Extrait de l'arrêt de la Cour VI
dans la cause X. contre Secrétariat d'Etat aux migrations
F-1367/2019 du 20 juillet 2021
Interdiction d'entrée de raccordement.
Art. 67 al. 2

SR 142.20 Bundesgesetz vom 16. Dezember 2005 über die Ausländerinnen und Ausländer und über die Integration (Ausländer- und Integrationsgesetz, AIG) - Ausländer- und Integrationsgesetz AIG Art. 67 Einreiseverbot - 1 Das SEM verfügt unter Vorbehalt von Absatz 5 Einreiseverbote gegenüber weggewiesenen Ausländerinnen und Ausländern, wenn: |
1. Notion de décision d'interdiction d'entrée dite de " raccordement " (consid. 7.2-7.2.1).
2. Point de départ (dies a quo) pour le calcul de la durée de l'interdiction d'entrée de raccordement et la fixation de son échéance (consid. 7.2.2-7.2.2.4).
3. La durée maximale de quinze ans peut être dépassée par la décision d'interdiction d'entrée précédente et celle de raccordement, prises ensemble (consid. 7.2.3).
Anschlusseinreiseverbot.
Art. 67 Abs. 2 AIG.
1. Begriff des Anschlusseinreiseverbots (E. 7.2-7.2.1).
2. Ausgangspunkt (dies a quo) für die Berechnung der Dauer des Anschlusseinreiseverbots und die Festlegung seines Ablaufs (E. 7.2.2-7.2.2.4).
3. Das vorgängige Einreiseverbot und das Anschlusseinreiseverbot zusammengenommen können die Höchstdauer von fünfzehn Jahren überschreiten (E. 7.2.3).
Divieto d'entrata di raccordo.
Art. 67 cpv. 2 LStrI.
1. Divieto d'entrata: definizione di " Decisione di raccordo " (consid. 7.2-7.2.1).
2. Punto di partenza (dies a quo) per il calcolo della durata del divieto d'entrata di raccordo e per la fissazione della sua scadenza (consid. 7.2.2-7.2.2.4).
3. La durata totale pronunciata nella decisione di divieto d'entrata precedente e in quella di raccordo può superare la durata massima di quindici anni (consid. 7.2.3).
Extrait des considérants:
7.2 Il n'est pas rare que le Secrétariat d'Etat aux migrations (SEM) prononce une interdiction d'entrée alors qu'une autre est toujours en force et déploie ses effets. Dans ce cas de figure, le Tribunal a développé la notion de décision dite de " raccordement " (en allemand " Anschlussverfügung " et en italien " decisione di raccordo "; cf., notamment, arrêts du TAF C-3841/2013 du 1er octobre 2015 consid. 6 in fine; C-4017/2015 du 24 février 2016 consid. 4; F-5141/2014 du 30 septembre 2016 consid. 5.2; F-3242/2016 du 9 août 2017 consid. 4.1; F-2015/2016 du 31 août 2017 consid. 4; F-1444/2014 du 9 mai 2018 consid. 4.4;
F-7074/2017 du 23 mai 2019 consid. 4.6; F-1410/2019 du 25 mars 2021 consid. 5.5).
7.2.1 En règle générale, une interdiction d'entrée de raccordement est prononcée par le SEM en réaction au comportement adopté par la personne concernée postérieurement au prononcé de l'interdiction d'entrée précédente. Il peut s'agir, en particulier, de la commission de nouvelles infractions, sanctionnées par les autorités pénales. La décision d'interdiction d'entrée de raccordement ne remet pas en cause l'interdiction d'entrée précédente, qui continue déployer ses effets, mais la complète. Formellement, l'interdiction d'entrée précédente et celle de raccordement constituent deux décisions distinctes. Il est ainsi possible de recourir contre la décision d'interdiction d'entrée de raccordement sans pour autant remettre en cause l'interdiction d'entrée précédente, qui sera généralement déj entrée en force de chose décidée (cf., ce sujet aussi, Adank-Schärer/Antoniazza-Hafner, Interdiction d'entrée prononcée l'encontre d'un étranger délinquant, PJA 2018 p. 888).
Sous réserve de l'arrêt du TAF F-3804/2018 du 20 juin 2019, qui présente une particularité, dès lors que la nouvelle interdiction d'entrée examinée par le Tribunal administratif fédéral ne se fondait pas uniquement sur une nouvelle condamnation pénale du recourant, mais aussi sur un jugement du Tribunal cantonal soleurois réformant partiellement, en défaveur de l'intéressé, une décision pénale rendue antérieurement la décision d'interdiction d'entrée précédente (cf., pour les détails, arrêt F-3804/2018 consid. 5), l'ensemble des jurisprudences suivantes ont trait des interdictions d'entrée de raccordement prononcées en réaction au comportement adopté par la personne concernée postérieurement l'interdiction d'entrée précédente: arrêts du TAF C-7643/2007 du 29 juin 2009;
C-1039/2010 du 19 août 2011; C-2081/2011 du 20 janvier 2012;
C-1930/2015 du 30 juillet 2015; C-3841/2013; C-4017/2015;
F-5141/2014; F-3242/2016; F-2015/2016; F-1444/2014; F-7700/2016 du 26 juillet 2018; F-4229/2017 du 7 décembre 2018; F-7074/2017;
F-4567/2019, F-2947/2020 du 10 septembre 2020; F-1410/2019.
7.2.2 S'agissant du point de départ pour le calcul de la durée de l'interdiction d'entrée de raccordement - et partant, la fixation de son échéance -, il y a lieu de constater que ni la pratique du SEM ni celle du Tribunal administratif fédéral ne sont pour l'heure uniformes.
7.2.2.1 A l'aune d'une majorité de décisions allant dans ce sens, il est cela dit possible de retenir, comme dies a quo, la date du prononcé de la décision de raccordement (cf., notamment, arrêts C-3841/2013 consid. 6 et 10.4; C-4017/2015 consid. 4 in fine; F-5141/2014 consid. 5.2 s.;
F-2015/2016 consid. 4 et 7.4; F-3242/2016 consid. 4.1; F-1410/2019 consid. 5.5; Adank-Schärer/Antoniazza-Hafner, op. cit., p. 889). Dès lors que le prononcé d'une mesure d'éloignement suppose l'établissement d'un pronostic quant au comportement futur de la personne concernée et au risque que celle-ci est encore susceptible de représenter, l'autorité doit en effet se placer au moment où elle se prononce pour effectuer ce pronostic et non pas la date de l'échéance de l'interdiction d'entrée précédente qui peut se situer dans un futur plus ou moins lointain (cf. réf. cit.). C'est également par rapport la date du prononcé de l'interdiction d'entrée de raccordement qu'il s'agira de vérifier si, d'une part, cette mesure respecte les exigences légales et jurisprudentielles en lien avec la durée maximale et si, d'autre part, elle respecte le principe de proportionnalité (cf., notamment, arrêts C-3841/2013 consid. 10.4 et F-2015/2016 consid. 6.3 et 7.4). Dès lors que, d'après les informations communiquées par les représentants du SEM lors de l'audience d'instruction du 21 septembre 2020, le Système d'information central sur la migration (SYMIC) ne permet pas, pour des raisons techniques, que deux
interdictions d'entrée déploient leurs effets parallèlement, rien n'empêche le SEM de faire débuter les effets de l'interdiction d'entrée de raccordement (immédiatement) l'échéance de l'interdiction d'entrée précédente (cf. réf. cit.; Adank-Schärer/
Antoniazza-Hafner, op. cit., p. 889). Le report du début des effets de l'interdiction d'entrée de raccordement n'a toutefois aucune portée pratique, puisque cela n'influence pas la durée de la mesure de raccordement, qui est calculée par l'autorité par rapport la date de son prononcé.
7.2.2.2 A titre illustratif, on citera l'exemple fictif donné par les représentants du SEM l'audience du 21 septembre 2020 ([...]): le SEM prononce, le 4 avril 2018, une interdiction d'entrée en Suisse contre un ressortissant d'Etat tiers d'une durée de trois ans, c'est- -dire valable jusqu'au 3 avril 2021. Il y a ensuite de nouveaux faits qui parviennent la connaissance du SEM (une autre condamnation) en 2019. Le SEM envisage donc de prononcer une nouvelle interdiction d'entrée, basée sur ces nouveaux faits, le 6 juin 2019. SYMIC ne permettant pas que cette nouvelle interdiction d'entrée déploie ses effets partir du 6 juin 2019, la décision sera datée du 6 juin 2019, mais sera indiquée comme valable partir du 4 avril 2021, soit le jour après que la première interdiction d'entrée aura pris fin. Pour fixer, en revanche, la durée de cette nouvelle interdiction d'entrée, on se basera sur la date du 6 juin 2019, soit celle de son prononcé. Pour une décision d'interdiction d'entrée de cinq ans, son échéance sera ainsi le 5 juin 2024. Les dates officielles de l'interdiction d'entrée courront donc du 4 avril 2021 au 5 juin 2024, puisqu'il n'est pas possible de la faire partir du 6 juin 2019 cause de
SYMIC. La pratique actuelle du SEM, consistant reporter les effets de l'interdiction d'entrée de raccordement, s'avérant compliquée et source de confusion non seulement pour les administrés, mais également pour les autorités, le SEM est toutefois invité remédier, si possible, cette difficulté technique, afin que SYMIC permette dorénavant deux interdictions d'entrée de déployer simultanément leurs effets.
7.2.2.3 A noter que, dans les jurisprudences suivantes, le SEM et/ou le Tribunal administratif fédéral n'ont pas utilisé la date du prononcé de l'interdiction d'entrée de raccordement pour en fixer l'échéance: arrêts
C-1039/2010; C-1930/2015; F-1444/2014; F-4229/2017; F-7074/2017 (dans cette affaire, le TAF a calculé la durée de l'interdiction d'entrée de raccordement par rapport au lendemain de l'échéance de l'interdiction d'entrée précédente). Ces quelques jurisprudences ne sauraient toutefois justifier que l'on s'écarte du principe développé dans une majorité des cas ci-dessus.
7.2.2.4 Le principe de fixer la durée et l'échéance de l'interdiction d'entrée de raccordement par rapport la date de son prononcé (et non pas par rapport la date de l'échéance de l'interdiction d'entrée précédente) est également conforme aux principes posés par le Tribunal fédéral en matière d'expulsion pénale dans son ATF 146 IV 311. La Haute Cour a statué qu'en cas de concours de deux expulsions pénales, ces mesures ne devaient pas être exécutées cumulativement, mais selon le principe de l'absorption: l'expulsion de moindre durée au moment du prononcé du nouveau jugement pénal était absorbée par celle dont la durée était plus longue (cf. ATF 146 IV 311 consid. 3.5.1, 3.6.1 et 3.7). En l'occurrence, le Tribunal fédéral a retenu que l'expulsion pénale prononcée par l'autorité inférieure pour une durée de six ans ne pouvait pas être additionnée celle prononcée quelques mois auparavant par un autre tribunal pour une durée de cinq ans. Ces mesures ne devaient dès lors pas être exécutées l'une après l'autre, mais simultanément, ce qui avait pour conséquence que le recourant ne se voyait interdire un retour sur le territoire suisse que durant six ans (et non pas onze ans comme
l'aurait voulu l'autorité inférieure; ATF 146 IV 311 consid. 3.7).
7.2.3 Quant la question de savoir si l'interdiction d'entrée précédente et celle de raccordement doivent, prises ensemble, respecter la durée maximale de quinze ou vingt ans en cas de récidive fixée par la jurisprudence du Tribunal administratif fédéral (cf. ATAF 2014/20), le Tribunal ne s'est jamais prononcé sur cette question. Dans son arrêt F-1444/2014 précité, le Tribunal administratif fédéral l'a expressément laissée ouverte (cf. arrêt F-1444/2014 consid. 9.3 in fine [durée maximale de vingt ans]). Dans d'autres affaires, le Tribunal administratif fédéral ne s'est pas penché sur cette question, alors que cumulées, l'interdiction d'entrée précédente et celle de raccordement dépassaient la durée maximale de quinze ou vingt ans (cf. arrêts C-4017/2015 [interdiction d'entrée précédente de plus de neuf ans et interdiction de raccordement de dix ans]; F-5141/2014 [interdiction d'entrée précédente ramenée vingt ans par le DFJP et interdiction de raccordement de cinq ans]; F-2015/2016 [interdiction d'entrée précédente de dix ans et interdiction d'entrée de raccordement fixée neuf ans par le TAF]).
Dès lors que l'interdiction d'entrée précédente et celle de raccordement constituent des décisions qui sont indépendantes l'une de l'autre et qui, en principe, se fondent sur des complexes de faits différents, il y a lieu, de l'avis du Tribunal, de retenir, du moins pour la durée maximale de quinze ans, que celle-ci ne constitue pas une limite absolue devant être respectée par les deux mesures prises ensemble, mais comme une limite pouvant être, si les circonstances le justifient, dépassée (cf., en ce sens, Adank-Schärer/Antoniazza-Hafner, op. cit., nbp 28 p. 888). En d'autres termes, le fait que la personne concernée ait déj fait, par exemple, l''objet d'une interdiction d'entrée de trois ou quatre ans (par ex. pour séjour illégal et travail sans autorisation) n'empêche pas l'autorité inférieure, si les circonstances le justifient (la personne est, par ex., nouveau condamnée pour, cette fois, des infractions dirigées contre la vie ou l'intégrité corporelle), de prononcer une interdiction d'entrée de raccordement de douze ou treize ans. S'agissant de la question de savoir si, prises ensemble, les deux interdictions d'entrée peuvent dépasser la durée maximale de vingt ans prévue en cas de
récidive, celle-ci ne sera pas tranchée par le Tribunal in casu, dès lors [qu']elle n'est pas indispensable pour l'issue de la présente affaire.