Bundesstrafgericht Tribunal pénal fédéral Tribunale penale federale Tribunal penal federal
Numéro de dossier: RR.2017.57
Arrêt du 2 août 2017 Cour des plaintes
Composition
Les juges pénaux fédéraux Stephan Blättler, président, Tito Ponti et Giorgio Bomio, le greffier David Bouverat
Parties
A., représenté par Me Olivier Wehrli, avocat,
recourant
contre
Ministère public du canton de Genève, partie adverse
Objet
Entraide judiciaire internationale en matière pénale à Israël
Indemnisation (art. 15

Faits:
A. Le 29 mars 2016, l'Etat d'Israël a formé auprès des autorités de la République et canton de Genève une demande d’entraide fondée sur la Convention de la Haye sur l'obtention des preuves à l'étranger en matière civile ou commerciale du 18 mars 1970 (in: arrêt du Tribunal pénal fédéral RR.2016.247-248 du 4 janvier 2017).
B. Par décision du 11 avril 2016, le Ministère public de la République et canton de Genève (ci-après : le MP-GE) est entré en matière (in: arrêt du Tribunal pénal fédéral RR.2016.247-248 du 4 janvier 2017).
C. Le même jour, le MP-GE a rendu une ordonnance d'exécution portant sur la saisie probatoire de documentation bancaire relative à des comptes dont B. et C. étaient titulaires, ayants droit ou fondés de procuration, "notamment le compte n° 1 auprès de la banque D. (devenue banque E., aujourd'hui F.)" (in: arrêt du Tribunal pénal fédéral RR.2016.247-248 du 4 janvier 2017).
D. Par missive du 20 septembre 2016, le MP-GE a transmis le dossier de la cause aux autorités judiciaires civiles, en précisant que la demande avait «été traitée comme une demande pénale, émanant du Ministère public israélien, alors qu’il semble s’agir en réalité d’une demande civile» (in: arrêt du Tribunal pénal fédéral RR.2016.247-248 du 4 janvier 2017).
E. Par courriers des 14 et 20 octobre 2016 au MP-GE, B. et C. ont demandé à cette autorité de statuer sur la fin de la procédure, laquelle avait, selon eux, été ouverte à tort (in: arrêt du Tribunal pénal fédéral RR.2016.247-248 du 4 janvier 2017).
F. Le 31 octobre 2016, les prénommés ont adressé à la Cour de céans un mémoire de recours par lequel ils ont conclu (1) à ce que soit constatée l’existence d’un déni de justice et (2) à ce qu’il soit ordonné au MP-GE de statuer sans délai sur la fin de la procédure d’entraide internationale en matière pénale (in: arrêt du Tribunal pénal fédéral RR.2016.247-248 du 4 janvier 2017).
G. Par arrêt du RR.2016.247-248 du 4 janvier 2017, la Cour de céans a partiellement admis le recours. Elle a renvoyé la cause au MP-GE afin que celui-ci rende une décision de clôture mettant fin à la procédure.
H. Le 3 février 2017, le MP-GE a rendu une décision de clôture par laquelle il a 1) constaté que les pièces saisies avaient été transmises à l'autorité civile compétente le 20 septembre 2016, 2) clos, avec effet à cette date, la procédure d'entraide ouverte par la décision d'entrée en matière du 11 avril 2016 et 3) alloué à C. et B., "solidairement, une indemnité de CHF 800.-- pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de leurs droits de procédure (art. 429 al. 1 let. a


Il a notifié cet acte, notamment, à A. (act. 1.1).
I. Par mémoire du 8 mars 2017, A. interjette un recours contre cette décision, dont il demande l'annulation en tant que la procédure d'entraide a été close sans qu'il eût été interpellé sur ses prétentions en indemnisation, respectivement été indemnisé. Il conclut à ce que la cause soit renvoyée au MP-GE, afin que celui-ci l'interpelle puis lui octroie une indemnité de CHF 4'320.-- (act. 1).
J. Au cours de l'échange d'écritures ordonné par la cour de céans, l'OFJ (autorité de surveillance), a renoncé à se déterminer, tandis que le MP-GE a conclu au rejet du recours (act. 6 et 7). Le recourant n'a pas donné suite à l'invitation (act. 8) de la Cour de céans à déposer une réplique.
Les arguments et moyens de preuve invoqués par les parties seront repris, si nécessaire, dans les considérants en droit.
La Cour considère en droit:
1.
1.1 Au vu du dispositif de l'acte litigieux, ainsi que des conclusions du recourant et de l'argumentation développée à l'appui de celles-ci, le litige porte sur l'indemnisation du recourant – qui prétend être titulaire du compte n°1 auprès de la banque D. (devenue banque E., aujourd'hui banque F.) –, au sens de l'art. 15

1.2 L'art. 15




2.
2.1 En vertu de l'art. 37 al. 2 let. a



2.2 Dans le cadre d'un litige contre une décision de clôture portant sur une indemnisation au sens de l'art. 15


Dès lors que le recourant prétend que le MP-GE lui a dénié à tort le droit à une indemnisation pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure, cette condition est remplie en l'occurrence.
2.3 Formé dans les trente jours à compter de la notification de l'ordonnance attaquée, le recours a été déposé en temps utile (art. 80k

2.4 Au vu de ce qui précède, il y a lieu d'entrer en matière.
3.
3.1 Le recourant se plaint d'une violation de son droit d'être entendu. Il affirme que le MP-GE ne lui a pas donné l'occasion de s'exprimer avant de rendre l'acte querellé.
3.2 Le droit d'être entendu comprend notamment le droit pour la personne concernée de s'expliquer avant qu'une décision ne soit prise à son détriment (ATF 132 II 485 consid. 3.2; 129 II 497 consid. 2.2, et les références).
3.3 Le MP-GE admet qu'il n'a pas invité le recourant à s'exprimer avant de rendre la décision entreprise; cela n'est d'ailleurs pas contesté. Il a donc violé le droit d'être entendu de l'intéressé, lequel s'était manifesté auprès de lui le 18 mai 2016 (act. 1.2). La Cour de céans ne peut pas réparer ce vice, dès lors qu'elle ne dispose notamment pas des éléments nécessaires pour se prononcer sur le principe même de l'indemnisation. En effet, ne figure au dossier aucune pièce permettant d'établir si l'intéressé est ou non titulaire de la relation bancaire précitée. Or, ce point est pertinent pour l'issue du présent litige: si le recourant ne revêt pas cette qualité, on voit mal a priori à quel titre il aurait pu être touché par la procédure d'entraide; partant, dans cette hypothèse, il est difficilement imaginable que l'intéressé puisse prétendre à une indemnité pour les dépenses occasionnées par l'exercice raisonnable de ses droits de procédure. A noter que le MP-GE ne s'est manifestement pas penché sur cette question, puisque dite autorité a affirmé, dans sa réponse au recours, que le "statut procédural" du recourant (dans la procédure menée devant elle) n'était "pas établi" (act. 7, verso).
4. Il suit de ce qui précède que le grief tiré de la violation du droit d'être entendu, et partant le recours, est bien fondé. La cause est renvoyée au MP-GE pour nouvelle décision au sens du considérant qui précède.
5. En tant que partie qui succombe, le MP-GE devrait en principe supporter les frais de la cause. Cependant, aucun frais de procédure n'est mis à la charge des autorités inférieures, ni des autorités fédérales recourantes et déboutées (art. 63 al. 2

6. Dans la mesure où le recourant a obtenu gain de cause, il a droit à une indemnité au sens de l'art. 64 al. 1

Par ces motifs, la Cour des plaintes prononce:
1. Le recours est admis.
2. La cause est renvoyée au Ministère public de la République et canton de Genève pour nouvelle décision au sens des considérants.
3. L'avance de frais versée par le recourant, par CHF 500.--, lui est restituée.
4. Une indemnité de dépens de CHF 1'000.-- est octroyée au recourant, à la charge du Ministère public de la République et canton de Genève.
Bellinzone, le 3 août 2017
Au nom de la Cour des plaintes
du Tribunal pénal fédéral
Le président: Le greffier:
Distribution
- Me Olivier Wehrli, avocat
- Ministère public du canton de Genève
- Office fédéral de la justice, Unité Entraide judiciaire
Indication des voies de recours
Le recours contre une décision en matière d’entraide pénale internationale doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 10 jours qui suivent la notification de l’expédition complète (art. 100 al. 1


Le recours n’est recevable contre une décision rendue en matière d’entraide pénale internationale que s’il a pour objet une extradition, une saisie, le transfert d’objets ou de valeurs ou la transmission de renseignements concernant le domaine secret et s’il concerne un cas particulièrement important (art. 84 al. 1

