BGE 68 IV 97
19. Arrêt de la Cour de cassation pénale du 19 juin 1942 en la cause Steinmann
c. Ministère public du canton du Valais.
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Regeste:
Larcins; pluralité d'actes; plainte.
Faut-il additionner la valeur des divers objets dérobés? Consid. 2.
Il appartient à la procédure cantonale de fixer les conditions de forme que
doit remplir la plainte. Consid. 3.
Délai de plainte, droit transitoire, art. 339 ch. l et 2 CPS. Consid. 3.
L'art. 29 CPS ne s'oppose pas à ce que l'ayant droit puisse porter plainte dès
avant que l'auteur de l'infraction ait été découvert. Consid. 3.
Aggravation de la peine de par l'art. 68 ch. 1 CPS en raison de la pluralité
des infractions. Consid. 4.
Entwendungen, Mehrheit von Handlungen, Strafantrag.
Muss der Wert der verschiedenen entwendeten Gegenstände zusammengezählt
werden? Erw. 2.
Es ist Sache des kantonalen Prozessrechtes, die formellen Erfordernisse des
Strafantrages festzusetzen. Erw. 3.
Frist zur Stellung des Strafantrages, Übergangsrecht, Art. 339 Ziff. 1 und 2
StGB. Erw. 3.
Art. 29 StGB hindert nicht, dass der Berechtigte schon Strafantrag stellen
darf, bevor der Täter bekannt ist. Erw. 3.
Strafschärfung gemäss Art. 68 Ziff. 1 StGB wegen Zusammentreffens von
strafbaren Handlungen. Erw. 4.
Sottrazioni di poca entità, querela penale.
Si debbono sommare i valori dei singoli oggetti sottratti? Consid. 2.
Spetta alla procedura cantonale di stabilire i requisiti di forma cui deve
soddisfare la querela penale. Consid. 3.
Termine per sporgere querela, diritto transitorio, art. 339 cifro 1 e 2 CPS.
Consid. 3.
L'art. 29 CPS non impedisce che l'avente diritto possa sporgere querela prima
che l'autore del reato sia stato scoperto. Consid. 3.
Aggravamento della pena in virtù dell'art. 68 cifra 1 CPS a motivo del
concorso di più reati. Consid. 4.
A. - Le 26 mars 1942, dame Maret, tenancière de la Brasserie valaisanne, à
Sion, ayant constaté que des boîtes de conserves, dont elle avait une
provision, lui avaient été
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soustraites, écrivit au Juge d'instruction en déclarant «déposer une plainte
contre inconnu pour vol». Le même jour, le Juge d'instruction ordonna
«l'ouverture d'une enquête d'office». Il entendit dame Maret qui répondit
affirmativement lorsqu'il lui demanda si elle confirmait sa «dénonciation» et
qui déclara en outre qu'elle entendait se porter partie civile, «mais sans
demander à intervenir en cause, laissant au juge le soin de fixer l'indemnité
à m'allouer et sollicitant la communication du jugement».
L'enquête révéla que Steinmann, qui prenait pension chez dame Maret, s'était
approprié en plusieurs fois, entre l'automne 1941 et le mois de mars 1942, les
conserves manquantes, soit 10 boîtes de viande, de sardines et de thon.
B. - Fondé sur ces faits et vu l'art. 137 CPS, qu'il déclara applicable à
titre de loi la plus favorable à l'accusé en ce qui concerne les infractions
commises avant le 1er janvier 1942, le Juge instructeur de Sion condamna
Steinmann, le 8 avril 1942, à deux mois de prison pour vol, la durée de
l'emprisonnement préventif subi devant être déduite de cette peine.
C. - Statuant sur appel interjeté par Steinmann, le Tribunal de Sion confirma
ce jugement, le 29 avril 1942, en bref par les motifs suivants: Le droit le
plus favorable à l'accusé est, en l'espèce, le CPS, qui s'applique donc à
l'exclusion de la loi valaisanne. Steinmann s'est rendu coupable de vol. Ce
délit se poursuit d'office, car on ne saurait admettre que l'accusé ait été un
proche ou un familier de dame Maret (art. 137 ch. 3; cf. art. 110 ch. 2 et 3
CPS). Il existe, du reste, une plainte valable de cette dernière. On ne peut,
enfin, admettre que les actes visés par l'accusation constituent de simples
larcins qui tomberaient sous le coup de l'art. 138 CPS, car «on se trouve en
présence d'une série de soustractions s'étendant de décembre 1941 à mi-mars
1942».
D. - Contre cet arrêt, Steinmann s'est, en temps utile, pourvu en nullité au
Tribunal fédéral en prenant les conclusions suivantes:
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«a) principalement:
Hans-Theodor Steinmann est absous, la poursuite dirigée contre lui étant
illégale, en l'absence d'une plainte, ou devant être mise à néant à partir du
retrait de la plainte (art. 137, ch. 3 CPS et 138, al. 1).
b) très subsidiairement:
La cause est renvoyée à l'autorité cantonale, pour qu'il soit statué à
nouveau; éventuellement, Hans-Theodor Steinmann est puni de la peine des
arrêts à fixer par la Cour de cassation (art. 138 al. 1 CPS).»
«Le Ministère public du canton du Valais conclut «au rejet du pourvoi avec
suite de frais».
Considérant en droit:
1.- .....
2.- Le recourant allègue que les actes dont il s'est rendu coupable
constituent, non pas des vols (art. 137 CPS), mais de simples larcins (art.
138 CPS). Le larcin se distingue du vol en ce qu'il porte sur une chose
mobilière de peu de valeur et en ce que l'auteur agit, non pour se procurer un
enrichissement illégitime, mais poussé par la détresse ou par la légèreté ou
pour satisfaire une envie.
On peut admettre, sur le fondement du dossier, que Steinmann, qui a consommé
les conserves aussitôt prises, les a dérobées non pas dans le dessein de
s'enrichir, mais pour satisfaire une envie, soit appétit, soit gourmandise.
Quant à la valeur des conserves, elle est peu importante, puisque, selon le
dossier, il s'agit de boîtes qui coûtaient chacune de 1 fr. à 2 fr. 50. Il n'y
aurait lieu d'additionner la valeur des diverses boîtes que s'il s'agissait
d'un délit successif. Il suffit de constater que tel n'est point le cas en
l'espèce, sans préjuger la question de savoir dans quelle mesure la catégorie
des délits successifs doit être maintenue sous l'empire du CPS qui, du reste,
ne la définit ni ne la mentionne expressément. En effet, conformément à la
jurisprudence antérieure du Tribunal fédéral, le délit successif se définirait
comme la répétition identique ou analogue d'actes délictueux qui lèsent le
même genre d'intérêts protégés par le droit et procèdent d'une décision
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unique (RO 56 I 78 et 315). Or, il n'y a pas eu, en l'espèce, de décision
unique; rien ne permet de croire que Steinmann ait eu dès le début l'intention
de s'approprier à plusieurs reprises des boîtes de conserves au détriment de
dame Maret. Le Tribunal de Sion lui-même exclut l'existence d'une telle
intention. Quant au Ministère public du canton du Valais, il nie, dans sa
réponse au pourvoi, qu'il ait pu s'agir d'un délit successif. Si, néanmoins,
le juge cantonal a estimé que les actes de Steinmann tombaient sous le coup
des prescriptions relatives au vol, c'est qu'à son avis la répétition de ces
actes empêche d'admettre qu'il s'agisse de simples larcins. Cette opinion,
cependant, ne trouve aucun fondement dans le CPS.
3.- Selon l'art. 138 CPS, le larcin ne se poursuit que sur plainte. Le
Tribunal de Sion a tenu pour une plainte la lettre que dame Maret a adressée,
le 26 mars 1942, au Juge instructeur de Sion. Le Tribunal fédéral ne peut
examiner si c'est à juste titre, parce que sa connaissance se borne à
l'application du droit fédéral et qu'il appartient à la procédure pénale
cantonale de fixer les conditions de forme que doit remplir la plainte. Il
importe peu, du reste, qu'après avoir été saisi d'une plainte valable, le juge
ait poursuivi l'enquête d'office; l'efficacité de la plainte ne pouvait être
mise en question du simple fait que le magistrat instructeur a estimé par
erreur qu'il s'agissait, en l'espèce, d'un délit se poursuivant d'office.
Quant au délai pour porter plainte, l'art. 339 ch. 1 CPS prévoit qu'il se
calcule «d'après la loi en vigueur au moment de l'infraction». Dans la mesure
où il s'agit, en l'espèce, d'infractions commises après le 1er janvier 1942,
c'est donc le CPS qui s'applique, dont l'art. 29 a la teneur suivante: «Le
droit de porter plainte se prescrit par trois mois. Le délai court du jour où
l'ayant droit a connu l'auteur de l'infraction». Lorsque dame Maret a porté
plainte, le 26 mars 1942, l'auteur des larcins dont elle avait été victime
n'était pas encore connu, mais sa plainte n'en était pas moins valable.
Contrairement à ce que les
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commentaires semblent admettre (THORMANN V. OVERBECK ad art. 29 n. 1, LOGOZ ad
art. 29 n. 2), le texte de la loi ne s'oppose pas à ce que l'ayant droit
puisse porter plainte dès avant que l'auteur de l'infraction ait été
découvert: Il ne fixe pas le moment à partir duquel la plainte peut être
déposée, mais seulement le moment à partir duquel le lésé doit agir s'il ne
veut pas voir son droit s'éteindre. On ne peut, du reste, admettre que le
législateur ait voulu exclure la plainte contre inconnu. En effet, cette
solution ne permettrait aux organes de la police judiciaire d'intervenir
qu'après la découverte du délinquant. La recherche de ce dernier incomberait
ainsi à l'ayant droit, lequel, à titre de personne privée, ne dispose jamais
des moyens d'investigation qui assurent, en général, le succès des enquêtes
pénales. On ne saurait objecter que l'institution des délits qui ne se
poursuivent que sur plainte a pour but, en général, de permettre à l'ayant
droit d'éviter l'ouverture d'une enquête pénale lorsqu'à son avis une telle
enquête porterait préjudice à ses intérêts, et qu'il ne peut en juger avant de
connaître l'auteur du délit. Une telle objection demeurerait sans portée,
parce qu'il est loisible à l'ayant droit de retirer éventuellement sa plainte
jusqu'au prononcé du jugement de première instance (art. 31 CPS). Il n'y a
donc aucun inconvénient à admettre que l'art. 29 CPS détermine uniquement le
jour où le droit de porter plainte prend fin et non pas le jour où ce droit
prend naissance. Il prend naissance, évidemment, dès la lésion. Par
conséquent, et pour les larcins commis après le 1er janvier 1942, dame Maret a
porté plainte en temps utile.
Les actes commis avant cette date tombent en revanche sous le coup de l'art.
339 ch. 2 CPS, car ils ne se poursuivent que sur plainte d'après le CPS,
tandis que, selon le CP val., ils doivent être poursuivis d'office à titre de
vol (art. 288
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 288 |
SR 311.0 Code pénal suisse du 21 décembre 1937 CP Art. 298 - Quiconque, par malveillance, enlève, dégrade ou outrage par des actes les emblèmes de souveraineté d'un État étranger arborés publiquement par un représentant officiel de cet État, notamment ses armes ou son drapeau, est puni d'une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d'une peine pécuniaire. |
SR 312.0 Code de procédure pénale suisse du 5 octobre 2007 (Code de procédure pénale, CPP) - Code de procédure pénale CPP Art. 38 Fixation d'un autre for - 1 Les ministères publics peuvent convenir d'un autre for que celui prévu aux art. 31 à 37, lorsque la part prépondérante de l'activité délictueuse, la situation personnelle du prévenu ou d'autres motifs pertinents l'exigent. |
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1 | Les ministères publics peuvent convenir d'un autre for que celui prévu aux art. 31 à 37, lorsque la part prépondérante de l'activité délictueuse, la situation personnelle du prévenu ou d'autres motifs pertinents l'exigent. |
2 | Afin de garantir les droits de procédure d'une partie et après que la mise en accusation a eu lieu, l'autorité de recours du canton peut, à la demande de cette partie ou d'office, déléguer le jugement à un autre tribunal de première instance compétent du canton, en dérogation aux dispositions du présent chapitre concernant les fors. |
le délai de plainte partait donc du 1er janvier 1942.
En définitive, il y a, en l'espèce, une plainte valable, comme l'exige l'art.
138 CPS. Cette plainte n'a pas été
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retirée: Par sa déclaration faite devant le juge de première instance, dame
Maret s'est bornée à se désister de ses conclusions civiles. Ce désistement
n'impliquait nullement une renonciation à la poursuite pénale.
4.- L'affaire doit être renvoyée au juge cantonal pour qu'il condamne le
recourant, non pas pour vol, mais pour larcin. S'agissant d'une pluralité de
délits, il y aura lieu d'aggraver la peine selon l'art. 68 ch. 1 CPS.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral
Admet le recours, annule l'arrêt attaqué et renvoie l'affaire au juge cantonal
pour que celui-ci se prononce à nouveau dans le sens des motifs.