S. 353 / Nr. 79 Obligationenrecht (f)

BGE 61 II 353

79. Arrêt de la Ire Section civile de 17 décembre 1935 dans la cause Ateliers
des Charmilles S. A. contre Stucki et consorts.


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Regeste:
Contrat de travail. Les cantons n'ont pas le droit d'instituer des jours
fériés isolés pour lesquels ils obligent les employeurs à payer le salaire
même aux ouvriers travaillant à l'heure ou aux pièces.

A. - Par une loi du 12 mai 1934, modifiant l'art. 1er de la loi du 6 février
1869 sur les jours de fêtes légales, modifiée elle-même par les lois du 21
février 1877 et du 11 octobre 1895, le Grand Conseil du Canton de Genève a
décrété ce qui suit:
«Article premier. - Le 1er juin, anniversaire de l'arrivée des Confédérés au
Port Noir, est déclaré jour férié.
«Art. 2. - Il ne peut être fait aucune déduction de salaire pour les jours
fériés légaux.
«Art. 3. - L'urgence est déclarée.»
A la suite d'une initiative populaire, le Grand Conseil a abrogé cette loi le
18 novembre 1934.
B. - Les Ateliers des Charmilles S. A. à Genève ont fermé leurs usines le 1er
juin 1934, mais se sont refusés à payer pour ce jour-là le salaire de ceux de
leurs ouvriers qui travaillaient à l'heure et aux pièces.
Alfred Stucki et les autres intimés au présent recours, qui appartiennent à
cette catégorie d'ouvriers, ont assigné la Société recourante devant le
Tribunal des Prud'hommes de Genève en paiement des sommes correspondantes au
salaire qu'ils auraient touché le 1er juin 1934 si les ateliers n'avaient pas
été fermés.
La défenderesse a conclu au rejet des demandes par le motif que les jours
fériés sont assimilés au dimanche en vertu de l'art. 58 de la loi fédérale sur
le travail dans les fabriques et qu'aucun salaire n'est dû le dimanche aux
ouvriers travaillant à l'heure ou aux pièces; l'art. 2 de la

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loi cantonale de 1934 n'est applicable qu'au salaire fixe, payé au mois, à la
quinzaine ou à la semaine.
Par jugements du 12 juin 1935 le Tribunal des Prud'hommes a condamné la
défenderesse à payer aux demandeurs les sommes réclamées. Le juge a estimé que
la loi du 12 mai 1934 obligeait les employeurs à verser le salaire du 1er juin
à tous leurs ouvriers sans distinction.
C. - La défenderesse a formé au Tribunal fédéral un recours de droit civil
tendant à l'annulation des prononcés des prud'hommes. Les moyens de recours
sont en résumé les suivants: En vertu de l'art. 64 Const. féd., la
Confédération a seule le droit de légiférer en matière de droit civil et en
particulier dans le domaine du contrat de travail. Celui-ci a été réglementé
d'une manière complète par le code des obligations et, en ce qui concerne la
recourante, par la loi du 18 juin 1914 sur le travail dans les fabriques.
L'art. 58 de cette loi prévoit huit jours fériés par an et les assimile au
dimanche. Les cantons ne peuvent édicter des dispositions contraires à cette
réglementation (RO 37 I p. 26 et sv.). L'art. 2 de la loi genevoise est
inconciliable avec la loi fédérale. L'arrêt RO 58 I p. 26 est sans pertinence,
car il a seulement trait à la faculté des cantons de légiférer en matière de
police du commerce et de l'industrie.
D. - Les intimés ont conclu au rejet des recours. Ils relèvent que la loi
genevoise du 12 mai 1934 a été adoptée par l'unanimité du Grand Conseil. La
déduction de salaire est interdite pour tous les salariés, quel que soit le
mode de fixation de leur rémunération. Le législateur ne vise pas les
dimanches, jours fériés ordinaires, il n'a en vue que les jours fériés légaux,
soit les jours déclarés officiellement fériés. L'art. 58 de la loi fédérale de
1914 n'a trait qu'au travail et au repos, il ne s'occupe pas du salaire. Le
droit civil fédéral ne s'oppose pas au paiement du salaire les jours fériés.
En édictant l'art. 2 de la loi, le Grand Conseil a pris une mesure d'ordre
public dans l'intérêt général. L'arrêt RO 58 I p. 26 est favorable à la thèse
des intimés.

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Considérant en droit:
La loi fédérale du 18 juin 1914 interdit de travailler le dimanche dans les
fabriques. Des exceptions ne sont admissibles qu'avec le consentement de
l'autorité compétente (art. 51). L'art. 58 permet aux cantons d'instituer huit
jours fériés par année; ces jours sont assimilés au dimanche.
Le Canton de Genève a fait usage de cette faculté en décrétant à l'art. 1er de
la loi du 12 mai 1934 que le 1er juin, anniversaire de l'arrivée des
Confédérés au Port Noir, est jour férié. La légalité de ce jour férié n'est
pas contestée. Mais le Canton est allé plus loin: il a statué à l'art. 2 de la
loi qu'«il ne peut être fait aucune déduction de salaire pour les jours fériés
légaux».
La recourante voit dans cette disposition une atteinte à la prérogative de la
Confédération de réglementer le contrat de travail (art. 64 Const. féd.).
Les intimés combattent cette manière de voir.
D'après l'arrêt du Tribunal fédéral, du 22 janvier 1932, en la cause Rapp et
consorts contre Bâle-Ville (RO 58 I p. 26; J. d. T. 1932 p. 600), une loi
cantonale ne viole pas le principe de la force dérogatoire de droit fédéral
si, en l'édictant, le Canton n'a point outrepassé la compétence de droit
public que la Constitution fédérale lui reconnaît (art. 3
SR 414.110.12 Convenzione del 1°/31 marzo 1909 fra il Consiglio federale svizzero e il Consiglio di Stato del Cantone di Zurigo circa la divisione degli oggetti costituenti le collezioni comuni di paleontologia
Art. 3 - La collezione geologica, prima di consegnare gli oggetti alla collezione zoologica, ha il diritto di farne eseguire dei gessi, quando ciò appaia desiderabile e possa farsi senza danneggiare gli originali.
) et dont l'exercice
n'a pas été limité par le droit civil fédéral (art. 6 CC). Le Tribunal fédéral
a vu des règles de droit public dans les prescriptions d'une loi cantonale
obligeant les employeurs à accorder à leurs employés des vacances payées. Il a
estimé qu'il y avait là essentiellement des mesures prises dans l'intérêt
général de la santé publique et qu'elles relevaient ainsi d'un domaine - celui
de la police du commerce et de l'industrie - dont les lois civiles fédérales
ne s'occupent pas.
Les motifs qui ont permis à la Cour de droit public de maintenir la loi
bâloise imposant le principe de vacances payées ne se retrouvent pas en
l'espèce. Les vacances

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doivent être un repos du corps et de l'esprit; non payées, elles deviendraient
pour beaucoup de salariés modestes un luxe irréalisable. L'intérêt général
milite en faveur d'une organisation qui les mette à la portée de tous, tandis
qu'il ne peut être invoqué à l'égard d'un jour férié isolé. Ici les raisons de
santé ou les mesures de police, du commerce et de l'industrie ne jouent aucun
rôle. Les intéressés peuvent se reposer ce jour-là comme ils le font le
dimanche, sans toucher de salaire.
Il s'agit donc bien de l'ingérence du Canton dans la réglementation d'une
matière de droit privé, réservée à la Confédération par l'art. 64 Const. féd.
Le contrat de travail est régi par le droit civil fédéral. C'est la convention
par laquelle l'employé loue à l'employeur ses services pour un temps déterminé
ou indéterminé contre paiement d'un salaire. En principe, le salaire n'est dû
qu'en retour du travail fourni. La loi statue (art. 334
SR 220 Parte prima: Disposizioni generali Titolo primo: Delle cause delle obbligazioni Capo primo: Delle obbligazioni derivanti da contratto
CO Art. 334 - 1 Il rapporto di lavoro di durata determinata cessa senza disdetta.
1    Il rapporto di lavoro di durata determinata cessa senza disdetta.
2    Se continua tacitamente dopo la scadenza della durata pattuita, è considerato di durata indeterminata.
3    Se stipulato per più di dieci anni, può, dopo dieci anni, essere disdetto in ogni tempo da ciascuna delle parti per la fine di un mese, con preavviso di sei mesi.
CO) que l'employeur
est tenu de faire, en raison du travail déjà exécuté, les avances devenues
nécessaires à l'employé par suite de sa gêne et en vertu de l'art. 336
l'employé a droit à un supplément de salaire pour surcroît de travail. D'où il
suit a contrario qu'aucun salaire n'est dû lorsqu'aucun travail n'a été
effectué. La loi elle-même confirme cette règle en prescrivant à l'art. 335
que, par exception, dans les contrats de travail conclus à long terme,
l'employé ne perd pas son droit au salaire pour un temps relativement court
lorsque, sans sa faute, il est empêché de travailler. Il perd donc ce droit
lorsque le contrat n'est pas conclu à long terme. Le législateur a déterminé
ainsi lui-même la mesure dans laquelle l'intérêt des salariés et partant
l'intérêt public de la communauté méritait une protection spéciale quant au
paiement du salaire, ce qui exclut le droit des cantons de s'ingérer dans
cette réglementation (RO 58 I p. 31, consid. 2; J.d.T. 1932, p. 602 i. f. et
603).
Aucun des intimés ne peut se mettre au bénéfice de l'art. 335
SR 220 Parte prima: Disposizioni generali Titolo primo: Delle cause delle obbligazioni Capo primo: Delle obbligazioni derivanti da contratto
CO Art. 335 - 1 Il rapporto di lavoro di durata indeterminata può essere disdetto da ciascuna delle parti.
1    Il rapporto di lavoro di durata indeterminata può essere disdetto da ciascuna delle parti.
2    La parte che dà la disdetta deve, a richiesta dell'altra, motivarla per scritto.
CO. Pour eux la
loi spéciale de 1914 est applicable qui limite le travail et partant le
salaire aux jours ouvrables. Les ouvriers payés à l'heure et aux pièces n'ont
droit

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à aucune rémunération pour le dimanche où ils ne travaillent pas ni par
conséquent pour les jours fériés que la loi autorise les cantons à instituer
et qu'elle assimile expressément aux dimanches (art. 58). Les pauses mêmes
peuvent être déduites de la journée si l'ouvrier a la faculté de quitter son
poste de travail (art. 39). Il en est autrement pour les salariés dont la
rémunération est fixée par semaine, par quinzaine ou par mois; dans leur cas,
c'est le mode de calcul adopté qui empêche l'employeur d'opérer une déduction
pour un jour de chômage isolé.
Il n'y a aucun motif d'en faire autant pour les ouvriers qui travaillent à
l'heure ou à la journée. Aux termes de l'art. 326
SR 220 Parte prima: Disposizioni generali Titolo primo: Delle cause delle obbligazioni Capo primo: Delle obbligazioni derivanti da contratto
CO Art. 326 - 1 Se in virtù del contratto il lavoratore lavora esclusivamente a cottimo soltanto per un datore di lavoro, questi deve dargli lavoro sufficiente.
1    Se in virtù del contratto il lavoratore lavora esclusivamente a cottimo soltanto per un datore di lavoro, questi deve dargli lavoro sufficiente.
2    Il datore di lavoro può affidare al lavoratore un lavoro pagato a tempo se, senza sua colpa, è nell'impossibilità di affidare lavoro a cottimo conformemente al contratto o se le condizioni dell'azienda lo esigono transitoriamente.
3    Se il salario per il lavoro pagato a tempo non è stabilito mediante accordo, contratto normale o contratto collettivo, il datore di lavoro deve pagare al lavoratore l'equivalente del salario medio guadagnato antecedentemente con il lavoro prestato a cottimo.
4    Il datore di lavoro che non può dare al lavoratore sufficiente lavoro né a cottimo né a tempo, resta nondimeno tenuto, secondo le disposizioni sulla mora, a pagare il salario che dovrebbe versare per un lavoro pagato a tempo.
CO, les conditions du
contrat de travail peuvent être fixées librement, pourvu qu'elles ne soient
contraires ni à la loi ni aux moeurs. Or ni la loi, ni les moeurs - pas plus
que la santé ou l'ordre publics, on l'a vu - n'exigent que l'employeur fasse
les frais d'un jour férié isolé que le législateur se plaît à instituer. La
perte serait très sensible et hors de proportion pour un patron qui emploie de
nombreux journaliers. L'équité même parle en sa faveur tandis qu'elle ne peut
être invoquée que dans une moindre mesure par les ouvriers qui, lorsqu'ils
sont payés à l'heure et aux pièces, savent qu'ils n'ont pas droit au salaire
pour les jours où ils ne travaillent point.
L'extension de la portée de l'art. 2 de la loi genevoise à tous les ouvriers
sans distinction du mode de rémunération va donc à l'encontre de la
réglementation du contrat de travail par le droit civil fédéral et cette
dérogation ne peut se justifier par le pouvoir des cantons de légiférer en
matière de droit public, contrairement à ce qui était le cas dans l'affaire
Rapp et consorts.
En conséquence, c'est à tort que le Tribunal des Prud'hommes a condamné la
recourante à payer les salaires réclamés par les intimés pour le 1er juin
1934.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral
admet les recours et annule les jugements attaqués.
Informazioni decisione   •   DEFRITEN
Documento : 61 II 353
Data : 01. gennaio 1935
Pubblicato : 17. dicembre 1935
Sorgente : Tribunale federale
Stato : 61 II 353
Ramo giuridico : DTF - Diritto civile
Oggetto : Contrat de travail. Les cantons n'ont pas le droit d'instituer des jours fériés isolés pour...


Registro di legislazione
CO: 326 
SR 220 Parte prima: Disposizioni generali Titolo primo: Delle cause delle obbligazioni Capo primo: Delle obbligazioni derivanti da contratto
CO Art. 326 - 1 Se in virtù del contratto il lavoratore lavora esclusivamente a cottimo soltanto per un datore di lavoro, questi deve dargli lavoro sufficiente.
1    Se in virtù del contratto il lavoratore lavora esclusivamente a cottimo soltanto per un datore di lavoro, questi deve dargli lavoro sufficiente.
2    Il datore di lavoro può affidare al lavoratore un lavoro pagato a tempo se, senza sua colpa, è nell'impossibilità di affidare lavoro a cottimo conformemente al contratto o se le condizioni dell'azienda lo esigono transitoriamente.
3    Se il salario per il lavoro pagato a tempo non è stabilito mediante accordo, contratto normale o contratto collettivo, il datore di lavoro deve pagare al lavoratore l'equivalente del salario medio guadagnato antecedentemente con il lavoro prestato a cottimo.
4    Il datore di lavoro che non può dare al lavoratore sufficiente lavoro né a cottimo né a tempo, resta nondimeno tenuto, secondo le disposizioni sulla mora, a pagare il salario che dovrebbe versare per un lavoro pagato a tempo.
334 
SR 220 Parte prima: Disposizioni generali Titolo primo: Delle cause delle obbligazioni Capo primo: Delle obbligazioni derivanti da contratto
CO Art. 334 - 1 Il rapporto di lavoro di durata determinata cessa senza disdetta.
1    Il rapporto di lavoro di durata determinata cessa senza disdetta.
2    Se continua tacitamente dopo la scadenza della durata pattuita, è considerato di durata indeterminata.
3    Se stipulato per più di dieci anni, può, dopo dieci anni, essere disdetto in ogni tempo da ciascuna delle parti per la fine di un mese, con preavviso di sei mesi.
335
SR 220 Parte prima: Disposizioni generali Titolo primo: Delle cause delle obbligazioni Capo primo: Delle obbligazioni derivanti da contratto
CO Art. 335 - 1 Il rapporto di lavoro di durata indeterminata può essere disdetto da ciascuna delle parti.
1    Il rapporto di lavoro di durata indeterminata può essere disdetto da ciascuna delle parti.
2    La parte che dà la disdetta deve, a richiesta dell'altra, motivarla per scritto.
SR 414.110.12: 3
Registro DTF
61-II-353
Parole chiave
Elenca secondo la frequenza o in ordine alfabetico
giorno festivo • domenica • contratto di lavoro • diritto civile • diritto pubblico • tribunale federale • tribunale del lavoro • diritto al salario • polizia del commercio • ordine pubblico • mese • interesse pubblico • lavoratore • decisione • calcolo • basilea città • codice delle obbligazioni • autorizzazione o approvazione • soppressione • salario
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