Bundesverwaltungsgericht
Tribunal administratif fédéral
Tribunale amministrativo federale
Tribunal administrativ federal


Cour V

E-4117/2016

Arrêt du 14 septembre 2016

Jean-Pierre Monnet, juge unique,

Composition avec l'approbation de William Waeber, juge ;

Anne-Laure Sautaux, greffière.

A._______,né le (...),

alias A._______, né le (...),

Russie,
Parties
représenté par Johnson Belangenyi, Swiss-Exile,

(...),

recourant,

contre

Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM),

Quellenweg 6, 3003 Berne,

autorité inférieure.

Exécution du renvoi (recours en matière de réexamen) ;
Objet
décision du SEM du 3 juin 2016 / N (...).

vu

la demande d'asile déposée le 7 décembre 2010 en Suisse par le recourant,

la décision du 25 août 2011, par laquelle l'Office fédéral des migrations (désormais et ci-après : SEM) a refusé de reconnaître la qualité de réfugié au recourant, a rejeté sa demande d'asile, et prononcé son renvoi de Suisse,

l'arrêt E-5345/2011, E-5342/2011, et E-5363/2011 du 24 octobre 2013, par lequel le Tribunal administratif fédéral (ci-après : Tribunal) a rejeté le recours interjeté le 26 septembre 2011 par le recourant contre la décision précitée, ainsi que ceux interjetés respectivement par sa mère et par son frère, contre les décisions individuelles les concernant,

l'acte du 8 novembre 2013, par lequel la mère du recourant a sollicité la reconsidération de la décision de refus d'asile et de renvoi la concernant, invoquant à titre de faits nouveaux le décès de sa fille le (...) 2013, ensuite d'un accident de la circulation à son avis provoqué par le régime de Kadyrov ou les services secrets russes,

l'acte du 26 novembre 2013, par lequel la mère du recourant a sollicité, pour elle, le recourant et le frère de celui-ci, B._______, la révision de l'arrêt du Tribunal du 24 octobre 2013, invoquant à titre de faits nouveaux le décès de sa fille le (...) 2013, ensuite d'un accident de la circulation provoqué par le régime de Kadyrov ou les services secrets russes,

l'arrêt E-6657/2013 et E-6655/2013 du 27 février 2014, par lequel le Tribunal a rejeté cette demande de révision, dans la mesure où elle était recevable,

l'acte du 26 mai 2014, par lequel le recourant a demandé le réexamen de la décision le concernant en raison de la réception d'une convocation à se présenter, le (...) 2014, à (...)h00 au Commissariat de l'armée à Grozny (qu'il a produite avec sa traduction) et du danger en découlant en cas de retour au pays,

les actes du 27 avril 2015 et 4 mai 2015 cosignés par le recourant, par lequel le frère de celui-ci, B._______, a allégué, à titre de faits nouveaux, la publication de documents à son avis subversifs et fait valoir qu'en raison de ceux-ci, les « sbires de Kadyrov » risquaient de s'en prendre à sa famille en cas de retour de celle-ci en Russie,

l'acte du 26 juillet 2015, par lequel le mandataire du recourant a fourni une procuration, et précisé que la demande de reconsidération du recourant tendait à l'annulation de la décision ordonnant l'exécution du renvoi et au prononcé d'une admission provisoire, et sollicité la dispense du paiement des frais de procédure,

la décision incidente du 10 mai 2016, par laquelle le SEM a invité le recourant à prendre position sur les indices de falsification de la convocation militaire produite, eu égard à son support sous forme de photocopie, et à l'absence d'indication d'un numéro de série et d'un motif justifiant la convocation,

la réponse du 31 mai 2016, par laquelle le recourant a indiqué qu'il n'avait pas lui-même établi la convocation,

la décision du 3 juin 2016 (notifiée le 7 juin 2016), par laquelle le SEM a rejeté la demande de reconsidération du recourant, sans percevoir d'émolument, et indiqué que sa décision du 25 août 2011 était entrée en force et exécutoire et qu'un éventuel recours ne déploierait pas d'effet suspensif,

le recours interjeté le 2 juillet 2016 contre cette décision, par lequel l'intéressé a conclu à l'admission de sa demande de réexamen, soit à l'annulation de la décision en matière d'exécution du renvoi et au prononcé d'une admission provisoire, ainsi qu'à l'octroi d'une autorisation cantonale de séjour (permis B), et a sollicité la dispense du paiement des frais de procédure,

la décision incidente du 7 juillet 2016, par laquelle le Tribunal a invité le recourant à régulariser son recours dans les trois jours dès notification (signature manuscrite), sous peine d'irrecevabilité, et a déclaré irrecevable la conclusion tendant à l'octroi d'une autorisation cantonale de séjour,

la régularisation du recours intervenue le 10 juillet 2016,

la décision incidente du 28 juillet 2016, par laquelle le Tribunal a autorisé, à titre provisionnel, le recourant à séjourner en Suisse jusqu'à nouvel avis,

et considérant

qu'en vertu de l'art. 31 LTAF (RS 173.32), le Tribunal connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 PA,

qu'en particulier, les décisions sur réexamen en matière d'exécution du renvoi rendues par le SEM consécutivement à la clôture d'une procédure d'asile, lesquelles n'entrent pas dans le champ d'exclusion de l'art. 32 LTAF, peuvent être contestées devant le Tribunal conformément à l'art. 33 let. d LTAF (disposition applicable en vertu du renvoi prévu à l'art. 105 LAsi),

que le Tribunal est donc compétent pour connaître du présent litige,

qu'il statue de manière définitive, en l'absence d'une demande d'extradition déposée par l'Etat dont le recourant cherche à se protéger (cf. art. 83 let. d ch. 1 LTF [RS 173.110]),

que le recourant a qualité pour recourir (cf. art. 48 al. 1 PA),

que, présenté dans le délai (cf. art. 108 al. 1 LAsi) et régularisé dans la forme (cf. art. 52 PA) prescrits par la loi, le recours est recevable,

qu'en l'espèce, la demande de réexamen de la décision du 25 août 2011 en matière d'exécution du renvoi (licéité) a été déposée par le recourant le 26 mai 2014, soit après l'entrée en vigueur, le 1er février 2014, du nouvel art. 111b LAsi (au contraire de celle de sa mère, datée du 8 novembre 2013),

qu'en conséquence, elle était soumise au nouveau droit,

que, même s'il avait fallu admettre qu'elle concernait aussi le recourant, malgré le fait qu'il était majeur depuis longtemps et l'absence de procuration de sa mère pour agir en sa faveur, c'est à juste titre que la demande du 8 novembre 2013 a été classée par le SEM dès lors que les faits non liés spécifiquement à l'état de santé de sa mère, à savoir l'accident de la circulation et le décès de sa soeur, avaient été jugés par arrêt E-6657/2013 et E-6655/2013 du 27 février 2014, bénéficiant de l'autorité matérielle de chose jugée,

que la demande du 26 mai 2014 est fondée sur des allégués de faits nouveaux (soit la réception d'une convocation à se présenter, le (...) 2014, à (...)h00 au Commissariat de l'armée à Grozny, la désobéissance à cet ordre, et les risques en découlant en cas de retour au pays) étayés par la production d'un nouveau moyen (la convocation en question),

que, dans la décision attaquée, le SEM a indiqué que des indices de falsification (soit le support sous forme d'une photocopie, plutôt que d'un original, et l'absence d'indication du numéro de série et du motif de la convocation) permettaient de douter sérieusement de l'authenticité de la convocation nouvellement produite,

qu'il a mis en évidence que l'accomplissement du service militaire était un devoir civique et que les éventuelles sanctions pour insoumission ou désertion ne constituaient en principe pas une persécution au sens de l'art. 3 LAsi,

qu'il a relevé que le recourant n'allait vraisemblablement pas être condamné au motif qu'il ne s'était pas présenté, le (...) 2014, à l'autorité militaire, faute d'avoir accusé personnellement réception de la convocation,

qu'il a ajouté que rien n'indiquait que le recourant serait condamné à une peine disproportionnée dans l'hypothèse où il serait convoqué en vue de son recrutement après son retour en Russie et refuserait de se présenter,

qu'il a estimé que, pour ces raisons, les faits nouvellement allégués et la convocation nouvellement produite ne pouvaient pas être considérés comme importants au sens de l'art. 66 al. 2 let. a PA,

que, dans son recours, l'intéressé ne conteste pas cette appréciation,

qu'en particulier, il n'apporte aucune démonstration tendant à démontrer que la convocation est authentique en dépit des irrégularités qu'elle présente, ni qu'il a été condamné par contumace pour désobéissance à l'ordre de se présenter le (...) 2014 au Commissariat de l'armée à Grozny, ni qu'il l'a été à une peine démesurément sévère, ni qu'il risque de l'être à l'avenir,

que l'authenticité de la convocation n'est pas établie, eu égard aux irrégularités qu'elle présente, à l'absence de toute motivation du recours sur ce point, à quoi s'ajoutent la prétendue remise de ce document à un tiers plus de trois ans après le départ du recourant de Grozny et l'indication d'une adresse distincte de celle officielle que celui-ci a mentionné avoir eue à Grozny lors de son audition du 10 décembre 2010,

qu'à ces indices de falsification s'ajoute l'implication patente du recourant dans des activités criminelles, laissant à supposer qu'il lui était aisé de se procurer des faux, pour lui et son frère (cf. arrêt du Tribunal E-4112/2016 de ce jour),

qu'ainsi, lorsqu'il a été interrogé, le 14 septembre 2014, par la police cantonale neuchâteloise, le recourant a déclaré que c'était le non-paiement de pots-de-vin qu'il aurait autrefois dû verser à des agents de l'Etat pour l'exploitation de son salon de massage qui le mettait en danger en cas de retour en Russie,

que, quand bien même sa procédure de réexamen était pendante, il n'a alors aucunement mentionné un risque d'être condamné à une peine démesurément sévère pour ne s'être pas présenté à une convocation militaire,

qu'il ressort en outre de ce procès-verbal qu'une attestation cantonale de délai de départ et d'aide d'urgence dont le recourant était titulaire a été utilisée pour créer une fausse attestation similaire au nom d'un tiers, que celui-là a reconnu ce fait, tout en indiquant que son attestation avait été utilisée à cette fin à son insu,

qu'une procédure pénale est également ouverte contre le recourant, prévenu notamment de brigandage et de contrainte selon un rapport du 1er décembre 2015 de la police cantonale neuchâteloise,

que celui-ci a en outre été condamné par ordonnance pénale du 20 juin 2013 pour plusieurs vols commis le 19 juin 2013,

qu'au vu de ce qui précède, les faits nouvellement allégués par le recourant (vrais novas) et la convocation nouvellement produite ne conduisent pas à admettre un changement notable des circonstances depuis le prononcé de l'arrêt confirmant la décision en matière d'exécution du renvoi,

que, dans ses écrits des 27 avril 2015 et 4 mai 2015 cosignés par le recourant, le frère de celui-ci, B._______, fait valoir un risque, en cas de retour en Tchétchénie ou ailleurs en Russie non seulement pour lui, mais également pour le recourant et leur mère, de mauvais traitements, plus précisément d'une disparition forcée, de la part des « sbires de Kadyrov »

que ce risque serait lié à l'expression par B._______ de son dégoût envers la dictature de Kadyrov, dans « un recueil de huit nouvelles sur la Tchétchénie [...] rédigés entre 2008 et 2014, [...] souvent autobiographiques et documentaires, dénonçant l'occupation russe de la Tchétchénie et la junte du soi-disant président Kadyrov, qui y est mise en place par Moscou », et publiés sur Internet, dans d'autres écrits (« travaux linguistiques ») également publiés sur Internet qualifiant la dictature de Kadyrov comme le « régime pantin pro-Moscou », et dans des articles publiés sur C._______ comme celui intitulé « D._______ », ainsi qu'à sa participation à (...),

que, dans son recours, l'intéressé se borne à invoquer qu'il risque à son retour en Russie d'être exposé à un traitement prohibé par l'art. 3 CEDH de la part des « services de sécurité de Kadyrov » en raison des écrits de son frère, B._______, publiés sur Internet,

que, toutefois, il n'apporte aucun élément concret et sérieux laissant présager qu'en cas de retour dans une république constitutive de la Fédération de Russie, autre que la République tchétchène, il courrait un risque réel d'être soumis à un traitement contraire à l'art. 3 CEDH de la part des Kadyrovtsy, en raison de son seul lien de parenté étroit avec un ressortissant russe d'origine tchétchène, arrivé en Suisse avant sa majorité, et prétendument auteur en exil d'écrits critiques envers le régime de Kadyrov et publiés sur Internet,

qu'il n'existe pas de motifs sérieux de croire que le recourant présenterait un intérêt tel pour les autorités russes du fait de ce lien de parenté qu'il serait susceptible d'être détenu et interrogé par celles-ci à son retour en Fédération de Russie,

que le recourant n'a fourni aucune explication circonstanciée sur les raisons pour lesquelles le contenu des publications serait à ce point dérangeant pour le régime de Kadyrov, que non seulement leur auteur, mais encore les membres de la famille de celui-ci s'exposeraient à des mauvais traitements de la part des Kadyrovsty, en cas de retour en Fédération de Russie, quel que soit leur lieu de réinstallation,

qu'au vu de ce qui précède, les faits nouvellement allégués relatifs aux publications du frère du recourant ne conduisent pas à admettre un changement notable des circonstances quant à la licéité de l'exécution du renvoi depuis le prononcé de l'arrêt du 24 octobre 2013 confirmant la décision du 25 août 2011 de l'ODM en matière d'exécution du renvoi,

que, pour le reste, il est vain au recourant de critiquer la décision de l'ODM du 25 août 2011 et les arrêts du Tribunal des 24 octobre 2013 et 27 février 2014,

qu'il cherche de la sorte à obtenir une nouvelle appréciation en sa faveur de faits connus et allégués antérieurement, ce que l'institution du réexamen ne permet pas,

qu'au vu de ce qui précède, le recours doit être rejeté et la décision attaquée être confirmée,

que, s'avérant manifestement infondé, le recours est rejeté dans une procédure à juge unique, avec l'approbation d'un second juge (cf. art. 111 let. e LAsi),

qu'il est dès lors renoncé à un échange d'écritures, le présent arrêt n'étant motivé que sommairement (cf. art. 111a al. 1 et 2 LAsi),

qu'au vu du caractère d'emblée voué à l'échec des conclusions du recours, la demande de dispense du paiement des frais de procédure doit être rejetée, nonobstant l'indigence du recourant (cf. art. 65 al. 1 PA),

que, vu l'issue de la cause, il y a lieu de mettre les frais de procédure à la charge du recourant, conformément aux art. 63 al. 1 PA et art. 2 et 3 let. a du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF, RS 173.320.2),

qu'avec le présent prononcé, les mesures provisionnelles prononcées par décision incidente du 28 juillet 2016 prennent fin,

(dispositif : page suivante)

le Tribunal administratif fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
La demande d'assistance judiciaire partielle est rejetée.

3.
Les frais de procédure, d'un montant de 1'200 francs, sont mis à la charge du recourant. Ce montant doit être versé sur le compte du Tribunal dans les 30 jours dès l'expédition du présent arrêt.

4.
Le présent arrêt est adressé au mandataire du recourant, au SEM et à l'autorité cantonale compétente.

Le juge unique : La greffière :

Jean-Pierre Monnet Anne-Laure Sautaux

Expédition :
Informazioni decisione   •   DEFRITEN
Documento : E-4117/2016
Data : 14. settembre 2016
Pubblicato : 27. settembre 2016
Sorgente : Tribunale amministrativo federale
Stato : Inedito
Ramo giuridico : Cittadinanza e diritto degli stranieri
Oggetto : Exécution du renvoi (réexamen) ; décision du SEM du 3 juin 2016


Registro di legislazione
CEDU: 3
LAsi: 3  105  108  111  111a  111b
LTAF: 31  32  33
LTF: 83
PA: 5  48  52  63  65  66
TS-TAF: 2  3
Parole chiave
Elenca secondo la frequenza o in ordine alfabetico
allattamento • ammissione provvisoria • assistenza giudiziaria gratuita • autenticità • autorità cantonale • autorità inferiore • avviso • calcolo • cedu • citazione a comparire • comunicazione • decisione incidentale • decisione • dichiarazione • dittatura • dubbio • effetto sospensivo • entrata in vigore • esclusione • forma e contenuto • forza di cosa giudicata • fratelli e sorelle • giudice unico • infortunio della circolazione • internet • legge sul tribunale amministrativo federale • legittimazione ricorsuale • leva • maggiore età • maltrattamenti • membro della famiglia • menzione • misura cautelare • misura di protezione • nuove allegazioni di fatto • originale • procedura d'asilo • procedura penale • salario • segreteria di stato • servizio militare • seta • titolo • traduzione • tribunale amministrativo federale • ufficio federale della migrazione • verbale
BVGer
E-4112/2016 • E-4117/2016 • E-5342/2011 • E-5345/2011 • E-5363/2011 • E-6655/2013 • E-6657/2013