S. 303 / Nr. 54 Uhrenindustrie (f)

BGE 79 I 303

54. Arrêt du 13 mars 1953 dans la cause Bourquin contre Département fédéral de
l'économie publique.

Regeste:
Art. 4 al. 1 lit. a AIH: Cette disposition légale est applicable par analogie
dans le cas où un termineur désire passer à la fabrication (consid. 2).
- Connaissances commerciales exigées de celui qui veut entreprendre la
fabrication (consid. 3).
Art. 4 al. 2 AIH; Lorsque le requérant ne possède pas les connaissances
commerciales requises, peut-on tenir compte, à titre de circonstances
spéciales justifiant l'autorisation, du contrat de travail de longue durée
passé avec un tiers qui, lui, possède ces connaissances? (consid. 4).
Art. 4, Abs. 1, lit. a UB gilt auch für den Termineur, der zur Fabrikation auf
eigene Rechnung übergehen will (Erw. 2)
- Die für die Eröffnung einer Uhrenfabrik erforderlichen kaufmännischen
Kenntnisse (Erw. 3)
Art. 4, Abs. 2: Kann von dem Erfordernis kaufmännischer Kenntnisse abgesehen
werden, wenn sich der Bewerber eine Arbeitskraft, die über diese Kenntnisse
verfügt, durch einen langjährigen Dienstvertrag sichert? (Erw. 4).
Art. 4 cp. 1 lett. a DISO: Questo disposto è applicabile per analogia anche
nel caso del «termineur» che intende dedicarsi alla fabbricazione (consid. 2).
- Conoscenze commerciali necessarie per l'apertura d'un'azienda orologiaia
(consid. 3).
Art. 4 cp. 2 DISO: Quando al richiedente mancano le conoscenze commerciali
necessarie si può tener conto, a titolo di circostanza speciale, del contratto
di lavoro di lunga durata stipulato con un terzo che possiede tali conoscenze?
(consid. 4).


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A. - André Bourquin, né en 1905, a suivi l'école primaire, puis le technicum à
La Chaux-de-Fonds, où il a fait pendant deux ans un apprentissage d'acheveur
d'échappements. De 1922 à 1931, il a travaillé en cette qualité chez son père,
qui exploitait un atelier de terminage - Il a été ensuite acheveur, visiteur
d'achevage, décotteur et horloger complet dans différentes fabriques
horlogerie jusqu'en 1949. Le 7 niai I 948, il a obtenu l'autorisation d'ouvrir
tin atelier de terminage et d'y occuper six ouvriers.
Le 23 janvier 1952, il a demandé au Département fédéral de l'économie publique
(le Départcment) l'autorisation d'ouvrir un atelier pour la fabrication de
montres à ancre et d'y occuper six ouvriers. Le 23 octobre 1952, le
Département a refusé de faire droit à sa requête, en bref par les motifs
suivants
Lorsqu'une entreprise passe du terminage à la fabrication, elle opère sa
transformation au sens de l'art. 3 al. 2 de l'arrêté fédéral du 22 juin 1951
(AIH). Seules les dispositions insérées sous lit. b et c de l'art. 4 al. 1 AIH
sont applicables à la transformation. Si l'on s'en tenait à la lettre de la
loi, il s'ensuivrait qu'il ne suffirait pas au termineur qui veut entreprendre
la fabrication de faire la preuve de ses capacités conformément à la lit. a.
Il serait, de ce fait, dans une situation moins favorable qu'un ouvrier qui
voudrait s'établir. C'est pourquoi il convient de traiter le passage du
terminage à la fabrication comme une demande d'ouverture d'une fabrique
d'horlogerie. Il faut donc examiner, en l'espèce, si le requérant remplit les
conditions posées sous l'art. 4 al. 1 lit. a AIH. Il a, sans aucun doute
possible, exercé une activité technique suffisante. En revanche, il n'a pas
exercé d'activité commerciale. C'est pourquoi il s'est assuré le concours d'un
tiers en la personne d'Ernest Jaton. Le Département a la faculté de prendre ce
fait en considération dans le cadre de l'art. 4 al. 2 AIH. Cependant, Jaton
n'a jamais travaillé dans une fabrique d'horlogerie et n'a ainsi pas établi
qu'il possède les connaissances requises.

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B. - Contre cette décision, Bourquin a formé, en temps utile, un recours de
droit administratif. Son argumentation se résume comme il suit:
Selon l'art. 4 al. 2 AIH, il suffit que le requérant possède les connaissances
techniques ou commerciales nécessaires. Cela est normal, car il est très
fréquent, dans les entreprises horlogères, qu'un commerçant s'adjoigne un
technicien ou vice-versa. Le recourant estime que Jaton est qualifié pour
diriger commercialement une petite entreprise de fabrication. Le commerce,
dans la branche horlogère, n'est pas spécialisé au point qu'une formation
spécifique soit indispensable. Un directeur commercial peut, en principe,
passer d'un genre de commerce à un autre, pourvu qu'il possède les
connaissances et les capacités d'ordre général. En outre, l'horlogerie est
réglementée avec tant de minutie par la Fédération horlogère i que les données
obligatoires pour tous les sociétaires restreignent considérablement les
initiatives personnelles et dictent à chacun la ligne de conduite i.
C. - Le Département conclut au rejet du recours, en bref par les motifs
suivants:
L'association d'un commerçant avec un technicien pour l'exploitation d'une
entreprise horlogère doit en principe être admise. Il y a alors une requête
collective des associés. Il faut distinguer de ce cas celui où un requérant
invoque les qualités professionnelles d'un tiers qu'il a l'intention
d'engager. Cette distinction se justifie par le rapport de subordination qui
existe entre l'employeur et l'employé et par le caractère normalement moins
solide et durable du contrat de travail comparé au contrat d'association. Pour
éviter qu'en période de prospérité il ne se crée des entreprises mal dirigées
qui risquent, en période de crise, d'avoir recours à des méthodes de
concurrence déloyale, il faut en principe exiger que l'exploitant lui-même ait
les capacités professionnelles requises, sur les points essentiels tout au
moins. En matière de fabrication, le Département estime que les connaissances
commerciales ne sont pas un point

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secondaire et qu'une lacune constatée chez le requérant dans ce domaine ne
peut donc être comblée par l'engagement d'un simple employé. Au surplus,
l'employé dont il s'agit en l'espèce, Ernest Jaton, n'a jamais eu d'activité
dans la fabrication de l'horlogerie et dans le commerce des montres, de sorte
qu'il ne possède pas, lui non plus, les connaissances commerciales requises.
Considérant en droit:
1.- Il s'agit, dans la présente espèce, d'une entreprise qui, après avoir
pratiqué le terminage, demande l'autorisation de se livrer dorénavant à la
fabrication des montres. Elle entend donc passer d'une branche de l'industrie
horlogère à l'autre, c'est-à-dire opérer sa transformation au sens de l'art. 3
al. 2 AIH. Elle a, pour ce faire, besoin d'un permis (art. 3 al. 1 AIH), que
le Département a la compétence de délivrer (art. 4 al. 4 AIH et art. 11 al. 1
de l'ordonnance d'exécution du 21 décembre 1951). La décision du Département,
sur ce point, peut être déférée au Tribunal fédéral par la voie du recours de
droit administratif de par l'art. 11 al. 1 AIH. Le présent recours est donc
recevable, car il remplit par ailleurs les conditions de forme que pose la
loi.
2.- La transformation d'une entreprise est réglée par les lit. b et e de
l'art. 4 al. 1 AIH. Mais il s'agit là de deux cas particuliers: premièrement
celui où la transformation a pour but l'exploitation d'une invention brevetée,
d'un nouveau procédé de fabrication ou d'une amélioration technique, et
secondement celui où la transformation est nécessaire pour que l'entreprise
reste viable. Ni l'une ni l'autre de ces deux hypothèses n'est donnée en
l'espèce. Bourquin demande donc à transformer son entreprise sans avoir aucune
des justifications que visent les lettres b et e de l'art. 4 al. 1 AIH. La loi
ne prévoit ce cas nulle part, de sorte qu'il appartient à la pratique et à la
jurisprudence de le régler dans le cadre de l'art. 4 al. 1 et 2 AIN.

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Il s'agit manifestement d'un cas analogue à celui de l'ouverture d'une
nouvelle entreprise avec cette différence que le requérait exploite déjà une
entreprise de la branche horlogère. Le requérant devra prouver qu'il remplit
les conditions posées par l'art. 4 al. 1 lit. a AIH.
3.- Selon les principes posés par le Tribunal fédéral dans son arrêt Thiébaud,
du 5 décembre 1952 (RO 781 46"), l'art. 4 al. 1 lit. a AIH exige en tout cas
que le requérant ait exercé, dans la branche où il veut ouvrir une entreprise,
une activité technique et commerciale suffisante et que, par cette activité et
éventuellement par d'autres moyens aussi, tels que les études faites, il ait
acquis les connaissances nécessaires pour assurer la bonne marche de
l'entreprise projetée. Pour chaque espèce d'entreprise, il y aura lieu
d'estimer quelles sont les connaissances nécessaires et de juger si le
requérant les possède. Il s'agit là de problèmes techniques dans la solution
desquels les décisions du Département ont pour le Tribunal fédéral la même
portée que l'avis d'un expert: elles ne le lient pas, mais il ne s'en écartera
pas sans nécessité.
Dans la présente espèce, il n'est pas contesté que Bourquin possède les
connaissances techniques requises pour exploiter une fabrique d'horlogerie.
Ses connaissances commerciales, en revanche, ont été jugées insuffisantes. Le
Département estime en effet et le Tribunal fédéral n'a aucune raison de
s'écarter de son avis sur ce point - que ces connaissances sont plus
importantes et doivent être plus étendues pour la fabrication que pour le
terminage. Effectivement, alors que le termineur ne travaille que pour
quelques clients, le fabricant doit se faire une clientèle en général beaucoup
plus étendue et spécialement à l'étranger, 95 % de la production suisse étant
exportée. Cela ne présente peut-être pas de difficultés exceptionnelles
actuellement, la demande de montres hors de Suisse étant très forte. Encore
faut-il avoir une connaissance approfondie des débouchés et du marché dans les
divers pays importateurs. Les connaissances et l'habileté commerciales

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prendraient dit reste une importance toute particulière en temps de crise.
4.- Le recourant, qui reconnaît lui-même l'avoir pas les connaissances
commerciales requises, entend comble cette lacune en s'adjoignant nu directeur
commercial eu la personne d'Ernest Jaton, avec lequel il a conclu un contrat
de travail pour dix ans. Le Tribunal fédéral a déjà dit à plusieurs reprises
que e est seulement dans le cadre de l'art. 4 al. 2 AIN que l'on pourrait
éventuellement tenir compte des connaissances d'un tiers que le requérait se
serait adjoint pour suppléer un défaut de ses connaissances propres (v.
notamment l'arrêt Thiébaud, dit 5 décembre 1952, précité).
L'art. 4 al. 2 AIN prévoit que l'autorisation pourra être accordée dans
d'autres cas que ceux qui sont fixés à l'al. 1. Pour que l'autorisation puisse
être accordée eu vertu de l'al. 2, il faut notamment et en tout cas que la
bonne marche de l'entreprise soit assurée. Ainsi, le requérant pourra recevoir
l'autorisation, même si, par ailleurs, il ne satisfait pas intégralement aux
conditions fixées par l'art. 4 al. 1 lit. a AIN. L'autorisation sera accordée
si des circonstances spéciales le justifient, sinon elle sera refusée. I!
appartient à la pratique et à la jurisprudence de définir ces circonstances
(arrêt Thiébaud). C'est à titre de circonstance spéciale que l'on pourrait
éventuellement tenir compte de l'engagement d'un tiers possédant les
connaissances commerciales qui feraient défaut au requérant. Le Département a
refusé d'en tenir compte, en l'espèce.
On peut se demander du point de vue du pouvoir d'examen du Tribunal fédéral
(art. 104 S. OJ) si, en définissant les circonstances spéciales qui justifient
l'application de l'art. 4 al. 2 AIH, l'autorité administrative tranche une
pure question de droit on si la loi lui accorde, sur ce point, une certaine
liberté d'appréciation. Cette question peut rester ouverte actuellement. Si la
décision de l'autorité administrative est fondée uniquement par des motifs de
droit, le Tribunal fédéral la revoit librement.

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Si, au contraire, l'autorité administrative dispose, pour décider, d'un
certain pouvoir d'appréciation, son pouvoir demeure cependant régi, dans une
certaine mesure, par des règles de droit dont le Tribunal fédéral peut revoir
l'application: notamment, dans le choix des facteurs déterminant 5 pour fixer
1 appréciation, l'administration doit se fonder sur le but et le système de
l'arrêté du 22 juin 1951.
Il n'est pas nécessaire de rechercher dans la présente espèce si, à défaut des
connaissances commerciales requises pour l'ouverture d'une fabrique
d'horlogerie, le requérant peut invoquer, à titre de circonstance spéciale
justifiant l'application de l'art. 4 al. 2 AIH, le contrat de travail de plus
ou moins longue durée conclu avec un tiers qui, lui, possède des connaissances
suffisantes. En effet on a vu plus haut que, pour assurer la bonne marche
d'une fabrique d'horlogerie, il faut exiger des connaissances commerciales
dans la branche elle-même, en particulier celles qui ont trait aux débouchés
et aux marchés étrangers. Or, il est constant que Jaton ne possède pas ces
connaissances plus que Bourquin, car il n'a jamais travaillé dans la
fabrication, et l'on voit pas qu'il ait pu s'instruire de quelque autre
manière.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral
Rejette le recours.
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 79 I 303
Date : 01. Januar 1953
Publié : 13. März 1953
Source : Bundesgericht
Statut : 79 I 303
Domaine : BGE - Verfassungsrecht
Objet : Art. 4 al. 1 lit. a AIH: Cette disposition légale est applicable par analogie dans le cas où un...


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