Tribunale federale delle assicurazioni
Tribunal federal d'assicuranzas
Cour des assurances sociales
du Tribunal fédéral
Cause
{T 7}
I 468/02
Arrêt du 19 février 2003
IIe Chambre
Composition
MM. et Mme les Juges Schön, Président, Widmer et Frésard. Greffier : M. Vallat
Parties
S.________, recourant, représenté par Me Martine Lang, avocate, chemin de la Gare 27, 2900 Porrentruy 1,
contre
Office de l'AI du canton du Jura, rue Bel-Air 3, 2350 Saignelégier, intimé
Instance précédente
Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des assurances, Porrentruy
(Jugement du 5 juin 2002)
Faits :
A.
S.________ était installateur indépendant en chauffage et sanitaire depuis 1973. Souffrant notamment de problèmes cardiaques, il a déposé, le 8 mars 2001, une demande de prestations de l'assurance-invalidité et a remis son entreprise à son fils au 1er avril suivant.
Dans un rapport du 30 mars 2001, son médecin traitant, le docteur A.________, indiquait que l'assuré, souffrant de longue date d'une cardiopathie ischémique traitée par angioplastie en 1988 et 1989, ainsi que, depuis 1996, de diabète sucré de type II non insulino-dépendant, d'un état dépressif masqué d'évolution progressive depuis 1996-1997, d'hypertension artérielle traitée, d'hyperlipémie mixte traitée et d'obésité, subissait une incapacité de travail totale depuis le 1er juillet 1999. Ce médecin se référait, par ailleurs, aux conclusions du professeur B.________, médecin-chef de la division d'endocrinologie, de diabétologie et du métabolisme du Centre hospitalier X.________ (rapport du 14 février 2001) et du docteur C.________, médecin adjoint au service de psychiatrie de liaison du Département universitaire Y.________ (rapport du 20 décembre 2000). Selon le docteur B.________, qui avait été appelé à se prononcer en qualité d'expert dans le cadre d'un litige avec l'assurance-maladie de S.________, ce dernier subissait une incapacité de travail totale d'origine multi-factorielle, qui devait être rapportée à la maladie (diabète), à l'état dépressif, à la trajectoire de vie (épuisement) ainsi qu'à la personnalité de l'intéressé et
à sa situation sociale, perçue comme en constante dégradation, cet effondrement bio-psycho-social l'empêchant d'effectuer toute activité soutenue, physique ou intellectuelle. Le docteur D.________, cardiologue traitant de l'assuré, a pour sa part décrit ce dernier comme un homme usé dont les pathologies constatées justifiaient qu'on lui reconnût un degré d'invalidité de 80 % au moins (rapport du 23 juillet 2001).
Sur le plan économique, l'assuré a produit les bilans comptables de son entreprise pour les exercices 1997 à 2000 dont il ressort notamment la réalisation de bénéfices nets de 11'333 fr. 60 (1997), 32'274 fr. 90 (1998), 31'088 fr. (1999) et 98'167 fr. 10 (2000).
Par décision du 21 janvier 2002, l'Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura (ci-après: l'OAI) a nié le droit de l'assuré à toute prestation au motif que malgré son invalidité, et en tenant compte du salaire versé à l'employé engagé pour le seconder, l'assuré ne subissait aucune perte économique, le bénéfice net tiré de son entreprise après la survenance de l'atteinte à la santé (98'167 fr. en 2000) apparaissant même supérieur à celui réalisé auparavant (32'774 fr. [recte: 32'274 fr. 90] en 1998.
B.
Par jugement du 5 juin 2002, le Tribunal cantonal de la République et canton du Jura a rejeté le recours formé contre cette décision par l'assuré.
C.
Ce dernier interjette recours de droit administratif contre ce jugement, concluant sous suite de frais et dépens à son annulation, principalement à l'octroi d'une rente d'invalidité entière et, à titre subsidiaire, au renvoi de la cause à l'administration pour instruction complémentaire et nouvelle décision.
L'OAI conclut au rejet du recours. L'Office fédéral des assurance sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit :
1.
La loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA) du 6 octobre 2000 a apporté diverses modifications dans le domaine de l'assurance-invalidité. Cette loi, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, n'est toutefois pas applicable au présent litige, qui reste soumis au droit en vigueur jusqu'au 31 décembre 2002 (ATF 127 V 467 consid. 1, 121 V 366 consid. 1b).
2.
Selon l'art. 4 al. 1

SR 831.20 Loi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité (LAI) LAI Art. 4 Invalidité - 1 L'invalidité (art. 8 LPGA44) peut résulter d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident.45 |
|
1 | L'invalidité (art. 8 LPGA44) peut résulter d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident.45 |
2 | L'invalidité est réputée survenue dès qu'elle est, par sa nature et sa gravité, propre à ouvrir droit aux prestations entrant en considération.46 |
Selon l'art. 28 al. 1

SR 831.20 Loi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité (LAI) LAI Art. 28 Principe - 1 L'assuré a droit à une rente aux conditions suivantes: |
|
1 | L'assuré a droit à une rente aux conditions suivantes: |
a | sa capacité de gain ou sa capacité d'accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles; |
b | il a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA203) d'au moins 40 % en moyenne durant une année sans interruption notable; |
c | au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40 % au moins. |
1bis | Une rente au sens de l'al. 1 n'est pas octroyée tant que toutes les possibilités de réadaptation au sens de l'art. 8, al. 1bis et 1ter, n'ont pas été épuisées.204 |
2 | ...205 |

SR 831.20 Loi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité (LAI) LAI Art. 28 Principe - 1 L'assuré a droit à une rente aux conditions suivantes: |
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1 | L'assuré a droit à une rente aux conditions suivantes: |
a | sa capacité de gain ou sa capacité d'accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles; |
b | il a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA203) d'au moins 40 % en moyenne durant une année sans interruption notable; |
c | au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40 % au moins. |
1bis | Une rente au sens de l'al. 1 n'est pas octroyée tant que toutes les possibilités de réadaptation au sens de l'art. 8, al. 1bis et 1ter, n'ont pas été épuisées.204 |
2 | ...205 |
Chez les assurés actifs, le degré d'invalidité doit être déterminé sur la base d'une comparaison des revenus. Pour cela, le revenu du travail que l'invalide pourrait obtenir en exerçant l'activité qu'on peut raisonnablement attendre de lui, après exécution éventuelle de mesures de réadaptation et compte tenu d'une situation équilibrée du marché du travail, est comparé au revenu qu'il aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide (art. 28 al. 2

SR 831.20 Loi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité (LAI) LAI Art. 28 Principe - 1 L'assuré a droit à une rente aux conditions suivantes: |
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1 | L'assuré a droit à une rente aux conditions suivantes: |
a | sa capacité de gain ou sa capacité d'accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles; |
b | il a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA203) d'au moins 40 % en moyenne durant une année sans interruption notable; |
c | au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40 % au moins. |
1bis | Une rente au sens de l'al. 1 n'est pas octroyée tant que toutes les possibilités de réadaptation au sens de l'art. 8, al. 1bis et 1ter, n'ont pas été épuisées.204 |
2 | ...205 |

SR 831.201 Règlement du 17 janvier 1961 sur l'assurance-invalidité (RAI) RAI Art. 27 - 1 Par travaux habituels, visés à l'art. 7, al. 2, de la loi, des assurés travaillant dans le ménage, il faut entendre l'activité usuelle dans le ménage, ainsi que les soins et l'assistance apportés aux proches. |
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1 | Par travaux habituels, visés à l'art. 7, al. 2, de la loi, des assurés travaillant dans le ménage, il faut entendre l'activité usuelle dans le ménage, ainsi que les soins et l'assistance apportés aux proches. |
2 | ...170 |
fondamentale entre la procédure extraordinaire d'évaluation et la méthode spécifique (selon l'art. 28 al. 3

SR 831.20 Loi fédérale du 19 juin 1959 sur l'assurance-invalidité (LAI) LAI Art. 28 Principe - 1 L'assuré a droit à une rente aux conditions suivantes: |
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1 | L'assuré a droit à une rente aux conditions suivantes: |
a | sa capacité de gain ou sa capacité d'accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles; |
b | il a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA203) d'au moins 40 % en moyenne durant une année sans interruption notable; |
c | au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40 % au moins. |
1bis | Une rente au sens de l'al. 1 n'est pas octroyée tant que toutes les possibilités de réadaptation au sens de l'art. 8, al. 1bis et 1ter, n'ont pas été épuisées.204 |
2 | ...205 |

SR 831.201 Règlement du 17 janvier 1961 sur l'assurance-invalidité (RAI) RAI Art. 26bis Détermination du revenu avec invalidité - 1 Si l'assuré réalise un revenu après la survenance de l'invalidité, le revenu avec invalidité (art. 16 LPGA) correspond à ce revenu, à condition que l'assuré exploite autant que possible sa capacité fonctionnelle résiduelle en exerçant une activité qui peut raisonnablement être exigée de lui. |
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1 | Si l'assuré réalise un revenu après la survenance de l'invalidité, le revenu avec invalidité (art. 16 LPGA) correspond à ce revenu, à condition que l'assuré exploite autant que possible sa capacité fonctionnelle résiduelle en exerçant une activité qui peut raisonnablement être exigée de lui. |
2 | Si l'assuré ne réalise pas de revenu déterminant, le revenu avec invalidité est déterminé en fonction des valeurs statistiques visées à l'art. 25, al. 3. Pour les assurés visés à l'art. 26, al. 6, des valeurs indépendantes du sexe sont utilisées, en dérogation à l'art. 25, al. 3. |
3 | Une déduction de 10 % est opérée sur la valeur statistique visée à l'al. 2. Si, du fait de l'invalidité, l'assuré ne peut travailler qu'avec une capacité fonctionnelle au sens de l'art. 49, al. 1bis, de 50 % ou moins, une déduction de 20 % est opérée. Aucune déduction supplémentaire n'est possible.167 |

SR 831.201 Règlement du 17 janvier 1961 sur l'assurance-invalidité (RAI) RAI Art. 27 - 1 Par travaux habituels, visés à l'art. 7, al. 2, de la loi, des assurés travaillant dans le ménage, il faut entendre l'activité usuelle dans le ménage, ainsi que les soins et l'assistance apportés aux proches. |
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1 | Par travaux habituels, visés à l'art. 7, al. 2, de la loi, des assurés travaillant dans le ménage, il faut entendre l'activité usuelle dans le ménage, ainsi que les soins et l'assistance apportés aux proches. |
2 | ...170 |
3.
3.1 Il n'est pas contesté que l'assuré est totalement incapable de travailler et ne peut plus exercer une quelconque activité soutenue, aussi bien physique qu'intellectuelle, comme en attestent l'expertise du docteur B.________ (rapport du 14 février 2001) et l'avis du médecin traitant de l'assuré (rapport du docteur A.________, du 30 mars 2001).
Selon le rapport du conseiller en réadaptation du 3 septembre 2001, l'assuré a cessé son activité d'installateur en chauffage indépendant en juillet 1999. Alors qu'auparavant, il passait l'essentiel de son temps de travail sur les chantiers, il ne pourrait désormais s'occuper que de la facturation, des devis et des commandes, ce qui représente 10 pour cent de l'activité globale.
Si l'administration et les premiers juges ont nié le droit à une rente, c'est en considérant que l'entreprise du recourant n'a pas subi de répercussion économique malgré l'atteinte à sa santé.
3.2 Le recourant fait valoir que les bons résultats des exercices 1999 et 2000 sont totalement indépendants de son activité ou plutôt de son absence d'activité. Son épouse a pris une part plus importante dans la collaboration à l'entreprise. Son fils s'est également impliqué de manière prépondérante dans l'entreprise. Il apparaît en outre qu'un monteur a été engagé pour remplacer le recourant sur les chantiers.
3.3 En l'espèce, on ne peut guère tirer d'enseignements des bilans comptables de 1997 à 2000 reproduits en page 3 du jugement attaqué, notamment pour les raisons exposées par le recourant et qui apparaissent crédibles. Dans une conjoncture favorable, il est évident que l'impossibilité pour le recourant d'exécuter des travaux de montage sur les chantiers (dix heures par jour selon le rapport d'enquête économique) a des répercussions économiques sur l'entreprise. D'une part, ce travail doit être exécuté par un autre monteur spécialisé. D'autre part, s'agissant d'une petite entreprise (avec un ou deux collaborateurs) un transfert des tâches du recourant vers une activité de direction et de bureau ne compense certainement pas ses répercussions économiques. A cet égard, on ne peut suivre les premiers juges lorsqu'ils affirment que l'assuré s'est réadapté dans la direction de l'entreprise, la surveillance et l'administration pour en conclure - de manière un peu hâtive - qu'il ne subit pas d'incapacité de gain. Indépendamment de cela, les données comptables dont on dispose varient très fortement d'une année à l'autre. De ce point de vue également, il est difficile de fixer sans tomber dans l'arbitraire un revenu hypothétique sur des
bases aussi fluctuantes.
C'est dire qu'il y a trop de facteurs étrangers à l'invalidité qui influencent le revenu de l'entreprise du recourant pour que l'on applique la méthode ordinaire d'évaluation de l'invalidité. Il se justifie bien plutôt d'appliquer la méthode extraordinaire, comme dans l'affaire qui a donné lieu à l'ATF 128 V 29, précité. Il s'agit, tout d'abord de déterminer les revenus horaires de chacune des activités, en se référant au besoin aux données fournies par une association professionnelle de la branche. En l'occurrence, ces éléments font défaut. Il convient dès lors de renvoyer la cause à l'administration pour complément d'instruction et nouvelle décision.
Le recourant s'est fait assister d'un conseil en procédure fédérale. Obtenant gain de cause, il peut prétendre l'allocation d'une indemnité de dépens (art. 159 al. 1

SR 831.201 Règlement du 17 janvier 1961 sur l'assurance-invalidité (RAI) RAI Art. 27 - 1 Par travaux habituels, visés à l'art. 7, al. 2, de la loi, des assurés travaillant dans le ménage, il faut entendre l'activité usuelle dans le ménage, ainsi que les soins et l'assistance apportés aux proches. |
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1 | Par travaux habituels, visés à l'art. 7, al. 2, de la loi, des assurés travaillant dans le ménage, il faut entendre l'activité usuelle dans le ménage, ainsi que les soins et l'assistance apportés aux proches. |
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SR 831.201 Règlement du 17 janvier 1961 sur l'assurance-invalidité (RAI) RAI Art. 27 - 1 Par travaux habituels, visés à l'art. 7, al. 2, de la loi, des assurés travaillant dans le ménage, il faut entendre l'activité usuelle dans le ménage, ainsi que les soins et l'assistance apportés aux proches. |
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1 | Par travaux habituels, visés à l'art. 7, al. 2, de la loi, des assurés travaillant dans le ménage, il faut entendre l'activité usuelle dans le ménage, ainsi que les soins et l'assistance apportés aux proches. |
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Par ces motifs, le Tribunal fédéral des assurances prononce :
1.
Le recours est partiellement admis en ce sens que le jugement du Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, du 5 juin 2002, et la décision de l'Office de l'assurance-invalidité du canton du Jura, du 21 janvier 2002, sont annulés, la cause étant renvoyée à l'office pour instruction complémentaire et nouvelle décision au sens des motifs.
2.
Il n'est pas perçu de frais de justice.
3.
L'intimé versera au recourant la somme de 2'500 fr. (y compris la taxe à la valeur ajoutée) à titre de dépens pour la procédure fédérale.
4.
Le présent arrêt sera communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de la République et canton du Jura, Chambre des assurances, et à l'Office fédéral des assurances sociales.
Lucerne, le 19 février 2003
Au nom du Tribunal fédéral des assurances
Le Président de la IIe Chambre: Le Greffier: