ou le fait qu'elle avait été ébranlée ou choquée n'étaient pas suffisants, dès lors qu'ils n'avaient pas engendré l'accomplissement d'un comportement déterminé de sa part. Un élément constitutif de l'art. 181
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 181 - Quiconque, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux, ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'oblige à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. |
Si le seul fait de porter atteinte à la personnalité de la victime ne constitue certes pas un résultat au regard de l'art. 181
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 181 - Quiconque, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux, ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'oblige à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. |
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 181 - Quiconque, en usant de violence envers une personne ou en la menaçant d'un dommage sérieux, ou en l'entravant de quelque autre manière dans sa liberté d'action, l'oblige à faire, à ne pas faire ou à laisser faire un acte est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. |
4.
Le recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Le recourant, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
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1 | En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
2 | Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis. |
3 | Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés. |
4 | En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours. |
5 | Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement. |
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre pénale d'appel et de révision.
Lausanne, le 28 novembre 2017
Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Denys
Le Greffier : Tinguely