Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}

1C 164/2016

Arrêt du 10 juin 2016

Ire Cour de droit public

Composition
MM. les Juges fédéraux Fonjallaz, Président,
Karlen et Kneubühler.
Greffier : M. Kurz.

Participants à la procédure
A.________ SA, représentée par Maîtres François R. Micheli et Marc Joory,
recourante,

contre

Ministère public de la Confédération.

Objet
Entraide judiciaire internationale en matière pénale à la République française, remise de moyens de preuve,

recours contre l'arrêt du Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes, du 5 avril 2016.

Faits :

A.
Par décision du 9 décembre 2015, le Ministère public de la Confédération (MPC) a ordonné la transmission, à un juge d'instruction parisien, de la documentation relative à un compte bancaire détenu par A.________ SA auprès de la Banque B.________. Cette transmission intervient en exécution d'une demande d'entraide judiciaire formée le 14 novembre 2015 et complétée le 2 décembre 2015 dans le cadre d'une information pour délits d'initiés mettant notamment en cause C.________, D.________ et E.________ (président de A.________ SA). Le premier aurait fait état d'informations privilégiées ayant permis de dégager d'importants bénéfices.

B.
Par arrêt du 5 avril 2016, la Cour des plaintes du Tribunal pénal fédéral a rejeté le recours formé par A.________ SA contre l'ordonnance de clôture. Il n'y avait pas d'incompétence manifeste de l'autorité étrangère puisque les titres étaient cotés en bourse en France et que C.________ y était domicilié. Les actes décrits étaient punissables en Suisse selon l'art. 40 aLBVM, et il n'était pas nécessaire que la recourante elle-même ait bénéficié d'informations privilégiées. L'ayant droit de la recourante apparaissait dans la demande d'entraide et la recourante avait participé à des transactions sur les titres visés par l'enquête. Le principe de la proportionnalité était respecté, de même que le principe "ne bis in idem", puisque la décision de classement rendue par l'Autorité française des marchés financiers (AMF) ne concernait pas les mêmes faits et que l'autorité requérante n'avait pas renoncé à sa démarche.

C.
Par acte du 18 avril 2016, A.________ SA forme un recours en matière de droit public par lequel elle demande l'annulation de l'arrêt du Tribunal pénal fédéral et le renvoi de la cause à l'autorité de première instance ou à la Cour des plaintes. Elle demande l'octroi d'un délai supplémentaire pour compléter son recours.
La Cour des plaintes, l'Office fédéral de la justice et le MPC concluent à l'irrecevabilité du recours.
Dans ses déterminations du 23 mai puis du 6 juin 2016, la recourante persiste dans ses griefs et ses conclusions, et se prévaut d'un arrêt du Tribunal administratif fédéral du 13 mai 2016 refusant l'entraide administrative à l'AMF.

Considérant en droit :

1.
Selon l'art. 109 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 109 Cours statuant à trois juges - 1 Le refus d'entrer en matière sur les recours qui ne soulèvent pas de question juridique de principe ni ne portent sur un cas particulièrement important alors qu'ils ne sont recevables qu'à cette condition (art. 74 et 83 à 85) est prononcé par la cour statuant à trois juges. L'art. 58, al. 1, let. b, n'est pas applicable.
1    Le refus d'entrer en matière sur les recours qui ne soulèvent pas de question juridique de principe ni ne portent sur un cas particulièrement important alors qu'ils ne sont recevables qu'à cette condition (art. 74 et 83 à 85) est prononcé par la cour statuant à trois juges. L'art. 58, al. 1, let. b, n'est pas applicable.
2    La cour décide dans la même composition et à l'unanimité:
a  de rejeter un recours manifestement infondé;
b  d'admettre un recours manifestement fondé, en particulier si l'acte attaqué s'écarte de la jurisprudence du Tribunal fédéral et qu'il n'y a pas de raison de la réexaminer.
3    L'arrêt est motivé sommairement. Il peut renvoyer partiellement ou entièrement à la décision attaquée.
LTF, la cour siège à trois juges - et, selon l'art. 107 al. 3
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 107 Arrêt - 1 Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties.
1    Le Tribunal fédéral ne peut aller au-delà des conclusions des parties.
2    Si le Tribunal fédéral admet le recours, il statue lui-même sur le fond ou renvoie l'affaire à l'autorité précédente pour qu'elle prenne une nouvelle décision. Il peut également renvoyer l'affaire à l'autorité qui a statué en première instance.
3    Si le Tribunal fédéral considère qu'un recours en matière d'entraide pénale internationale ou d'assistance administrative internationale en matière fiscale est irrecevable, il rend une décision de non-entrée en matière dans les quinze jours qui suivent la fin d'un éventuel échange d'écritures. Dans le domaine de l'entraide pénale internationale, le Tribunal fédéral n'est pas lié par ce délai lorsque la procédure d'extradition concerne une personne dont la demande d'asile n'a pas encore fait l'objet d'une décision finale entrée en force.100
4    Le Tribunal fédéral statue sur tout recours contre une décision du Tribunal fédéral des brevets portant sur l'octroi d'une licence visée à l'art. 40d de la loi du 25 juin 1954 sur les brevets101 dans le mois qui suit le dépôt du recours.102
LTF, dans les quinze jours suivant la fin d'un éventuel échange d'écritures - lorsqu'elle refuse d'entrer en matière sur un recours soumis à l'exigence de l'art. 84
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 84 Entraide pénale internationale - 1 Le recours n'est recevable contre une décision rendue en matière d'entraide pénale internationale que s'il a pour objet une extradition, une saisie, le transfert d'objets ou de valeurs ou la transmission de renseignements concernant le domaine secret et s'il concerne un cas particulièrement important.
1    Le recours n'est recevable contre une décision rendue en matière d'entraide pénale internationale que s'il a pour objet une extradition, une saisie, le transfert d'objets ou de valeurs ou la transmission de renseignements concernant le domaine secret et s'il concerne un cas particulièrement important.
2    Un cas est particulièrement important notamment lorsqu'il y a des raisons de supposer que la procédure à l'étranger viole des principes fondamentaux ou comporte d'autres vices graves.
LTF.

1.1. A teneur de cette disposition, le recours est recevable à l'encontre d'un arrêt du TPF en matière d'entraide judiciaire internationale si celui-ci a pour objet la transmission de renseignements concernant le domaine secret. Il doit toutefois s'agir d'un cas particulièrement important (al. 1). Un cas est particulièrement important notamment lorsqu'il y a des raisons de supposer que la procédure à l'étranger viole des principes fondamentaux ou comporte d'autres vices graves (al. 2). Ces motifs d'entrée en matière ne sont toutefois pas exhaustifs et le Tribunal fédéral peut être appelé à intervenir lorsqu'il s'agit de trancher une question juridique de principe ou lorsque l'instance précédente s'est écartée de la jurisprudence suivie jusque-là (ATF 133 IV 215 consid. 1.2 p. 218). En vertu de l'art. 42 al. 2
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 42 Mémoires - 1 Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
1    Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
2    Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Si le recours n'est recevable que lorsqu'il soulève une question juridique de principe ou qu'il porte sur un cas particulièrement important pour d'autres motifs, il faut exposer en quoi l'affaire remplit la condition exigée.15 16
3    Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu'elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée si le mémoire est dirigé contre une décision.
4    En cas de transmission électronique, le mémoire doit être muni de la signature électronique qualifiée de la partie ou de son mandataire au sens de la loi du 18 mars 2016 sur la signature électronique17. Le Tribunal fédéral détermine dans un règlement:
a  le format du mémoire et des pièces jointes;
b  les modalités de la transmission;
c  les conditions auxquelles il peut exiger, en cas de problème technique, que des documents lui soient adressés ultérieurement sur papier.18
5    Si la signature de la partie ou de son mandataire, la procuration ou les annexes prescrites font défaut, ou si le mandataire n'est pas autorisé, le Tribunal fédéral impartit un délai approprié à la partie pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
6    Si le mémoire est illisible, inconvenant, incompréhensible ou prolixe ou qu'il n'est pas rédigé dans une langue officielle, le Tribunal fédéral peut le renvoyer à son auteur; il impartit à celui-ci un délai approprié pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
7    Le mémoire de recours introduit de manière procédurière ou à tout autre égard abusif est irrecevable.
LTF, il incombe aux recourants de démontrer que les conditions d'entrée en matière posées à l'art. 84
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 84 Entraide pénale internationale - 1 Le recours n'est recevable contre une décision rendue en matière d'entraide pénale internationale que s'il a pour objet une extradition, une saisie, le transfert d'objets ou de valeurs ou la transmission de renseignements concernant le domaine secret et s'il concerne un cas particulièrement important.
1    Le recours n'est recevable contre une décision rendue en matière d'entraide pénale internationale que s'il a pour objet une extradition, une saisie, le transfert d'objets ou de valeurs ou la transmission de renseignements concernant le domaine secret et s'il concerne un cas particulièrement important.
2    Un cas est particulièrement important notamment lorsqu'il y a des raisons de supposer que la procédure à l'étranger viole des principes fondamentaux ou comporte d'autres vices graves.
LTF sont réunies (ATF 133 IV 131 consid. 3 p. 132).

1.2. La présente espèce porte sur la transmission de renseignements touchant le domaine secret. Toutefois, compte tenu de la nature de la transmission envisagée (la documentation portant sur une relation bancaire déterminée) et de l'objet de la procédure étrangère, limité à des infractions de droit commun, le cas ne revêt en soi aucune importance particulière.

1.3. La recourante se prévaut d'un document qui lui aurait été transmis par le MPC le 5 avril 2016 comportant une liste des personnes intervenues dans des opérations de titres, soit les initiés "primaires" tels que recensés par l'autorité requérante. Or, C.________ n'y figurerait pas alors qu'il se trouverait selon l'autorité requérante à la source des informations privilégiées. La bonne foi de cette autorité constituerait une question de principe.

En réalité, la recourante tente de mettre en doute la présentation des faits telle qu'elle figure dans la demande d'entraide et son complément. Selon la jurisprudence constante, une telle argumentation à décharge n'a pas à être prise en considération par l'autorité suisse d'entraide, celle-ci étant liée par l'état de fait présenté par l'autorité requérante (ATF 133 IV 40 consid. 5.2 non publié; 123 II 175 consid. 4 p. 181). Il n'est fait exception à ce principe qu'en cas de lacune ou de contradictions évidentes, faisant apparaître la demande comme un abus manifeste. Sur le vu des explications fournies par le TPF dans sa réponse, la recourante a reçu la pièce invoquée en tout cas dans le courant de la procédure de recours, et elle aurait ainsi pu se déterminer à son sujet dans ses dernières écritures. En outre, le nom de C.________ y est bien mentionné à plusieurs reprises. Quoi qu'il en soit, la pièce en question n'a été établie qu'à titre indicatif pour faciliter le tri des documents saisis; elle ne saurait contredire les faits tels qu'ils sont exposés dans la demande d'entraide. Il ne se pose dès lors aucune question de principe sur ce point.
La recourante entend aussi se prévaloir d'un arrêt du TAF du 13 mai 2016 relatif à une demande d'entraide administrative de l'AMF. L'arrêt en question porte sur la compétence de cette autorité pour poursuivre des personnes qui ne tomberaient pas sous sa régulation. On ne voit pas en quoi cet arrêt pourrait avoir une incidence sur l'octroi de l'entraide judiciaire à une autorité de poursuite pénale, ni surtout en quoi cela constituerait une question de principe.

2.
Sur le vu de ce qui précède, le recours est irrecevable. Conformément à l'art. 66 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
1    En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
2    Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis.
3    Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés.
4    En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours.
5    Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement.
LTF, les frais judiciaires sont mis à la charge de la recourante qui succombe. L'octroi d'un délai supplémentaire au sens de l'art. 43
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 43 Mémoire complémentaire - Le Tribunal fédéral accorde au recourant, à sa demande, un délai approprié pour compléter la motivation de son recours en matière d'entraide pénale internationale:
a  s'il a déclaré recevable ce recours, et
b  si l'étendue exceptionnelle ou la difficulté particulière de l'affaire le commande.
LTF ne se justifie pas, la recourante ayant d'ailleurs eu l'occasion de présenter des observations complémentaires.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1.
Le recours est irrecevable.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1'000 fr., sont mis à la charge de la recourante.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires de la recourante, au Ministère public de la Confédération, au Tribunal pénal fédéral, Cour des plaintes et à l'Office fédéral de la justice, Unité Entraide judiciaire.

Lausanne, le 10 juin 2016

Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Fonjallaz

Le Greffier : Kurz