Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
1B 442/2020
Arrêt du 14 janvier 2021
Ire Cour de droit public
Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Kneubühler, Président,
Chaix, Jametti, Müller et Merz.
Greffier : M. Tinguely.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Maitres Daniel Kinzer et Andrio Orler, avocats,
recourant,
contre
Administration fédérale des contributions, Eigerstrasse 65, 3003 Berne.
Objet
Droit pénal administratif; refus de mise sous scellés,
recours contre la décision du Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes, du 28 juillet 2020 (BV.2020.19).
Faits :
A.
Le 18 avril 2019, le Chef du Département fédéral des finances a autorisé l'Administration fédérale des contributions (AFC) à mener une enquête fiscale spéciale contre B.B.________, C.B.________ et A.________ en raison de soupçons de graves infractions fiscales au sens des art. 190 ss
SR 642.11 Loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct (LIFD) LIFD Art. 190 Conditions - 1 Lorsqu'il existe un soupçon fondé de graves infractions fiscales, d'assistance ou d'incitation à de tels actes, le chef du DFF peut autoriser l'AFC à mener une enquête en collaboration avec les administrations fiscales cantonales. |
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1 | Lorsqu'il existe un soupçon fondé de graves infractions fiscales, d'assistance ou d'incitation à de tels actes, le chef du DFF peut autoriser l'AFC à mener une enquête en collaboration avec les administrations fiscales cantonales. |
2 | Par grave infraction fiscale, on entend en particulier la soustraction continue de montants importants d'impôt (art. 175 et 176) et les délits fiscaux (art. 186 et 187). |
B.
B.a. Les 19 et 20 février 2020, une perquisition a été effectuée par l'AFC dans les locaux de la banque D.________ SA, à Genève.
Celle-ci était détenue par un membre de la famille B.________, dont font partie B.B.________ et C.B.________, eux-mêmes ayant été administrateurs de la banque respectivement jusqu'au 15 novembre 2018 et 17 octobre 2014. A.________, qui exerçait diverses activités pour le compte de la famille B.________ ainsi que pour des sociétés détenues par cette dernière, disposait pour sa part d'une boîte de messagerie électronique professionnelle liée à la banque D.________ SA.
La banque D.________ SA s'étant opposée à la perquisition, l'intégralité des données saisies a été mise sous scellés (cf. art. 50 al. 3
SR 313.0 Loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif (DPA) DPA Art. 50 - 1 La perquisition visant des papiers doit être opérée avec les plus grands égards pour les secrets privés; en particulier, les papiers ne seront examinés que s'ils contiennent apparemment des écrits importants pour l'enquête. |
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1 | La perquisition visant des papiers doit être opérée avec les plus grands égards pour les secrets privés; en particulier, les papiers ne seront examinés que s'ils contiennent apparemment des écrits importants pour l'enquête. |
2 | La perquisition doit être opérée de manière à sauvegarder le secret de fonction, ainsi que les secrets confiés aux ecclésiastiques, avocats, notaires, médecins, pharmaciens, sages-femmes et à leurs auxiliaires, en vertu de leur ministère ou de leur profession. |
3 | Avant la perquisition, le détenteur des papiers est, chaque fois que cela est possible, mis en mesure d'en indiquer le contenu. S'il s'oppose à la perquisition, les papiers sont mis sous scellés et déposés en lieu sûr; la cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral statue sur l'admissibilité de la perquisition (art. 25, al. 1). |
B.b. Par courrier du 28 février 2020, la banque D.________ SA a informé A.________ que les données contenues dans sa boîte de messagerie électronique professionnelle avaient été saisies lors de la perquisition menée les 19 et 20 février 2020.
Après que, le 9 mars 2020, A.________ avait requis de l'AFC la mise sous scellés de " l'intégralité des données saisies ", l'AFC lui a demandé, le même jour, de motiver sa requête sous l'angle d'un " éventuel intérêt juridiquement protégé au maintien du secret sur les données saisies ".
Le 16 mars 2020, A.________ a précisé que sa requête de mise sous scellés portait exclusivement sur les données le concernant personnellement, soit en particulier sur celles provenant de sa boîte de messagerie électronique. A cet égard, il a expliqué qu'à son souvenir, il avait utilisé celle-ci pour des messages privés avec des avocats ou des médecins.
Le 2 avril 2020, l'AFC a indiqué à A.________ que les données en question ne seraient pas exploitées jusqu'à droit connu sur sa requête de mise sous scellés.
B.c. Par décision du 8 mai 2020, l'AFC a refusé de donner suite à la requête de A.________ du 9 mars 2020.
En substance, elle a considéré que le précité n'était pas légitimé à requérir la mise sous scellés des données saisies auprès de la banque D.________ SA, dès lors qu'il n'en était pas détenteur et qu'il n'avait fait valoir, de manière suffisamment motivée, aucun intérêt juridiquement protégé au maintien d'un secret.
B.d. Saisie d'une plainte (art. 26
SR 313.0 Loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif (DPA) DPA Art. 26 - 1 Les mesures de contrainte (art. 45 et s.) et les actes ou omissions qui s'y rapportent peuvent être l'objet d'une plainte adressée à la cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral. |
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1 | Les mesures de contrainte (art. 45 et s.) et les actes ou omissions qui s'y rapportent peuvent être l'objet d'une plainte adressée à la cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral. |
2 | La plainte est déposée: |
a | auprès de la cour des plaintes si elle est dirigée contre une autorité judiciaire cantonale ou contre le directeur ou chef de l'administration; |
b | auprès du directeur ou du chef de l'administration dans les autres cas. |
3 | Si, dans les cas mentionnés à l'al. 2, let. b, le directeur ou le chef de l'administration corrige l'acte officiel ou remédie à l'omission conformément aux conclusions du plaignant, la plainte devient caduque; sinon, il la transmet à la cour des plaintes, avec ses observations, au plus tard le troisième jour ouvrable suivant celui où elle a été déposée. |
La plainte a été rejetée par décision du 28 juillet 2020 de la Cour des plaintes.
C.
Par acte du 31 août 2020, A.________ forme un recours en matière pénale au Tribunal fédéral contre la décision du 28 juillet 2020. Il conclut, avec suite de frais et dépens, principalement à sa réforme en ce sens que sa plainte contre la décision du 8 mai 2020 est admise et que l'AFC est invitée à mettre sous scellés toutes les données qui le concernent personnellement, notamment toutes les données provenant de sa boîte de messagerie électronique. Subsidiairement, il conclut à l'annulation de la décision du 28 juillet 2020 et au renvoi de la cause à la Cour des plaintes pour nouvelle décision dans le sens des considérants.
L'AFC conclut au rejet du recours. La Cour des plaintes renonce pour sa part à présenter des observations.
Par acte du 19 octobre 2020, A.________ persiste dans ses conclusions.
D.
Par ordonnance du 25 septembre 2020, le Président de la Ire Cour de droit public a admis la requête d'effet suspensif assortie au recours.
Considérant en droit :
1.
1.1. Le recours est dirigé contre une décision de la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral, qui porte sur la mise sous scellés de données saisies lors d'une perquisition au sens de l'art. 50
SR 313.0 Loi fédérale du 22 mars 1974 sur le droit pénal administratif (DPA) DPA Art. 50 - 1 La perquisition visant des papiers doit être opérée avec les plus grands égards pour les secrets privés; en particulier, les papiers ne seront examinés que s'ils contiennent apparemment des écrits importants pour l'enquête. |
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1 | La perquisition visant des papiers doit être opérée avec les plus grands égards pour les secrets privés; en particulier, les papiers ne seront examinés que s'ils contiennent apparemment des écrits importants pour l'enquête. |
2 | La perquisition doit être opérée de manière à sauvegarder le secret de fonction, ainsi que les secrets confiés aux ecclésiastiques, avocats, notaires, médecins, pharmaciens, sages-femmes et à leurs auxiliaires, en vertu de leur ministère ou de leur profession. |
3 | Avant la perquisition, le détenteur des papiers est, chaque fois que cela est possible, mis en mesure d'en indiquer le contenu. S'il s'oppose à la perquisition, les papiers sont mis sous scellés et déposés en lieu sûr; la cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral statue sur l'admissibilité de la perquisition (art. 25, al. 1). |
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 79 Exception - Le recours est irrecevable contre les décisions de la cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral, sauf si elles portent sur des mesures de contrainte. |
1.2. Ne mettant pas un terme à la procédure pénale administrative dirigée notamment contre le recourant, la décision attaquée est de nature incidente. Le recours au Tribunal fédéral n'est donc en principe recevable qu'en présence d'un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours: |
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1 | Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours: |
a | si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou |
b | si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse. |
2 | En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies. |
3 | Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci. |
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours: |
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1 | Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours: |
a | si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou |
b | si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse. |
2 | En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies. |
3 | Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci. |
Il ressort en l'espèce de la décision attaquée que, nonobstant le refus de l'AFC de donner suite à la requête du recourant du 9 mars 2020 tendant à la mise sous scellés des données de sa messagerie électronique, l'intégralité des données saisies lors de la perquisition des 19 et 20 février 2020, y compris celles concernant le recourant, sont néanmoins actuellement placées sous scellés par suite de l'opposition à la perquisition formée par la banque précitée (cf. décision attaquée, ad " Faits ", let. B p. 2; dossier de la Cour des plaintes, act. 2.3 et 2.4), ce que l'AFC a également confirmé dans ses déterminations du 22 septembre 2020 (cf. ch. III/1 p. 3). Il n'y a, dans ce contexte, rien d'évident à considérer que la décision attaquée soit propre à causer un préjudice au recourant.
De surcroît, le recourant ne prend pas de conclusions tendant à ce qu'il soit admis à participer à la procédure de levée de scellés qui pourrait avoir été initiée par l'AFC. Il ne prétend d'ailleurs pas non plus avoir formellement sollicité de la Cour des plaintes de pouvoir, le cas échéant, participer à cette procédure, ni en avoir indûment été écarté. Il n'apparaît dès lors pas que la décision attaquée revête un caractère définitif quant au maintien des scellés actuellement apposés sur les données litigieuses.
1.3. Il s'ensuit qu'à défaut pour le recourant de pouvoir valablement se prévaloir d'un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours: |
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1 | Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours: |
a | si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou |
b | si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse. |
2 | En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies. |
3 | Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci. |
2.
Le recourant, qui succombe, supporte les frais judiciaires (art. 66 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
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1 | En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
2 | Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis. |
3 | Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés. |
4 | En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours. |
5 | Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement. |
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 68 Dépens - 1 Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe. |
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1 | Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe. |
2 | En règle générale, la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige. |
3 | En règle générale, aucuns dépens ne sont alloués à la Confédération, aux cantons, aux communes ou aux organisations chargées de tâches de droit public lorsqu'ils obtiennent gain de cause dans l'exercice de leurs attributions officielles. |
4 | L'art. 66, al. 3 et 5, est applicable par analogie. |
5 | Le Tribunal fédéral confirme, annule ou modifie, selon le sort de la cause, la décision de l'autorité précédente sur les dépens. Il peut fixer lui-même les dépens d'après le tarif fédéral ou cantonal applicable ou laisser à l'autorité précédente le soin de les fixer. |
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est irrecevable.
2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 2000 fr., sont mis à la charge du recourant.
3.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, à l'Administration fédérale des contributions et au Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes.
Lausanne, le 14 janvier 2021
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Kneubühler
Le Greffier : Tinguely