S. 269 / Nr. 49 Handels- und Gewerbefreiheit (f)

BGE 59 I 269

49. Arrêt du 28 décembre 1933 dans la cause Roulet et cons, contre Conseil
d'Etat du Canton de Neuchâtel.


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Regeste:
1. Les règles relatives à la liberté du commerce ne sont pas applicables à
l'entretien des tombes lorsqu'il est considéré comme un service public.
Si le cimetière est une propriété publique, l'autorité n'est pas tenue d'y
tolérer l'exercice d'une industrie privée (consid. 1).
2. Le fait qu'une commune interdit aux jardiniers privés d'entretenir des
tombes pour le compte de particuliers, tandis qu'elle autorise ces derniers à
entretenir personnellement les tombes de leur famille, n'est pas incompatible
avec l'égalité des citoyens devant la loi.

A. - N'étant pas satisfait de la manière dont les tombes de sa famille étaient
entretenues par le jardinier-concierge du cimetière de Beauregard, E. Roulet
informa, le 22 novembre 1932, la Direction de police de la ville de Neuchâtel
que dorénavant il confiait ce soin à M. Baudin, jardinier privé. Mais la
Direction de police lui dénia le droit d'utiliser les services d'un jardinier
privé en invoquant l'art. 14 al. 6 du règlement communal du 23 décembre 1890
sur les cimetières, lequel prescrit que «les concierges ont de droit le soin
des tombes, ainsi que la création et l'entretien des plantations qui les
recouvrent dans le cas où les familles n'y pourvoient pas elles-mêmes». Sur
recours de Roulet et de Paul Baudin et Fritz Virchaux, jardiniers privés, la
décision de la Direction de police a été confirmée, le 14 janvier 1933, par le
Conseil communal de la ville de Neuchâtel.
B. - Par arrêté du 25 juillet 1933 le Conseil d'Etat du Canton de Neuchâtel a
rejeté le recours formé par les prénommés contre le prononcé du Conseil
communal. Il constatait qu'aux termes de la loi cantonale du 10 juillet 1894
sur les sépultures, les cimetières sont des propriétés publiques dont
l'administration et la police appartiennent exclusivement aux communes.
Contrairement à l'opinion des recourants. l'interdiction de faire entretenir
les tombes

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par des jardiniers privés ne datait pas de l'époque (1931/32) où la ville
avait attribué un traitement fixe au jardinier-concierge et commencé à
encaisser elle-même les factures pour l'entretien des tombes, mais était
problablement plus que séculaire. Un rapport du 15 mars 1858 au Conseil
général de Neuchâtel en faisait déjà mention. Le droit exclusif d'entretien
que, comme beaucoup de communes suisses, la ville de Neuchâtel s'était ainsi
réservé dans les cas visés par l'art. 14 al. 6 du règlement du 10 juillet 1894
était une mesure de police prise dans l'intérêt général et non pour des
considérations d'ordre purement fiscal.
C. - E. Roulet, P. Baudin et F. Virchaux ont interjeté un recours de droit
public tendant à l'annulation de l'arrêté du 25 juillet 1933. Les recourants
font valoir notamment que l'interprétation donnée par la commune de Neuchâtel
à l'art. 14 al. 6 du règlement concernant les cimetières est incompatible avec
l'égalité des citoyens devant la loi et avec la liberté du commerce. En
interdisant aux jardiniers privés d'entretenir des tombes pour le compte de
tiers, la ville s'est réservé un monopole qu'aucun motif d'ordre public ne
justifie. La surveillance des jardiniers privés n'offre, en effet, pas plus de
difficultés que celle des membres de la famille d'un défunt, auxquels ce droit
d'entretien est reconnu. N'étant déterminée que par des considérations
fiscales, l'interdiction de s'adresser aux jardiniers privés est contraire à
l'art. 31 CF et crée à leur préjudice une inégalité de traitement interdite
par l'art. 4 CF.
Le Conseil d'Etat du Canton de Neuchâtel a conclu au rejet du recours.
Statuant sur ces faits et considérant en droit:
1.- L'art. 1 de la loi neuchâteloise du 10 juillet 1894 sur les sépultures
prescrit que «les cimetières sont des propriétés publiques dont
l'administration et la police appartiennent exclusivement aux communes». En
harmonie avec l'art. 53 al. 2 CF, aux termes duquel «le droit

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de disposer des lieux de sépulture appartient à l'autorité civile», la
prescription légale susmentionnée considère donc l'administration et la police
des sépultures comme un service public auquel les règles relatives au droit
individuel de la liberté du commerce et de l'industrie ne sont partant pas
applicables. Il s'ensuit que la commune de Neuchâtel est en droit d'organiser
ce service public de la manière qui lui paraît la plus appropriée et,
notamment, de réserver à ses employés l'entretien exclusif des tombes
auxquelles les familles des défunts ne pourvoient pas elles-mêmes.
Etant donné qu'aux termes de l'art. 1 précité de la loi de 1894 les cimetières
sont des propriétés publiques, l'autorité communale ne peut d'ailleurs être
astreinte, déjà pour ce motif, à y tolérer l'exercice d'une industrie privée
(cf. BURCKHARDT, 3e éd. p. 243, le chapitre concernant l'usage des propriétés
publiques, RO 58 I 298).
2.- Les prescriptions communales concernant l'entretien des tombes ne doivent
toutefois pas être entachées d'arbitraire, ni créer entre les intéressés des
inégalités de traitement incompatibles avec l'art. 4 CF. Or les recourants ont
allégué qu'une inégalité de ce genre résulterait de ce que la commune interdit
aux jardiniers privés d'entretenir des tombes pour le compte des particuliers,
tandis qu'elle autorise ces derniers à pourvoir personnellement. à l'entretien
des sépultures de leur famille. Aucune raison plausible ne justifierait cette
différence de traitement. Mais cette opinion n'est pas fondée. Si la commune
accorde aux familles le droit d'entretenir elles-mêmes leurs tombes, cette
autorisation s'explique par des considérations fort compréhensibles de respect
pour les sentiments des survivants, considérations qui ne peuvent s'appliquer
en aucune manière aux jardiniers chargés d'entretenir des tombes pour le
compte de tiers. La différence de traitement instituée par l'art. 14 al. 6 du
règlement communal peut donc se justifier. Ainsi que l'autorité cantonale l'a
fait observer, elle existe à Neuchâtel depuis fort longtemps et

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est conforme à un usage suivi par un grand nombre de
communes suisses (cf. SALIS vol. II n. 740, l'arrêté du Conseil fédéral, du 4
janvier 1895, en la cause Beglinger). Les recourants ont, en outre, allégué
que cette réglementation place les familles qui n'entretiennent pas
elles-mêmes leurs tombes dans une situation d'infériorité en les obligeant à
s'adresser aux jardiniers du cimetière et à payer ainsi un impôt auquel les
autres citoyens ne sont pas soumis. Mais cette critique est manifestement mal
fondée, les recourants ne subissant aucun préjudice de ce qu'ils doivent payer
les travaux d'entretien à l'administration et non, comme ils le voudraient, à
un jardinier privé.
Par ces motifs, le Tribunal fédéral
rejette le recours.
Entscheidinformationen   •   DEFRITEN
Dokument : 59 I 269
Datum : 01. Januar 1932
Publiziert : 28. Dezember 1933
Quelle : Bundesgericht
Status : 59 I 269
Sachgebiet : BGE - Verfassungsrecht
Gegenstand : 1. Les règles relatives à la liberté du commerce ne sont pas applicables à l'entretien des tombes...


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