S. 268 / Nr. 48 Staatsverträge (f)

BGE 64 I 268

48. Arrêt du 30 septembre 1938 dans la cause S.A. pour l'industrie des métaux
contre Chambre des recours du Tribunal cantonal vaudois et Vereinigte
Aluminium A.-G.


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Convention germano-suisse du 2 novembre 1929 relative à la reconnaissance et à
l'exécution des décisions judiciaires et des sentences arbitrales.
Regeste:
1. Le créancier allemand qui refuse, en vertu de la législation allemande sur
les devises, d'accepter en paiement de son débiteur suisse une assignation sur
un débiteur allemand - alors que ce mode de règlement était convenu entre
parties -, est-il en droit, du point de vue de l'ordre public suisse (art. 4
al. 1er de la convention), d'opposer ce refus à son débiteur et de poursuivre
en Suisse le recouvrement de sa créance? Question laissée indécise (consid.
2).
2. Lorsqu'une défense de payer faite au débiteur étranger d'un créancier
suisse résulte non pas d'une mesure unilatérale de l'Etat du débiteur mais
d'un traité conclu par la Suisse avec cet Etat, le juge suisse doit tenir
compte de cette défense.
D'après les accords pour la compensation des paiements germano-suisses, le
règlement de tous les paiements s'opère, sous la réserve de certaines
exceptions, par l'intermédiaire de la Caisse allemande de compensation et de
la Banque nationale suisse. Pour effectuer, autrement que par le versement aux
caisses désignées, le paiement d'une créance visée par les accords, il faut
obtenir une autorisation spéciale des offices de devises (consid. 3).
3. Influence des restrictions découlant des accords sur la validité des
contrats passés antérieurement (consid. 4).

A. - Par lettre du 5 juillet 1934, l'intimée a accepté une commande
d'aluminium que lui avait faite la recourante. Le § 13 des conditions de vente
figurant au verso de la lettre désignait le Landgericht Cottbus comme lieu de
juridiction pour les deux parties. La recourante a, par lettre du 12 juillet
1934, confirmé à son tour, sous réserve de quelques précisions, son
acceptation des clauses du marché.
Un conflit ayant éclaté au sujet du paiement des fournitures, l'intimée a
obtenu du Landgericht Cottbus, le 22 juin 1936, un jugement par défaut
condamnant la recourante à lui payer les sommes litigieuses.

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B. - Le 25 novembre 1937, l'intimée a fait notifier un commandement de payer à
la recourante qui l'a frappé d'opposition. Devant le juge de mainlevée, la
débitrice a invoqué la réserve de l'ordre public figurant à l'art. 4 al. 1er
de la convention germano-suisse du 2 novembre 1929 relative à la
reconnaissance et à l'exécution de décisions judiciaires et de sentences
arbitrales. Elle argumentait comme il suit:
Elle est créancière d'avoirs en Allemagne à la suite de livraisons de
marchandises à l'Aluminiumwerk Tscheulin G.m.b.H., à Teningen (Baden). Elle a
offert à l'intimée, dont elle reconnaît être débitrice, d'acquitter sa dette
au moyen de sa créance sur la maison Tscheulin, mais l'office allemand des
devises de Karlsruhe, puis celui de Berlin, ont refusé d'autoriser le
transfert. A l'époque de ces décisions (1936), le jugement de Cottbus n'était
pas encore rendu. Il est contraire à l'équité et à l'ordre public suisse de
contraindre, en vertu de ce jugement, un débiteur suisse à payer avec de
l'argent suisse, dévalué entre temps, ce qu'il peut devoir à un créancier
allemand en Allemagne, alors que la législation allemande l'empêche d'utiliser
pour s'acquitter les avoirs qu'il possède en Allemagne. Le Tribunal fédéral a
d'ailleurs jugé que la législation allemande sur les devises est contraire à
l'ordre public suisse.
Le Président du Tribunal de Lausanne, puis, sur recours, la Chambre des
recours ont prononcé la mainlevée définitive de l'opposition. La Cour
cantonale relève que la jurisprudence invoquée par la recourante vise des
espèces diamétralement opposées à la présente, soit des cas dans lesquels la
législation allemande sur. les devises avait été déclarée contraire à l'ordre
public suisse dans la mesure où elle interdit à un débiteur allemand de payer
ses dettes à un créancier suisse. Cette jurisprudence ne saurait, d'après le
Tribunal cantonal, justifier le refus d'un débiteur suisse de payer en marks
la dette d'un créancier allemand. L'admission d'une théorie opposée
constituerait au contraire une violation de l'ordre public suisse.

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C. - La . A. pour l'industrie des métaux a formé contre cet arrêt un recours
de droit public pour violation de la Convention germano-suisse, en concluant
au maintien de son opposition. Elle fait valoir en résumé ce qui suit:
L'aluminium que l'intimée, depuis un certain temps déjà, livrait à la
recourante, était exclusivement destiné, selon le contrat de vente, à être
revendu à la société Tscheulin. Pour payer l'intimée, la recourante donnait
ordre à sa débitrice, la société Tscheulin, de payer ce qu'elle devait
directement à l'intimée. Elle procédait ainsi notamment en prévision des
difficultés que les autorités allemandes auraient pu lui faire si elle avait
voulu payer ou se faire payer depuis la Suisse. Ce mode de paiement constitue
ainsi une clause essentielle du contrat entre la recourante et l'intimée.
L'autorité allemande ne s'opposait pas au début à ces paiements. Brusquement,
l'office allemand des devises a interdit une semblable opération, estimant
qu'elle était contraire aux lois allemandes sur les devises. Le résultat de
cette décision serait qu'un Suisse qui achète et revend des marchandises à
l'intérieur de l'Allemagne devrait payer son créancier allemand en bon argent
suisse et attendre un paiement hypothétique de la part de son débiteur. Au
contraire, un Allemand qui aurait des dettes en Suisse pourrait, dans les
mêmes conditions, les payer en Suisse sans difficultés au moyen de ses
créances en Suisse. Il est difficile d'admettre que les accords de
compensation aient voulu consacrer une pareille inégalité. Ce que le
gouvernement suisse a voulu en signant ces accords, c'est faire passer toutes
les créances des exportateurs suisses en Allemagne par le «clearing» pour être
en quelque sorte échangées contre les créances des exportateurs allemands sur
la Suisse. En outre, grâce à l'excédent des importations suisses sur les
importations allemandes, des avoirs suisses immobilisés en Allemagne devaient
pouvoir être récupérés peu à peu. Mais les accords de compensation n'ont pas
pu privilégier les Allemands par rapport aux

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Suisses. Le créancier allemand qui poursuit son débiteur en Suisse dans les
conditions où le fait l'intimée doit être renvoyé à s'adresser aux autorités
de son pays pour obtenir le paiement de ce qui lui est dû. Le contraire aurait
pour conséquence qu'un Suisse ayant une dette en Allemagne, où il aurait en
même temps des avoirs, alors qu'il ne posséderait rien en Suisse, pourrait
être mis en faillite dans ce dernier pays. A plusieurs reprises, le Tribunal
fédéral a déclaré la législation allemande sur les devises incompatible avec
l'ordre public suisse. On doit en conclure que les décisions des offices de
devises de Karlsruhe et de Berlin, qui empêchent la recourante de charger la
société Tscheulin de payer pour son compte l'intimée, sont une atteinte
spoliatrice aux droits d'un créancier suisse. On ne pourrait les déclarer
conciliables avec l'ordre public suisse que si ce mode de paiement était
interdit expressément ou tacitement par l'accord de compensation du 26 juillet
1934, en vigueur au moment où l'offre de payement par la société Tscheulin a
été faite. Mais cet accord, bien loin d'interdire un règlement semblable, le
prévoit au contraire explicitement à son art. 4 litt. a.
D. - La Chambre des recours du Tribunal cantonal s'est référé aux considérants
de son arrêt.
L'intimée a conclu au rejet du recours.
Considérant en droit:
1.- .....
2.- En vertu de l'art. 4 al. 1er de la convention germano-suisse, la
reconnaissance et l'exécution d'une décision à laquelle la convention est en
principe applicable seront néanmoins refusées lorsque l'exequatur «aurait pour
résultat la réalisation d'un rapport de droit dont la validité ou la poursuite
est défendue sur le territoire de l'Etat où la décision est invoquée pour des
motifs tirés de l'ordre public ou des bonnes moeurs». Le but de cette réserve
est d'empêcher que, par l'effet de la reconnaissance du jugement étranger, des
règles de droit

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contraires à l'ordre public du pays de l'exequatur n'exercent des effets dans
ce pays (RO 63 I 302). Tel sera le cas lorsque le juge étranger n'aura pu
rendre sa décision qu'en se fondant sur des règles incompatibles avec les
principes que l'Etat requis entend de toute manière faire prévaloir sur ceux
du droit étranger, là même où il admet l'application de ce droit par le juge
étranger dont il s'est engagé à reconnaître la sentence.
D'après la recourante, les livraisons effectuées par l'intimée devaient être
payées au moyen de la créance de l'acheteuse contre la société Tscheulin. De
fait, la recourante aurait offert, selon qu'il était convenu, de s'acquitter
de la sorte. Mais l'intimée n'aurait pu, malgré son désir, accepter ce mode de
règlement, car les offices allemands des devises n'auraient point autorisé le
transfert. La recourante paraît en déduire qu'elle est, sinon libérée, du
moins en droit de refuser de payer en Suisse tant qu'elle ne pourra pas
disposer de sa créance en Allemagne. Le Tribunal de Cottbus a implicitement
rejeté cette argumentation.
En droit allemand (§ 293 BGB) comme en droit suisse (art. 91
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 91 - Der Gläubiger kommt in Verzug, wenn er die Annahme der gehörig angebotenen Leistung oder die Vornahme der ihm obliegenden Vorbereitungshandlungen, ohne die der Schuldner zu erfüllen nicht imstande ist, ungerechtfertigterweise verweigert.
CO), le créancier
est en demeure s'il refuse sans motif légitime d'accepter la prestation.
L'intimée justifie le refus de la délégation offerte en invoquant la défense
faite par l'autorité allemande en vertu de la législation sur les devises. Le
contrat étant sans aucun doute soumis au droit allemand, le juge d'exequatur
devrait admettre cette excuse, en tant qu'elle est compatible avec la réserve
inscrite à l'art. 4 al. 1er de la convention. Or le Tribunal fédéral a jugé à
plusieurs reprises (RO 60 II 310 s., 61 II 245 ss., 62 II 110, 64 II 97 ss.)
que la législation allemande sur les devises est contraire à l'ordre public
suisse. Il a écarté l'application de cette législation chaque fois qu'elle
entraîne une modification du rapport juridique ou fonde une prétendue
impossibilité d'exécution, c'est-à-dire dans la mesure où elle apporte une
limitation aux droits d'un créancier suisse. En l'espèce, il y aurait atteinte
aux droits

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d'un créancier suisse en ce sens que la recourante, débitrice de l'intimée et
créancière de la maison Tscheulin, ne pourrait payer la première au moyen de
sa créance contre la seconde. Cependant, la défense de payer étant faite à un
tiers, elle n'affecte pas directement les rapports de la recourante avec
l'intimée, quelle que soit la dépendance économique entre le contrat qui lie
ces dernières et le contrat conclu par la débitrice avec la société Tscheulin.
Il n'en reste pas moins que, sans en faire une condition essentielle de
l'opération (cf. consid. 4 ci-dessous), les parties en cause paraissent être
convenues d'un règlement par assignation. On devrait dès lors se demander si,
du point de vue de l'ordre public suisse, l'intimée ne devrait pas quand même
se laisser opposer l'offre de la recourante. Il faudrait rechercher, en
d'autres termes, si, nonobstant l'absence de mesures législatives
exceptionnelles, le créancier allemand ne devrait pas, dans un cas de ce
genre, supporter les conséquences des restrictions que son débiteur suisse
doit subir dans le recouvrement de ses créances contre un débiteur allemand.
Toutefois, sans compter que la recourante ne semble pas avoir tiré les
conséquences de la prétendue demeure de l'intimée, il n'est pas nécessaire de
trancher la question.
3.- En effet, même si la défense de transfert était en elle-même contraire à
l'ordre public suisse, la recourante ne saurait se prévaloir de l'art. 4 al.
1er de la convention. Cette disposition vise l'application de principes du
droit étranger incompatibles avec les conceptions fondamentales du droit
suisse. Mais lorsque le droit étranger est implicitement reconnu dans un
accord conclu par la Suisse avec un Etat étranger, il n'y a naturellement plus
place pour la réserve de l'ordre public, en tant que cet accord régit le
litige. La jurisprudence qui a écarté l'application de la législation
allemande sur les devises avait trait à des défenses de payer fondées sur une
mesure unilatérale du pays du débiteur. Si la défense de payer résulte d'un
traité conclu entre la Suisse et l'Etat du débiteur, elle doit

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nécessairement être prise en considération par le juge suisse, car le traité
consacre des principes de droit fédéral. C'est ce que le Tribunal fédéral a
déjà admis au sujet des accords de clearing qui lient la Suisse à divers pays
(RO 63 II 312 -315). Pas plus qu'il ne peut examiner si une loi fédérale est
ou non contraire à la Constitution, le Tribunal fédéral ne peut rechercher,
lorsqu'il est appelé à l'appliquer, si un traité conclu par la Confédération
contient des principes qui violent l'ordre public suisse. Les accords de
clearing n'interdisent d'ailleurs pas tout paiement du débiteur au créancier,
mais obligent le premier à ne s'acquitter que par l'intermédiaire ou moyennant
l'autorisation de l'office compétent, en sorte que le créancier recevra
finalement son argent, quoique avec un certain retard.
La Suisse a conclu avec l'Allemagne des «accords pour la compensation des
paiements germano-suisses» (accord du 26 juillet 1934, entré en vigueur le 1er
août 1934, remplacé par l'accord du 17 avril 1935, complété par l'additif du 6
juillet 1936, dispositions actuellement remplacées par l'accord du 30 juin
1937). Aux termes de ces accords, le règlement de tous les paiements entre
l'Allemagne et la Suisse s'opère, sous réserve de certaines exceptions,
exclusivement par l'intermédiaire de la Caisse allemande de compensation et de
la Banque nationale suisse. Le paiement de la recourante à l'intimée et le
paiement de la maison Tscheulin à la recourante étaient en principe soumis au
clearing (art. III et IV des accords). La recourante n'a pas prétendu que,
parce que les marchandises étaient destinées à être revendues en Allemagne,
l'accord de clearing ne s'appliquât pas. Elle soutient en revanche que le mode
de paiement consistant à s'acquitter de sa dette envers l'intimée au moyen de
sa créance contre la maison Tscheulin était expressément permis par l'art. IV
litt. a de l'accord de 1934. La première hypothèse visée par cette disposition
n'est pas réalisée (libération du débiteur suisse à raison des paiements
effectués par des débiteurs allemands pour livraison de marchandises suisses à
un compte

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spécial pour «étranger» destiné aux paiements à l'intérieur de l'Allemagne).
La seconde hypothèse, celle d'une libération par voie de compensation, n'est
pas réalisée non plus. Il s'agit d'abord en l'espèce d'une assignation en
paiement et non d'une compensation. Mais, voudrait-on voir dans le mode
d'exécution prévu une opération analogue à la compensation, que les conditions
de celle-ci ne seraient pas remplies. L'additif de juillet 1936 a précisé que
le paiement par voie de compensation était subordonné à l'assentiment d'un
office allemand des devises et à l'approbation de l'office suisse de
compensation. Bien que les accords précédents ne continssent pas cette clause,
il faut cependant admettre que la double autorisation était déjà nécessaire,
car le but du clearing exige qu'un contrôle s'exerce sur l'exécution de
l'ensemble des obligations qui lient les personnes domiciliées dans les deux
Etats, quel que soit le mode de règlement prévu (ROSSET, Les accords de
clearing et les obligations contractuelles, Zeitschr. f. schw. Recht, 1936, p.
261 a/262 a; HUG, Das Clearingsrecht und seine Einwirkungen auf die
vertraglichen Schuldverhältnisse, ibid., 552 a; en sens contraire, un arrêt de
la Cour de cassation pénale du Tribunal fédéral du 30 mars 1936, dans la cause
von Arx). En l'espèce, les offices allemands des devises ont refusé
l'autorisation requise par la maison Tscheulin. Or, ils pouvaient statuer
librement à cet égard, car les parties n'ont aucun droit à ce que
l'autorisation leur soit accordée, même si précédemment elle l'a été
expressément ou tacitement (HUG, op. cit., 556 a/557 a). La recourante devait
d'ailleurs s'adresser encore à l'office suisse de compensation; elle ne paraît
pas l'avoir fait. D'une manière générale. les accords de clearing interdisent,
sauf autorisation spéciale, toute extinction des obligations opérée autrement
que par versement à l'office désigné (HUG, p. 478 a - 481 a, p. 534 a ss., 551
ss.). Il en est ainsi notamment de l'assignation en paiement. Celle-ci se
trouve soumise à l'assentiment de l'autorité allemande en tant que le paiement
de

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l'assigné allemand à l'assignataire allemand éteint la dette du premier envers
l'assignant suisse et elle est subordonnée à l'assentiment de l'autorité
suisse en tant que ce même paiement éteint la dette de l'assignant suisse
envers l'assignataire allemand. C'est ce qui ressort, pour le débiteur
allemand, de l'art. III litt. h de l'accord de 1937 («les autres paiements
pour lesquels un mode de règlement spécial est prescrit par un office allemand
des changes ou de surveillance», disposition figurant dans les accords
antérieurs), pour le débiteur suisse, de l'art. IV litt. h du même accord
(«paiements décrétés libres», disposition figurant aussi dans les accords
antérieurs) et de l'art. 1er litt. i de l'arrêté du Conseil fédéral du 23
juillet 1936 («autres paiements pour lesquels l'office suisse aura admis un
mode particulier de règlement»). (Cf. HUG, P.562 a note 343 a, et ROSSET,
274/275)
A défaut des autorisations requises, la recourante ne pouvait disposer de sa
créance contre la maison Tscheulin pour s'acquitter envers sa créancière;
celle-ci était en droit, et de par sa législation et de par l'accord
germano-suisse, de refuser la délégation offerte. La recourante est donc
contrainte de passer par le clearing et ne peut refuser de payer en Suisse.
Elle doit de même consentir à ce que sa propre débitrice la paie par la voie
du clearing. L'inégalité dont la recourante se plaint n'existe pas, car,
contrairement à ce qu'elle affirme, un débiteur allemand ne pourrait, d'après
les accords de compensation, payer sans autres formalités son créancier suisse
au moyen de ses avoirs en Suisse. D'autre part, la situation du débiteur
suisse ne serait intolérable que s'il ne pouvait, de son côté, obtenir le
paiement de son débiteur allemand. Mais le jeu du clearing a précisément pour
effet de lui procurer ce paiement. On ne voit pas pourquoi le débiteur suisse,
qui est en même temps créancier d'un débiteur allemand, devrait nécessairement
bénéficier de ce fait d'un traitement de faveur par rapport aux autres
créanciers suisses qui doivent attendre leur tour dans le règlement des
paiements.

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4.- La recourante prétend que le mode de règlement consistant à déléguer son
débiteur allemand à son créancier allemand était une condition essentielle du
contrat passé entre elle et ce dernier. S'il en était ainsi - et le premier
accord germano-suisse (26 juillet 1934 / 1er août 1934) étant postérieur au
contrat du 5 juillet 1934 -, on pourrait se demander si la recourante n'eût
pas été en droit de résilier ce contrat dès le moment où elle n'était plus en
mesure de l'exécuter de la manière convenue (sur ce point, ROSSET, p. 279 a;
HUG, p. 549 a s.). Mais la débitrice n'a pas exercé son éventuel droit de
résiliation et elle aurait dû le faire au plus tard devant le Tribunal de
Cottbus. Il est vrai que c'est surtout la dévaluation du franc suisse (26
septembre 1936) postérieure au jugement allemand (12 juillet 1936) qui a rendu
onéreux pour la débitrice le paiement au clearing. Cependant, devant le juge
de mainlevée, la recourante n'a pas mis en doute la validité du contrat; elle
s'est placée uniquement sur le terrain de l'exécution. Au demeurant, si la
créance paraît découler d'une opération commerciale intimement liée h celle
qui a donné naissance à sa dette envers l'intimée, il s'agit là d'un simple
rapport économique et non d'un rapport de droit. Dans le contrat entre la
recourante et l'intimée, la maison Tscheulin n'est mentionnée que comme lieu
de livraison des marchandises livrées par camion. Il n'est pas question de
cette maison en ce qui concerne les conditions et le mode de paiement et la
recourante ne prétend pas elle-même que l'intimée se serait engagée à n'être
payée que par l'intermédiaire de la maison Tscheulin à laquelle la marchandise
était revendue par la recourante, et que l'intimée ait renoncé à tout autre
mode de paiement. Le règlement par assignation ne serait donc pas une
condition essentielle du contrat.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral
rejette le recours.
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 64 I 268
Date : 01. Januar 1937
Publié : 30. September 1938
Source : Bundesgericht
Statut : 64 I 268
Domaine : BGE - Verwaltungsrecht und internationales öffentliches Recht
Objet : 1. Le créancier allemand qui refuse, en vertu de la législation allemande sur les devises...


Répertoire des lois
CO: 91
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat
CO Art. 91 - Le créancier est en demeure lorsqu'il refuse sans motif légitime d'accepter la prestation qui lui est régulièrement offerte, ou d'accomplir les actes préparatoires qui lui incombent et sans lesquels le débiteur ne peut exécuter son obligation.
Répertoire ATF
60-II-294 • 61-II-242 • 62-II-108 • 63-I-297 • 63-II-303 • 64-I-268 • 64-II-88
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
allemand • devise • ordre public • tribunal fédéral • acquittement • défense de payer • autorisation ou approbation • décision • droit étranger • tribunal cantonal • aluminium • rapport de droit • refus de payer • droit suisse • banque nationale • doute • à l'intérieur • réserve de l'ordre public • vue • sentence arbitrale
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