Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}
4A 150/2012

Arrêt du 12 juillet 2012
Ire Cour de droit civil

Composition
Mme et MM. les Juges Klett, présidente, Corboz et Kolly.
Greffier: M. Carruzzo.

Participants à la procédure
X.________, représentée par
Mes Michel A. Halpérin et Lionel Halpérin,
recourante,

contre

Y.________, représentée par
Me Frank Spoorenberg,
intimée.

Objet
arbitrage international,

recours en matière civile contre la sentence finale rendue le 9 février 2012 par le Tribunal arbitral CCI.

Faits:

A.
La société X.________ et la société Y.________ ont conclu une série de contrats relatifs à l'installation d'une usine de fabrication de papier. Elles ont notamment signé un Deed of Agreement, le 17 mai 2005, amendé le 7 décembre 2005 (Amendment n° 1) (désignés collectivement the PM-4 Agreement dans la sentence attaquée; ci-après: le Contrat), et un Hall Ventilation and Heat Recovery System Agreement (ci-après: le contrat de ventilation), le 15 juin 2006. En vertu de ces contrats, Y.________ devait fournir à X.________ du matériel et des services pour un prix total de 81 millions d'euros payable par tranches. Elle garantissait certaines performances devant faire l'objet de tests après la mise en service de l'usine. Les différends auxquels pourrait donner lieu l'exécution des contrats seraient soumis à un tribunal arbitral constitué sous l'égide de la Cour d'arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale (CCI), le siège de l'arbitrage étant fixé à Genève et le droit suisse applicable sur le fond.

Un litige est survenu entre les parties au sujet de la qualité de l'équipement fourni par Y.________. Selon X.________, qui n'avait pas payé la dernière tranche du prix préfixé, le test effectué entre le 26 mars et le 10 avril 2009 démontrait que cet équipement ne permettait pas d'atteindre les performances promises.

B.
Par requête du 29 juillet 2009, Y.________ a introduit une procédure arbitrale contre X.________ en vue d'obtenir quelque 10 millions d'euros, intérêts en sus, à titre, notamment, de paiement de la dernière tranche du prix convenu (7'900'000 euros pour le Contrat et 210'000 euros pour le contrat de ventilation) et de remboursement de la TVA (626'040 euros).

X.________ a admis devoir ce dernier montant, tout en indiquant qu'il y avait lieu de le compenser avec les prétentions qu'elle faisait valoir reconventionnellement, en particulier la somme de 10'140'000 euros à titre de liquidated damages (ci-après: l'indemnité forfaitaire) correspondant à 12,5% du prix contractuel (9'875'000 euros pour le Contrat et 265'000 euros pour le contrat de ventilation) avec les intérêts y afférents. Elle a conclu au rejet de la demande pour le surplus.

Par sentence finale du 9 février 2012, le Tribunal arbitral CCI, composé de trois membres, a condamné X.________ à payer à Y.________ un total de 10'086'702,45 euros, plus intérêts. Cette somme inclut les trois montants précités (cf. let. B, 1er § ci-dessus), celui relatif au remboursement de la TVA ayant été compensé partiellement avec un montant de 397'746 euros à payer par Y.________ à titre d'indemnité pour le matériel défectueux livré à X.________. Celle-ci a, en outre, été reconnue créancière de celle-là à hauteur de 487'000 euros au titre des équipements non fournis. Les autres demandes principales et reconventionnelles ont été rejetées. Enfin, le Tribunal arbitral a fait supporter à chaque partie ses propres frais d'avocats, tout en mettant les frais de la procédure arbitrale à la charge exclusive de X.________.

C.
Le 16 mars 2012, X.________ (ci-après: la recourante) a formé un recours en matière civile. Reprochant au Tribunal arbitral d'avoir violé son droit d'être entendue ainsi que l'ordre public, elle a demandé au Tribunal fédéral d'annuler la sentence finale.

Dans sa réponse du 7 mai 2012, Y.________ (ci-après: l'intimée) a conclu au rejet du recours.

Par lettre du 23 mars 2012, le Tribunal arbitral a indiqué qu'il ne souhaitait pas se prononcer sur le recours.

La demande d'effet suspensif formulée dans le mémoire de recours a été rejetée par ordonnance présidentielle du 19 avril 2012.

Considérant en droit:

1.
D'après l'art. 54 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 54 - 1 La procédure est conduite dans l'une des langues officielles (allemand, français, italien, rumantsch grischun), en règle générale dans la langue de la décision attaquée. Si les parties utilisent une autre langue officielle, celle-ci peut être adoptée.
1    La procédure est conduite dans l'une des langues officielles (allemand, français, italien, rumantsch grischun), en règle générale dans la langue de la décision attaquée. Si les parties utilisent une autre langue officielle, celle-ci peut être adoptée.
2    Dans les procédures par voie d'action, il est tenu compte de la langue des parties s'il s'agit d'une langue officielle.
3    Si une partie a produit des pièces qui ne sont pas rédigées dans une langue officielle, le Tribunal fédéral peut, avec l'accord des autres parties, renoncer à exiger une traduction.
4    Si nécessaire, le Tribunal fédéral ordonne une traduction.
LTF, le Tribunal fédéral rédige son arrêt dans une langue officielle, en règle générale dans la langue de la décision attaquée. Lorsque cette décision a été rendue dans une autre langue (ici l'anglais), le Tribunal fédéral utilise la langue officielle choisie par les parties. Devant le Tribunal arbitral, celles-ci se sont servies de l'anglais, tandis que, dans les mémoires qu'elles ont adressés au Tribunal fédéral, elles ont employé le français. Conformément à sa pratique, le Tribunal fédéral rendra, par conséquent, son arrêt en français.

2.
Dans le domaine de l'arbitrage international, le recours en matière civile est recevable contre les décisions de tribunaux arbitraux aux conditions prévues par les art. 190
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication.
1    La sentence est définitive dès sa communication.
2    Elle ne peut être attaquée que:
a  lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé;
b  lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent;
c  lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande;
d  lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté;
e  lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public.
3    En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision.
4    Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152
à 192
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 192 - 1 Si les parties n'ont ni domicile, ni résidence habituelle, ni siège en Suisse, elles peuvent, par une déclaration dans la convention d'arbitrage ou dans une convention ultérieure, exclure tout ou partie des voies de droit contre les sentences du tribunal arbitral; elles ne peuvent exclure la révision au sens de l'art. 190a, al. 1, let. b. La convention doit satisfaire aux conditions de forme de l'art. 178, al. 1.156
1    Si les parties n'ont ni domicile, ni résidence habituelle, ni siège en Suisse, elles peuvent, par une déclaration dans la convention d'arbitrage ou dans une convention ultérieure, exclure tout ou partie des voies de droit contre les sentences du tribunal arbitral; elles ne peuvent exclure la révision au sens de l'art. 190a, al. 1, let. b. La convention doit satisfaire aux conditions de forme de l'art. 178, al. 1.156
2    Lorsque les parties ont exclu tout recours contre les sentences et que celles-ci doivent être exécutées en Suisse, la convention de New York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères157 s'applique par analogie.
LDIP (art. 77 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 77 - 1 Le recours en matière civile, indépendamment de la valeur litigieuse, est recevable contre les décisions de tribunaux arbitraux:43
1    Le recours en matière civile, indépendamment de la valeur litigieuse, est recevable contre les décisions de tribunaux arbitraux:43
a  pour l'arbitrage international, aux conditions prévues aux art. 190 à 192 de la loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé44;
b  pour l'arbitrage interne, aux conditions prévues aux art. 389 à 395 du code de procédure civile du 19 décembre 200845.46
2    Sont inapplicables dans ces cas les art. 48, al. 3, 90 à 98, 103, al. 2, 105, al. 2, et 106, al. 1, ainsi que l'art. 107, al. 2, dans la mesure où cette dernière disposition permet au Tribunal fédéral de statuer sur le fond de l'affaire.47
2bis    Les mémoires peuvent être rédigés en anglais.48
3    Le Tribunal fédéral n'examine que les griefs qui ont été invoqués et motivés par le recourant.
LTF).
Le siège de l'arbitrage a été fixé à Genève. L'une des parties au moins (en l'occurrence, les deux) n'avait pas son domicile en Suisse au moment déterminant. Les dispositions du chapitre 12 de la LDIP sont donc applicables (art. 176 al. 1
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 176 - 1 Les dispositions du présent chapitre s'appliquent à tout arbitrage si le siège du tribunal arbitral se trouve en Suisse et si au moins l'une des parties à la convention d'arbitrage n'avait, au moment de la conclusion de celle-ci, ni son domicile, ni sa résidence habituelle, ni son siège en Suisse.128
1    Les dispositions du présent chapitre s'appliquent à tout arbitrage si le siège du tribunal arbitral se trouve en Suisse et si au moins l'une des parties à la convention d'arbitrage n'avait, au moment de la conclusion de celle-ci, ni son domicile, ni sa résidence habituelle, ni son siège en Suisse.128
2    Les parties peuvent, par une déclaration dans la convention d'arbitrage ou dans une convention ultérieure, exclure l'application du présent chapitre et convenir de l'application de la troisième partie du CPC129. La déclaration doit satisfaire aux conditions de forme de l'art. 178, al. 1.130
3    Les parties en cause ou l'institution d'arbitrage désignée par elles ou, à défaut, les arbitres déterminent le siège du tribunal arbitral.
LDIP).
La recourante est directement touchée par la sentence attaquée, étant donné que le Tribunal arbitral l'a condamnée à payer une somme d'argent à l'intimée et n'a fait droit que très partiellement à ses conclusions reconventionnelles. Aussi a-t-elle indéniablement un intérêt digne de protection à l'annulation de cette sentence, ce qui lui confère la qualité pour recourir (art. 76 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 76 Qualité pour recourir - 1 A qualité pour former un recours en matière civile quiconque:
1    A qualité pour former un recours en matière civile quiconque:
a  a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire, et
b  est particulièrement touché par la décision attaquée et a un intérêt digne de protection à son annulation ou sa modification.
2    Ont également qualité pour recourir contre les décisions visées à l'art. 72, al. 2, la Chancellerie fédérale, les départements fédéraux et, pour autant que le droit fédéral le prévoie, les unités qui leur sont subordonnées, si l'acte attaqué est susceptible de violer la législation fédérale dans leur domaine d'attributions.41
LTF).

Déposé dans les 30 jours suivant la notification de la sentence finale (art. 100 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 100 Recours contre une décision - 1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.
1    Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.
2    Le délai de recours est de dix jours contre:
a  les décisions d'une autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et de faillite;
b  les décisions en matière d'entraide pénale internationale et d'assistance administrative internationale en matière fiscale;
c  les décisions portant sur le retour d'un enfant fondées sur la Convention européenne du 20 mai 1980 sur la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière de garde des enfants et le rétablissement de la garde des enfants92 ou sur la Convention du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants93.
d  les décisions du Tribunal fédéral des brevets concernant l'octroi d'une licence visée à l'art. 40d de la loi du 25 juin 1954 sur les brevets95.
3    Le délai de recours est de cinq jours contre:
a  les décisions d'une autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour effets de change;
b  les décisions d'un gouvernement cantonal sur recours concernant des votations fédérales.
4    Le délai de recours est de trois jours contre les décisions d'un gouvernement cantonal sur recours touchant aux élections au Conseil national.
5    En matière de recours pour conflit de compétence entre deux cantons, le délai de recours commence à courir au plus tard le jour où chaque canton a pris une décision pouvant faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral.
6    ...96
7    Le recours pour déni de justice ou retard injustifié peut être formé en tout temps.
LTF), le recours, qui satisfait aux exigences formelles posées par l'art. 42 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 42 Mémoires - 1 Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
1    Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
2    Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Si le recours n'est recevable que lorsqu'il soulève une question juridique de principe ou qu'il porte sur un cas particulièrement important pour d'autres motifs, il faut exposer en quoi l'affaire remplit la condition exigée.15 16
3    Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu'elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée si le mémoire est dirigé contre une décision.
4    En cas de transmission électronique, le mémoire doit être muni de la signature électronique qualifiée de la partie ou de son mandataire au sens de la loi du 18 mars 2016 sur la signature électronique17. Le Tribunal fédéral détermine dans un règlement:
a  le format du mémoire et des pièces jointes;
b  les modalités de la transmission;
c  les conditions auxquelles il peut exiger, en cas de problème technique, que des documents lui soient adressés ultérieurement sur papier.18
5    Si la signature de la partie ou de son mandataire, la procuration ou les annexes prescrites font défaut, ou si le mandataire n'est pas autorisé, le Tribunal fédéral impartit un délai approprié à la partie pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
6    Si le mémoire est illisible, inconvenant, incompréhensible ou prolixe ou qu'il n'est pas rédigé dans une langue officielle, le Tribunal fédéral peut le renvoyer à son auteur; il impartit à celui-ci un délai approprié pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
7    Le mémoire de recours introduit de manière procédurière ou à tout autre égard abusif est irrecevable.
LTF, est recevable.

3.
En premier lieu, la recourante, se fondant sur l'art. 190 al. 2 let. d
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication.
1    La sentence est définitive dès sa communication.
2    Elle ne peut être attaquée que:
a  lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé;
b  lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent;
c  lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande;
d  lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté;
e  lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public.
3    En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision.
4    Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152
LDIP, fait grief au Tribunal arbitral d'avoir violé son droit d'être entendue en n'examinant pas les arguments qu'elle avait soulevés quant à l'absence de nouveaux tests de performance, d'une part, et au taux d'amidon appliqué lors du test de performance effectué, d'autre part.

3.1 Le droit d'être entendu en procédure contradictoire, au sens de l'art. 190 al. 2 let. d
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication.
1    La sentence est définitive dès sa communication.
2    Elle ne peut être attaquée que:
a  lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé;
b  lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent;
c  lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande;
d  lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté;
e  lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public.
3    En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision.
4    Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152
LDIP, n'exige certes pas qu'une sentence arbitrale internationale soit motivée (ATF 134 III 186 consid. 6.1 et les références). Il impose, toutefois, aux arbitres un devoir minimum d'examiner et de traiter les problèmes pertinents (ATF 133 III 235 consid. 5.2 p. 248 et les arrêts cités). Ce devoir est violé lorsque, par inadvertance ou malentendu, le tribunal arbitral ne prend pas en considération des allégués, arguments, preuves et offres de preuve présentés par l'une des parties et importants pour la décision à rendre. Si la sentence passe totalement sous silence des éléments apparemment importants pour la solution du litige, c'est aux arbitres ou à la partie intimée qu'il appartient de justifier cette omission dans leurs observations sur le recours. Il leur incombe de démontrer que, contrairement aux affirmations du recourant, les éléments omis n'étaient pas pertinents pour résoudre le cas concret ou, s'ils l'étaient, qu'ils ont été réfutés implicitement par le tribunal arbitral. Cependant, les arbitres n'ont pas l'obligation de discuter tous les arguments invoqués par les parties, de sorte qu'il ne peut leur être reproché, au titre de
la violation du droit d'être entendu en procédure contradictoire, de n'avoir pas réfuté, même implicitement, un moyen objectivement dénué de toute pertinence (ATF 133 III 235 consid. 5.2 et les arrêts cités).

Au demeurant, le Tribunal fédéral a jugé qu'il ne lui appartient pas de décider si les arbitres auraient dû admettre ou non le moyen qui leur a échappé, à supposer qu'ils l'eussent traité. Cela reviendrait, en effet, à méconnaître la nature formelle du droit d'être entendu et la nécessité, en cas de violation de ce droit, d'annuler la décision attaquée indépendamment des chances de la partie recourante d'obtenir un résultat différent (arrêt 4A 46/2011 du 16 mai 2011 consid. 4.3.2 in fine et les précédents cités).
3.2
3.2.1
3.2.1.1 En ce qui concerne la vérification des performances garanties, la recourante expose, en substance, que, par le jeu de diverses stipulations contractuelles, l'intimée était tenue, en cas d'échec du premier test de performance, de changer ou de modifier à ses frais les machines dans un délai maximum de 12 mois à compter de la mise en service de l'installation et que, dans ce laps de temps, deux nouveaux tests, voire davantage en cas d'entente entre les parties, devaient être effectués au besoin. Or, toujours selon la recourante, l'intimée n'avait procédé à aucune amélioration des machines dans le délai en question et n'avait accepté de conduire de nouveaux tests de performance qu'à la condition que la recourante renonçât à lui réclamer l'indemnité forfaitaire stipulée dans le Contrat, adoptant ainsi un comportement contraire à ses obligations contractuelles. Aussi était-elle tenue de lui verser cette indemnité forfaitaire pour ne pas avoir réussi à faire en sorte que les performances garanties pussent être obtenues avant l'expiration du délai précité. De surcroît, l'absence de nouveaux tests constituait une circonstance déterminante quant à l'exigibilité du paiement de la dernière tranche du prix à payer par la recourante.

Dans ce cadre-là, le Tribunal arbitral se voit reprocher par la recourante de n'avoir pas répondu, fût-ce de manière implicite, à la question essentielle de savoir si le refus de l'intimée de procéder aux tests supplémentaires à l'invitation de sa cocontractante avait un impact sur le droit de cette dernière à l'indemnité forfaitaire, voire sur l'exigibilité du dernier paiement convenu.
3.2.1.2 Dans sa réponse au recours, l'intimée soutient que les arbitres ont répondu à la question litigieuse. Elle souligne, à titre liminaire, qu'ils ont mentionné, dans leur sentence, les arguments présentés par l'intéressée sur le point controversé. Selon elle, le Tribunal arbitral aurait retenu, pour divers motifs énoncés par lui, que la recourante était responsable du fait que les tests de performance additionnels n'avaient pas été effectués, répondant ainsi par la négative à la question de savoir si le comportement de l'intimée était à l'origine de cette absence de nouveaux tests. Il aurait, par ailleurs, interprété les stipulations contractuelles en ce sens que l'indemnité forfaitaire ne pouvait être réclamée qu'après l'échec d'un troisième test de performance. Aussi, de l'avis de l'intimée, les arbitres n'étaient-ils pas tenus d'examiner si son refus d'effectuer des tests supplémentaires avait un impact sur le droit de la recourante à l'indemnité forfaitaire.

En tout état de cause, l'intimée considère que la recourante n'a pas établi en quoi les éléments prétendument omis par les arbitres eussent été pertinents pour résoudre le cas concret et qu'elle se plaint, en réalité, de l'absence de motivation ou de la motivation lacunaire de la sentence sur le point litigieux, grief n'entrant pas dans les prévisions de l'art. 190 al. 2 let. d
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication.
1    La sentence est définitive dès sa communication.
2    Elle ne peut être attaquée que:
a  lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé;
b  lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent;
c  lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande;
d  lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté;
e  lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public.
3    En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision.
4    Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152
LDIP.
3.2.1.3 Tel qu'il est présenté, le moyen examiné ne saurait prospérer.
Force est de relever, d'abord, l'insuffisance de sa motivation. Il apparaît, en effet, à la lecture de la sentence, que les nombreuses clauses contractuelles consacrées à la mise en oeuvre de la garantie de performance et, singulièrement, aux tests y afférents, voire celles ayant trait à l'exigibilité du paiement de la dernière tranche du prix stipulé, soulèvent des problèmes d'une rare complexité, s'agissant de les interpréter de manière à leur donner une signification intelligible et exempte de contradictions. Aussi la recourante en propose-t-elle une interprétation par trop simplificatrice lorsqu'elle semble vouloir en déduire, sans autres explications, que l'absence de tests de performance additionnels dans le délai prescrit suffisait à lui conférer le droit à l'indemnité forfaitaire, sans égard à la question de savoir si l'échec du premier test de performance était imputable à la partie qui avait livré l'installation litigieuse ou à celle qui l'avait reçue. Dans le même ordre d'idées, affirmer simplement, comme le fait la recourante, que l'admission de ses arguments "influerait inévitablement sur le droit de [l'intimée] à l'indemnité forfaitaire" ne saurait remplacer la démonstration concrète de la pertinence de tels
arguments.

Ensuite, les arbitres ont mentionné expressément la question soulevée par la recourante (cf. sentence, n. 143 et 144), ce que celle-ci est d'ailleurs la première à reconnaître (cf. recours, p. 13). Cette question ne leur a donc pas complètement échappé, même s'il est vrai que le fait de l'avoir mentionnée ne permet pas, à lui seul, d'écarter le reproche qui leur est adressé (cf. ATF 133 III 235 consid. 5.3).

Enfin et surtout, les arbitres ont expliqué pourquoi, selon eux, l'absence de tests de garantie de performance valablement effectués dans les 15 mois depuis la mise en service de l'usine, soit jusqu'au 14 septembre 2009, était imputable à la recourante, de sorte qu'en vertu de l'art. 6.1, avant-dernier alinéa, de l'annexe 11 du Contrat, la garantie promise devait être considérée comme remplie (sentence, n. 237 à 271). Il est raisonnable de déduire de cette motivation que le Tribunal arbitral a écarté de la sorte, à tout le moins implicitement, l'argument de la recourante voulant que l'intimée fût tenue pour responsable de ce que les tests de garantie de performance prescrits par le Contrat n'avaient pas été effectués dans le délai prévu pour y procéder.
3.2.2 Pour démontrer la nullité du test de performance effectué, l'intimée avait soutenu que la recourante n'avait pas respecté ses consignes en appliquant un taux d'amidon excessif. La recourante, selon ses dires, avait alors objecté que le respect des consignes de l'intimée aurait entraîné une violation des exigences contractuelles quant au taux d'amidon à appliquer. Cependant, les arbitres, faisant fi de cette objection, auraient invalidé le test de performance sans s'aviser de ce que le taux d'amidon restait dans les limites fixées par le Contrat.

Le moyen est dénué de tout fondement. Il ressort de la sentence attaquée que la question soulevée a été expressément traitée par le Tribunal arbitral et que celui-ci a considéré que la recourante aurait dû se conformer aux instructions de l'intimée quant au taux d'amidon à appliquer, instructions qui l'emportaient sur les limites, du reste flexibles, fixées dans le contrat (sentence, n. 259 ss).

3.3 Il suit de là que le moyen pris de la violation du devoir minimum de traiter les problèmes pertinents se révèle infondé dans ses deux branches.

4.
La recourante reproche, par ailleurs, au Tribunal arbitral d'avoir violé son droit à la preuve en ne donnant pas suite à sa réquisition tendant à ce qu'il procédât à une visite du site pour y constater de visu le caractère défectueux des équipements et machines livrés par l'intimée.

4.1 Le droit d'être entendu, tel qu'il est garanti par les art. 182 al. 3
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 182 - 1 Les parties peuvent, directement ou par référence à un règlement d'arbitrage, régler la procédure arbitrale; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix.
1    Les parties peuvent, directement ou par référence à un règlement d'arbitrage, régler la procédure arbitrale; elles peuvent aussi soumettre celle-ci à la loi de procédure de leur choix.
2    Si les parties n'ont pas réglé la procédure, celle-ci sera, au besoin, fixée par le tribunal arbitral, soit directement, soit par référence à une loi ou à un règlement d'arbitrage.
3    Quelle que soit la procédure choisie, le tribunal arbitral doit garantir l'égalité entre les parties et leur droit d'être entendues en procédure contradictoire.
4    Une partie qui poursuit la procédure d'arbitrage sans faire valoir immédiatement une violation des règles de procédure qu'elle a constatée ou qu'elle aurait pu constater en faisant preuve de la diligence requise ne peut plus se prévaloir de cette violation ultérieurement.142
et 190 al. 2
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication.
1    La sentence est définitive dès sa communication.
2    Elle ne peut être attaquée que:
a  lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé;
b  lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent;
c  lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande;
d  lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté;
e  lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public.
3    En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision.
4    Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152
let. d LDIP, n'a en principe pas un contenu différent de celui consacré en droit constitutionnel (ATF 127 III 576 consid. 2c; 119 II 386 consid. 1b; 117 II 346 consid. 1a p. 347). Ainsi, il a été admis, dans le domaine de l'arbitrage, que chaque partie avait le droit de s'exprimer sur les faits essentiels pour le jugement, de présenter son argumentation juridique, de proposer ses moyens de preuve sur des faits pertinents et de prendre part aux séances du tribunal arbitral (ATF 127 III 576 consid. 2c; 116 II 639 consid. 4c p. 643).

S'agissant du droit de faire administrer des preuves, il faut qu'il ait été exercé en temps utile et selon les règles de forme applicables (ATF 119 II 386 consid. 1b p. 389). Le tribunal arbitral peut refuser d'administrer une preuve, sans violer le droit d'être entendu, si le moyen de preuve est inapte à fonder une conviction, si le fait à prouver est déjà établi, s'il est sans pertinence ou encore si le tribunal, en procédant à une appréciation anticipée des preuves, parvient à la conclusion que sa conviction est déjà faite et que le résultat de la mesure probatoire sollicitée ne peut plus la modifier (arrêt 4A 440/2010 du 7 janvier 2011 consid. 4.1). Le Tribunal fédéral ne peut revoir une appréciation anticipée des preuves, sauf sous l'angle extrêmement restreint de l'ordre public. Le droit d'être entendu ne permet pas d'exiger une mesure probatoire inapte à apporter la preuve (arrêt 4A 600/2010 du 17 mars 2011 consid. 4.1).

La partie qui s'estime victime d'une violation de son droit d'être entendue ou d'un autre vice de procédure doit l'invoquer d'emblée dans la procédure arbitrale, sous peine de forclusion. En effet, il est contraire à la bonne foi de n'invoquer un vice de procédure que dans le cadre du recours dirigé contre la sentence arbitrale, alors que le vice aurait pu être signalé en cours de procédure (arrêt 4A 348/2009 du 6 janvier 2010 consid. 4). Ce principe est d'ailleurs exprimé à l'art. 39 du Règlement d'arbitrage de la CCI .

4.2 Considéré à la lumière de ces principes jurisprudentiels et sur le vu des arguments que lui oppose l'intimée, le moyen soulevé par la recourante ne peut qu'être rejeté.

D'abord, l'allégation de la recourante selon laquelle elle aurait réclamé "sans retard et à réitérées reprises" l'administration du moyen de preuve en question (recours, p. 15) est sujette à caution. La seule requête en ce sens, citée par la recourante, consiste en une lettre du 24 novembre 2010 de ses conseils priant le Tribunal arbitral d'envisager une visite du site. Telle qu'elle était libellée, cette requête, formulée quelque 16 mois après le début de la procédure arbitrale, n'avait rien de contraignant puisqu'elle ne faisait qu'évoquer la possibilité d'une inspection des lieux par les arbitres. De plus, la recourante n'indique pas quand et de quelle manière elle aurait réitéré semblable requête.

S'agissant ensuite de la pertinence du moyen de preuve examiné, le Tribunal arbitral indique qu'il n'a pas jugé nécessaire de se rendre sur place (sentence, n. 48). Il n'a donc pas "ignoré" un moyen de preuve essentiel, contrairement à ce qu'affirme la recourante (recours, p. 16), mais a procédé à une appréciation anticipée de la pertinence de ce moyen de preuve qui l'a amené à considérer comme superflue l'administration de celui-ci. Le résultat de cette appréciation est soustrait à la connaissance du Tribunal fédéral (cf., ci-dessus, consid. 4.1, 2e § in fine). D'ailleurs, étant donné que la solution du différend soumis au Tribunal arbitral découlait essentiellement de l'interprétation des diverses clauses contractuelles se rapportant à l'exigibilité du prix et à la constatation du respect des garanties de performance promises, on peine à discerner, quoi qu'en dise la recourante, en quoi une inspection des lieux requise deux ans et demi environ après la mise en service de l'usine eût été d'une quelconque utilité pour les trois juristes appelés à résoudre ce différend.

Quoi qu'il en soit, la recourante, si elle s'estimait victime d'une violation de son droit d'être entendue, aurait dû relancer les arbitres pendente lite ou, à tout le moins, lorsque le Tribunal arbitral avait déclaré la procédure close, en date du 20 décembre 2011 (sentence, n. 55). Elle aurait dû s'opposer alors à la clôture de la procédure arbitrale en attirant l'attention des arbitres sur le fait qu'ils n'avaient pas ordonné l'inspection des lieux requise par elle. Au lieu de quoi, la recourante a attendu de connaître l'issue du litige pour se plaindre alors seulement, après avoir constaté qu'elle lui était défavorable, de la violation de son droit à la preuve, ce qui n'est pas admissible.

5.
Dans un dernier groupe de moyens, la recourante, invoquant l'art. 190 al. 2 let. e
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication.
1    La sentence est définitive dès sa communication.
2    Elle ne peut être attaquée que:
a  lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé;
b  lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent;
c  lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande;
d  lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté;
e  lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public.
3    En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision.
4    Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152
LDIP, reproche au Tribunal arbitral d'avoir rendu une sentence incompatible avec l'ordre public. Plus précisément, elle lui fait grief d'avoir violé les règles de la bonne foi et le principe de la fidélité contractuelle.

5.1 L'examen matériel d'une sentence arbitrale internationale, par le Tribunal fédéral, est limité à la question de la compatibilité de la sentence avec l'ordre public (ATF 121 III 331 consid. 3a).

Une sentence est incompatible avec l'ordre public si elle méconnaît les valeurs essentielles et largement reconnues qui, selon les conceptions prévalant en Suisse, devraient constituer le fondement de tout ordre juridique (ATF 132 III 389 consid. 2.2.3). Elle est contraire à l'ordre public matériel lorsqu'elle viole des principes fondamentaux du droit de fond au point de ne plus être conciliable avec l'ordre juridique et le système de valeurs déterminants; au nombre de ces principes figurent, notamment, la fidélité contractuelle et le respect des règles de la bonne foi. Pour qu'il y ait incompatibilité avec l'ordre public matériel, notion plus restrictive que celle d'arbitraire, il ne suffit pas qu'une règle de droit ait été clairement violée (arrêt 4P.71/2002 du 22 octobre 2002 consid. 3.2 et les arrêts cités).
Le principe pacta sunt servanda, au sens restrictif que lui donne la jurisprudence relative à l'art. 190 al. 2 let. e
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication.
1    La sentence est définitive dès sa communication.
2    Elle ne peut être attaquée que:
a  lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé;
b  lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent;
c  lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande;
d  lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté;
e  lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public.
3    En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision.
4    Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152
LDIP, n'est violé que si le tribunal arbitral refuse d'appliquer une clause contractuelle tout en admettant qu'elle lie les parties ou, à l'inverse, s'il leur impose le respect d'une clause dont il considère qu'elle ne les lie pas. En d'autres termes, le tribunal arbitral doit avoir appliqué ou refusé d'appliquer une disposition contractuelle en se mettant en contradiction avec le résultat de son interprétation à propos de l'existence ou du contenu de l'acte juridique litigieux. En revanche, le processus d'interprétation lui-même et les conséquences juridiques qui en sont logiquement tirées ne sont pas régis par le principe de la fidélité contractuelle, de sorte qu'ils ne sauraient prêter le flanc au grief de violation de l'ordre public. Le Tribunal fédéral a souligné à maintes reprises que la quasi-totalité du contentieux dérivé de la violation du contrat est exclue du champ de protection du principe pacta sunt servanda (arrêt 4A 370/2007 du 21 février 2008 consid. 5.5).

Les règles de la bonne foi doivent être comprises dans le sens que leur donne la jurisprudence rendue au sujet de l'art. 2
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 2 - 1 Chacun est tenu d'exercer ses droits et d'exécuter ses obligations selon les règles de la bonne foi.
1    Chacun est tenu d'exercer ses droits et d'exécuter ses obligations selon les règles de la bonne foi.
2    L'abus manifeste d'un droit n'est pas protégé par la loi.
CC (arrêt 4A 488/2009 du 15 février 2010 consid. 3.1).
5.2
5.2.1 Dans un premier moyen, intitulé: "Double standard dans l'application du principe de la bonne foi", la recourante reproche, en substance, au Tribunal arbitral d'avoir fait une "application à géométrie variable" de ce principe dans l'interprétation des clauses contractuelles pertinentes: il s'en serait tenu à une interprétation littérale du Contrat s'agissant du devoir de la recourante de respecter les consignes de l'intimée dans le cadre du test de performance, tout en s'écartant du Contrat, nonobstant son texte clair, dans l'interprétation des conditions d'exigibilité de la dernière tranche du prix convenu.

Le moyen considéré est de nature purement appellatoire et n'a rien à voir avec l'ordre public, tel qu'il a été défini par la jurisprudence précitée. Il vise à obtenir, en réalité, un réexamen par la Cour de céans du bien-fondé de l'interprétation que les arbitres ont faite des clauses contractuelles relatives à l'exigibilité du prix, d'une part, et aux modalités du test de performance, d'autre part. Tel n'est pas le rôle du Tribunal fédéral lorsqu'il est saisi du grief de violation de l'ordre public matériel dans le cadre d'un recours en matière d'arbitrage international. Au demeurant, la recourante oublie, en formulant son grief, que le moyen pris de l'incohérence intrinsèque des considérants d'une sentence n'entre pas dans la définition de l'ordre public matériel (arrêt 4A 464/2009 du 15 février 2010 consid. 5.1).

Par conséquent, il n'y a pas lieu d'examiner plus avant les mérites du grief en question.
5.2.2 Le grief de violation du principe pacta sunt servanda, formulé en dernier lieu par la recourante, n'apparaît pas plus fondé que les précédents.
Selon l'intéressée, le Tribunal arbitral aurait alloué à l'intimée un montant de 312'000 euros au titre des coûts additionnels d'ingénierie, alors que la clause contractuelle pertinente faisait dépendre l'admissibilité d'une telle prétention d'un accord écrit des parties, dont l'absence, en l'espèce, avait pourtant été implicitement reconnue par lui. Ce faisant, il aurait refusé d'appliquer une disposition contractuelle dont il avait reconnu l'existence, violant ainsi le principe de la fidélité contractuelle et, partant, l'ordre public matériel.

Tel n'est pas le cas. L'existence et le contenu de la clause contractuelle litigieuse n'ont pas échappé aux arbitres. Toutefois, ceux-ci ont jugé que la recourante ne pouvait pas se prévaloir de l'absence de l'accord écrit prévu par cette clause pour obtenir de l'intimée une prestation sans bourse délier, en s'abstenant simplement de confirmer par écrit son acceptation des travaux additionnels sans fournir de motif valable à son abstention (sentence, n. 304 et 305). En la condamnant à payer le montant susmentionné, ils ont ainsi pris une décision qui était parfaitement conforme à l'appréciation juridique qu'ils avaient faite de la situation. On ne saurait le leur reprocher sous l'angle de l'art. 190 al. 2 let. e
SR 291 Loi fédérale du 18 décembre 1987 sur le droit international privé (LDIP)
LDIP Art. 190 - 1 La sentence est définitive dès sa communication.
1    La sentence est définitive dès sa communication.
2    Elle ne peut être attaquée que:
a  lorsque l'arbitre unique a été irrégulièrement désigné ou le tribunal arbitral irrégulièrement composé;
b  lorsque le tribunal arbitral s'est déclaré à tort compétent ou incompétent;
c  lorsque le tribunal arbitral a statué au-delà des demandes dont il était saisi ou lorsqu'il a omis de se prononcer sur un des chefs de la demande;
d  lorsque l'égalité des parties ou leur droit d'être entendues en procédure contradictoire n'a pas été respecté;
e  lorsque la sentence est incompatible avec l'ordre public.
3    En cas de décision incidente, seul le recours pour les motifs prévus à l'al. 2, let. a et b, est ouvert; le délai court dès la communication de la décision.
4    Le délai de recours est de 30 jours à compter de la communication de la sentence.152
LDIP.

6.
La recourante, qui succombe, devra payer les frais de la procédure fédérale (art. 66 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
1    En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
2    Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis.
3    Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés.
4    En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours.
5    Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement.
LTF) et verser des dépens à l'intimée (art. 68 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 68 Dépens - 1 Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
1    Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
2    En règle générale, la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige.
3    En règle générale, aucuns dépens ne sont alloués à la Confédération, aux cantons, aux communes ou aux organisations chargées de tâches de droit public lorsqu'ils obtiennent gain de cause dans l'exercice de leurs attributions officielles.
4    L'art. 66, al. 3 et 5, est applicable par analogie.
5    Le Tribunal fédéral confirme, annule ou modifie, selon le sort de la cause, la décision de l'autorité précédente sur les dépens. Il peut fixer lui-même les dépens d'après le tarif fédéral ou cantonal applicable ou laisser à l'autorité précédente le soin de les fixer.
et 2
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 68 Dépens - 1 Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
1    Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe.
2    En règle générale, la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige.
3    En règle générale, aucuns dépens ne sont alloués à la Confédération, aux cantons, aux communes ou aux organisations chargées de tâches de droit public lorsqu'ils obtiennent gain de cause dans l'exercice de leurs attributions officielles.
4    L'art. 66, al. 3 et 5, est applicable par analogie.
5    Le Tribunal fédéral confirme, annule ou modifie, selon le sort de la cause, la décision de l'autorité précédente sur les dépens. Il peut fixer lui-même les dépens d'après le tarif fédéral ou cantonal applicable ou laisser à l'autorité précédente le soin de les fixer.
LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 39'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.

3.
La recourante versera à l'intimée une indemnité de 49'000 fr. à titre de dépens.

4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires des parties et à l'arbitre ... pour le Tribunal arbitral CCI.

Lausanne, le 12 juillet 2012

Au nom de la Ire Cour de droit civil
du Tribunal fédéral suisse

La Présidente: Klett

Le Greffier: Carruzzo