Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
5P.460/2006 /frs

Arrêt du 17 janvier 2007
IIe Cour de droit civil

Composition
M. et Mmes les Juges Raselli, Président,
Nordmann et Hohl.
Greffier: M. Braconi.

Parties
X.________ SA,
recourante, représentée par Me Alexandre Montavon, avocat,

contre

Y.________ SA,
intimée, représentée par Me Christian Luscher, avocat,
1ère Section de la Cour de justice du canton de Genève, case postale 3108, 1211 Genève 3.

Objet
art. 9
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 9 Protection contre l'arbitraire et protection de la bonne foi - Toute personne a le droit d'être traitée par les organes de l'État sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi.
et 29
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
1    Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
2    Les parties ont le droit d'être entendues.
3    Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert.
Cst. (mainlevée d'opposition),

recours de droit public [OJ] contre l'arrêt de la 1ère Section de la Cour de justice du canton de Genève
du 28 septembre 2006.

Faits:
A.
A.a Par ordonnance du 27 octobre 2003, le Président du Tribunal de commerce de Marrakech a condamné la société X.________ SA à payer à Y.________ SA la somme de 22'000'100 dirhams marocains, avec intérêts à 6%. Cette ordonnance a été confirmée le 6 juillet 2004 par la Cour de commerce de Marrakech.
A.b Se fondant sur ces décisions, Y.________ SA a fait notifier le 14 juillet 2005 à X.________ SA un commandement de payer la somme de 3'094'247 fr., plus intérêts à 6% dès le 18 octobre 2002, auquel la poursuivie a formé opposition.
Le 20 mars 2006, la poursuivante a sollicité du Tribunal de première instance de Genève l'exequatur de l'arrêt de la Cour de commerce de Marrakech du 6 juillet 2004 et la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer; elle a produit notamment les deux décisions marocaines sous forme d'expéditions complètes et authentiques, ainsi qu'un courrier de l'Ambassade du Maroc en Suisse du 26 février 2006 indiquant que, d'après le Ministère marocain de la Justice, l'arrêt dont l'exequatur était requis ne pouvait faire l'objet d'un recours ordinaire, qu'un éventuel pourvoi en cassation n'aurait pas d'effet suspensif, sauf à titre exceptionnel - à savoir en matière d'état, d'immatriculation et en cas de faux incident -, et que, en conclusion, aucun recours ne pouvait faire obstacle à l'exécution d'une décision prise par une Cour d'appel de commerce.

La poursuivie a soutenu que l'arrêt en question n'était pas exécutoire, alléguant avoir introduit à l'encontre de cette décision les procédures suivantes:
- un pourvoi en cassation déposé le 22 février 2005 auprès de la Cour Suprême de Rabat, sans demande d'octroi de l'effet suspensif;
- une action en rétractation déposée le 18 mai 2006 auprès du Tribunal de première instance de Marrakech;
- une demande de suspension à l'exécution déposée le 18 mai 2006 auprès de la Cour d'appel de commerce de Marrakech.
B.
Par jugement du 29 juin 2006, le Tribunal de première instance de Genève a reconnu et déclaré exécutoire en Suisse l'arrêt de la Cour de commerce de Marrakech du 6 juillet 2004 et prononcé la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer.
La poursuivie a appelé de ce jugement le 29 juin 2006. À l'appui de sa réponse, la poursuivante a produit cinq pièces nouvelles, à savoir un extrait du Code de procédure civile marocain portant sur la procédure de rétractation (pièce n° 16), une expédition complète et authentique de l'arrêt de la Cour Suprême de Rabat du 17 mai 2006 rejetant le pourvoi en cassation de la poursuivie (pièce n° 17a), ainsi que sa traduction (pièce n° 17b), une expédition complète et authentique de l'ordonnance du Président de la Cour d'appel de commerce de Marrakech du 6 juillet 2006 rejetant la demande de suspension à l'exécution (pièce n° 18a), ainsi que sa traduction (pièce n° 18b). Lors de l'audience de plaidoiries du 6 septembre 2006, la poursuivie a requis que lesdites pièces soient écartées du dossier, pour cause de tardiveté.

Statuant le 28 septembre 2006, la Cour de justice, après avoir admis la recevabilité des pièces susmentionnées, a rejeté l'appel.
C.
Agissant par la voie du recours de droit public au Tribunal fédéral pour violation des art. 9
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 9 Protection contre l'arbitraire et protection de la bonne foi - Toute personne a le droit d'être traitée par les organes de l'État sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi.
et 29 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
1    Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
2    Les parties ont le droit d'être entendues.
3    Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert.
Cst., X.________ SA conclut, avec suite de frais et dépens, à l'annulation de cet arrêt.

Y.________ SA conclut, avec suite de frais et dépens, au rejet du recours.
D.
Par ordonnance présidentielle du 20 novembre 2006, l'effet suspensif a été attribué au recours.

Le Tribunal fédéral considère en droit:
1.
La décision attaquée ayant été rendue avant l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2007 (RO 2006 1205, 1242), de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF; RS 173.110), l'ancienne loi d'organisation judiciaire (OJ) s'applique en l'espèce (art. 132 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 132 Droit transitoire - 1 La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
1    La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
2    ...122
3    La période de fonction des juges ordinaires et suppléants qui ont été élus sur la base de l'organisation judiciaire du 16 décembre 1943123 ou de l'arrêté fédéral du 23 mars 1984 concernant l'augmentation du nombre des juges suppléants du Tribunal fédéral124 ou qui seront élus pendant les années 2007 et 2008 prend fin le 31 décembre 2008.125
4    La limitation du nombre de juges suppléants au sens de l'art. 1, al. 4, s'applique dès 2009.126
LTF).
2.
Le Tribunal fédéral vérifie d'office et librement la recevabilité du recours dont il est saisi (ATF 132 III 747 consid. 4 p. 748).
2.1 Interjeté en temps utile contre un prononcé de mainlevée définitive de l'opposition rendu en dernière instance cantonale (ATF 120 la 256 consid. 1a p. 257; 98 la 527 consid. 1 p. 532), le recours est recevable sous l'angle des art. 84 al. 2
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 132 Droit transitoire - 1 La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
1    La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
2    ...122
3    La période de fonction des juges ordinaires et suppléants qui ont été élus sur la base de l'organisation judiciaire du 16 décembre 1943123 ou de l'arrêté fédéral du 23 mars 1984 concernant l'augmentation du nombre des juges suppléants du Tribunal fédéral124 ou qui seront élus pendant les années 2007 et 2008 prend fin le 31 décembre 2008.125
4    La limitation du nombre de juges suppléants au sens de l'art. 1, al. 4, s'applique dès 2009.126
, 86 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 132 Droit transitoire - 1 La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
1    La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
2    ...122
3    La période de fonction des juges ordinaires et suppléants qui ont été élus sur la base de l'organisation judiciaire du 16 décembre 1943123 ou de l'arrêté fédéral du 23 mars 1984 concernant l'augmentation du nombre des juges suppléants du Tribunal fédéral124 ou qui seront élus pendant les années 2007 et 2008 prend fin le 31 décembre 2008.125
4    La limitation du nombre de juges suppléants au sens de l'art. 1, al. 4, s'applique dès 2009.126
, 87
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 132 Droit transitoire - 1 La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
1    La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
2    ...122
3    La période de fonction des juges ordinaires et suppléants qui ont été élus sur la base de l'organisation judiciaire du 16 décembre 1943123 ou de l'arrêté fédéral du 23 mars 1984 concernant l'augmentation du nombre des juges suppléants du Tribunal fédéral124 ou qui seront élus pendant les années 2007 et 2008 prend fin le 31 décembre 2008.125
4    La limitation du nombre de juges suppléants au sens de l'art. 1, al. 4, s'applique dès 2009.126
et 89 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 132 Droit transitoire - 1 La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
1    La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
2    ...122
3    La période de fonction des juges ordinaires et suppléants qui ont été élus sur la base de l'organisation judiciaire du 16 décembre 1943123 ou de l'arrêté fédéral du 23 mars 1984 concernant l'augmentation du nombre des juges suppléants du Tribunal fédéral124 ou qui seront élus pendant les années 2007 et 2008 prend fin le 31 décembre 2008.125
4    La limitation du nombre de juges suppléants au sens de l'art. 1, al. 4, s'applique dès 2009.126
OJ.
2.2 Dans un recours de droit public, les faits et les moyens de preuve nouveaux sont en principe irrecevables (ATF 129 I 49 consid. 3 p. 57 et les citations). Le Tribunal fédéral s'en tient aux faits constatés par la juridiction cantonale, à moins que le recourant ne démontre que ces constatations sont arbitrairement fausses ou lacunaires (ATF 118 la 20 consid. 5a p. 26). Il s'ensuit que les compléments ou précisions que la recourante apporte à l'état de fait de l'arrêt attaqué sont irrecevables, sous réserve des griefs motivés conformément aux exigences posées à l'art. 90 al. 1 let. b
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 132 Droit transitoire - 1 La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
1    La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
2    ...122
3    La période de fonction des juges ordinaires et suppléants qui ont été élus sur la base de l'organisation judiciaire du 16 décembre 1943123 ou de l'arrêté fédéral du 23 mars 1984 concernant l'augmentation du nombre des juges suppléants du Tribunal fédéral124 ou qui seront élus pendant les années 2007 et 2008 prend fin le 31 décembre 2008.125
4    La limitation du nombre de juges suppléants au sens de l'art. 1, al. 4, s'applique dès 2009.126
OJ (cf. à ce sujet: ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495 et les arrêts cités).
3.
La recourante se plaint tout d'abord d'une violation de son droit d'être entendue garanti par l'art. 29 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
1    Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
2    Les parties ont le droit d'être entendues.
3    Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert.
Cst. En substance, elle reproche à la Cour de justice de ne pas s'être prononcée sur son moyen déduit de l'atteinte à l'ordre public (procédural) suisse; ce moyen était pertinent, puisque la jurisprudence admet l'intervention de la clause de réserve lorsque le jugement étranger a été obtenu ensuite d'un comportement frauduleux (en l'espèce, la souscription de deux lettres de change par des personnes qui n'avaient jamais eu de pouvoir de représentation et qui étaient, de surcroît, des employés de l'intimée).
3.1 Le droit d'être entendu découlant de l'art. 29 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
1    Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
2    Les parties ont le droit d'être entendues.
3    Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert.
Cst. implique, en particulier, l'obligation pour le juge de motiver au moins sommairement sa décision, afin que le justiciable puisse en saisir la portée et recourir à bon escient; le juge n'est, cependant, pas tenu de discuter tous les moyens invoqués par les parties, mais il peut, au contraire, se limiter à ceux qui apparaissent pertinents (ATF 129 I 232 consid. 3.2 p. 236 et les arrêts cités).
3.2 La cour cantonale a exposé que la reconnaissance d'une décision étrangère doit être refusée si elle est manifestement incompatible avec l'ordre public suisse (art. 27 al. 1
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 27 - 1 La reconnaissance d'une décision étrangère doit être refusée en Suisse si elle est manifestement incompatible avec l'ordre public suisse.
1    La reconnaissance d'une décision étrangère doit être refusée en Suisse si elle est manifestement incompatible avec l'ordre public suisse.
2    La reconnaissance d'une décision doit également être refusée si une partie établit:
a  qu'elle n'a été citée régulièrement, ni selon le droit de son domicile, ni selon le droit de sa résidence habituelle, à moins qu'elle n'ait procédé au fond sans faire de réserve;
b  que la décision a été rendue en violation de principes fondamentaux ressortissant à la conception suisse du droit de procédure, notamment que ladite partie n'a pas eu la possibilité de faire valoir ses moyens;
c  qu'un litige entre les mêmes parties et sur le même objet a déjà été introduit en Suisse ou y a déjà été jugé, ou qu'il a précédemment été jugé dans un État tiers, pour autant que cette dernière décision remplisse les conditions de sa reconnaissance.
3    Au surplus, la décision étrangère ne peut faire l'objet d'une révision au fond.
LDIP), c'est-à-dire lorsqu'elle heurte de manière intolérable les conceptions suisses de la justice, soit à cause du contenu matériel de ladite décision, soit en raison de la procédure dont elle est issue (art. 27 al. 2
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 27 - 1 La reconnaissance d'une décision étrangère doit être refusée en Suisse si elle est manifestement incompatible avec l'ordre public suisse.
1    La reconnaissance d'une décision étrangère doit être refusée en Suisse si elle est manifestement incompatible avec l'ordre public suisse.
2    La reconnaissance d'une décision doit également être refusée si une partie établit:
a  qu'elle n'a été citée régulièrement, ni selon le droit de son domicile, ni selon le droit de sa résidence habituelle, à moins qu'elle n'ait procédé au fond sans faire de réserve;
b  que la décision a été rendue en violation de principes fondamentaux ressortissant à la conception suisse du droit de procédure, notamment que ladite partie n'a pas eu la possibilité de faire valoir ses moyens;
c  qu'un litige entre les mêmes parties et sur le même objet a déjà été introduit en Suisse ou y a déjà été jugé, ou qu'il a précédemment été jugé dans un État tiers, pour autant que cette dernière décision remplisse les conditions de sa reconnaissance.
3    Au surplus, la décision étrangère ne peut faire l'objet d'une révision au fond.
LDIP). En tant que clause d'exception, la réserve d'ordre public s'interprète de façon restrictive, spécialement en matière de reconnaissance et d'exécution de jugements étrangers, où sa portée est plus restreinte que pour l'application directe du droit étranger.

Il est vrai que l'arrêt attaqué ne comporte aucune motivation expresse au sujet de l'ordre public, mais rappelle les conditions de sa mise en oeuvre (cf. consid. 4.2). Cependant, il faut admettre que la juridiction cantonale a implicitement nié que ces conditions fussent réalisées "en l'espèce" (cf. consid. 5). Le grief s'avère mal fondé.
4.
La Cour de justice a admis le caractère exécutoire de l'arrêt de la Cour de commerce de Marrakech du 6 juillet 2004 sur la base d'un double raisonnement. D'une part, les pièces produites en appel confirmaient que l'arrêt en cause était exécutoire. D'autre part, même si ces pièces n'avaient pas été produites ou déclarées recevables, l'issue du litige ne s'en serait pas trouvée modifiée. En effet, le courrier de l'Ambassade du Maroc en Suisse (pièce n° 9), produit par l'intimée à l'appui de sa requête, qui retranscrit la position du Ministère marocain de la Justice, constituait - dans l'optique du premier juge - une preuve déterminante que le pourvoi en cassation est une voie de recours extraordinaire et qu'aucun recours ne peut faire obstacle à l'exécution d'un arrêt rendu par une Cour d'appel de commerce; partant, l'intimée a bien satisfait à ses obligations découlant de l'art. 29 al. 1 let. b
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 29 - 1 La requête en reconnaissance ou en exécution sera adressée à l'autorité compétente du canton où la décision étrangère est invoquée. Elle sera accompagnée:
1    La requête en reconnaissance ou en exécution sera adressée à l'autorité compétente du canton où la décision étrangère est invoquée. Elle sera accompagnée:
a  d'une expédition complète et authentique de la décision;
b  d'une attestation constatant que la décision n'est plus susceptible de recours ordinaire ou qu'elle est définitive, et
c  en cas de jugement par défaut, d'un document officiel établissant que le défaillant a été cité régulièrement et qu'il a eu la possibilité de faire valoir ses moyens.
2    La partie qui s'oppose à la reconnaissance et à l'exécution est entendue dans la procédure; elle peut y faire valoir ses moyens.
3    Lorsqu'une décision étrangère est invoquée à titre préalable, l'autorité saisie peut statuer elle-même sur la reconnaissance.
LDIP. Au surplus, le Tribunal de première instance a retenu que la recourante n'avait pas démontré qu'une requête en suspension à l'exécution avait été formée devant la juridiction compétente, ni que le dépôt d'une pareille action entraînait l'octroi de l'effet suspensif, l'intéressée s'étant contentée de prétendre que cette mesure avait été
accordée, mais sans en apporter la preuve.
4.1 Concernant la première motivation, la recourante fait grief à la cour cantonale d'avoir conclu au caractère exécutoire de l'arrêt en question sur le vu de pièces (n° 18a et 18b; cf. supra, let. B) se rapportant à des circonstances qui n'existaient pas lorsque le premier juge a statué; or, les règles applicables à l'appel extraordinaire en procédure genevoise prohibent "l'invocation de faits et la production de moyens de preuve survenus postérieurement au jugement de première instance".
4.2 D'après la jurisprudence, une décision est arbitraire lorsqu'elle est manifestement insoutenable, méconnaît gravement une norme ou un principe juridique clair et incontesté, ou heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité; il ne suffit pas qu'une solution différente soit concevable, voire préférable; une telle décision n'est, de surcroît, annulée que si elle se révèle arbitraire, non seulement dans ses motifs, mais aussi dans son résultat (ATF 132 III 209 consid. 2.1 p. 211 et les arrêts cités).
4.3 Saisie d'un appel extraordinaire pour violation de la loi, au sens de l'art. 292 al. 1 let. c LPC/GE - ouvert en l'occurrence (arrêt 5P.65/1991 du 25 juin 1991, consid. 3b et les citations) -, la Cour de justice doit se placer dans la situation où se trouvait le premier juge lorsqu'il a rendu la décision attaquée et ne peut donc, en principe, fonder sa conviction sur des pièces produites pour la première fois en appel (ATF 106 Ia 88 consid. 1 p. 91/92 et les arrêts cités). Toutefois, cette règle souffre des exceptions, en particulier lorsque ces pièces nouvelles se rapportent à un domaine où l'examen a lieu d'office ou qu'elles tendent à réfuter un argument inopiné que le poursuivi a soulevé à l'audience de plaidoirie en première instance (Bertossa/Gaillard/Guyet/Schmidt, Commentaire de la loi de procédure civile du canton de Genève du 10 avril 1987, vol. II, n. 6 ad art. 292 LPC/GE et la jurisprudence citée).

En l'occurrence, la recourante fonde toute son argumentation sur cette dernière hypothèse (i.e. "moyen inattendu"), mais ne démontre pas en quoi il serait arbitraire d'admettre que l'exception relative aux pièces nouvelles se rapportant à un "domaine où l'examen a lieu d'office" - ici la détermination du caractère exécutoire (Gilliéron, Commentaire de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite, vol. I, n. 12 et 124 ad art. 81
SR 281.1 Loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP)
LP Art. 81 - 1 Lorsque la poursuite est fondée sur un jugement exécutoire rendu par un tribunal ou une autorité administrative suisse, le juge ordonne la mainlevée définitive de l'opposition, à moins que l'opposant ne prouve par titre que la dette a été éteinte ou qu'il a obtenu un sursis, postérieurement au jugement, ou qu'il ne se prévale de la prescription.
3    Si le jugement a été rendu dans un autre État, l'opposant peut en outre faire valoir les moyens prévus par une convention liant cet État ou, à défaut d'une telle convention, prévus par la loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé161, à moins qu'un juge suisse n'ait déjà rendu une décision concernant ces moyens.162
LP; cf. ATF 105 III 43 consid. 2a p. 44 et l'arrêt cité [pour les décisions administratives]) - vaut pour les faits nouveaux proprement dits (cf. Guldener, Schweizerisches Zivilprozessrecht, 3e éd., p. 490 in principio; Yung, Des faits nouveaux en appel, in: SJ 60/1938 p. 578 ss, spéc. 581 et les références). Faute d'être suffisamment motivée sur ce point, la critique est irrecevable (art. 90 al. 1 let. b
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 132 Droit transitoire - 1 La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
1    La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
2    ...122
3    La période de fonction des juges ordinaires et suppléants qui ont été élus sur la base de l'organisation judiciaire du 16 décembre 1943123 ou de l'arrêté fédéral du 23 mars 1984 concernant l'augmentation du nombre des juges suppléants du Tribunal fédéral124 ou qui seront élus pendant les années 2007 et 2008 prend fin le 31 décembre 2008.125
4    La limitation du nombre de juges suppléants au sens de l'art. 1, al. 4, s'applique dès 2009.126
OJ; ATF 125 I 492 consid. 1b p. 495 et les arrêts cités).
4.4 La première motivation de l'arrêt déféré résiste au grief d'arbitraire, en sorte qu'il devient superflu d'examiner si la Cour de justice a violé l'art. 9
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 9 Protection contre l'arbitraire et protection de la bonne foi - Toute personne a le droit d'être traitée par les organes de l'État sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi.
Cst. en considérant que le caractère exécutoire de la décision étrangère résultait également de la lettre de l'Ambassade du Maroc en Suisse (cf. ATF 130 III 321 consid. 6 p. 328).
5.
En conclusion, le présent recours doit être rejeté dans la mesure où il est recevable. Les frais et dépens incombent à la recourante (art. 156 al. 1
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 9 Protection contre l'arbitraire et protection de la bonne foi - Toute personne a le droit d'être traitée par les organes de l'État sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi.
et 159 al. 1
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 9 Protection contre l'arbitraire et protection de la bonne foi - Toute personne a le droit d'être traitée par les organes de l'État sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi.
OJ).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté dans la mesure où il est recevable.
2.
Un émolument judiciaire de 10'000 fr. est mis à la charge de la recourante.
3.
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 10'000 fr. à titre de dépens.
4.
Le présent arrêt est communiqué en copie aux mandataires des parties et à la 1ère Section de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 17 janvier 2007
Au nom de la IIe Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 5P.460/2006
Date : 17 janvier 2007
Publié : 13 juin 2007
Source : Tribunal fédéral
Statut : Non publié
Domaine : Droit des poursuites et de la faillite
Objet : art. 9 et 29 Cst. (mainlevée d'opposition)


Répertoire des lois
Cst: 9 
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 9 Protection contre l'arbitraire et protection de la bonne foi - Toute personne a le droit d'être traitée par les organes de l'État sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi.
29
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999
Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
1    Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable.
2    Les parties ont le droit d'être entendues.
3    Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert.
LDIP: 27 
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 27 - 1 La reconnaissance d'une décision étrangère doit être refusée en Suisse si elle est manifestement incompatible avec l'ordre public suisse.
1    La reconnaissance d'une décision étrangère doit être refusée en Suisse si elle est manifestement incompatible avec l'ordre public suisse.
2    La reconnaissance d'une décision doit également être refusée si une partie établit:
a  qu'elle n'a été citée régulièrement, ni selon le droit de son domicile, ni selon le droit de sa résidence habituelle, à moins qu'elle n'ait procédé au fond sans faire de réserve;
b  que la décision a été rendue en violation de principes fondamentaux ressortissant à la conception suisse du droit de procédure, notamment que ladite partie n'a pas eu la possibilité de faire valoir ses moyens;
c  qu'un litige entre les mêmes parties et sur le même objet a déjà été introduit en Suisse ou y a déjà été jugé, ou qu'il a précédemment été jugé dans un État tiers, pour autant que cette dernière décision remplisse les conditions de sa reconnaissance.
3    Au surplus, la décision étrangère ne peut faire l'objet d'une révision au fond.
29
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 29 - 1 La requête en reconnaissance ou en exécution sera adressée à l'autorité compétente du canton où la décision étrangère est invoquée. Elle sera accompagnée:
1    La requête en reconnaissance ou en exécution sera adressée à l'autorité compétente du canton où la décision étrangère est invoquée. Elle sera accompagnée:
a  d'une expédition complète et authentique de la décision;
b  d'une attestation constatant que la décision n'est plus susceptible de recours ordinaire ou qu'elle est définitive, et
c  en cas de jugement par défaut, d'un document officiel établissant que le défaillant a été cité régulièrement et qu'il a eu la possibilité de faire valoir ses moyens.
2    La partie qui s'oppose à la reconnaissance et à l'exécution est entendue dans la procédure; elle peut y faire valoir ses moyens.
3    Lorsqu'une décision étrangère est invoquée à titre préalable, l'autorité saisie peut statuer elle-même sur la reconnaissance.
LP: 81
SR 281.1 Loi fédérale du 11 avril 1889 sur la poursuite pour dettes et la faillite (LP)
LP Art. 81 - 1 Lorsque la poursuite est fondée sur un jugement exécutoire rendu par un tribunal ou une autorité administrative suisse, le juge ordonne la mainlevée définitive de l'opposition, à moins que l'opposant ne prouve par titre que la dette a été éteinte ou qu'il a obtenu un sursis, postérieurement au jugement, ou qu'il ne se prévale de la prescription.
3    Si le jugement a été rendu dans un autre État, l'opposant peut en outre faire valoir les moyens prévus par une convention liant cet État ou, à défaut d'une telle convention, prévus par la loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé161, à moins qu'un juge suisse n'ait déjà rendu une décision concernant ces moyens.162
LTF: 132
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 132 Droit transitoire - 1 La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
1    La présente loi s'applique aux procédures introduites devant le Tribunal fédéral après son entrée en vigueur; elle ne s'applique aux procédures de recours que si l'acte attaqué a été rendu après son entrée en vigueur.
2    ...122
3    La période de fonction des juges ordinaires et suppléants qui ont été élus sur la base de l'organisation judiciaire du 16 décembre 1943123 ou de l'arrêté fédéral du 23 mars 1984 concernant l'augmentation du nombre des juges suppléants du Tribunal fédéral124 ou qui seront élus pendant les années 2007 et 2008 prend fin le 31 décembre 2008.125
4    La limitation du nombre de juges suppléants au sens de l'art. 1, al. 4, s'applique dès 2009.126
OJ: 84  86  87  89  90  156  159
Répertoire ATF
105-III-43 • 106-IA-88 • 125-I-492 • 129-I-232 • 129-I-49 • 130-III-321 • 132-III-209 • 132-III-747
Weitere Urteile ab 2000
5P.460/2006 • 5P.65/1991
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
tribunal fédéral • première instance • ordre public • effet suspensif • recours de droit public • d'office • commandement de payer • maroc • décision étrangère • droit civil • moyen de preuve • droit d'être entendu • plaidoirie • traduction • cour suprême • greffier • procédure civile • décision • suppression • loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite
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AS
AS 2006/1205 • AS 2006/1242