S. 65 / Nr. 20 Familienrecht (f)

BGE 62 II 65

20. Arrêt de la IIe Section civile du 2 avril 1936 dans la cause D. contre T.


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Regeste:
Présomption de paternité en cas de naissance après terme.

A. ­ Par exploit du 6 novembre 1933, Hélène T. et son fils illégitime, né le
19 mai 1933, ce dernier représenté par son curateur, ont ouvert action contre
D., en concluant à ce qu'il fût condamné, en sa qualité de père illégitime de
l'enfant, à payer:
a) à la demanderesse, la somme de 300 francs pour frais de couches, entretien
avant et après la grossesse et autres dépenses occasionnées par la grossesse
et l'accouchement;
b) à l'enfant, une pension mensuelle de 45 francs, dès la naissance et jusqu'à
ce qu'il ait atteint l'âge de 10 ans révolus et de 60 francs dès lors et
jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge de 18 ans révolus.
Les demandeurs alléguaient en substance que le défendeur avait eu des
relations sexuelles avec la mère de l'enfant dès l'automne 1931 et le 16 août
1932 encore.
Le défendeur a conclu au rejet de la demande. Il a convenu avoir eu des
relations sexuelles avec la demanderesse, mais il a soutenu que les dernières
avaient eu lieu le 22 juillet 1932. Il a allégué en outre divers faits tendant
à démontrer, selon lui, que la demanderesse n'avait pas eu une conduite
exemplaire et qu'elle s'était même donnée à un ouvrier boulanger italien en
été 1932.
B. ­ Par jugement du 9 janvier 1936, le Tribunal a condamné le défendeur à
payer:

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1° à la mère, la somme de 300 francs;
2° à l'enfant, une pension mensuelle de 40 francs dès la naissance et jusqu'à
ce qu'il ait 7 ans révolus, et une pension mensuelle de 50 francs dès lors et
jusqu'à ce qu'il ait atteint l'âge de 18 ans révolus, ladite pension étant
payable d'avance en mains du représentant légal.
Ce jugement est motivé en résumé de la manière suivante:
Il n'est pas établi que les parties aient eu des rapports sexuels durant la
période légale de conception de l'enfant. La preuve de leur cohabitation à la
date du 16 août 1932 n'a, en effet, pas été rapportée. En revanche l'existence
de rapports sexuels entre la demanderesse et le défendeur à la date du 22
juillet 1932 est admise par le défendeur. La naissance de l'enfant étant
survenue 301 jours après cette cohabitation, la présomption légale de
paternité ne peut être invoquée. Toutefois il a déjà été jugé que s'il est
acquis que l'enfant peut avoir été conçu en dehors de cette période, une
interprétation extensive de l'art. 314 al. 1 Cc se justifie dans tous les cas
lorsque la date de la conception possible n'est que de peu de jours antérieure
ou postérieure à la période légale. Or, en l'espèce, il résulte de la
déclaration très nette du Dr B. que l'enfant est né après terme et l'on peut
ainsi présumer que sa conception remonte effectivement au 22 juillet 1932. En
conséquence, sauf les exceptions prévues aux art. 314 al. 2 et 315 Cc, le
défendeur doit être présumé le père de l'enfant. D. n'a pas rapporté la preuve
du bien fondé des allégations relatives à la prétendue inconduite de la
demanderesse. Les débats permettent au contraire d'affirmer qu'Hélène T. jouit
d'une excellente réputation. Aucun fait n'autorise des doutes sur la paternité
du défendeur, qui est d'ailleurs incapable de dire quel serait, sinon lui, le
père de l'enfant. Au surplus, il a expressément reconnu sa paternité devant le
juge de paix. La somme de 300 francs correspond à ce qu'il est d'usage
d'allouer en pareille matière. Pour tenir compte des ressources du défendeur
(275 francs nets par mois) et

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des besoins de l'enfant, il paraît indiqué de fixer la pension à 40 francs
jusqu'à 7 ans et à 50 francs dès lors.
C. ­ Le défendeur a recouru en réforme en reprenant ses conclusions
libératoires.
Considérant en droit:
1. ­ Le recourant reproche aux premiers juges d'avoir faussement interprété
l'art. 314 al. 1 Cc en ce qu'ils ont admis qu'il était le père de l'enfant,
alors, d'une part, que ce dernier est né le 301e jour seulement après la date
des derniers rapports qu'il a eus avec la demanderesse et, d autre part, que
la preuve n'avait pas été rapportée que la conception remontait effectivement
à cette date.
Ce grief n'est pas fondé. Sans doute n'y a-t-il de présomption légale de
paternité que si l'enfant est né entre le 180e et le 300e jour après la
cohabitation. Mais cela ne veut pas dire qu'on ne puisse pas présumer la
paternité du défendeur lorsqu'il est établi que l'enfant est né après terme et
qu'il peut avoir été conçu au moment des derniers rapports. Cette preuve ne
doit d'ailleurs pas s'apprécier d'une façon trop rigoureuse. Il n'est pas
nécessaire en particulier de démontrer que l'enfant a, selon toute
probabilité, été conçu à ce moment-là (RO 55 II p. 233). Il suffit qu'il soit
simplement possible qu'il l'ait été, alors surtout que, hors du retard de la
naissance, il n'existe aucun fait qui soit de nature à élever des doutes
sérieux sur la paternité du défendeur. Si, au contraire, on a de bonnes
raisons pour douter qu'il soit réellement le père de l'enfant, le juge aura à
se prononcer sur le degré de vraisemblance de cette paternité en tenant compte
évidemment de ce retard aussi bien que des autres faits de la cause.
Or, en l'espèce, à part le retard de la naissance, l'instruction de la cause
n'a révélé aucun fait qui puisse faire douter sérieusement de la paternité du
défendeur. Non seulement on n'a rien pu reprendre au sujet de la conduite de
la demanderesse, hormis ses rapports avec le défendeur, mais le Tribunal
relève expressément qu'elle «jouissait d'une

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excellente réputation». Et, quant au fait que l'enfant était né avant terme,
il a estimé qu'on pouvait le tenir pour constant au vu des rapports médicaux.
Il a donc conclu de ces faits qu'on pouvait présumer que l'enfant avait bien
été conçu le 22 juillet 1932. Ne voulût-on pas voir là une constatation de
fait qui lie le Tribunal fédéral, on ne saurait en tout cas arriver à un autre
résultat. Si l'on admet avec le Dr B. que l'enfant est né avec un retard de 15
jours, qu'il peut donc parfaitement avoir été conçu le 22 juillet, et si l'on
tient compte, d'autre part, de l'absence de tout fait autorisant des doutes
sur la paternité du défendeur, on est fondé à conclure que cette paternité
peut être présumée, ce qui entraîne l'admission de l'action en principe.
2.- Le recourant n'a pas critiqué le montant des prestations auxquelles il a
été condamné. Le Tribunal fédéral n'a donc pas à revoir cette question.
Aurait-il d'ailleurs à le faire, qu'il n'aurait aucune raison de s'écarter de
la décision des premiers juges.
Le Tribunal fédéral prononce:
Le recours est rejeté et le jugement attaqué est confirmé.
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 62 II 65
Date : 01. Januar 1936
Publié : 02. April 1936
Source : Bundesgericht
Statut : 62 II 65
Domaine : BGE - Zivilrecht
Objet : Présomption de paternité en cas de naissance après terme.


Répertoire ATF
62-II-65
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
doute • naissance • rapports sexuels • tennis • tribunal fédéral • grossesse • décision • calcul • preuve facilitée • jour déterminant • rapport médical • interprétation extensive • inconduite • constatation des faits • boulangerie • curateur • quant • juge de paix • rejet de la demande • mois
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