S. 386 / Nr. 58 Obligationenrecht (f)

BGE 59 II 386

58. Arrêt de la Ire Section civile du 24 octobre 1933 dans la cause:Blateau
contre Confédération Suisse.

Regeste:
Art. 89 , 45
SR 273 Bundesgesetz vom 4. Dezember 1947 über den Bundeszivilprozess
BZP Art. 45 - 1 Jeder Zeuge wird in Abwesenheit der später abzuhörenden einvernommen. Bei Widerspruch der Aussagen kann er andern Zeugen gegenübergestellt werden.
1    Jeder Zeuge wird in Abwesenheit der später abzuhörenden einvernommen. Bei Widerspruch der Aussagen kann er andern Zeugen gegenübergestellt werden.
2    Der Zeuge soll gegebenenfalls auf das Recht der Zeugnisverweigerung aufmerksam gemacht werden; er soll zur wahrheitsgemässen Aussage ermahnt und auf die strafrechtlichen Folgen des falschen Zeugnisses gemäss Artikel 307 des Strafgesetzbuches23 hingewiesen werden.
et 46
SR 273 Bundesgesetz vom 4. Dezember 1947 über den Bundeszivilprozess
BZP Art. 46 - Der Zeuge wird durch den Richter einvernommen. Die Parteien erhalten Gelegenheit, Erläuterungs- und Ergänzungsfragen zu beantragen, über deren Zulässigkeit der Richter entscheidet.
PCF: Dans les actions formées directement devant le Tribunal
fédéral, le demandeur a, sous peine de forclusion, l'obligation d'exposer de
manière précise dans sa demande, tous les faits et moyens sur lesquels il
fonde ses prétentions. La réplique, par rapport à la réponse, comme la
duplique par rapport à la réplique, ne sont prévues que pour permettre aux
parties de répondre à des arguments nouveaux et indépendants et non pour
suppléer aux lacunes de la demande et de la réponse (consid. 2).
Rejet d'une demande parce que le retard calculé, contrarie à l'usage, avec
lequel elle a été introduite, constitue un acte contraire à la bonne foi
(consid. 3).

Résumé des faits.
A. - Par arrêté du 1er mai 1918, le Conseil fédéral décida de créer en Espagne
un Office commercial suisse destiné en premier lieu à représenter les
différentes administrations fédérales dans leurs transactions commerciales
avec ce pays et, en outre, à prêter son concours au commerce et à l'industrie
suisses en tant que les intéressés le désiraient. Benjamin Rochat, citoyen
suisse domicilié à Paris, était désigné comme chef de l'office. Aux termes du
contrat Passé le 1er mai 1918 entre la Confédération et

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Rochat, celui-ci devait recevoir pour ses services une commission de 1 1/2%
basée sur le montant des factures des fournisseurs espagnols pour toutes les
transactions dont l'Office commercial suisse aurait à s'occuper.
En septembre 1919, l'office entra en liquidation. L'activité déployée à sa
tête par Rochat fut vivement critiquée par la Confédération. De 1920 à 1924,
de nombreux pourparlers en vue d'un règlement de comptes eurent lieu entre les
représentants de celle-ci et Rochat; ce dernier réclamait le paiement de
commissions, contes ées par la Confédération, laquelle lui opposait en outre
une demande en dommages-intérêts d'un montant beaucoup plus élevé. A une
conférence qui eut lieu le 18 janvier 1923 à Berne, Rochat évalua à 42239 fr.
80 le montant de sa créance sur la Confédération, montant dans lequel
n'étaient toutefois pas comprises ses prétentions contre la Régie fédérale des
alcools et pour commissions dues par des tiers. De son côté, la Confédération
estima à 668000 fr. sa créance pour dommages-intérêts contre Rochat.
Les pourparlers en vue d'une transaction entre Rochat et la Confédération
n'aboutirent pas.
B. - En 1922, toutes les prétentions de Rochat contre la Confédération avaient
été séquestrées et saisies à la requête d'un créancier par l'Office des
poursuites de Berne. Elles furent réalisées pour le prix de 6 fr. et acquises
par un certain G. Läderach. Rochat les racheta toutefois de ce dernier par
l'intermédiaire d'un tiers et pour le prix de 100 fr.
C. - Par acte du 10 septembre 1928 daté de Lausanne et écrit sur papier timbré
vaudois, B. Rochat a fait cession de sa créance contra la Confédération Suisse
à Roger Blateau, ressortissant français domicilié à Paris. La créance cédée
était évaluée à 199799 fr. 24 en capital et intérêts au 30 juin 1928.
Par acte du 9 avril 1930, également daté de Lausanne, Roger Blateau a cédé la
créance en question à son frère Henri Blateau. à Paris. Des commandements de
payer,

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du montant de 213530 fr., avec intérêt moratoire au 6% furent notifiés à la
Confédération les 29 novembre 1928, 1er novembre 1929 et 31 octobre 1930, le
premier à la requête de B. Rochat et Roger Blateau et les suivants à celle des
prénommés et de Hemi Blateau.
D. - Par demande introductive d'instance du 31 octobre 1930, Henri Blateau a
conclu à ce que le Tribunal fédéral condamne la Confédération suisse à lui
payer:
1) 213530 fr. 75 en capital et intérêts arrêtés au 15 novembre 1928 à titre de
commissions dues à Benjamin Rochat, en sa qualité de commissaire fédéral
chargé d'affaires commerciales en Espagne;
2) l'intérêt au 6% sur la somme ci-dessus dès le 16 novembre 1928;
3) les frais des commandements de payer.
Sous chiffre 14 de la demande, le demandeur s'expliquait comme suit sur les
différentes sommes composant le total de 213530 fr. 75:
«Les commissions dues à Benjamin Rochat par la Confédération suisse en
exécution de la convention d'avril 1918 et auxquelles il y a lieu d'ajouter
les intérêts calculés au 15 novembre 1928, sont les suivantes:
1) Ecorces à tan.. Fr. 27361.40
intérêts.. Fr. 15526.80 Fr. 42888.20
----- ---------
2) Riz... Fr. 6630.- Fr.
intérêts.. Fr. 3530.47 10160.47
----- ---------
3) Rappel forfaitaire pour intérêts...
Fr. 7773.15
intérêts.. Fr. 4022.58 Fr. 11795.73
----- ---------
4) Bidons pour huile.. Fr. 9112.50
intérêts.. Fr. 5125.50 Fr. 14238.-
5) 30000 hectos d'alcool...
Fr. 47706.41 Fr.
intérêts.. Fr. 28385.05 Fr. 76091.46
----- ---------

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6) Marchés particuliers...
Fr. 21307.85
intérêts. 12091.15 Fr. 33399.-
----- --------
7) Commissions abandonnées...
Fr. 12427.80
intérêts. 7051.75 Fr. 19479.55
----- --------
8) Soldes de comptes courants...
Fr. 3071.85
intérêts. 1176.50 Fr. 5478.35
----- --------
recte 4848.35
-------------
Fr. 213900.76
-------------
recte Fr. 212900.76»
La défenderesse a conclu au rejet de la demande avec suite de frais et de
dépens. Parmi d'autres moyens, elle a fait valoir à l'appui de ses
conclusions:
a) que les sommes énumérées sous ch. 14 de la demande manquaient des
explications et précisions indispensables pour que l'on pût se rendre compte
de quelles prétentions il s'agissait;
b) et c) ...
En réplique, le demandeur a fourni des explications au sujet des divers chefs
de sa demande. En outre, il a allégué que la Confédération, saisie à maintes
reprises de ses réclamations par les états qu'il lui fournissait, savait
pertinemment de quelles prétentions il s'agissait.
La défenderesse a contesté, dans la duplique, que les allégués de la réplique
expliquant et complétant la demande fussent recevables.
E. - A l'audience de ce jour, les parties ont persisté dans leurs conclusions.
Statuant sur ces faits et considérant en droit:
1. -,..
2.- L'art. 89 de la loi du 22 novembre 1850 sur la procédure à suivre par
devant le Tribunal fédéral en matière civile prescrit que «les faits qui
motivent la

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demande» et «l'objet de la demande» doivent être désignés dans celle-ci en
abrégé, mats d'une manière précise. C'est avec raison que la défenderesse a
fait observer que cette dernière condition fait complètement défaut en ce qui
concerne les différents montants, d'un total de 213530 fr. 7b, dont le
demandeur a réclamé le paiement. Ces sommes, énumérées sous ch. 14 de la
demande, manquent en effet de toute explication tant soit peu précise.
Plusieurs sont même incompréhensibles: ainsi il est impossible de se rendre
compte de ce que représentent les montants indiqués sous les rubriques «rappel
forfaitaire pour intérêts «marchés particuliers»,«commissions abandonnées» et
«soldes de comptes courants» Qu'est-ce, en effet, qu'un «rappel forfaitaire»
et de quels intérêts s'agit-il? A quels «marchés particuliers» le demandeur
fait-il allusion? avec qui ont-ils été conclus, à quelle époque, à quel prix
et pour quelles marchandises? Pourquoi réclame-t-il le paiement de
«commissions» qu'il déclare «abandonnées» et sur quels contrats sont-elles
dues? Par qui et en faveur de qui ont-elles été abandonnées? De quels «soldes
de comptes courants» s'agit-il? et à quelles dates ces comptes ont-ils été
arrêtés?
Les indications concernant les autres créances (écorces à tan, riz, bidons
pour huile) énumérées sous ch. 14 sont un peu plus explicites, mais néanmoins
insuffisantes. On devine, du moins en ce qui concerne les écorces à tan et le
riz, qu'il s'agit de commissions réclamées sur des contrats d'achat de ces
marchandises, mais quels sont ces contrats? Avec qui, quand, pour quels prix
et pour quelles quantités ont-ils été conclus? Tous ces renseignements
indispensables à l'examen et à l'appréciation des conclusions de la demande
font complètement défaut. Malgré l'indication de la quantité, il en est de
même pour la réclamation ayant trait à «30000 hectos d'alcool». Les 8 articles
du compte relatifs aux intérêts sont également dépourvus de toute explication,
bien qu'il s'agisse de sommes importantes. Quel est le taux de ces intérêts? à
partir de quelle

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date ont-ils été comptés? s'agit-il d'intérêts moratoires ou d'intérêts
contractuels? Sur tous ces points essentiels, la demande est muette. Les
montants formant la créance litigieuse manquent ainsi, sans exception, des
renseignements indispensables à leur compréhension et à leur examen. La
demande n'est donc pas conforme à la prescription de l'art. 89 PCF, lequel
exige une désignation précise des faits qui motivent la demande et de l'objet
de celle-ci.
C'est en vain qu'en réplique le demandeur a voulu justifier ces lacunes de la
demande, en alléguant que la défenderesse savait parfaitement quelles étaient
les sommes dont il lui demandait le paiement. Fût-elle exacte, cette
circonstance ne le dispensait pas de se conformer à la règle de droit strict
de l'art. 89. En outre, il convient de relever, d'une part, que les relations
d'affaires sur lesquelles le demandeur base ses prétentions datent des années
1918-19, soit d'une époque éloignée et, de l'autre, qu'au cours des
pourparlers qui eurent lieu entre les parties de 1920 à 1924, B. Rochat avait
évalué sa créance sur la Confédération à un chiffre considérablement moins
élevé que le montant actuellement rélamé par le demandeur. Il n'est donc
nullement certain que la défenderesse eût su à quoi s'en tenir sur les
différents chefs des conclusions de la demande.
En réplique, le demandeur a voulu remédier, dans ses allégués 125 à 138, à
l'insuffisance de l'allégué no 14 de la demande, mais ces nouvelles
explications ont été fournies trop tard et il n'est pas possible d'en tenir
compte. La procédure civile fédérale est en effet basée sur le principe de la
maxime éventuelle. Aux termes de l'art. 45 de la loi, «tous les moyens à
l'appui de la demande ou de la défense doivent être présentés d'une seule
fois. Les moyens qui n'ont pas été présentés ne peuvent plus être produits
postérieurement, à moins que la loi ne permette une exception», et l'art. 46
interdit aux parties toute modification ultérieure de leurs exposés de fait
qui soit préjudiciable

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à leur partie adverse, sauf les rectifications d'erreurs d'écriture ou de
calcul.
Il ressort de ces deux articles combinés avec l'art. 89 que le demandeur a,
sous peine de forclusion, l'obligation d'exposer de manière précise, dans sa
demande, tous les faits et moyens sur lesquels il fonde ses prétentions. La
réplique, par rapport à la réponse, comme la duplique par rapport à la
réplique, ne sont prévues que pour permettre aux parties de répondre à des
arguments nouveaux et indépendants et non pour suppléer aux lacunes de la
demande et de la réponse (cf. SCHURTER et FRITZSCHE, Das Zivilprozessrecht des
Bundes, vol. I, p. 362 et sv.). Il n'est donc pas possible de tenir compte des
faits que le demandeur eût pu et dû exposer, à l'appui des conclusions de la
demande, déjà dans celle-ci, et qu'il n'a allégués qu'en réplique. N'étant pas
suffisamment précise et détaillée sur des points essentiels, son action doit
être rejetée.
3.- En l'espèce, cette conclusion s'impose d'autant plus que l'attitude du
demandeur et des cédants B. Rochat et Roger Blateau, aux droits desquels il se
trouve, a été contraire aux règles de la bonne foi. Les faits sur lesquels est
basée l'action en paiement de commissions diverses et des intérêts dus sur ces
commissions remontent en effet aux années 1918-1920. De 1920 à juin 1924, des
pourparlers en vue d'un règlement amiable ont eu lieu entre les parties. Or ce
n'est qu'en octobre 1930, soit plus de six ans après l'échec définitif de ces
pourparlers et dix ans après les faits se trouvant à la base du litige, que le
demandeur a saisi le juge de ses réclamations. Un retard aussi considérable,
contraire aux usages en matière commerciale, ne peut s'expliquer par aucune
raison plausible, si ce n'est par l'intention du demandeur de laisser tomber
dans l'oubli les faits déjà anciens, nombreux et compliqués dont la
Confédération aurait pu se prévaloir à l'appui de son refus de le payer, et de
rendre ainsi impossible, ou du moins fort difficile' à la défenderesse
l'administration

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des preuves. Il convient en effet de relever que si, malgré le temps écoulé,
il est resté relativement aisé pour B. Rochat (aux droits duquel se trouve le
demandeur) d'expliquer et, le cas échéant, de prouver des prétentions se
rapportant à des affaires dont il s'occupa personnellement, la situation n'est
pas la même pour la Confédération qui, de 1918 à 1920, était représentée dans
ses relations avec lui par un grand nombre de fonctionnaires appartenant à des
administrations différentes, dont quelques-unes (Division des marchandises du
Département de l'Economie publique, Office de l'alimentation, etc.) ont
licencié leur personnel et ont été dissoutes depuis fort longtemps. Dans ces
conditions, le retard calculé dans l'introduction de la demande apparaît comme
un acte de mauvaise foi caractérisé infirmant et viciant à sa base l'action du
demandeur, bien que, contrairement à l'opinion de la défenderesse, elle ne
puisse pas être considérée comme prescrite (cf. l'arrêt non publié du 25
février 1928 Mary et Melocco c/ Barbezat et Fabrique Zénith et les arrêts
cantonaux cités dans Blätter für zürcherische Rechtsprechung n. F. 7, no 83,
p. 174, Schw. Juristenzeitung 1924, p. 13, et, en ce qui concerne le droit
allemand, STAUB, Kom. z. HGB, notes 147 et 115 b).
4.- ...
Par ces motifs, le Tribunal fédéral rejette la demande.
Decision information   •   DEFRITEN
Document : 59 II 386
Date : 01. Januar 1932
Published : 24. Oktober 1933
Source : Bundesgericht
Status : 59 II 386
Subject area : BGE - Zivilrecht
Subject : Art. 89, 45 et 46 PCF: Dans les actions formées directement devant le Tribunal fédéral, le...


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59-II-386
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