BGE 65 I 13
4. Arrêt du 3 février 1939 dans la cause dame Magnus-Lévy contre Chambre des
recours du Tribunal cantonal vaudois et Speelmann.
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Regeste:
Convention de La Haye du, 12 juin 1902 pour régler la tutelle des mineurs.
La Convention ne concerne que la tutelle des mineurs proprement dite, à
l'exclusion de la puissance paternelle. L'art. 7, qui réserve aux autorités
locales le soin de prendre les mesures nécessaires dans tous les cas
d'urgence, ne s'applique lui-même qu'en rapport avec une tutelle.
C'est au regard du droit étranger qu'il faut examiner si la puissance do
l'époux survivant sur ses enfants équivaut à une véritable tutelle.
Haager Übereinkunft zur Regelung der Vormundschaft über Minderjährige vom 12.
Juni 1902.
Die Übereinkunft gilt nur für bevormundete, nicht auch für unter elterlicher
Gewalt stehende Minderjährige. Daher ist auch Art. 7, der den zuständigen
Ortsbehörden in allen dringenden Fällen die Sorge für den Erlass von
Massnahmen vorbehält, nur im Zusammenhang mit einer Vormundschaft anwendbar.
Ob die elterliche Gewalt des überlebenden Ehegatten über seine Kinder einer
eigentlichen Vormundschaft gleichkommt, beurteilt sich nach ausländischem
Recht.
Convenzione dell'Aia, del 12 giugno 1902, concernente la tutela dei minorenni.
La convenzione concerne soltanto la tutela dei minorenni propriamente dotta,
esclusa la potestà dei genitori. L'art. 7, che riserva allo autorità locali il
compito di prendere i provvedimenti necessari in tutti i oasi urgenti, si
applica soltanto in connessione con una tutela.
La questiono di sapere so la potestà del coniuge superstite sui propri figli
equivale ad una tutela vera e propria va esaminata alla stregua del diritto
estero.
A. - Hélène-Suzanne Speelmann, née en 1930, est la fille de Benjamin
Speelmann, citoyen hollandais, domicilié à Amsterdam. Comme les parents
vivaient en mauvaise intelligence, l'enfant a été, dès l'âge de 13 mois,
confiée à sa grand-mère maternelle, dame Magnus-Lévy, demeurant actuellement à
Lausanne. La mère de la fillette eRt
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décédée au cours du procès en divorce et le père s'est depuis remarié. La
grand-mère a tenté de faire priver Speelmann de la puissance paternelle par
les tribunaux hollandais, afin de garder l'enfant auprès d'elle; mais elle a
été déboutée dans toutes les instances, en dernier lieu par arrêt de la Cour
de cassation des Pays-Bas, du 13 juin 1938.
Peu avant ce prononcé, soit le 2 juin 1938, dame Magnus-Lévy, qui avait,
obtenu que l'enfant lui fût confiée jusqu'à droit connu sur l'action en
déchéance de la puissance paternelle, a requis le Juge de paix de Lausanne de
priver Benjamin Speelmann, en vertu de l'art. 284 CC, du droit de garde sur
son enfant. Elle soutenait que cette mesure s'imposait dans l'intérêt du
développement physique et moral de la jeune Hélène et elle invoquait l'art. 7
de la Convention de La Haye du 2 juin 1902 qui permet aux autorités locales,
en attendant l'organisation de la tutelle ainsi que dans tous les cas
d'urgence, de prendre les mesures nécessaires pour la protection de la
personne et des intérêts du mineur étranger.
Statuant le 7 juin 1938, la Justice de paix s'est déclarée incompétente,
considérant que l'enfant était sous la puissance de son père domicilié à
Amsterdam et que la Convention de La Haye ne s'appliquait pas aux mesures
tendant à la protection de l'enfant contre le détenteur de la puissance
paternelle.
Par arrêt du 24 août 1938, la Chambre des recours du Tribunal cantonal vaudois
a confirmé ce jugement. Elle estime que, supposé la Convention de La Haye
applicable, le juge ne pourrait prendre que des mesures provisoires conformes
à la législation hollandaise; qu'au reste cette Convention ne s'applique pas;
que, pour déterminer la législation applicable aux mesures à prendre contre un
père exerçant la puissance paternelle, il faut se reporter à la loi du 25 juin
1891 sur les rapports de droit civil des citoyens établis ou en séjour; qu'il
ressort de l'art. 9 de cette loi que le droit suisse ne peut être invoqué et
que la
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juridiction suisse n'est pas compétente lorsque le père habite l'étranger;
qu'il n'est pas nécessaire de rechercher si le juge aurait pu prendre des
mesures provisoires en application de l'art. 283 CC, la question de la
puissance paternelle étant définitivement réglée.
B. - Contre cet arrêt, dame Magnus-Lévy a formé
1) un recours de droit civil fondé sur l'art. 87 ch. 2 OJ et tendant à ce que
la Justice de paix fût déclarée compétente pour prendre les mesures
provisionnelles prévues par le CC en faveur de l'enfant Hélène Speelmann,
2) un recours de droit public tendant à l'annulation des jugements cantonaux
pour fausse application de la Convention de La Haye du 12 juin 1902 sur la
tutelle des mineurs.
Ce dernier recours est, en bref, motivé comme il suit:
Il s'agit de décider si l'art. 7 de la Convention de La Haye crée dans les cas
d'urgence un for spécial des autorités locales pour assurer la protection du
mineur. La Convention est en elle-même applicable: l'art. 7 ne vise pas
seulement les mesures provisoires à prendre en attendant l'organisation de la
tutelle, mais les mesures provisoires dans tous les cas d'urgence. C'est à
tort, d'autre part, que le Tribunal cantonal estime que la Convention ne
comprend pas la puissance paternelle ou la tutelle de l'un des époux. En
l'espèce, en tout cas, la puissance du père sur l'enfant est une véritable
tutelle. On ne saurait contester qu'il ne s'agisse d'un cas d'urgence.
C. - Par arrêt du 17 novembre 1938, la IIe Section civile a rejeté le recours
dont elle était saisie.
Considérant en droit:
1.- Le recours de droit civil n'était recevable que pour prétendue violation
de la loi fédérale de 1891 sur les rapports de droit civil des citoyens
établis ou en séjour. La Cour de droit public est exclusivement compétente
pour décider si les autorités cantonales ont violé la Convention
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de La Haye en déclinant leur juridiction (arrêt de la IIe Section civile,
consid. 1; RO 57 II 548).
2.- Le Tribunal cantonal a jugé que la Convention de La Haye du 12 juin 1902
ne réglait que la tutelle des mineurs proprement dite, à l'exclusion de la
puissance paternelle des parents. Ce point est hors de doute (MEILI et
MAMELOK, Internationales Privat- und Zivilprozessrecht, p. 274; SIMON, La
tutelle des mineurs, p. 22). La recourante ne le conteste pas sérieusement. En
revanche, elle soutient, d'une part, que l'art. 7 de la Convention prévoit une
«compétence en quelque sorte exorbitante» dépassant le cadre de la Convention,
d'autre part-supposé que le traité ne vise que la tutelle-, qu'en droit
hollandais la puissance du père survivant sur ses enfants constitue une
véritable tutelle.
3.- Selon l'art. 7 de la Convention, «en attendant l'organisation de la
tutelle, ainsi que dans tous les cas d'urgence, les mesures nécessaires pour
la protection de la personne et des intérêts d'un mineur étranger pourront
être prises par les autorités locales». La recourante pense que les cas
d'urgence visés par cette disposition peuvent être sans rapport avec une
tutelle. Cette thèse est contredite par l'intitulé même de la Convention,
conclue «pour régler la tutelle des mineurs n. Si l'art. 7 assimile au cas où
la tutelle n'est pas encore organisée tous les cas d'urgence-pour confier ici
comme là à d'autres autorités que celles du pays d'origine le soin de prendre
les mesures nécessaires-, cela ne signifie nullement que la Convention
envisage des cas d'urgence qui n'auraient aucun rapport avec l'institution et
l'administration d'une tutelle sur des mineurs. La disposition invoquée veut
simplement dire que les autorités locales doivent se saisir d'un cas urgent
non seulement lorsqu'une tutelle n'est pas encore instituée, mais aussi
lorsqu'elle l'est déjà.
Les extraits de doctrine et de jurisprudence cités par la recourante
n'autorisent pas une autre conclusion. Dans une réponse au Département de
justice du canton de St Gall,
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le Département fédéral de justice et police (BURCKHARDT, Droit fédéral, t. IV
no 1578) a en effet déclaré qu'au regard de l'art. 7
SR 210 Schweizerisches Zivilgesetzbuch vom 10. Dezember 1907 ZGB Art. 7 - Die allgemeinen Bestimmungen des Obligationenrechtes6 über die Entstehung, Erfüllung und Aufhebung der Verträge finden auch Anwendung auf andere zivilrechtliche Verhältnisse. |
Haye il y avait lieu d'appliquer à une étrangère, qui a avisé l'autorité de sa
grossesse, l'art. 311 al. 2
SR 210 Schweizerisches Zivilgesetzbuch vom 10. Dezember 1907 ZGB Art. 311 - 1 Sind andere Kindesschutzmassnahmen erfolglos geblieben oder erscheinen sie von vornherein als ungenügend, so entzieht die Kindesschutzbehörde die elterliche Sorge:419 |
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1 | Sind andere Kindesschutzmassnahmen erfolglos geblieben oder erscheinen sie von vornherein als ungenügend, so entzieht die Kindesschutzbehörde die elterliche Sorge:419 |
1 | wenn die Eltern wegen Unerfahrenheit, Krankheit, Gebrechen, Abwesenheit, Gewalttätigkeit oder ähnlichen Gründen ausserstande sind, die elterliche Sorge pflichtgemäss auszuüben; |
2 | wenn die Eltern sich um das Kind nicht ernstlich gekümmert oder ihre Pflichten gegenüber dem Kinde gröblich verletzt haben. |
2 | Wird beiden Eltern die Sorge entzogen, so erhalten die Kinder einen Vormund. |
3 | Die Entziehung ist, wenn nicht ausdrücklich das Gegenteil angeordnet wird, gegenüber allen, auch den später geborenen Kindern wirksam. |
tutelle ou de la curatelle, car en droit suisse la mère naturelle n'a pas
d'emblée la puissance paternelle sur son enfant (art. 326
SR 210 Schweizerisches Zivilgesetzbuch vom 10. Dezember 1907 ZGB Art. 326 - Endet die elterliche Sorge oder Verwaltung, so haben die Eltern das Kindesvermögen aufgrund einer Abrechnung dem volljährigen Kind oder seinem gesetzlichen Vertreter herauszugeben. |
renvoi à l'art. 7 de la Convention n'était qu'un motif auxiliaire de la
réponse départementale et de plus celle-ci ne saurait en aucun cas lier le
Tribunal fédéral. Le passage de l'ouvrage de MEILI et MAMELOK (p. 299) que
cite la recourante parle contre sa thèse; ces auteurs exposent que les mesures
de l'art. 7 peuvent être ordonnées avant que la tutelle soit organisée, mais
qu'elles peuvent aussi l'être après: c'est ce qui résulte du fait que la
disposition visée place sur le même pied les autres cas urgents. Il faut donc
toujours qu'il s'agisse d'une tutelle. SIMON (OP. cit. p. 134 ss) ainsi que
l'auteur de l'article paru dans la Schweiz. Juristen-Zeitung, 2 p. 255, ne se
prononcent pas dans un autre sens. Aussi bien le Tribunal cantonal n'a-t-il
pas entendu déclarer qu'après l'institution d'une tutelle les autorités du
lieu de résidence ne pourraient plus prendre des mesures provisoires, mais
qu'en l'espèce il ne s'agissait nullement de mesures urgentes à statuer avant
ou après l'institution d'une tutelle.
4.- La recourante reproche subsidiairement à la Cour cantonale d'avoir nié
qu'aux Pays-Bas la situation de l'époux survivant à l'égard de ses enfants
équivaille à une véritable tutelle. Mais, comme le reconnaît la recourante,
cette question doit être résolue au regard du droit hollandais, et non à la
lumière de la Convention de La Haye, en sorte que l'arrêt attaqué ne peut
avoir violé le traité. Ce ne serait donc que sous l'angle de l'arbitraire que
le Tribunal fédéral pourrait examiner si le Tribunal cantonal a sainement
appliqué le droit étranger. Or le grief d'arbitraire n'est même pas articulé.
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Voudrait-on cependant admettre qu'une fausse interprétation du droit
hollandais impliquât violation indirecte de la Convention de La Haye, que le
moyen soulevé ne serait pas fondé. L'art. 400 du Code civil hollandais
s'exprime en ces termes (traduction de Tripels):
«Après la dissolution du mariage par la mort de l'un des époux la tutelle des
enfants mineurs et non émancipés appartient de plein droit au survivant des
père et mère.»
L'art. 407 dispose que l'époux qui exerce cette tutelle doit, avant de
contracter un nouveau mariage, rendre des comptes. Pour désigner l'époux
survivant, le traducteur Tripels parle simplement de «père» ou de «mère» et
non pas, selon la citation de la recourante, de «père-tuteur» ou de
«mère-tutrice». Il est vrai que le code lui-même appelle le père «voogd»,
c'est-à-dire tuteur, et son office «voogdijschap», c'est-à-dire tutelle. Mais
on ne saurait s'en remettre à la terminologie de la loi; c'est le sens qui
importe. Or, à cet égard, on constate qu'à la mort de son conjoint l'époux
survivant devient d'emblée le tuteur de ses enfants, sans qu'il doive être
constitué comme tel. Ce système correspond à celui du droit suisse (art. 274
al. 3
SR 210 Schweizerisches Zivilgesetzbuch vom 10. Dezember 1907 ZGB Art. 274 - 1 Der Vater und die Mutter haben alles zu unterlassen, was das Verhältnis des Kindes zum anderen Elternteil beeinträchtigt oder die Aufgabe der erziehenden Person erschwert.334 |
|
1 | Der Vater und die Mutter haben alles zu unterlassen, was das Verhältnis des Kindes zum anderen Elternteil beeinträchtigt oder die Aufgabe der erziehenden Person erschwert.334 |
2 | Wird das Wohl des Kindes durch den persönlichen Verkehr gefährdet, üben die Eltern ihn pflichtwidrig aus, haben sie sich nicht ernsthaft um das Kind gekümmert oder liegen andere wichtige Gründe vor, so kann ihnen das Recht auf persönlichen Verkehr verweigert oder entzogen werden. |
3 | Haben die Eltern der Adoption ihres Kindes zugestimmt oder kann von ihrer Zustimmung abgesehen werden, so erlischt das Recht auf persönlichen Verkehr, sobald das Kind zum Zwecke künftiger Adoption untergebracht wird. |
la tutelle» (art. 7
SR 210 Schweizerisches Zivilgesetzbuch vom 10. Dezember 1907 ZGB Art. 7 - Die allgemeinen Bestimmungen des Obligationenrechtes6 über die Entstehung, Erfüllung und Aufhebung der Verträge finden auch Anwendung auf andere zivilrechtliche Verhältnisse. |
organisée, mais prend naissance de «plein droit». Au vu de l'art. 407
SR 210 Schweizerisches Zivilgesetzbuch vom 10. Dezember 1907 ZGB Art. 407 - Die urteilsfähige betroffene Person kann, auch wenn ihr die Handlungsfähigkeit entzogen worden ist, im Rahmen des Personenrechts durch eigenes Handeln Rechte und Pflichten begründen und höchstpersönliche Rechte ausüben. |
hollandais, la circonstance que Speelmann s'est remarié ne change rien à son
pouvoir; la recourante n'a pas prétendu qu'il n'eût pas remis des comptes et
qu'il fût ainsi déchu de ses droits. L'arrêt belge en la cause Eberhaert
(Recueil Kosters et Bellemans, p. 214) concerne la tutelle après divorce,
tandis qu'en l'espèce la mère de l'enfant est morte au cours de l'instance de
divorce. Il est vrai qu'un arrêt du Kammergericht allemand considère la
puissance de l'époux survivant comme une véritable tutelle (Recueil cité, p.
737); mais, sans compter que cet arrêt a été rendu dans d'autres
circonstances, il ne saurait aucunement lier le Tribunal fédéral.
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En conséquence, la Cour cantonale n'a pas violé la Convention de La Haye en
refusant de l'appliquer en l'espèce. Au demeurant, dès l'instant où l'action
de la recourante en déchéance de la puissance paternelle a été rejetée par les
tribunaux hollandais-sans doute parce que le père a été jugé digne d'exercer
sa puissance-, on ne voit pas comment les tribunaux suisses seraient en droit,
par voie de mesures provisionnelles, d'en décider autrement.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral
rejette le recours.