BGE 58 II 17
5. Extrait de l'arrêt de la l re Section civile du 19 janvier 1932 dans la
cause Gobat contre Masse du concordat par abandon d'actif du "Crédit de
Lausanne S. A.".
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Regeste:
Art. 179 al. 3

SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 179 - 1 Les exceptions dérivant de la dette reprise passent de l'ancien débiteur au nouveau. |
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1 | Les exceptions dérivant de la dette reprise passent de l'ancien débiteur au nouveau. |
2 | Le nouveau débiteur ne peut faire valoir les exceptions personnelles que l'ancien aurait pu former contre le créancier, si le contraire ne résulte du contrat passé avec le créancier. |
3 | Il ne peut opposer au créancier les exceptions que les faits qui ont donné naissance à la reprise de dette lui auraient permis d'opposer à l'ancien débiteur. |
recevable à opposer au créancier les exceptions résultant du rapport juridique
qui existe entre lui et l'ancien débiteur et dont provient la reprise de
dette. Il en serait autrement si le créancier avait accepté d'ériger en
condition du contrat de reprise la validité du contrat passé entre le
reprenant et l'ancien débiteur. Néanmoins le reprenant est toujours en droit
d'exciper du dol personnel du créancier.
Résumé des faits:
Le demandeur, Gobat, est intervenu auprès du liquidateur de la masse du
concordat par abandon d'actif de la société anonyme «Crédit de Lausanne» pour
se faire reconnaître créancier du chef d'un prêt qu'il avait consenti au
Crédit de Lausanne et qui avait été garanti par des titres appartenant à un
tiers. Le liquidateur ayant opposé à cette prétention une contre-réclamation
en payement de la part non versée du montant de 20 actions de la société,
possédées par Gobat, ce dernier a ouvert action devant la Cour civile du
Tribunal Cantonal vaudois. Ensuite d'une transaction intervenue avec le tiers,
les parties sont convenues que litige ne portait plus que sur la somme de 5092
fr. 75, comprenant: 2500 fr. plus 92 fr. 75 à titre d'intérêts, comme premier
versement de 50%, et 2500 fr. comme second versement de 50% sur lesdites
actions. Gobat avait acquis ces actions de Charbonney, qui, après avoir fait
partie du syndicat de constitution de la société, devint le premier directeur
du Crédit de Lausanne. Gobat
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soutenait qu'il n'avait pas acheté ces actions de Charbonney mais qu'il en
était devenu possesseur ensuite de la signature d'un bulletin de souscription
qui lui avait été présenté par Charbonney. Mais, selon, lui, cette
souscription était nulle parce qu'elle était postérieure à la constitution de
la société. Il excipait en outre du dol dont, disait-il, il avait été victime
de la part de Charbonney lors de la souscription des actions.
La Cour civile du Tribunal cantonal vaudois a débouté le demandeur de ses
conclusions et mis à sa charge les frais et dépens de la cause.
Gobat a recouru au Tribunal fédéral en reprenant ses conclusions.
Le Tribunal fédéral a rejeté le recours et confirmé le jugement attaqué.
Extrait des motifs:
(Sous chiffres 1, 2 et 3, le Tribunal fédéral examine et rejette divers moyens
soulevés par le demandeur et relève notamment que ce dernier doit être
considéré comme débiteur du non-versé, soit qu'on s'en tienne aux principes
posés dans l'arrêt Kocher contre Manufacture d'horlogerie de Bévillard S. A.
(RO 50 II p. 473 et suiv.), le dossier fournissant la preuve qu'il a repris la
dette du souscripteur, soit qu'on se range à l'opinion de la Cour cantonale,
d'après laquelle les droits et obligations du souscripteur passent au
cessionnaire par le seul fait du transfert du titre. Puis il aborde l'examen
du moyen tiré du dol dans l'une et l'autre de ces deux hypothèses.)
3 b) - Dans le système de l'arrêt Kocher contre Manufacture d'horlogerie
Bévillard S. A., l'exception du demandeur se heurte à la disposition de l'art.
179 al. 3

SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 179 - 1 Les exceptions dérivant de la dette reprise passent de l'ancien débiteur au nouveau. |
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1 | Les exceptions dérivant de la dette reprise passent de l'ancien débiteur au nouveau. |
2 | Le nouveau débiteur ne peut faire valoir les exceptions personnelles que l'ancien aurait pu former contre le créancier, si le contraire ne résulte du contrat passé avec le créancier. |
3 | Il ne peut opposer au créancier les exceptions que les faits qui ont donné naissance à la reprise de dette lui auraient permis d'opposer à l'ancien débiteur. |
créancier les exceptions que les faits qui ont donné naissance à la reprise de
dette lui auraient permis d'opposer à l'ancien débiteur». Ainsi que
l'enseignent BECKER (art. 179 note 5) et VON TUHR (II p. 775), il résulte de
ce
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texte que le reprenant n'est jamais recevable à opposer au créancier les
exceptions résultant du rapport juridique qui existe entre lui et l'ancien
débiteur et dont provient la reprise de dette. FICK (art. 180 note 9), il est
vrai, soutient le point de vue contraire, mais à tort. Il perd de vue le fait
que le rapport juridique entre l'ancien et le nouveau débiteur, et dont
provient la reprise de dette, ne constitue que le motif de celle-ci, et qu'une
erreur qui ne porte que sur les motifs du contrat n'est pas essentielle (art.
24 al. 2

SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 24 - 1 L'erreur est essentielle, notamment: |
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1 | L'erreur est essentielle, notamment: |
1 | lorsque la partie qui se prévaut de son erreur entendait faire un contrat autre que celui auquel elle a déclaré consentir; |
2 | lorsqu'elle avait en vue une autre chose que celle qui a fait l'objet du contrat, ou une autre personne et qu'elle s'est engagée principalement en considération de cette personne; |
3 | lorsque la prestation promise par celui des contractants qui se prévaut de son erreur est notablement plus étendue, ou lorsque la contre-prestation l'est notablement moins qu'il ne le voulait en réalité; |
4 | lorsque l'erreur porte sur des faits que la loyauté commerciale permettait à celui qui se prévaut de son erreur de considérer comme des éléments nécessaires du contrat. |
2 | L'erreur qui concerne uniquement les motifs du contrat n'est pas essentielle. |
3 | De simples erreurs de calcul n'infirment pas la validité du contrat; elles doivent être corrigées. |
tirées du contrat entre les deux débiteurs et les exceptions prises de l'acte
juridique qui est à la base dudit contrat. Tandis que, d'après lui, les
dernières ne sont jamais opposables au créancier, les premières ne le seraient
que «falls im Vertrag zwischen Gläubiger und Übernehmer auf die Abmachung
zwischen den beiden Schuldnern Bezug genommen und sie als Grundlage ihres
Vertrages hingestellt wurde». Il va de soi que cette réserve s'accorde
parfaitement avec l'interprétation ci-dessus: le motif qui a amené une partie
à contracter devient, en effet, juridiquement opérant si le cocontractant a
accepté de l'ériger en condition du contrat.
Aussi bien, les travaux préparatoires du CO ne laissentils aucun doute sur
l'intention du législateur en ce qui concerne la question de savoir si et à
quelles conditions le reprenant peut opposer au créancier l'exception de dol
qu'il a contre l'ancien débiteur. Le projet de révision de 1905 renfermait un
article 1209 al. 3 de la teneur suivante: «Il (le reprenant) ne peut opposer
au créancier les exceptions que le contrat de reprise de dette aurait permis
au reprenant de faire valoir contre le débiteur, à moins qu'elles ne soient
dirigées contre l'existence même de ce contrat». A la séance de la Commission
d'experts du 13 octobre 1908, Wieland proposa de modifier le texte comme il
suit: «Die Einreden, die dem Übernehmer gegen den Schuldner aus dem der
Schuldübernahme zu Grunde liegenden Rechtsverhältnisse zustehen, können gegen
den Gläubiger,
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der sich in gutem Glauben befindet, nicht geltend gemacht werden». Cette
proposition allait à la fois plus loin et moins loin que le projet: plus loin,
en ce sens que le reprenant ne pouvait même pas opposer au créancier ses
exceptions contre l'ancien débiteur, lorsqu'elles étaient dirigées contre
l'existence du rapport à la base de la reprise; moins loin, d'autre part, en
ce sens qu'en cas de mauvaise foi du créancier, toutes les exceptions du
reprenant contre l'ancien débiteur lui étaient opposables. La Commission
écarta la proposition de Wieland et à la majorité se rangea à la manière de
voir de l'auteur du projet. Mais le projet de 1905 et celui qui est sorti des
délibérations de la Commission mettaient à la base de la réglementation de la
reprise de dette la «Genehmigungstheorie», et, en partie, la théorie de la
«Kollektivofferte». La Commission du Conseil National et les Chambres à sa
suite ont quitté ce terrain pour se placer sur celui de la «Vertragstheorie»
(cf. Bull. stén. Cons. Nat. 19 p. 555 et suiv.; Cons. des Et. 1920 p. 185 et
suiv.). Logiquement, les Chambres devaient dès lors reconnaître avec Wieland,
que le reprenant n'a le droit d'opposer au créancier aucune de ses exceptions
envers l'ancien débiteur, pas même celles qui sont dirigées contre l'existence
même de la dette. C'est du reste ce qu'elles ont fait, et si elles n'ont pas
repris expressément l'exception de Wieland pour le cas où le créancier est de
mauvaise foi, cette exception résulte toutefois des principes généraux, dans
la mesure du moins que le créancier a amené dolosivement le nouveau débiteur à
reprendre la dette. Car si le créancier s'est borné à connaître le dol de
l'ancien débiteur, il est bien de mauvaise foi, mais il n'agit dolosivement
que si, d'après les circonstances, il n'avait pas dû se taire vis-à-vis du
nouveau débiteur. Si, d'après les circonstances, il devait parler, ou s'il a
amené par des actes dolosifs le nouveau débiteur à reprendre la dette, ce
n'est pas le dol de l'ancien débiteur que le reprenant est fondé à lui
opposer, c'est son propre dol à lui, créancier. (Dans ce sens le rapport de
Huber au Conseil National,
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loc. cit. p. 557; cf. également HOFFMANN, Conseil des Etats 1920 p. 186. Dans
le même sens aussi, en Allemagne, sur la base du § 417 al. 2 BGB, dont l'art.
179 al. 3 est la reproduction, le commentaire de STAUDINGER, Vol. II première
partie, p. 882 II second alinéa).
Or, en l'espèce, rien n'autorise à dire que le Crédit de Lausanne ait jamais
accepté d'ériger en condition de la reprise de dette la validité du contrat
passé entre le demandeur et Charbonney. seul ou avec ses associés.