26. Extraits de la décision de la CRA du 28 octobre 1998,
K. B.S., Algérie
Art. 14a, al. 4 LSEE : exigibilité de l'exécution du renvoi.
Analyse de la situation en Algérie.
Art. 14a Abs. 4 ANAG: Zumutbarkeit des Wegweisungsvollzugs.
Beurteilung der Situation in Algerien.
Art. 14a cpv. 4 LDDS: esigibilità dell'esecuzione del rinvio.
Analisi della situazione in Algeria.
Extraits des considérants :
7.b) Suite à l'interdiction du Front islamique du salut (FIS), le 4 mars 1992, par le pouvoir en place en Algérie, les chefs islamiques ont développé leurs activités dans la clandestinité au sein du Mouvement islamique armé (MIA) subdivisé en deux ailes, l'Armée islamique du salut (AIS) qui a unilatéralement décidé en 1995 d'une trève des opérations armées, et les Groupes islamiques armés (GIA). A partir de 1995, les islamistes radicaux des GIA se sont distancés de la direction du FIS et ont continué la lutte pour leur propre compte, en agissant souvent les uns contre les autres.
Durant les premières années (1992-1994), la résistance armée du MIA a frappé des cibles bien précises du régime en place. D'abord, il s'agissait d'abattre des représentants et des symboles du pouvoir algérien, principalement des policiers, des gendarmes, des militaires; puis cette même résistance s'est attaquée aux intellectuels, aux défenseurs de l'information et aux promoteurs de la culture occidentale, aux scientifiques, aux journalistes, aux enseignants, aux artistes et autres créateurs. Dès 1995, les islamistes s'en sont pris violemment aux femmes assumant un rôle professionnel ou ayant un compor-
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tement non conformes aux règles traditionnelles de la société algérienne, mais aussi aux islamistes repentis, aux enfants et aux étrangers.
De 1991 à 1995, les cellules des GIA étaient concentrées dans la région algéroise et la Mitidja adjacente ; leurs actions violentes, dirigées contre des civils, étaient essentiellement caractérisées par des assassinats, des enlèvements et des attentats à la bombe. On a assisté, par la suite, à l'extension de leurs activités vers le sud et l'ouest du pays, de M'Sila jusqu'à Tlemcen, extension qui s'est accompagnée d'une gradation dans l'horreur. En effet, les GIA ont adopté alors une stratégie de la terreur visant les éléments les plus faibles de la société civile afin de provoquer une rupture des liens sociaux. Actuellement, ces violences, attentats et massacres ont surtout lieu dans la wilaya (province) d'Alger plus précisément dans sa région rurale, dans les provinces de Blida, Médéa et Bouira, sises au sud d'Alger, et connues sous le nom de "triangle de la mort", ainsi que dans les provinces de Boumerdès et M'Sila, à Tipasa, Aïn Defla, Chlef, Tissemsilt, Tiaret, Relizane, Mascara, Saïda, Sidi-bel-Abbès et Tlemcen. La ville d'Alger et sa banlieue (le Grand-Alger) sont également touchées par les attentats. Les autres provinces du nord de l'Algérie sont soit soumises sporadiquement aux violences entre les forces de sécurité et les GIA (Tizi-
Ouzou, Bejaïa, Sétif, Constantine) voire libres de violences (est algérien).
Si jusqu'en 1995, les GIA s'en prenaient à des groupes ciblés de la population et s'attaquaient aux infrastructures, ils ont par la suite visé quiconque dans les villages s'opposaient à eux ou refusaient de les ravitailler, voire en définitive à n'importe qui. Dès lors, l'opinion publique algérienne a commencé à basculer en leur défaveur.
Depuis 1996, la stratégie des autorités a consisté, avec un certain succès, à interdire aux groupes armés l'accès aux zones urbaines et à les empêcher de recruter. Les villes ont généralement été épargnées par les attaques suivies de massacres et les terroristes s'en sont pris aux quartiers périphériques et, surtout, aux villages, hameaux et fermes isolées.
Actuellement, le régime algérien poursuit et condamne ceux qui sont soupçonnés d'être des islamistes armés ou des civils qui les appuient, les activistes notoires des droits de l'homme, les déserteurs et les réfractaires, les personnes ayant témoigné des actes de tortures commis par leurs collègues.
Il importe de souligner que, dans ce contexte, quelques milliers de jeunes seulement ont choisi la voie de l'exil, sur une population de plus de 30 millions
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d'habitants dont le 65% a moins de 30 ans. En dehors des zones critiques, la vie quotidienne s'écoule normalement en dépit des attentats. Les employés et les cadres continuent à travailler sans problème, les loisirs se déroulent comme à l'accoutumée, les cabarets sont ouverts, les cortèges et les fêtes familiales se produisent à l'occasion des mariages ou autres rites religieux. Le trafic maritime et aérien est dense entre l'Europe, y compris la Suisse, et l'Algérie.
Il résulte de ce qui précède qu'en dépit des troubles qui l'affectent, l'Algérie ne se trouve pas dans une situation de guerre civile, à savoir un conflit armé mettant aux prises le gouvernement établi avec un ou plusieurs mouvements insurrectionnels dont les buts tendent soit à renverser le gouvernement ou le régime de l'Etat, soit à obtenir la sécession d'une partie de cet Etat (C. Piguet, La guerre civile en droit international, Lausanne 1982, p. 18). En effet, les GIA ne sont pas des mouvements insurrectionnels qui se seraient mués en autorité de fait et exerceraient d'une manière effective, stable et durable la puissance publique sur une partie du territoire soumis au contrôle de sa propre administration (cf. JICRA 1996 no 18, p. 172; 1995 no 25, p. 234ss et no 2, p. 14ss; 1993 no 9, p. 59ss et no 10, p. 64ss). L'exécution du renvoi des personnes provenant des provinces sujettes aux attaques des terroristes doit donc faire l'objet d'un examen détaillé portant sur leur lieu de provenance. Il importe, notamment, de voir si elles viennent de régions rurales. A défaut d'admettre l'exigibilité du renvoi dans ces régions, il y a lieu de procéder à l'examen d'une possibilité de refuge interne dans des zones plus calmes, notamment
dans les régions sises à l'est du pays, près de la frontière tunisienne, lesquelles sont relativement épargnées par les violences et où les GIA ne semblent pas en mesure d'étendre leurs actions de manière significatives ainsi que dans les centres des grandes villes (Alger, Oran, Constantine, Annaba, Sétif et Batna) lesquels sont sous contrôle des forces de sécurité.
c) En l'occurrence, le recourant provient, selon ses dires - il n'a produit aucun document d'identité - du village de Lamri dans lequel habitent ses parents ; ce village se situe à l'extrême est du pays, à proximité de la frontière tunisienne, région pratiquement épargnée par les violences. De plus, le recourant n'appartient pas à un (ancien) groupe à risques (cf. ci-dessus, considérant 7b). En conséquence, en l'absence d'un danger concret et imminent, au sens de l'article 14a

