S. 175 / Nr. 38 Obligationenrecht (f)

BGE 66 II 175

38. Arrêt de la Ire Section civile du 26 novembre 1940 dans la cause Decreuze
contre enfants Humbert-Droz.

Regeste:
Perte de soutien. La perte que constitue pour le veuf et pour les enfants le
décès de la femme et de la mère doit être calculée séparément pour chacun des
demandeurs et les indemnités fixées doivent aussi être allouées à chacun d'eux
personnellement.
Le juge doit tenir compte des faits survenus en cours d'instance (p. ex. du
décès de l'un des demandeurs).
Versorgerschaden, Art. 45 Abs. 3 OR. Der Schadenersatzanspruch der sich aus
dem Verlust der Ehefrau und Mutter für den Ehemann und die Kinder ergibt, muss
für jeden Anspruchsberechtigten gesondert berechnet und zugesprochen werden.
Während des Prozesses eingetretene Ereignisse (z.B. Tod des einen der Kläger)
hat der Richter zu berücksichtigen.
Perdita del sostegno. Il danno derivante al vedovo e ai figli dalla morte
della moglie e madre dev'essere calcolato separatamente per ciascun attore e
l'indennità va pure accordata a ciascuno di essi personalmente.
Fatti avvenuti nel corso del processo (p. es. la morte di uno degli attori)
vanno presi in considerazione dal giudice.


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Le 9 octobre 1938, vers neuf heures du soir, Emile Humbert-Droz et sa femme se
promenaient sur le trottoir de la route cantonale qui va de Boudry à
Colombier. Louis Decreuze circulait en automobile sur la chaussée. A un
certain moment, il perdit la maîtrise de sa voiture, monta sur le trottoir et
renversa les époux Humbert-Droz. Le mari s'en tira avec des lésions
corporelles, sa femme décéda peu après à l'hôpital.
Le Tribunal de Boudry, statuant sur les conclusions civiles du veuf et de ses
trois enfants, condamna le 8 août 1940 le défendeur Louis Decreuze à payer aux
trois enfants (le père est décédé le 5 septembre 1939) la somme de 12354 fr.
10 avec intérêt à 5 % dès le 24 janvier 1939.
La somme de 12354 fr. 10 comprend, entre autres, 4332 fr. pour perte de
soutien.
Le défendeur a recouru au Tribunal fédéral. Celui-ci a maintenu le chiffre
total fixé par le premier juge, mais a alloué à chacun des demandeurs
personnellement l'indemnité que le défendeur lui doit.
Extrait des motifs:
Perte de soutien. - Partant des principes jurisprudentiels du Tribunal
fédéral, le premier juge a apprécié en ces termes l'aide matérielle que la
défunte apportait à son mari, à ses filles Claudine, née en 1918, et Nelly,
née en 1919, ainsi qu'à son fils Gaston, né en 1924: «En tenant compte de
l'activité de la défunte dans son ménage et dans ses travaux de campagne, on
pourrait fixer la valeur de ses ressources à 100 fr. par mois ou 1200 fr. par
an, mais elle n'en affectait qu'une partie à l'entretien de son mari et de ses
enfants». En comparant les ressources du mari (360 fr. par mois) et celles de
la femme, poursuit-il, «on constate que celles de la femme sont du quart de
celles du mari, de sorte que c'est le quart de cette somme qui doit être
considéré comme dommage normal pour perte de soutien. Etant donné l'âge de la
victime au moment

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de l'accident (48 ans), le montant capitalisé d'après Piccard serait de 4332
fr.»
Ce calcul, trop sommaire, ne tient pas compte des circonstances. Le juge a
tout simplement capitalisé à 4% une rente de 300 fr. au décès d'une femme âgée
de 48 ans et dont la probabilité de vie est de 23,26 ans (tables 2 et 4 de
Piccard, facteur 1444). Or il saute aux yeux que le soutien n'aurait pas eu la
même durée pour tous; sa durée eût été au contraire différente pour chacun des
demandeurs.
Le mari est décédé 11 mois après sa femme. Le juge devait tenir compte de ce
fait bien qu'il se fût produit en cours d'instance, à plus forte raison même
qu'il doit, d'après la jurisprudence (RO 54 II p. 369 et sv.), prendre en
considération le nouveau mariage contracté au cours du procès par la veuve de
la victime de l'accident. La mort de la personne assistée fait évidemment
cesser le besoin d'assistance. Aussi, dans un cas où la veuve était décédée
deux ans après son mari mort accidentellement, le Tribunal fédéral n'a-t-il
alloué aux enfants héritiers de l'action pour perte de soutien que deux fois
la somme que le mari consacrait annuellement à sa femme (arrêt non publié
Schneider-Jetzer c. Maresia, du 9 décembre 1936, p. 9 et 10 lettre e; cf. RO
52 II p. 262; OFTINGER, Schweiz. Haftpflichtrecht I p. 130 in fine et 131; G.
GAUTSCHI, Bemerkungen zur Schadensberechnung bei Körperverletzung nach 46 CO,
SJZ 1940/ 41 p. 119 première colonne). Le défendeur a ainsi raison de limiter
à 11 mois la perte de soutien du mari Humbert-Droz et au même laps de temps le
droit de ses héritiers.
Quant aux enfants, ils n'auraient bénéficié personnellement du soutien de leur
mère que jusqu'à l'âge où ils auraient été en état de gagner complètement leur
vie. Cet âge peut être fixé en l'espèce à 20 ans, selon la jurisprudence du
Tribunal fédéral dans des affaires récentes, du moment qu'il n'y a pas de
motifs particuliers de s'arrêter à un autre âge (RO 65 II p.256 et les arrêts
cités; JdT 1935

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p. 102, 1940 p. 437). Claudine était majeure à la mort de sa mère; Nelly a
atteint sa majorité neuf mois après et Gaston aura 20 ans en 1944.
Le Juge de Boudry a évalué à 1200 fr. par an la valeur pécuniaire de
l'activité de Mme Humbert-Droz tant dans son ménage que dans son jardin. Cette
appréciation lie le Tribunal fédéral. En revanche, on ne saurait admettre le
raisonnement simpliste du juge suivant lequel, les ressources de la femme
atteignant le quart des ressources du mari, «c'est le quart de cette somme (de
1200 fr.) qui doit être considéré comme dommage normal pour perte de soutien».
Sans doute la comparaison entre le gain de la femme et celui du mari fournit
un élément d'appréciation. Mais il y en a d'autres, comme l'âge des enfants,
la mesure dans laquelle ils ont besoin d'être soutenus, celle dans laquelle la
mère les aurait vraisemblablement aidés, la question de savoir si elle était
économe ou dépensière, la situation financière des parents, etc. (RO 60 II p.
325; 57 II p. 180; JdT 1932 p. 39). Il n'est cependant pas nécessaire de
renvoyer l'affaire au premier juge pour qu'il procède à une nouvelle
appréciation de tous les facteurs entrant en considération. Les parties
proposent en effet des chiffres à peu près concordants. Dans ses conclusions
en cause, le défendeur écrit: «... il y a lieu de s'arrêter à un montant
intermédiaire et de fixer, ex aequo et bono, la diminution du revenu
consécutive au décès de Mme Humbert-Droz à 800 fr., dont 600 fr. profitent au
mari et 200 fr. au fils cadet, en âge de scolarité». Les demandeurs, de leur
côté, articulent le chiffre de 900 fr. dans leur recours-joint. C'est ce
dernier chiffre qui paraît le plus près de la réalité, vu les preuves
administrées. On peut se rallier à ce que les demandeurs font observer en ces
termes: «Etant donnés le milieu, la vie essentiellement laborieuse de
l'épouse, l'équilibre financier maintenu dans le ménage malgré les lourdes
charges financières qui lui incombèrent, on doit admettre, contrairement à
l'avis du juge, que Mme Humbert-Droz affectait à l'entretien de

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son mari et de ses enfants les 3/4 de ses ressources, ne consacrant à ses
dépenses personnelles, qui se réduisaient en fait à l'habillement, que le
quart de son gain».
Le tiers des 900 fr. peut être considéré comme affecté aux enfants. De ces 300
fr., rien ne revient à la fille aînée, majeure lors du décès de sa mère (9
octobre 1938). Nelly a droit à une part pendant neuf mois. Comme elle gagnait
60 fr. par mois, une somme de 100 fr. paraît suffisante pour cette courte
période. Le fils n'aurait donc pas tardé à bénéficier de la totalité des 300
fr. Le recourant admet lui-même la reversibilité. En partant de l'âge de 15
ans, on obtient un capital de 1350 fr., chiffre rond (table 10 de Piccard).
Quant au père, sa perte de soutien pendant 11 mois équivaut à 11/ 12 de 600
fr. = 550 fr. Les demandeurs sont habilités à réclamer cette somme, chacun
pour un tiers, en vertu de leur droit successoral (arrêts non publiés
Schneider c. Maresia, du 9 décembre 1936; Roy c. Morel, du 14 février 1939;
cf. RO 63 II p. 157).
Vgl. auch Nr. 34 und 45. - Voir aussi no 34 et 45.
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 66 II 175
Date : 01. Januar 1940
Publié : 25. November 1940
Source : Bundesgericht
Statut : 66 II 175
Domaine : BGE - Zivilrecht
Objet : Perte de soutien. La perte que constitue pour le veuf et pour les enfants le décès de la femme et...


Répertoire ATF
66-II-175
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
perte de soutien • mois • tribunal fédéral • tennis • veuve • quant • trottoir • veuf • automobile • enfant • preuve facilitée • mort • bénéfice • majorité • prestation en capital • recours joint • calcul • décision • vue • doute
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RSJ
194 S.0