Bundesstrafgericht Tribunal pénal fédéral Tribunale penale federale Tribunal penal federal
Numéro de dossier: BB.2012.72 (Procédure secondaire: BP.2012.23)
Décision du 17 janvier 2013 Cour des plaintes
Composition
Les juges pénaux fédéraux Stephan Blättler, président, Roy Garré et Patrick Robert-Nicoud,
la greffière Clara Poglia
Parties
A., représentée par Me Edgar Paltzer, recourante
contre
Ministère public de la Confédération, intimé
Objet
Consultation des dossiers (art. 101 s


Faits:
A. Le Ministère public de la Confédération (ci-après: MPC) mène, depuis le 3 juin 2011, une procédure pénale des chefs de blanchiment d'argent (art. 305bis


Dans ce contexte et suite à une communication du Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent, le MPC, par ordonnance du 27 octobre 2011, a adressé une demande de renseignements à la banque B. SA concernant la relation d’affaire n° 1 dont est titulaire et ayant droit économique A. Ladite autorité a requis dans ce cadre la production des documents bancaires relatifs au compte susmentionné et prononcé le séquestre des valeurs patrimoniales y déposées (procédure connexe BB.2011.127, act. 1.1). La Cour de céans et le Tribunal fédéral ont confirmé ce prononcé par décision du 20 février 2012 (décision du Tribunal pénal fédéral BB.2012.127) et arrêt du 5 septembre 2012 (arrêt du Tribunal fédéral 1B_175/2012) respectivement. Compte tenu de la formulation du texte et malgré l'intitulé du prononcé, il avait par ailleurs été retenu que la décision du MPC attaquée ne formulait pas un ordre de production de la documentation bancaire visée mais en prononçait le séquestre (décision du Tribunal pénal fédéral BB.2012.127 susmentionnée, consid. 1.3).
B. En date du 23 mai 2012, le MPC a rendu une ordonnance établissant les modalités d'accès au dossier des prévenus et des autres participants à la procédure (act. 1.1). Par décision séparée du même jour, il a en outre autorisé la consultation du dossier par la République arabe d'Egypte (act. 1.1).
C. A. a recouru à l'encontre de ces deux décisions au moyen d'un seul mémoire daté du 4 juin 2012 (act. 1). Elle a conclu à ce qu'il plaise à la Ie Cour des plaintes (devenue Cour unique depuis le 1er janvier 2012; RO 2011 4495) du Tribunal pénal fédéral:
« Préalablement
Principalement
Ordonner l'effet suspensif à l'exécution de l'ordonnance d'accès au dossier du 23 mai 2012 ainsi que de la décision de même date accordant un droit d'accès au dossier de la République arabe d'Egypte.
Subsidiairement
Ordonner à titre de mesure provisoire la restriction de l'accès aux pièces du dossier concernant la recourante qui font l'objet de l'ordonnance de renseignements bancaires et de séquestre du 27 octobre 2011 ainsi que du courrier du MPC à la banque B. SA du 11 avril 2012.
Principalement
Le recours est admis.
L'ordonnance concernant l'accès au dossier du 23 mai 2012 ainsi que la décision concernant les modalités de consultation du dossier par la République arabe d'Egypte rendue par le Ministère public de la Confédération le 23 mai 2012 sont modifiées en ce sens que ni la République arabe d'Egypte ni les autres participants à la procédure n'ont accès aux pièces du dossier concernant la recourante qui font l'objet de l'ordonnance de renseignements bancaires et de séquestre du 27 octobre 2011 ainsi que du courrier du MPC à la banque B. SA du 11 avril 2012. »
D. Le volet du recours dirigé à l'encontre de la décision autorisant la République arabe d'Egypte à consulter le dossier a donné lieu à l'ouverture d'une procédure parallèle, référencée RR.2012.125. Cette procédure a fait l'objet d'un arrêt de la Cour de céans daté du 12 décembre 2012 décrétant la suspension de l'accès au dossier dudit pays jusqu'à l'entrée en force des différentes décisions de clôture qui seront rendues dans les procédures d'entraide pénale internationale connexes (arrêt du Tribunal pénal fédéral RR.2012.122/123/124/125/126-127/128-130/131/132-137/145/149-151).
Le pan du recours relatif aux modalités d'accès au dossier des prévenus et des autres parties a pour sa part conduit à l'ouverture de la procédure faisant l'objet de la présente décision (BB.2012.72).
E. En date du 5 juin 2012, la Cour de céans a octroyé au recours l'effet suspensif superprovisoire (BP.2012.23, act. 2). Par ordonnance du 25 juin 2012, ledit effet a été confirmé, après interpellation du MPC (BP.2012.23, act. 6).
F. Invité à répondre sur le fond, cette dernière autorité a conclu, le 13 juillet 2012, au rejet de celui-ci avec suite de frais (act. 12). Elle a joint à son écriture un inventaire de la procédure non caviardé qui lui a été retourné par la Cour de céans, compte tenu de la pratique constante de celle-ci selon laquelle aucun moyen de preuve non-accessible aux parties n'est versé au dossier; il était laissé le soin au MPC de décider s'il souhaitait soumettre d'autres pièces respectant ladite exigence (act. 17). C'est ainsi que cette autorité a par la suite transmis, en date du 3 août 2012, une nouvelle version dudit inventaire, partiellement caviardée (act. 24).
Egalement appelés à se déterminer, les prévenus à la procédure pénale ont été sollicités au moyen d'un résumé des griefs soulevés par la recourante – ainsi que ceux d'autres recourants tiers saisis et d'un prévenu, ayant également recouru à l'encontre de la décision faisant l'objet de la présente procédure (voir causes connexes BB.2012.73-74/76-79/81-83) –, ce afin de garantir l'anonymat de cette dernière et tenir compte de l'attribution de l'effet suspensif (act. 6). C. ainsi que D. et E. s'en sont rapportées à justice par écrit du 11 juillet 2012 (act. 11) de même que F. qui a fait part de sa prise de position par courrier du 16 juillet 2012 (act. 14). Par écrits du même jour, G. a déclaré souscrire aux arguments des recourants (act. 13) et H., I., J. ainsi que K. ont indiqué appuyer les recours (act. 15 et 16). L. a communiqué, le 16 juillet 2012, faire siens les arguments et conclusions des recourants (act. 19). Les autres prévenus à la procédure n'ont pas donné suite à l'invitation de la Cour. Une copie caviardée de ces dernières prises de position a été adressée à la recourante (act. 20).
Il n'a pas été ordonné d'échange d'écritures supplémentaire.
G. Les arguments et moyens de preuve invoqués par les parties seront repris, si nécessaire, dans les considérants en droit.
La Cour considère en droit:
1.
1.1 En tant qu’autorité de recours, la Cour des plaintes examine avec plein pouvoir de cognition en fait et en droit les recours qui lui sont soumis (Message relatif à l’unification du droit de la procédure pénale du 21 décembre 2005, FF 2006 1057, 1296 i.f.; Stephenson/Thiriet, Commentaire bâlois, Schweizerische Strafprozessordnung [ci-après: Commentaire bâlois], no 15 ad art. 393; Keller, Kommentar zur Schweizerischen Strafprozessordnung [StPO], [Donatsch/Hansjakob/Lieber, éd.] ci-après: Kommentar StPO, no 39 ad art. 393; Schmid, Handbuch des schweizerischen Strafprozessrechts, Zurich/Saint-Gall 2009, no 1512).
1.2 Les décisions du MPC peuvent faire l'objet d'un recours devant la Cour de céans (art. 393 al. 1 let. a




1.3 Dispose de la qualité pour recourir toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l'annulation ou à la modification d'une décision (art. 382 al. 1



1.4 Vu ce qui précède, le recours est recevable.
2. La recourante s'oppose à la décision du MPC en faisant valoir qu'autoriser aux prévenus la consultation des documents la concernant reviendrait à confirmer le séquestre de ceux-ci et à vider ainsi la procédure qui était, au moment du dépôt du présent recours, pendante à l'encontre de cette mesure par devant le Tribunal fédéral (act. 1, p. 4). La recourante allègue également que son intérêt à la confidentialité des informations financières l'emporterait sur celui des autres participants à la procédure.
2.1 Les modalités d'accès au dossier adoptées par le MPC avant sa décision du 23 mai 2012 prévoyaient que les prévenus à la procédure avaient accès à l'ensemble de l'information générale à l'exception des documents bancaires et sociétaires édités et/ou séquestrés – les pièces de forme y relatives, en particulier les annonces du Bureau de communication en matière de blanchiment d'argent, les ordonnances d'édition et autres, étant néanmoins accessibles aux conseils des prévenus sans autorisation de copie. En outre, les informations bancaires et sociétaires concernant les tiers saisis n'étaient pas accessibles (procédures connexes BB.2012.73-74/76-79, act. 1.21). La décision entreprise établit que les parties prévenues sont désormais autorisées à consulter l'intégralité de la procédure – y compris les informations bancaires et sociétaires relatives aux tiers saisis –, sans toutefois pouvoir relever copie des pièces touchant à un intérêt privé prépondérant et digne de protection des autres participants à la procédure (act. 1.1). Au demeurant, en application de l'art. 105 al. 2

2.2 En procédure pénale, l'accès au dossier est garanti aux parties de manière générale par l'art. 107 al. 1 let. a











2.3 En l'espèce, la recourante ne conteste pas les modalités de son accès au dossier mais s'attaque à l'élargissement de la consultation octroyé aux autres parties. En l'occurrence, la question ne porte ici que sur l'accès accordé aux prévenus à la procédure. En effet, il y a lieu de relever que la consultation du dossier par la partie plaignante a déjà été réglée par arrêt de la Cour de céans du 12 décembre 2012 (arrêt du Tribunal pénal fédéral RR.2012.122/123/124/125/126-127/128-130/131/132-137/145/149-151 susmentionné) et que, selon les termes de la décision querellée, le droit de consultation des autres participants à la procédure n'a pas été modifié de sorte que ceux-ci n'auront en tout état de cause pas accès aux pièces concernant la recourante.
In casu, même si l'on avait dû admettre que le grief invoqué aurait été bien fondé, ce qui apparaît plus que douteux, il y a lieu de relever que, depuis l'arrêt du Tribunal fédéral (arrêt 1B_175/2012 susmentionné) confirmant la mesure de séquestre contestée par la recourante, celui-ci a perdu toute pertinence. Au surplus, l'argument selon lequel l'intérêt de la recourante au maintien de la confidentialité des informations financières versées à la procédure primerait celui des autres parties n'est aucunement motivé. La simple qualité "confidentielle" des pièces concernées n'est au demeurant pas suffisante, compte tenu des principes exposés ci-dessus (consid. 2.2.), pour justifier une restriction de l'accès au dossier au détriment des droits de la défense. Au demeurant, l'interdiction prononcée par le MPC de lever copie des pièces touchant à un intérêt privé prépondérant et digne de protection des autres participants à la procédure permet d'assurer la proportionnalité des modalités adoptées. La démarche du MPC apparaît, en outre, d'autant plus opportune qu'elle permet de garantir la protection d'importants intérêts. Parmi ceux-ci, il y a lieu en particulier de mentionner le droit d'être entendu des prévenus, élément essentiel du droit de la défense, ainsi que l'économie de procédure, exigeant de l'autorité que celle-ci organise le déroulement de la procédure de la manière la plus idoine pour assurer le respect du principe de célérité (art. 5

2.4 La recourante ne faisant valoir aucun autre motif justifiant une limitation de l'accès au dossier, le recours doit être rejeté.
3. Selon l’art. 428 al. 1


4. Afin de respecter les limitations d'accès au dossier établies par la décision du MPC présentement confirmée, la recourante recevra une version partiellement anonymisée de la décision, laquelle dissimulera le nom des prévenus. Au vu de l'intérêt de ces derniers dans la présente cause, un exemplaire de ce prononcé leur sera également notifié. Celui-ci, compte tenu de l'issue du recours, ne comportera pas l'anonymisation du nom de la recourante. Les indications bancaires relatives à cette dernière seront néanmoins caviardées.
Par ces motifs, la Cour des plaintes prononce:
1. Le recours est rejeté.
2. Un émolument de CHF 1'500.-- est mis à la charge de la recourante.
3. Un émolument de CHF 200.-- chacun est mis à la charge de H., I., J., K. et L.
4. Il n'est pas alloué de dépens.
Bellinzone, le 21 janvier 2013
Au nom de la Cour des plaintes
du Tribunal pénal fédéral
Le président: La greffière:
Distribution
- Me Edgar H. Paltzer, avocat
- Ministère public de la Confédération
- Me Michel Halpérin, avocat
- Me Marc Hassberger, avocat
- Me Vincent Jeanneret, avocat
- Me Patrick Hunziker, avocat
- Me Jean-Marie Crettaz, avocat
- Me Dominique Ritter, avocate
- Me Guillaume Vodoz, avocat
- M.
- Mes Paul Gully-Hart et Benjamin Borsodi, avocats
- Mes Didier de Montmollin et André Gruber, avocats
Indication des voies de recours
Il n'existe pas de voies de recours ordinaires contre la présente décision.