94 I 286
42. Arrêt du 18 juin 1968 dans la cause Werren contre Etat de Vaud.
Regeste (de):
- Enteignung (Art. 5, 19 lit. b, 22 Abs. 1 und 69 EntG; Art. 684 ZGB).
- 1. Enteignung einer Dienstbarkeit; Anwendbarkeit der Vorschriften über die Teilenteignung; Anrechnung der Vorteile an die Nachteile (Erw. 3).
- 2. Verzinsung der Enteignungsentschädigung; Beginn und Zinsfuss (Erw. 4).
- 3. Ansprüche aus Nachbarrecht: Zuständigkeit der Enteignungsbehörden - unter Ausschluss des ordentlichen Richters - zum Entscheid darüber, ob das Eigentum überschritten und deshalb Entschädigung zu leisten ist (Änderung der Rechtsprechung) (Erw. 7).
- 4. Lärmeinwirkungen einer Autobahn; "Ortsgebrauch".
- a) im allgemeinen ist die Einwirkung nicht übermässig (Erw. 8a).
Regeste (fr):
- Expropriation (LEx. art. 5, 19 lettre b, 22 al. 1, 69; CC. art. 684).
- 1. Expropriation d'une servitude: applicabilité des règles relatives à l'expropriation partielle; compensation des inconvénients par les avantages (consid. 3).
- 2. Point de départ et taux de l'intérêt de l'indemnité d'expropriation (consid. 4).
- 3. Droits découlant des rapports de voisinage: compétence des autorités d'expropriation - à l'exclusion du juge ordinaire - pour décider s'il y a excès et, partant, droit à indemnité (changement de jurisprudence) (consid. 7).
- 4. Bruit provenant d'une autoroute; "usage local":
- a) en général, il n'y a pas d'excès (consid. 8a).
Regesto (it):
- Espropriazione (art. 5, 19 lett. b, 22 cpv. 1, 69 LEspr.; art. 684
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907
CC Art. 684 - 1 Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin.
1 Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. 2 Sont interdits en particulier la pollution de l'air, les mauvaises odeurs, le bruit, les vibrations, les rayonnements ou la privation de lumière ou d'ensoleillement qui ont un effet dommageable et qui excédent les limites de la tolérance que se doivent les voisins d'après l'usage local, la situation et la nature des immeubles.573 - 1. Espropriazione d'una servitù: applicabilità delle norme sull'espropriazione parziale; compensazione degli inconvenienti con i vantaggi (consid. 3).
- 2. Data da cui decorre l'interesse sull'indennità d'espropriazione e tasso di quest'ultimo (consid. 4).
- 3. Pretese derivanti dai rapporti di vicinato: competenza delle autorità d'espropriazione - ad esclusione del giudice ordinario - per decidere se c'è un eccesso e, di conseguenza, se esiste un diritto all'indennità (cambiamento della giurisprudenza) (consid. 7).
- 4. Rumore proveniente da una autostrada; "uso locale":
- a) in generale, l'immissione non è eccessiva (consid. 8a).
Sachverhalt ab Seite 287
BGE 94 I 286 S. 287
A.- Jean Werren était propriétaire en St-Jean, commune de Morges, d'une parcelle de 806 m2 sur laquelle a été construite, en 1954-1955, une villa locative de trois appartements. Ce fonds (no 1176) faisait partie d'un groupe de cinq parcelles (nos 1174 à 1178), alignées du nord-ouest au sud-est entre la route cantonale Morges-Lonay au nord et la ligne CFF Lausanne-Genève au sud. Sur les parcelles 1174 et 1175, au nord-ouest, et sur la parcelle 1178, au sud-est, des villas ont été édifiées, tandis que la parcelle 1177, au sud-est, n'était pas bâtie. A l'est de la propriété Werren quelques villas ont également été construites, tandis qu'à l'ouest s'étendait un terrain vague, au-delà duquel a été édifiée la fabrique d'horlogerie Richard, seule construction industrielle implantée dans le voisinage immédiat, mais dont l'activité n'est pas bruyante. L'immeuble Werren était intéressé comme fonds dominant et comme fonds servant à une servitude de restriction au droit de bâtir, constituée sur chacune des cinq parcelles précitées, et selon laquelle l'implantation de villas devrait se faire "en quinconce", servitude inscrite au registre foncier en 1950, sous le no 125 673.
B.- Le tracé définitif de l'autoroute Genève-Lausanne dans la région de Morges/St-Jean a été approuvé par le Conseil d'Etat du canton de Vaud le 6 mars 1961 et par le Département fédéral de l'intérieur le 29 mars 1961. Il emprunte les parcelles 1177 et 1178, situées au sud-est de l'immeuble Werren, qui ont été acquises par l'Etat de Vaud et dégrevées de la servitude 125 673. Le bâtiment construit sur la parcelle 1178 a été démoli. L'autoroute, large de 26 m et surélevée de 1,50 m environ par rapport au niveau naturel du sol, se trouve à une distance de 10 m de la limite sud-est de la propriété Werren et à 20 m environ de la façade de la villa. Elle longe les voies ferrées, entre celles-ci et la villa. A cet endroit, considéré comme "traversée" urbaine, elle est éclairée toute la nuit.
BGE 94 I 286 S. 288
C.- Jean Werren est intervenu lors de la mise à l'enquête pour faire valoir son droit à être indemnisé pour la suppression de la servitude foncière grevant les deux parcelles acquises par l'Etat et pour l'expropriation du droit découlant pour lui des rapports de voisinage (art. 684
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 684 - 1 Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
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1 | Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
2 | Sont interdits en particulier la pollution de l'air, les mauvaises odeurs, le bruit, les vibrations, les rayonnements ou la privation de lumière ou d'ensoleillement qui ont un effet dommageable et qui excédent les limites de la tolérance que se doivent les voisins d'après l'usage local, la situation et la nature des immeubles.573 |
Dans la discussion qui s'engagea entre les parties, l'Etat de Vaud déclara qu'ayant acquis la parcelle située à l'ouest de l'immeuble Werren, il la céderait à une société coopérative d'habitation pour la construction de deux bâtiments locatifs, en la grevant de deux servitudes, l'une interdisant toute industrie quelconque, l'autre fixant la ligne des constructions à 10 m de la limite du côté de l'immeuble Werren. La tentative de conciliation ayant échoué, Jean Werren maintint sa demande d'indemnité de 12 000 fr., représentant 10% de la valeur de sa propriété, estimée à 120 000 fr.
D.- La Commission fédérale d'estimation écarta les conclusions de Jean Werren, par décision du 21 juillet 1961 notifiée le 25 du même mois. Elle motiva sa décision comme il suit. en bref: La suppression de la servitude 125 673 n'entraîne pas de dommage, pour le propriétaire, du fait que l'autoroute n'est pas plus gênante pour la vue que des villas en quinconce, ou que des bâtiments industriels. En ce qui concerne l'atteinte aux droits de voisinage, l'autoroute sera peu bruyante en cet endroit, du fait de son tracé plane et rectiligne; elle ne provoquera pas plus de bruit que les 150 trains qui passent chaque jour sur la ligne CFF et dont certains s'arrêtent à la halte de St-Jean, ni que les bâtiments industriels qui auraient pu s'implanter sur les terrains situés à l'ouest, selon le plan d'aménagement communal. L'Etat s'engageant à constituer sur ces derniers terrains une servitude excluant la construction d'usines, le requérant bénéficie de cette situation. L'éclairage de l'autoroute ne sera pas plus intense que celui d'une autre voie publique à l'intérieur d'une agglomération, de sorte qu'en définitive le trafic de l'autoroute ne sera pas plus gênant pour la villa Werren que celui de n'importe quelle voie publique à l'intérieur d'une localité.
BGE 94 I 286 S. 289
E.- Par acte du 23 août 1961, Jean Werren recourut au Tribunal fédéral contre la décision de la Commission fédérale d'estimation. Il maintint sa demande d'indemnité pour les dommages résultant de la suppression de la servitude 125 673 et, subsidiairement, de l'atteinte aux rapports de voisinage. A son avis, cette servitude a non seulement pour effet de sauvegarder la vue au sud de la villa, mais également d'interdire, sur les parcelles situées au sud, la construction d'autres bâtiments que des villas, notamment d'établissements industriels incommodants et bruyants. Permettant la construction d'une autoroute particulièrement bruyante, l'extinction de la servitude cause à l'exproprié un dommage qu'il évalue à 12000 fr. En ce qui concerne l'atteinte aux droits de voisinage, le recourant argumente comme il suit: L'Etat de Vaud n'a pas contesté valablement l'atteinte portée aux droits garantis par l'art. 684
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 684 - 1 Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
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1 | Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
2 | Sont interdits en particulier la pollution de l'air, les mauvaises odeurs, le bruit, les vibrations, les rayonnements ou la privation de lumière ou d'ensoleillement qui ont un effet dommageable et qui excédent les limites de la tolérance que se doivent les voisins d'après l'usage local, la situation et la nature des immeubles.573 |
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx) LEx Art. 69 - 1 Si l'existence d'un droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée, la procédure est suspendue et il est fixé à l'expropriant un délai pour ouvrir action devant le juge ordinaire, à défaut de quoi le droit sera considéré comme existant. À la requête de l'une des parties, il peut être procédé à une estimation à titre éventuel. |
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1 | Si l'existence d'un droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée, la procédure est suspendue et il est fixé à l'expropriant un délai pour ouvrir action devant le juge ordinaire, à défaut de quoi le droit sera considéré comme existant. À la requête de l'une des parties, il peut être procédé à une estimation à titre éventuel. |
2 | Les parties peuvent toutefois, par une déclaration expresse, attribuer le jugement de la contestation à la commission. Le recours contre la décision de celle-ci est réservé (art. 77 ss).78 |
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx) LEx Art. 69 - 1 Si l'existence d'un droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée, la procédure est suspendue et il est fixé à l'expropriant un délai pour ouvrir action devant le juge ordinaire, à défaut de quoi le droit sera considéré comme existant. À la requête de l'une des parties, il peut être procédé à une estimation à titre éventuel. |
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1 | Si l'existence d'un droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée, la procédure est suspendue et il est fixé à l'expropriant un délai pour ouvrir action devant le juge ordinaire, à défaut de quoi le droit sera considéré comme existant. À la requête de l'une des parties, il peut être procédé à une estimation à titre éventuel. |
2 | Les parties peuvent toutefois, par une déclaration expresse, attribuer le jugement de la contestation à la commission. Le recours contre la décision de celle-ci est réservé (art. 77 ss).78 |
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 684 - 1 Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
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1 | Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
2 | Sont interdits en particulier la pollution de l'air, les mauvaises odeurs, le bruit, les vibrations, les rayonnements ou la privation de lumière ou d'ensoleillement qui ont un effet dommageable et qui excédent les limites de la tolérance que se doivent les voisins d'après l'usage local, la situation et la nature des immeubles.573 |
BGE 94 I 286 S. 290
28 janvier 1961 (date de son intervention dans la procédure d'enquête), - très subsidiairement à l'annulation de la décision attaquée et au renvoi de la cause à la Commission pour nouvelle instruction et nouvelle décision dans le sens des considérants. Il requiert en outre l'allocation d'une indemnité de 750 fr. - ou tout autre montant que justice dira - à titre de dépens de première instance et d'un montant semblable à titre de dépens de seconde instance. L'Etat de Vaud conclut au rejet du recours. Il produit l'acte du 15 septembre 1961 par lequel il a cédé la parcelle ouest à une société coopérative d'habitation et constitué sur cette parcelle deux servitudes, l'une y interdisant toute construction industrielle, l'autre fixant la ligne des constructions à 10 m de la limite, du côté de l'immeuble Werren.
F.- D'entente avec les parties, le Juge d'instruction a suspendu la procédure jusqu'à la mise en service de l'autoroute, au printemps 1964. Il ordonna le 15 avril 1964 une expertise technique portant sur le bruit, qu'il confia au professeur Furrer, de l'Ecole polytechnique fédérale. Dans son rapport déposé le 27 janvier 1965, l'expert arrive à la conclusion que le bruit provenant de l'utilisation de l'autoroute ne dépasse pas les niveaux sonores admissibles le long des routes à grand trafic à la sortie des villes ou dans de petites localités, tels qu'ils ont été fixés par la Commission fédérale d'experts pour la lutte contre le bruit.
G.- Par ordonnance du 4 octobre 1965, le Juge d'instruction chargea une commission de trois membres, composée de MM. Kratzer, notaire à Vevey, Zumstein, notaire à Lausanne et Piccard, architecte à Lausanne, d'examiner les répercussions de la construction de l'autoroute et de son utilisation sur la valeur vénale de l'immeuble Werren. Les trois experts déposèrent leur rapport le 28 août 1967. Ils répondirent, par un rapport complémentaire du 14 novembre 1967, aux questions supplémentaires posées par les parties. Ils arrivent à la conclusion que les inconvénients du trafic dépassent ce qui est normalement supportable et qu'un préjudice en résulte pour le propriétaire. Ils estiment que ce préjudice équivaut à 10% de la valeur vénale de la propriété, qu'il n'est pas exagéré de fixer à 120 000 fr., de sorte que la demande d'indemnité de 12 000 fr. est justifiée.
H.- Dans son projet d'arrêt du 28 décembre 1967, le Juge
BGE 94 I 286 S. 291
d'instruction a proposé d'admettre le recours en principe, c'est-à-dire de condamner l'Etat de Vaud à payer aux héritiers de Jean Werren - décédé en cours de procédure - une indemnité de 12 000 fr., portant intérêts à 41/2% dès la mise en service de l'autoroute, et de mettre tous les frais, y compris ceux des deux expertises s'élevant à 10 513 fr. 80, à la charge de l'intimé, qui devrait verser en outre 1000 fr. de dépens à l'autre partie pour les deux instances. L'Etat de Vaud a requis le Tribunal fédéral de prononcer un jugement, tandis que les héritiers de Jean Werren se sont soumis sans réserve au projet d'arrêt. Réformant la décision de la commission fédérale d'estimation, le Tribunal fédéral a accordé l'indemnité de 12 000 fr., en raison de la suppression de la servitude.
Erwägungen
Considérant en droit:
1. - Il n'est pas contesté que l'acquisition par l'Etat des deux parcelles 1177 et 1178 en vue d'y faire passer l'autoroute entraîne l'extinction de la servitude qui les grevait et dont bénéficiait entre autres l'immeuble Werren. Il n'est pas douteux non plus (on le verra plus loin) que l'exploitation de l'autoroute conformément à sa destination entraîne la suppression du droit, pour Werren, de se défendre en qualité de voisin contre les immissions excessives inévitables qui en proviennent. Ces droits (servitude et droit découlant des rapports de voisinage) peuvent faire l'objet d'une expropriation, laquelle consiste soit dans leur suppression, soit dans leur réduction (art. 5
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx) LEx Art. 5 - 1 Peuvent faire l'objet de l'expropriation les droits réels immobiliers, les droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage, en outre les droits personnels des locataires ou fermiers de l'immeuble à exproprier. |
|
1 | Peuvent faire l'objet de l'expropriation les droits réels immobiliers, les droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage, en outre les droits personnels des locataires ou fermiers de l'immeuble à exproprier. |
2 | Ces droits peuvent être supprimés ou restreints soit définitivement, soit temporairement. |
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx) LEx Art. 16 - L'expropriation ne peut avoir lieu que moyennant indemnité pleine et entière. |
BGE 94 I 286 S. 292
revanche, l'Etat de Vaud estime qu'ils n'ont pas tenu compte de certains éléments qui auraient dû les amener à une autre solution. Il fait état d'une part de certains facteurs qui, même sans la suppression des droits expropriés, auraient diminué la valeur qu'avait l'immeuble avant la construction de l'autoroute; il soutient d'autre part que certains faits de l'expropriant ont augmenté la valeur de l'immeuble, ou plus exactement empêché la dépréciation qu'auraient pu causer les facteurs précités. En d'autres termes, l'Etat prétend que les droits expropriés n'auraient pas permis à Werren de se défendre contre tout le dommage subi par son immeuble.
Il est vrai que la dépréciation de l'immeuble, telle qu'elle est fixée par les experts, ne correspond pas nécessairement au dommage provenant de l'expropriation des droits liés à cet immeuble. Le dommage n'équivaut qu'à la dépréciation que les droits expropriés auraient permis à Werren d'éviter s'ils n'avaient pas été supprimés. Il s'agit donc d'examiner, d'une part si les droits expropriés auraient permis à Werren d'éviter tout le dommage subi par son immeuble, et d'autre part si l'expropriant est en droit de demander la compensation - totale ou partielle - des inconvénients par les avantages résultant de son entreprise. Comme le recourant a fondé sa demande principalement sur l'extinction de la servitude, et subsidiairement seulement sur la suppression de ses droits découlant des rapports de voisinage, il y a lieu d'examinar séparément les deux questions ci-dessus au regard des deux prétentions, principale et subsidiaire.
I.
2. - En vertu de la servitude 125 673, le recourant pouvait exiger des propriétaires des parcelles 1177 et 1178 qu'ils se bornent à y construire des villas, et encore sur un emplacement déterminé. Contrairement à la manière de voir de la Commission d'estimation, cette servitude n'avait pas pour seul but d'assurer une vue plus ou moins étendue aux habitants de la maison du recourant. Constituée sur des terrains classés en zone industrielle, elle garantissait principalement le recourant contre toute utilisation des fonds servants qui serait plus incommodante que la présence de villas placées d'une certaine manière; elle le protégeait donc notamment contre l'édification de vastes maisons
BGE 94 I 286 S. 293
locatives ou d'installations industrielles, aussi bien que contre l'établissement d'une grande voie de communication. L'intimé prétend d'une part que la construction de deux villas sur les parcelles 1177 et 1178 aurait enlevé à la propriété Werren plus de vue et d'espace libre que ne le fait l'autoroute et lui aurait ainsi occasionné une certaine dépréciation; il soutient d'autre part que la servitude, frappant seulement les terrains au nord et au sud sur une largeur de 35 m, n'aurait pas permis à l'exproprié de se défendre contre les immissions incommodantes provenant d'installations industrielles qui se seraient implantées en dehors de l'assiette de la servitude, soit sur l'emplacement de l'autoroute, soit sur la parcelle située à l'ouest de l'immeuble Werren. La construction d'une villa sur chacune des parcelles expropriées n'était pas de nature à déprécier la propriété Werren, d'autant moins que leur implantation avait été fixée de façon à gêner le moins possible les autres constructions. La présence de ces deux villas pouvait bien plutôt ajouter à la valeur des autres immeubles, en contribuant à donner au quartier un certain caractère résidentiel. Quant aux installations industrielles bruyantes et incommodantes qui auraient pu s'édifier en dehors de l'assiette de la servitude, notamment sur l'emplacement de l'autoroute et sur la parcelle ouest, il faut admettre avec les experts qu'une telle implantation n'était rien moins que certaine. Si les terrains en question sont juridiquement classés en zone industrielle, la présence de plusieurs maisons d'habitation confère en fait à cette région le caractère de zone mixte, dans laquelle seules des installations industrielles peu incommodantes auraient pu être autorisées, comme c'est le cas de la fabrique d'horlogerie Richard, seule industrie qui y soit implantée pour le moment. Or la présence de telles installations n'eût guère nui à l'immeuble Werren, qui est une construction simple et modeste. Il faut relever d'autre part que la parcelle à l'ouest aurait très bien pu servir aussi à l'habitation, une telle utilisation étant autorisée par l'art. 46 du règlement communal des constructions; sachant que le précédent propriétaire était une société anonyme qui, au moment de sa constitution en vue de l'acquisition de la parcelle, avait pris le nom de "Cité gracieuse SA", on peut penser que cette dernière éventualité avait tout autant de chance de se réaliser que la première. Il n'y a donc pas lieu
BGE 94 I 286 S. 294
de retenir cet élément comme facteur de réduction de la valeur vénale de l'immeuble Werren. On peut également négliger l'éventualité où l'autoroute se serait construite plus au sud, sans mettre à contribution les parcelles grevées de la servitude: en raison de la présence des voies CFF immédiatement au sud des deux parcelles, cette solution n'aurait pas été possible, à moins que l'autoroute ne passe au sud de la voie ferrée; mais alors l'immeuble Werren, plus éloigné, n'aurait pas subi de dépréciation, aux dires des experts. De même, on peut se dispenser d'examiner la solution d'une autoroute construite au-dessus de la voie ferrée: en effet, rien ne permet de supposer qu'une telle éventualité se serait produite.
En définitive, l'examen des différentes situations qui auraient pu se présenter sans la suppression de la servitude et la construction de l'autoroute ne permet pas de conclure qu'une dépréciation de l'immeuble Werren serait de toute façon intervenue. On peut donc admettre que la servitude expropriée aurait permis à son bénéficiaire d'éviter tout le dommage subi par son immeuble du fait de la construction et de l'utilisation de l'autoroute.
3. - Peut-on tenir compte des faits de l'expropriant qui auraient, selon lui, réduit le dommage causé à l'immeuble, ou plus exactement empêché la dépréciation qui aurait pu se produire en raison des facteurs considérés sous le point 2 ci-dessus? Pour répondre à cette question, il faut examiner la portée de l'art. 22 al. 1
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx) LEx Art. 22 - 1 En cas d'expropriation partielle, il n'est pas accordé d'indemnité de dépréciation pour la partie restante, lorsque la dépréciation se trouve compensée par des avantages particuliers résultant de l'entreprise de l'expropriant. |
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1 | En cas d'expropriation partielle, il n'est pas accordé d'indemnité de dépréciation pour la partie restante, lorsque la dépréciation se trouve compensée par des avantages particuliers résultant de l'entreprise de l'expropriant. |
2 | Par contre, il est tenu compte du dommage résultant de la perte ou de la diminution d'avantages influant sur la valeur vénale et que la partie restante aurait, selon toute vraisemblance, conservés s'il n'y avait pas eu d'expropriation. |
BGE 94 I 286 S. 295
dépendance économique avec le fonds dominant: sa suppression entraîne une diminution de valeur de celui-ci; l'indemnité à payer pour sa suppression se détermine en fonction du dommage subi par la propriété, lequel se calcule par comparaison de la valeur vénale de l'immeuble avant et après la suppression de la servitude. Il faut en conclure que, même si la servitude est expropriée en totalité, les règles relatives à l'expropriation partielle peuvent s'appliquer, notamment les art. 12, 19 lettre b et 22. Ainsi l'on pourrait tenir compte, en l'espèce, des avantages particuliers résultant de l'entreprise de l'expropriant.
b) Aux dires de l'intimé, les avantages particuliers consisteraient en ceci: la parcelle Werren, qui était aussi fonds servant, est elle-même libérée de la servitude à l'égard des deux parcelles 1177 et 1178; la présence de l'autoroute exclut la possibilité de construire des villas sur ces deux parcelles et des installations industrielles en dehors de l'assiette de la servitude, de sorte que la propriété Werren jouit ainsi d'une vue plus étendue et d'espaces libres plus vastes; la constitution de deux servitudes sur la parcelle située à l'ouest garantit la propriété Werren contre la présence d'installations industrielles incommodantes qui auraient pu s'implanter jusqu'à la limite de la propriété. Il en résulte une augmentation de valeur qui compense la dépréciation occasionnée par le trafic de l'autoroute; en d'autres termes, l'entreprise de l'expropriant empêche la survenance de certains faits (énumérés sous consid. 2 ci-dessus) qui auraient déprécié la propriété Werren. On peut douter qu'il s'agisse en l'espèce d'avantages particuliers pour la propriété Werren, et que ces avantages - tout au moins dans le troisième cas - proviennent bien de l'entreprise de l'expropriant, c'est-à-dire de la construction et de l'exploitation de l'autoroute. La question peut cependant rester indécise, car les prétendus avantages n'en sont pas en réalité. En effet, comme on l'a vu ci-dessus (consid. 2), il n'est pas du tout prouvé, ni même vraisemblable, que la propriété Werren se serait dépréciée si les choses avaient suivi leur cours normal, sans l'expropriation de la servitude 125 673 et sans la construction de l'autoroute; d'autre part, si la vue dont on jouit de l'immeuble Werren est plus vaste sans la présence de deux villas au sud, elle est certainement moins agréable en raison de l'autoroute. Ainsi l'entreprise de l'expropriant et les diverses mesures prises par lui n'ont empêché que des dommages très
BGE 94 I 286 S. 296
hypothétiques; on ne peut donc pas dire qu'elles ont procuré à la propriété Werren des avantages compensant sa dépréciation.
4. - Ayant admis que la servitude expropriée aurait permis à Werren d'éviter tout le dommage provenant de l'autoroute et que l'entreprise de l'expropriant n'a pas procuré à la propriété Werren des avantages qui devraient compenser la dépréciation, on doit conclure que l'exproprié a droit au montant total du dommage évalué par lui à 12 000 fr. et confirmé par les experts. Conformément à l'art. 76 al. 2
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx) LEx Art. 76 - 1 L'expropriant peut demander en tout temps d'être autorisé à prendre possession du droit ou à exercer celui-ci déjà avant le paiement de l'indemnité s'il prouve qu'à défaut l'entreprise serait exposée à un sérieux préjudice. Si le droit à exproprier est déjà exercé dans les faits sur un ouvrage existant, cette prise de possession anticipée est autorisée par la loi.82 |
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1 | L'expropriant peut demander en tout temps d'être autorisé à prendre possession du droit ou à exercer celui-ci déjà avant le paiement de l'indemnité s'il prouve qu'à défaut l'entreprise serait exposée à un sérieux préjudice. Si le droit à exproprier est déjà exercé dans les faits sur un ouvrage existant, cette prise de possession anticipée est autorisée par la loi.82 |
2 | Le président de la commission d'estimation statue sur la demande au plus tôt lorsque le titre d'expropriation devient exécutoire, en tout cas après avoir entendu l'exproprié et, s'il le faut, après une inspection spéciale des lieux.83 Il s'assure le concours de membres de la commission d'estimation s'il le juge nécessaire ou si leur participation est exigée par l'une des parties. |
3 | Dans la procédure devant le Tribunal administratif fédéral et devant le Tribunal fédéral, le juge instructeur statue sur la demande.84 |
4 | L'autorisation doit être accordée, à moins que la prise de possession ne rende l'examen de la demande d'indemnité impossible ou que cet examen ne puisse être assuré par des mesures de la commission telles que prise de photographies, d'esquisses. ...85 |
5 | L'exproprié peut demander que l'expropriant soit astreint à fournir préalablement des sûretés d'un montant convenable ou à verser des acomptes, ou à l'une et l'autre de ces prestations simultanément. Le président de la commission d'estimation statue sur la demande, seul ou en faisant appel aux membres de la commission d'estimation. Les acomptes sont répartis conformément à l'art. 94. Dans tous les cas, l'indemnité définitive porte intérêt au taux fixé par le Tribunal administratif fédéral dès le jour de la prise de possession et l'exproprié est indemnisé de tout autre dommage résultant de la prise de possession anticipée.86 |
6 | ...87 |
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx) LEx Art. 76 - 1 L'expropriant peut demander en tout temps d'être autorisé à prendre possession du droit ou à exercer celui-ci déjà avant le paiement de l'indemnité s'il prouve qu'à défaut l'entreprise serait exposée à un sérieux préjudice. Si le droit à exproprier est déjà exercé dans les faits sur un ouvrage existant, cette prise de possession anticipée est autorisée par la loi.82 |
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1 | L'expropriant peut demander en tout temps d'être autorisé à prendre possession du droit ou à exercer celui-ci déjà avant le paiement de l'indemnité s'il prouve qu'à défaut l'entreprise serait exposée à un sérieux préjudice. Si le droit à exproprier est déjà exercé dans les faits sur un ouvrage existant, cette prise de possession anticipée est autorisée par la loi.82 |
2 | Le président de la commission d'estimation statue sur la demande au plus tôt lorsque le titre d'expropriation devient exécutoire, en tout cas après avoir entendu l'exproprié et, s'il le faut, après une inspection spéciale des lieux.83 Il s'assure le concours de membres de la commission d'estimation s'il le juge nécessaire ou si leur participation est exigée par l'une des parties. |
3 | Dans la procédure devant le Tribunal administratif fédéral et devant le Tribunal fédéral, le juge instructeur statue sur la demande.84 |
4 | L'autorisation doit être accordée, à moins que la prise de possession ne rende l'examen de la demande d'indemnité impossible ou que cet examen ne puisse être assuré par des mesures de la commission telles que prise de photographies, d'esquisses. ...85 |
5 | L'exproprié peut demander que l'expropriant soit astreint à fournir préalablement des sûretés d'un montant convenable ou à verser des acomptes, ou à l'une et l'autre de ces prestations simultanément. Le président de la commission d'estimation statue sur la demande, seul ou en faisant appel aux membres de la commission d'estimation. Les acomptes sont répartis conformément à l'art. 94. Dans tous les cas, l'indemnité définitive porte intérêt au taux fixé par le Tribunal administratif fédéral dès le jour de la prise de possession et l'exproprié est indemnisé de tout autre dommage résultant de la prise de possession anticipée.86 |
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BGE 94 I 286 S. 297
II.
5. - Le recours devant être admis en principe en raison de la radiation de la servitude, il n'est plus indispensable de se prononcer sur l'atteinte aux droits de voisinage, invoquée à titre subsidiaire par le recourant. Toutefois, non seulement cette question a fait l'objet d'une expertise longue et coûteuse, mais sa solution intéresse les commissions d'estimation aussi bien qu'un grand nombre d'expropriants et d'expropriés. Dès lors, bien qu'habituellement le Tribunal fédéral ne statue pas sur les problèmes qui peuvent rester indécis, il estime opportun de déroger ici à la règle. Il a d'autant plus de raison de sortir de sa réserve que, dans les affaires d'expropriation, il joue en vertu de l'art. 63
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx) LEx Art. 63 - Le Tribunal administratif fédéral assume les tâches et exerce les compétences suivantes: |
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a | il assure la surveillance de la gestion administrative des commissions d'estimation et de leurs présidents; |
b | il peut demander des rapports ponctuels ou périodiques aux présidents et aux commissions; |
c | il remplit les tâches visées aux art. 59ter et 59quater; |
d | il assure le versement des indemnités ou des rémunérations aux membres des commissions d'estimation et aux collaborateurs de leurs secrétariats. |
6. - En vertu des art. 684
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 684 - 1 Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
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1 | Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
2 | Sont interdits en particulier la pollution de l'air, les mauvaises odeurs, le bruit, les vibrations, les rayonnements ou la privation de lumière ou d'ensoleillement qui ont un effet dommageable et qui excédent les limites de la tolérance que se doivent les voisins d'après l'usage local, la situation et la nature des immeubles.573 |
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 679 - 1 Celui qui est atteint ou menacé d'un dommage parce qu'un propriétaire excède son droit, peut actionner ce propriétaire pour qu'il remette les choses en l'état ou prenne des mesures en vue d'écarter le danger, sans préjudice de tous dommages-intérêts. |
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1 | Celui qui est atteint ou menacé d'un dommage parce qu'un propriétaire excède son droit, peut actionner ce propriétaire pour qu'il remette les choses en l'état ou prenne des mesures en vue d'écarter le danger, sans préjudice de tous dommages-intérêts. |
2 | Lorsqu'une construction ou une installation prive l'immeuble voisin de certaines de ses qualités, le propriétaire ne peut être actionné que si les dispositions régissant la construction ou l'installation en vigueur lors de leur édification n'ont pas été respectées.560 |
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx) LEx Art. 5 - 1 Peuvent faire l'objet de l'expropriation les droits réels immobiliers, les droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage, en outre les droits personnels des locataires ou fermiers de l'immeuble à exproprier. |
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1 | Peuvent faire l'objet de l'expropriation les droits réels immobiliers, les droits résultant des dispositions sur la propriété foncière en matière de rapports de voisinage, en outre les droits personnels des locataires ou fermiers de l'immeuble à exproprier. |
2 | Ces droits peuvent être supprimés ou restreints soit définitivement, soit temporairement. |
BGE 94 I 286 S. 298
allée au-delà des compétences que lui confère l'art. 69
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx) LEx Art. 69 - 1 Si l'existence d'un droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée, la procédure est suspendue et il est fixé à l'expropriant un délai pour ouvrir action devant le juge ordinaire, à défaut de quoi le droit sera considéré comme existant. À la requête de l'une des parties, il peut être procédé à une estimation à titre éventuel. |
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1 | Si l'existence d'un droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée, la procédure est suspendue et il est fixé à l'expropriant un délai pour ouvrir action devant le juge ordinaire, à défaut de quoi le droit sera considéré comme existant. À la requête de l'une des parties, il peut être procédé à une estimation à titre éventuel. |
2 | Les parties peuvent toutefois, par une déclaration expresse, attribuer le jugement de la contestation à la commission. Le recours contre la décision de celle-ci est réservé (art. 77 ss).78 |
7. - L'art. 69 al. 1
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx) LEx Art. 69 - 1 Si l'existence d'un droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée, la procédure est suspendue et il est fixé à l'expropriant un délai pour ouvrir action devant le juge ordinaire, à défaut de quoi le droit sera considéré comme existant. À la requête de l'une des parties, il peut être procédé à une estimation à titre éventuel. |
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1 | Si l'existence d'un droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée, la procédure est suspendue et il est fixé à l'expropriant un délai pour ouvrir action devant le juge ordinaire, à défaut de quoi le droit sera considéré comme existant. À la requête de l'une des parties, il peut être procédé à une estimation à titre éventuel. |
2 | Les parties peuvent toutefois, par une déclaration expresse, attribuer le jugement de la contestation à la commission. Le recours contre la décision de celle-ci est réservé (art. 77 ss).78 |
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx) LEx Art. 69 - 1 Si l'existence d'un droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée, la procédure est suspendue et il est fixé à l'expropriant un délai pour ouvrir action devant le juge ordinaire, à défaut de quoi le droit sera considéré comme existant. À la requête de l'une des parties, il peut être procédé à une estimation à titre éventuel. |
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1 | Si l'existence d'un droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée, la procédure est suspendue et il est fixé à l'expropriant un délai pour ouvrir action devant le juge ordinaire, à défaut de quoi le droit sera considéré comme existant. À la requête de l'une des parties, il peut être procédé à une estimation à titre éventuel. |
2 | Les parties peuvent toutefois, par une déclaration expresse, attribuer le jugement de la contestation à la commission. Le recours contre la décision de celle-ci est réservé (art. 77 ss).78 |
SR 711 Loi fédérale du 20 juin 1930 sur l'expropriation (LEx) LEx Art. 69 - 1 Si l'existence d'un droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée, la procédure est suspendue et il est fixé à l'expropriant un délai pour ouvrir action devant le juge ordinaire, à défaut de quoi le droit sera considéré comme existant. À la requête de l'une des parties, il peut être procédé à une estimation à titre éventuel. |
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1 | Si l'existence d'un droit faisant l'objet d'une demande d'indemnité est contestée, la procédure est suspendue et il est fixé à l'expropriant un délai pour ouvrir action devant le juge ordinaire, à défaut de quoi le droit sera considéré comme existant. À la requête de l'une des parties, il peut être procédé à une estimation à titre éventuel. |
2 | Les parties peuvent toutefois, par une déclaration expresse, attribuer le jugement de la contestation à la commission. Le recours contre la décision de celle-ci est réservé (art. 77 ss).78 |
BGE 94 I 286 S. 299
l'atteinte aux droits de voisinage, la commission d'estimation compétente "n'ayant qu'à fixer l'éventuelle indemnité qui pourrait être due"; c'était dire que la question du droit à l'indemnité relève de la juridiction du juge ordinaire (RO 83 II 544). Après s'être prononcée implicitement en sens contraire (arrêt Lugon du 26 juin 1925), la Chambre de droit public a adopté il y a quelques années la manière de voir de la IIe Cour civile (arrêt Siegenthaler du 9 juillet 1958, p. 5). En revanche, dans la séance plénière du 20 mars 1968, où elle a approuvé les rapports des commissions d'estimation, elle a contesté "mit aller Entschiedenheit" qu'il appartienne au juge ordinaire de statuer sur la violation du droit de voisinage, soit sur l'existence du droit à une indemnité. Cet avis se fonde sur l'idée que le juge civil n'est compétent que pour statuer sur les contestations relatives à l'existence d'un droit, et non pour examiner si et dans quelle mesure un tel droit est violé; celui qui conteste la violation d'un droit de voisinage n'en conteste pas l'existence elle-même. Si les deux points de vue opposés peuvent se justifier en théorie, la solution retenue récemment par la Chambre de droit public paraît préférable pour des raisons pratiques et doit être maintenue. En effet, la question de la violation du droit de voisinage, c'est-à-dire celle du droit à indemnité, ne peut être séparée raisonnablement de celle du montant de l'indemnité: pour déterminer s'il y a excès, il faut se prononcer sur la gravité de l'atteinte; mais il faut aussi examiner cette même question pour fixer le montant de l'indemnité. Il ne serait pas judicieux que deux autorités statuent sur le même point.
8. - La question de compétence étant élucidée, il y a lieu de se demander si, en raison de la circulation sur l'autoroute, le recourant est victime d'un excès qui fait naître en sa faveur le droit à une indemnité. Pour instruire utilement les commissions d'estimation, il ne suffit pas d'examiner la situation particulière du recourant. Il convient bien plutôt de se prononcer d'abord, d'une manière générale, sur les droits des voisins des routes publiques. a) Selon l'art. 684 al. 2
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 684 - 1 Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
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1 | Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
2 | Sont interdits en particulier la pollution de l'air, les mauvaises odeurs, le bruit, les vibrations, les rayonnements ou la privation de lumière ou d'ensoleillement qui ont un effet dommageable et qui excédent les limites de la tolérance que se doivent les voisins d'après l'usage local, la situation et la nature des immeubles.573 |
BGE 94 I 286 S. 300
Or en principe, conformément à l'opinion communément admise, les voisins d'une route ne sauraient prétendre être indemnisés en raison des inconvénients qui en résultent. "Die Expropriationsentschädigung - écrit le professeur OFTINGER - setzt folglich die Übermässigkeit der Immissionen im Sinne der privatrechtlichen Bestimmung Art. 684 ZGB voraus. Hieran fehlt es nun aber, was die von öffentlichen Strassen herrührenden Einwirkungen anlangt, im Normalfall deswegen, weil diese - Al. II/Art. 684 - durch,Lage und Beschaffenheit der Grundstücke'und'Ortsgebrauch'legitimiert werden, auch wenn sie noch so stark sind" (Schweizerisches Haftpflichtrecht II/2 p. 518; cf. GUISAN, JdT 1936 I 314; L'HUILLIER, RDS 1952 p. 90 a s.; KOLB, RDS 1952 p. 196 a et 198 a; WEGMANN, Das Gemeinwesen als Nachbar, p. 52 s.). Il est significatif aussi que, jusqu'à ces dernières années, les propriétaires Iésés par le trafic routier n'aient pas estimé opportun de réclamer des dommages-intérêts devant les tribunaux ou les autorités d'expropriation. Leur passivité s'explique d'ailleurs aisément. Celui dont le fonds a augmenté de valeur par suite de l'établissement ou de la correction d'une route serait mal venu à se plaindre des conséquences de ces travaux; faute d'avoir subi un dommage, il n'obtiendrait rien. En outre, le propriétaire qui devait prévoir l'extension du réseau routier et du trafic, par exemple celui qui a acquis un immeuble à l'intérieur ou dans la banlieue d'une agglomération, n'a pas lieu de demander une indemnité; selon la jurisprudence, il serait débouté (RO 40 I 455; arrêt Siegenthaler du 9 juillet 1958, p. 9). Bien plus, même s'ils subissent un préjudice effectif auquel ils ne pouvaient s'attendre, les voisins des routes publiques adoptent généralement la même attitude, que motivent sans doute des considérations d'intérêt public. L'augmentation constante du nombre des véhicules à moteur exige l'ouverture de nouvelles voies et l'agrandissement de celles qui existent déjà. Si les collectivités publiques étaient tenues de réparer tous les dommages qu'entraînent ces ouvrages indispensables, elles seraient dans la plupart des cas hors d'état de les entreprendre. Le principe posé vaut aussi pour les autoroutes, dont le trafic n'est généralement pas plus bruyant que celui des artères principales dans les localités et leurs abords immédiats. Il semble d'ailleurs s'être aussi imposé à l'étranger (cf. notamment deux arrêts allemands, l'un du Reichsgericht du 9 janvier 1939, publié
BGE 94 I 286 S. 301
au RGZ vol. 159 p. 137 ss., et l'autre du Bundesgerichtshof du 22 décembre 1967). b) La règle n'est cependant pas absolue. D'une part, celui qui s'est fié de bonne foi aux assurances d'une autorité pour acheter un immeuble ou construire un bâtiment mérite d'être protégé conformément à la jurisprudence (cf. notamment RO 88 I 148; de même 91 I 136). D'autre part, il faut réserver le cas où le dommage est à la fois spécial, imprévisible et grave: lorsque ces trois conditions sont réunies, l'octroi d'une indemnité se justifie. Bien que ces conditions puissent chevaucher dans une certaine mesure, il y a lieu de les examiner séparément pour en déterminer le sens.
9. - a) La condition de spécialité se justifie d'elle-même. Si le préjudice est normal, c'est qu'il est conforme à l'usage habituel et doit être toléré. Mais quand y a-t-il préjudice spécial? On peut envisager trois hypothèses. aa) Le préjudice peut être spécial en raison des immissions elles-mêmes: intensité particulière du bruit qui se dégage de la route, ou nocivité de certaines émanations. Il appartient à l'autorité d'expropriation d'examiner de cas en cas si le dommage est spécial. Mais s'il s'agit, par exemple, d'un immeuble situé dans les environs immédiats d'une agglomération et jouissant jusqu'ici d'une certaine tranquillité, son propriétaire ne peut se plaindre de l'augmentation du bruit aussi longtemps que les niveaux sonores admissibles le long des artères principales, tels qu'ils ont été fixés par la Commission fédérale d'experts pour la lutte contre le bruit, ne sont pas dépassés (cf. Rapport de 1963 au Conseil fédéral, p. 44). On ne saurait, sur ce point, partager l'avis du professeur OFTINGER (loc. cit., p. 518/9), selon lequel il y aurait excès toutes les fois qu'une route nouvelle s'ouvre dans une région à l'abri du trafic ou qu'une voie peu fréquentée est transformée en une artère de grande circulation; le droit à indemnité ne peut pas davantage découler du seul fait qu'une route nationale a été construite. Pour justifier un tel droit, il faut que des circonstances particulières s'ajoutent à celle qu'indique cet auteur. bb) Le caractère spécial du dommage peut également provenir du mode d'utilisation de son immeuble par l'exproprié: celui qui a ouvert par exemple une clinique pour maladies nerveuses dans une région écartée et tranquille subira un dommage spécial si le trafic d'une autoroute construite à proximité
BGE 94 I 286 S. 302
l'empêche de poursuivre l'exploitation de cette clinique et l'oblige à la transférer ailleurs. cc) Enfin, le préjudice peut être spécial en raison du mode d'implantation de l'ouvrage par rapport aux immeubles voisins. Les routes en viaduc, construites au-dessus du niveau naturel du terrain d'alentour, peuvent non seulement priver de vue et de soleil des maisons d'habitation, mais également provoquer des immissions excessives de poussière, des éclaboussures ou d'autres dommages encore. Il est vrai qu'en ce qui concerne la privation de vue et de soleil, on peut se demander s'il y a excès au sens de l'art. 684
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 684 - 1 Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
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1 | Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
2 | Sont interdits en particulier la pollution de l'air, les mauvaises odeurs, le bruit, les vibrations, les rayonnements ou la privation de lumière ou d'ensoleillement qui ont un effet dommageable et qui excédent les limites de la tolérance que se doivent les voisins d'après l'usage local, la situation et la nature des immeubles.573 |
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 684 - 1 Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
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1 | Le propriétaire est tenu, dans l'exercice de son droit, spécialement dans ses travaux d'exploitation industrielle, de s'abstenir de tout excès au détriment de la propriété du voisin. |
2 | Sont interdits en particulier la pollution de l'air, les mauvaises odeurs, le bruit, les vibrations, les rayonnements ou la privation de lumière ou d'ensoleillement qui ont un effet dommageable et qui excédent les limites de la tolérance que se doivent les voisins d'après l'usage local, la situation et la nature des immeubles.573 |
BGE 94 I 286 S. 303
droit est subordonné. Aussi incombe-t-il aux autorités d'expropriation de le déterminer de cas en cas, en tenant équitablement compte de tous les éléments de l'espèce, notamment de l'importance du dommage et de sa relation avec la valeur de l'immeuble déprécié. Le caractère de gravité devrait être en tout cas dénié si le dommage n'atteint pas un certain montant ou un certain pourcentage, qui ne peuvent cependant être déterminés une fois pour toutes. d) Les règles posées ci-dessus ne s'appliquent pas seulement au cas où, sans être privé d'une partie de son terrain, le propriétaire se borne à faire valoir un droit découlant des rapports de voisinage, mais aussi dans l'éventualité où, sa propriété ayant été amputée, il invoque ces mêmes rapports pour obtenir réparation du dommage causé par des immissions excessives à la parcelle restante.
10. - Si l'on applique au cas Werren les considérants précédents, on observe que la condition de spécialité n'est pas remplie. L'immeuble du recourant est situé dans une zone industrielle, aux environs immédiats d'une agglomération de moyenne importance, et à proximité d'une voie ferrée. Or il ressort de l'expertise Furrer que le bruit de l'autoroute, mesuré depuis la villa, ne dépasse pas les niveaux sonores admissibles au bord d'une artère principale. En outre, étant donnée la situation de l'immeuble, son propriétaire devait s'attendre à une augmentation du trafic et du bruit. Même si un certain caractère de spécialité pouvait résulter du fait que l'autoroute est surélevée de 1,50 m par rapport au niveau naturel du sol, la dépréciation qui en découle est certainement minime; elle ne représente qu'une fraction réduite du dommage de 12 000 fr. articulé par Werren pour justifier sa demande d'indemnité. Cette demande devrait donc être rejetée en tant qu'elle se fonde sur de prétendues immissions excessives contre lesquelles le propriétaire de l'immeuble déprécié aurait pu se défendre au moyen du droit dérivant des dispositions sur les rapports de voisinage.