B. STRAFREGHTSPFLEGE ADMINISTRATlON DE LA JUSTICE
PÉNALEI. Markenrecht. Marques de fabrique.

27. Arrèt du 23 mars 1909 dans la cause il.-A. Moser & Gie et Baumann
contre H.. Moser & Cie.

Question de procédure {consid. 1 4): Qualité pour se pourvonen cassation,
d'après l'art. 161 OJF. Recevahilité d'un recours en eassation
contre un prononeé basé sur le verdiet d'un jury. -Reeevabilité
de recours en eassatjon concernant l'application de conventions
internationales. Relation entre le reeours en cassation penale et
le recours de droit public (art.. 182 al. 2 OJF). -Interpretation de
l'art. 173 OJF, lorsqu'i]. s'agit du verdict d'un jury.

Question de fond (consid. 5 7): Mise en vente de montres revetues de
l'imitation d'une marque figurative. Condemnetion basée sur l'art. 24
litt. e. de Ia LF concernant la protection des marques de fabrique et
de commerce.

A. La Société H. Moser&0fe,fabricants d'horlogerie av. Locle, est
propriétaire de la marque n° 14 915, enregistrée eu bureau fédéral de
la propriété intellectnelle le 19 aoùt 1902. La marque, destinée à etre
appliquée sur des montres ou des parties de montres, consiste dans la
raison socialeinserite dans un rectangle: Hy Moser & Cie.

Informée per une lettre anonyme, du 12 septembre 1907, qu'un sieur
H. Baumann, à La Chaux-de-Fonds, fabriquait des, montres portent la
marque Moser & 0, la société du LocleI. Markenrecht. N° 27. 173

se livre, à une enquéte et déposa le 21 janvier 1908 une Plainte pour
contravention à la loi federale sur la protection des marques de fabrique
et de commerce et demanda. au Juge d'instruction de La Chaux-de-Fonds
de vouloir bien:

1° procéder à une saisie chez MM. H. Baumann & Cie, sur toutes les
montres et pièces constituant l'imitad tion et la contrefaqon

2° procéder à la saisie des livres et documents de na.p ture à permettre
d'éteblir l'importance des dommages causés aux plaignants;

3° saisir entre les meins de la maison Lemrich, Gui nand & Gie les
grosses de eadrans portant 1a mai-que J. A. Moser & C'è.

40 donner suite à la. plainte

La plaignante se portait en meme temps partie civile pour une somme de
10 000 fr.

Elle invoquait en substance le fait qu'une demoiselle Louise Schindler
aurait declare avoir fini et poli, de mai à juillet 1907, pour la maison
H. Baumann, des boîtes de montres, parmi lesquelles il s'en trouvait un
bon nombre portam; la. marque Moser & Cie, encadrée. De méme, une maison
de La Cheux-de-Fonds aurait fait et livré plusieurs grosses de casdrans
portant la marque J. A. Moser & Cie dans une legende rectanguleire. Enfin,
le bureau du Registre du commerce déclarait qu'une reisen J. A. Moser &
Cie n'était pas inserite. La. plaignante mettait donc en deute l'existence
d'une telle maison.

B. Le juge d'instruotion ordonna une visite domiciliaire chez Baumann,
visite qui eut lieu le 13 février 1903.

Baumann remit au juge Vingt cartons contenant chacun six montres
portant la marque J. A. Moser & Cie, ainsi que deux cai-tons incomplete
contenant ensemble huit pièces portant la. méme marque. Au cours de son
interrogatoire, auquel il _fut procédé le meme jour, Baumann declare
etre associé avec un sieur Kleiner pour le commerce d'horlogerie. Il
produisit un contrat passe le 1" mai 1907 avec la société J. A. Moser &
O il Charquemont (France). Aux termes de ce contrat, 1a

174 B. Stratrechtspflege.

maison de Charquemont cede à la maison Baumann & Kleiner le monopole
exclusif de sa fabrication. De leur cöté, ceux-ci s'engagent a prendre
toute la production de la maison Moser. De plus, il était stipulé que
(toutes les montres porteront sur le cadran et la cuvette la raison
commerciale J. A. Moser & Cie . Cette société étant régulièrement
constituée en France au dire de Baumann, celui-ci estimait qu'il pouvait
acheterî les produits de Moser sans enfreindre la loi.

Il ressort, d'autre part, du dossier de l'enquète penale que la maison
Lemrich, Guinand & Cis a bien recu, par l'intermediaire de Baumann,
des commandes de cadrans portant les mots J. A. Moser dans un rectangle
et qu'elle les a livres à Baumann. La polisseuse de boîtes, Louisa
Schindler, a, de son còté, confirmé devant le juge d'instruction sa
déclaration écrite du 19 septembre 1907, qui est reproduite en partie
dans la plainte. Dans cette déclaratiou, demoiselle Schindler affirmait
que le mot Moser de la marque était précédé d'une lettre ou d'un signe
qu'elle n'avait pu déchiffrer. Lors de son audition devant le juge, elle
déposa que cette lettre ou ce signe avait quelque ressemhlance avec la
lettre H .

Le 3 mars 1908, les plaignants produisirent le numéro du 12lfévrier de
la meme année, du journal Le Petit Montbééiardazs portant en quatrième
page la publication de la Société J. A. Moser & Cie, constiiuée pour la
durée de cinq aus, a partir du 4 février 1908.

Be 4 mars 1908, la Société H. Moser & Cie étendit sa plamte à. l'associé
de Baumann, le sieur Kleiner, en reprenant

'contre lui les chefs d'accusation formulés contre Baumann.

C. Les prévenus soulevèrent une exception préjudicielle par acte du 15
mai 1908, en concluant à. ce qu'il plùt à la. Chambre d'accusation:

1° Ordonner la suspension de la poursuite penale.

2° leer aux plaignants un délai péremptoire pour l'ouverture de l'action
civile, devant les tribunaux francais compétente, contre J. A. Moser &
C)ie pour obtenir soit l'annulation de cette société ou de sa raison
sociale, soit l'interdiction de l'usage de cette raison comme marque de
fabrique ou de commerce.I. Markenrecht. N° 27. 175

A l'appui de leur demande, les prévenus faisaient valoir en substance
les moyens suivants: La Société J. A. Moser

' & Cie existerait en fait déjà. avant le 8 février 1908 et elle

aurait le droit de marquer ses produits de sa raison commerciale. En vertu
de l'art. 8 de la convention de Paris pour la protection de la propriété
industrielle, du 20 mars 1883, le nom commercial .] . A. Moser & CW,
utilisé comme marque, devrait etre protégé en Suisse, dans la mesure où
il est vraiment un nom commercial . Au surplus, la reisen de commerce
de la maison de Charquemout se distinguerait nettement de la raison
Hy Moser & Cie et pourrait coexister avec elle. Enfin, les prévenus
invoquaient leur bonne foi.

Les plaignants s'opposèrent à la demande de suspension en soutenant, dans
leur réponse du 7 juillet 1908, que la marque de fabrique incriminée était
de nature à créer une reelle confusion dans l'esprit de l'acheteur,
que la société J. A. Moser n'existait pas avant le 4 février 1908 et que,
si meme on admettait son existence, le nom commercial, encadré dans
un rectangle, constituait une marque de fabrique imitant leur marque
suisse. Ge délit étant commis sur territoire suisse, les tribunaux suisses
seraient compétents pour connaître de l'action intentée, en conformité
de l'art. er litt. {; et e de la loi fédérale sur les marques de fabrique.

D. Par arr'èt du 28 juillet 1908, la Chambre d'accusation du canton
de Neuchatel déclara la requète des prévenus mal fondée et renvoya le
dossier de la cause au Juge d'instruction pour suivre a l'enquète pénale.

Ce prononcé est base sur le motif que les moyens invoqués sont des moyens
libératoires, rentrant dans le cadre de l'action pénale, et qu'ils peuvent
ètre examinés par le juge pénal sans intervention d'un preces civil.

Le 31 aoùt 1908, la Chambre d'accusation prononca le renvoi de Baumann
et de Kleiner devant le Président du Tribunal correctionnel de La
Chaux-de-Fonds, siégeant avec l'assistance du jury, sous la prévention
d'avoir imité, de manière a induire le public en erreur, la marque Hy
Moser & C' et d'avoir mis en vente ou en circuiation des produits revètus
d'une marque qu'ils savaient ètre imitée, délits prévus aux

176 B. Strafrechtspflege.

art. 24 litt. a et c, et 25 de la Ioi federale du 26 septembre 1890.

E. Les débats eurent lieu le 23 octobre 1908, et le jury rendit un
verdicf, déclarant Baumann coupable d'avoir, au cours des années 1907 et
1908, commis les infrantions dont il était accusé. Par le meme verdict,
le jury réponslait negativement à. la question de sevoir si Baumann
avait commis ces infractions par simple faute, imprudence ou négligence.
Il admettait, par contre, qu'il en était bien ainsi pour Kleiner.

Ensuite de ce verdict, le Président libera Kleiner et condamna Baumann
a 1000 fr. d'amende, ainsi qu'aux frais, en faisant application des
art. 24 et 25 de la loi sur la protection des marques de fabrique.

F.C'est contre ce prononcé que, par déclarations déposées au greffe du
Tribunal de La GhauX de-Fonds le 2 novembre 1908, Baumann et .I. A. Moser
& Cia ont recouru en cassation auprès du Tribunal fédéral.

Jean-André Moser et Brulard, soit la société J. A. Moser & Cie, ont
présenté le 6 novembre 1908 le mémoire prévu à. l'art. 167 OJF. Baumann en
a fait de meme le 9 novembre suivant. Ses conclusions sont les suivantes :

1° Annuler le jugement du tribunal correctionnel, conformément à
l'art. 172 OJF.

2° Subsidiairement, annuler le dit juge-ment et renvoyer l'affaire pour
nouvelle decision, en conformité de l'art. 173 OJF.

Les recourants J .-A. Moser & Cî'e ont conclu à ce qu'il plùt à la Cour
de cassation:

1° Annuler le jugement du tribuna! correctionnel.

2° Renvoyer l'affaire à l'autorité cantonale pour statuer à. nouveau.

Les intimés, H. Moser & Ci, ont conclu à ce que les recours fussent
déclarés mal fondés, sous suite de tous frais et dépens.

Stamani sur ces faits et conside'rant en droit : 1. Il y a lieu d'écarter,
tout d'abord, comme irrecevabie, ie pourvoi en cassation de .I. A. Moser &
Cie. En présenceI. Markenrecht. N° 27. 177

du texte de l'art. 161 al. 1 OJF, le seul fait que les intéréts d'une
personne se trouvent lésés par la decision incriminée, ne suffit pas
pour lui conférer le droit de recourir auprès de la Cour de cassation
du Tribunal fédéral. Il faut en nutre que cette personne seit partie
au procès pénal. Or, il n'en est pas ainsi en l'espèce. La société de
Charquemont n'a aucunement été impliquée comme partie dans le procès
pénal, elle n'a donc pas pu etre atteinte comme telle par le prononcé
de l'instance cantonale. Dès lors, elle n'a pas qualité pour recourir
en cassation contre ce jugement.

La société recourante invoque a tort l'arrèt du Tribunal fédéral rendu
le 6 décembre 1905, en la cause Procureur général du canton de Neuchatel
contre Wyss et consorts (RO 31 I pag. 711). Get arrét n'étend en aucune
faqon la qualité de parties à toutes les personnes dont les intéréts
peuvent ètre atteints par la decision susceptible de recours. Au
contraire, il restreint le sens et la portée du terme parties en
l'unissant indissolublement aux mots atteintes par la décision . Il
faut donc que le recourant soit à la fois partie et atteint dans ses
intérèts personnels.

2. Le Tribunal fédéral doit, par contre, entrer en matière sur le recours
de H. Baumann. Le fait que la Cour de cassation se trouve en présence
d'un prononcé basé sur le verdict d'un jury n'exclut pas sa competence
pour connaître du recours (voir l'arrét rendu, le 15 juillet 1907, par
la Cour de eassation fédérale dans la cause Société anonyme Höchster
Farbwerke contre Heim, RO 33 I pag. 656 et suiv.). Cette circonstance
est seulement de nature à rendre illusoire, dans le plus grand nombre
des cas, le recours au Tribunal fédéral, la décision cantonale n'étant
pas motivée et la procédure devant le jury étant orale. Il sera donc
le plus souvent impossible de savoir sur quels faits le verdict du jury
est base et quels considérants de droit le justifient. Malgré les graves
inconvenients qui résultent de cette Situation, le Tribunal fédéral ne
peut se refuser à examiner si les réponses données par le jury impliquent
une violation du droit fédéral. A cet effet, il lui incombe d'euvisager
successivement tous les états

AS 35 1 _ 1909 ' 12

178 B. Strafrechtspflege. ,

de fait que le jury a mo admettre comme constants, puis, en se placant
tour al tour dans chacune de ces hypothèses, d'examiner si le jury a fait
une juste application de la loi (cf. RO 33 I pag. 657, arrét Cité). Les
art. 160 et suiv. OJF n'indiquent pas quelle forme les jugements cantonaux
doivent revètir pour que le recours en cassation soit recevable. Les.
cantons sont libres d'organiser l'instance chargée de connaître des
infrantions à la loi sur les marques de fabrique, et la circonstance qu'un
juryr est appelé à trancher les questions de fait et de droit du litige
est indifferente au point de vue de la competence du Tribunal fédéral.

Le Tribunal fédéral ne pourrait d'ailleurs pas se prémunir contre les
difficultés résultant du fait que l'on est en présent-e d'un verdict
du jury, en renvoyant l'affaire à. l'instance cantonale pour nouvelle
decision, ainsi que le demande le recourant. L'art. 173 OJF suppose
dans la règle un jngement basé snr des constatations de fait et sur des
considérants de droit, condition qui n'est pas réalisée en l'espèce,
puisque la délibération des jurés ne donne pas lieu à. la reduction d'un
procès-verbal. Tout au plus pourrait-on faire application de l'art. 173
lorsque les réponses du jury sont ineomplètes et qu'il faut combler
cette lacune. Or, il n'en est rien dans la présente cause. Le jugement
cantonal n'est entaché que des vices de forme qui sont inhérents aux
décisions rendues sur la base du verdict d'un jury. .

II y a donc lieu d'écarter le chef de conclusions subsidialredu recourant
relatif an renvoi de la cause. Une nouvelle décision ne ferait disparaître
aucune des difficultés présentes.

3. A teneur des art. 160 et 163 OJF, le Tribunal federal est competent
pour connaître du present recours fondé sur une prétendue violation
des art. 868 GO, 24 et 25 de la lor sur les marques de fabrique. Il
l'est également en ce qui concerne les art. 2, 3 et 8 de la convention
internationale pour

la protection de la propriété industrielle, conclue à Paris le

20 mars 1883. si _ . On doit, en effet, donner aux mots dispos1t10n
du (iron; federal le sens large de toute loi, ordonnance,
disposmoul. Markenrecht. N° 27. lila

legale quelconque émanant d'une autorité fédérale competente (cf. Message
du Conseil federal du 5 avril 1892 pag. 91; REICHEL, Comment-rire ad
art. 163; TH. WEISS, Rewe penale suisse 13 pag. 143). :

L'art. 182 al. 2 OJF réserve , d'autre part, expressément le recours de
droit public pour violation de traités internationaux, pour autant que
les de'cisions des autorités can tonales ne peuvent etre attaqnées par les
voies de droit indiquées par la présente loi en matière civile et penale.

Suivant un arrèt fondamental du Tribunal fédéral, rendn le 1er mai 1901,
en la cause Müller & Cie contre Nordostbahngesellschaft (RO 27 I pag. 192
et suiv.), le recours de droit public réservé par l'art. 182 al. 2 n'est
admissible que dans le cas où les dispositions de droit public des traites
sont violées, mais non dans les cas où la violation ne porte que sur
des dispositions de droit privé. A teneur de la disposition citée, il
en est de meme pour les differ-ends de droit pénal auxquels une voie, en
matière penale, est onverte par l'organisation judiciaire fédérale. Dans
ce cas, cette voie de droit a le pas sur celle da recours de droit public,
alors meme que le droit pénal applicable soit contenu dans un traité.

Daus ces conditions, c'est bien la voie de la cassation penale qui est
ouverte au recourant, en l'espèce.

Par contre, le recours est irrecevable en tant qu'il a trait à l'art. 31
CF concernant la liberté de commerce et d'industrie. Aux termes
du chili. 3 de l'art. 189 OJF, le recours visant cette disposition
constitutionnelle rentre dans la competence du Conseil fédéral.

4. Quant au fond, le reproche du recourant que l'enquete du juge
d'instruction aurait été sommaire ne peut etre prie en considération
par le Tribunal fédéral. Il en est de meme des critiques adresse'es aux
dépositions de dame Schindler. Ce sont là des questions de procédure
relevant exclusivement dn droit centonal, que le Tribunal fédéral ne
peut revoir. Le fait que Ia demande de suspension du procès pénal a ete
écartée par la Chambre d'accusation ne seurait, pour les mémes motifs,
fonder le recours.

180 B. Strafrechtspflege.

En ce qui concerne l'application de l'art. 173 OJF, le Tribunal fédéral
est dans l'impossibilité de contròler si la question du droit a la raison
sociale .LA. Moser & Cis compétant à la maison de Charquemont a. été
effectivement examinée par le jury. Mais meine si l'on admet que le jury
ne s'est pas occnpé de cette question, il ne suit pas de là qu'il faille
renvoyer le dossier a l'iustance cantonale pour complément d'enquète.
Il s'agit en efl'et de la question de culpabilité; le reoourant a-t-il
imité la marque H. Moser & Cie? Pour résoudre cette question, une nouvelle
instruction n'est pas nécessaire, les pièces du dossier étant suffisantes
à cet efiet.

De plus, il est inexact d'affirmer que le jury n'a pas examiné cette
question. Le Président du tribunal s'est conformé à l'art. 433 Cpc
neuchateiois. Si pour résoudre les questions il et 3 du programme,
celle de l'imitation de la marque et celle de la culpabilité, le jury a
dù trancher au préalable la question des droits appartenant à la société
de Charquemont, il y 9. lieu d'admettre qu'il a répondu implicitement à
cette question dans son verdict. En tout cas, il n'est nuilement prouvé
que le jury ait omis de prendre en considération un des éléments à la
base de la question de culpabilité.

En conséquence, Pergament du recourant, tiré de l'art. 173 OJF, ne
saurait justifier le pourvoi en cassation.

5. Le principal moyen du recourant consiste à soutenir qu'on est en
présence d'une violation des art. 868 GO et 24 de la loi sur les marques
de fabrique. Les deux raisons sociales, J .-A. Moser & Cie et Hy Moser &
Cie, se distingueraient suffisamment pour pouvoir coexister. Tout au plus
peurrait-il y avoir concurrence déloyale an sens des art. 50
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 50 - 1 Haben mehrere den Schaden gemeinsam verschuldet, sei es als Anstifter, Urheber oder Gehilfen, so haften sie dem Geschädigten solidarisch.
1    Haben mehrere den Schaden gemeinsam verschuldet, sei es als Anstifter, Urheber oder Gehilfen, so haften sie dem Geschädigten solidarisch.
2    Ob und in welchem Umfange die Beteiligten Rückgriff gegeneinander haben, wird durch richterliches Ermessen bestimmt.
3    Der Begünstiger haftet nur dann und nur soweit für Ersatz, als er einen Anteil an dem Gewinn empfangen oder durch seine Beteiligung Schaden verursacht hat.
et suiv. CO.

L'intimée, de son cöté, soutient qu'en tout état de cause la société
de Charquemont n'avait pas ie droit d'employer la marque J. A. Moser &
Cie dans un encadrement rectangulaire, attendu qu'elle n'a pas déposé de
marque de fabrique et qu'en France la raison sociale affectant une forme
distinctive en l'espèce un rectangle est considérée comme une marque de
fabrique soumise à l'obligation du dépöt.

Le verdict du jury n'indiquant pas les constatations de
faitI. Markenrecht. N° 27. 181

et les considérants de droit qui sont à sa base, le Tribunal fédéral
est obligé d'examiner les différents points de vue auxquels les jurés
ont pu se placer.

a) Il est possible que le jury ait admis qu'avant le 4 février 1908 la
société J.-A. Moser & (li'i n'existait pas. Toutefois, la culpabilité du
recourant n'en résuite pas nécesseirement, puisque ce fait n'implique pas
sans autre Famila-lion de la raison H' Moser & Cie. Par contre, dans cette
eventualité, on doit considérer comme mal fondé le moyen du recourant
consistant à dire qu'il n'est pas coupable parce qu'il n'a fait qu'user
de sen droit en utilisaut une raison commerciale régulièrement constituée.

Mais si le recourant essaie de soutenir, contrairement à. l'opinion ci
dessus indiquée, que d'après le droit francais une société et une raison
J .-A. Moser & 01° existaient déjà avant le 4 février 1908, étant donné
qu'en France les contrats de société simplement verbaux sont salables,
alors la Cour de cassation ne peut le suivre sur ce terrain. En efiet,
la question de savoir si la société J.-A. Moser & C a été régulièrement
constituée en France, est une question relevant uniquement du droit
étranger, dont l'examen échappe à la Cour de cassation fédérale.

b} Est-'on en présence d'une imitation de la marque Hy Moser & Cie?

Pour trancher cette question, il faut examiner la nature des marques
en présence.

S'il s'agit de raisons de commerce employees comme marques, elles sont
protégées de plein droit, moyennant l'accomplissement des formalités
prescrites pour la reconnaissauce de ces raisons (Loi sur les marques
art. 2; CO art. 865 et sehr.).

Si done, en conformité de l'art. 868 GO, les deux raisons en présence
se distinguent nettement tout en utilisant le meine nom, il ne peut étre
question d'imitation.

En l'espèce, la difference entre les deux raisons de commerce peut étre
considérée comme suffisante au regard de l'art. 2
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 2 - 1 Haben sich die Parteien über alle wesentlichen Punkte geeinigt, so wird vermutet, dass der Vorbehalt von Nebenpunkten die Verbindlichkeit des Vertrages nicht hindern solle.
1    Haben sich die Parteien über alle wesentlichen Punkte geeinigt, so wird vermutet, dass der Vorbehalt von Nebenpunkten die Verbindlichkeit des Vertrages nicht hindern solle.
2    Kommt über die vorbehaltenen Nebenpunkte eine Vereinbarung nicht zustande, so hat der Richter über diese nach der Natur des Geschäftes zu entscheiden.
3    Vorbehalten bleiben die Bestimmungen über die Form der Verträge.
de la loi fédérale
sur les marques et de l'art. 868
SR 220 Erste Abteilung: Allgemeine Bestimmungen Erster Titel: Die Entstehung der Obligationen Erster Abschnitt: Die Entstehung durch Vertrag
OR Art. 868 - Für die Verbindlichkeiten der Genossenschaft haftet das Genossenschaftsvermögen. Es haftet ausschliesslich, sofern die Statuten nichts anderes bestimmen.
CO,

182 B. Strafrechtspflege.

étant donné que les initiales des prénoms ne sont nullement semblables.

La condamnation du recourant ne serait done pas justifiée dans cette
hypothèse, puisqu'il n'aurajt fait qu'user de son droit.

Mais cette éventualité n'est pas la seule possible.

1° Le témoin dame Schindler a déclaré qu'il y avait devant le mot Moser,
inscrit dans les boites qu'elle a polies, une lettre ou un signe qui
avait quelque ressemblance avec la lettre H. .

Les jurés ont eu connaissance de cette déposition, qui a été lue
aux débats. Ils ont donc pu admettre qu'on était en présence d'une
imitation. Cette opinion est parfaitement soutenable en droit. En tout
état de cause, elle n'implique pas une violation d'une disposition du
droit fédéral.

Le Tribunal fédéral ne peut prendre en considération le moyeu du recourant
tendant a infirmer le témoignage de dame Schindler en lui opposant les
dépositions des autres témoins entendus aux débats. Il est impossible
au Tribunal federal de contröler l'appréciation des témoignages par le
jury. Les débats devant cette instance sont purement oraux et il n'en
subsiste aucune trace. De plus, le Tribunal fédéral doit prendre en
considération la possibilité que les jure's ont tenu pour l'expression
de la vérité le témoignage de dame Schindler.

Des lors, le jury ayant pu admettre comme fondée l'accusation dirigée
contre Baumann du chef de l'imitation de la marque Hs Moser & Cie,
le recours doit etre écarté pour ce premier motif déjà.

2° D'autre part, une seconde conjecture est également admissible. On
peut soutenir qu'il s'agit non de simples raisons de commerce, mais
de vraies marques figuratives consistant dans le nom et l'encadrement
rectangulaire. L'adjonction de cette figure géométrique au nom changerait
la nature de la marque. Cette opinion est défendable tant au regard du
droit suisse qu'à celui du droit francais.

D'apres le droit suisse, la raison de commerce, utiliséeI. Markenrecht. N°
27. 183

comme marque, n'est autre chose que le nom commercial appliqué sur les
produits ou sur leur emballage. Toute adjonction d'un motif décoratif
change par conséquent la nature juridique de la marque, pour autant
qu'il en est un élément essentiel. Cette condition est réalisée par le
rectangle entourant la marque des plaignants.

Le droit francais fait aussi des distinctions. Il n'admet pas l'emploi de
la simple raison de commerce comme marque. Mais il considère qu'on est en
présence d'une marque de fabrique valable dès que la raison commerciale
revét une forme particulière. C'est ainsi que le nom du fabricant peut
iui servir de marque à condition qu'il aflecte une forme distinctive,
par exemple la signature avec paraphe, la disposition du nom en cercle
ou en carré, l'emploi d'un encadrement Spécial etc. (cf. POUILLET,Marques
dc fabrique,4° éd. n° 60).

Mais si l'on admet qu'on est en présence d'une marque figurative, les
dispositions légales relatives aux raisons de commerce sont dénuées
d'intérét. Et dans cette hypothès'e, l'imitation est parfaitement
admissible, étant donné surtout que le public peut étre induit en erreur
d'autant plus facilement que l'inscription dans les boîtes de montres
et sur les cadi-ans est minuscule. A cet égard, la difference existant
entre les initiales des prénoms des deux raisous commerciales en cause
ne joue pas un role décisif.

Or, en fait, le recourant a mis en vente des montres revetues de la marque
.I.-A. Moser & Cie insorite dans un rectangle. Cela ressort notamment de
la déposition de dame Lemrich suivant laquelle Baumann a fait faire des
cadrans portant la raison .I.-A. Moser & Cie entourée d'un rectangle. Il
est indifferent qu'il ait fait cette commande en sen nom et pour sen
compte ou sur l'ordre de la société francaise. En tout état de cause,
le recourant a vendu ou mis en vente des montres munies de ces cadrans,
puisque, aux termes du contrat conciu avec la maison .I.-A. Moser & 0,
ii devait prendre toute la production de cette maison. L'art. 24 litt. c
de la loi federale est donc applicable en l'espèce.

Dans cette hypothèse le verdict du jury se justifie.

184 B. Strafrechtspflege.

_ 3° Enfin, il est possible que les jurés ont combine les deux dernières
conjectures. D'un còté, ils ont admis qu'il y avait imitation, comme
le témoignage de dame Schindler le faisait présumer et, de l'autre,
ils ont considéré qu'il s'agissait d'une marque figurative.

Dans cette éventualité également, la décision du jury ne saurait etre
cassée.

6. Le recourant invoque encore la violation de l'art. 25 al. 8 de la loi
fédérale sur les marques de fabrique. Aux termes de cette dispositicn,
les infractions ne sont pas pnnissables lorsqu'elles ont été commises
par simple faute, imprudence ou négligence. Or, le recourant soutient
qu'il a toujours ern que le nom commercial .I.-A. Moser jouissait de la
protection legale. Il n'aurait donc pas commis la contravention sciemment
et il ne saurait par suite ètre puni.

Cette question de la bonne foi du recourant est sans deute une question
de droit seumise à la revision du Tribunal fédéral. Gependant, qu'on
admette l'une ou l'autre des hypothèses ci dessus émises, le caractère
intentionnel de l'acte de Baumann subsiste.

En effet, celui-ci devait connaître la marque des plaignants, car elle
est enregistrée au bureau fédéral de la propriété intellectuelle et
elle a été publiée. L'imitation de la raison commerciale, soit de la
marque figurative des plaignants ne pom-uit avoir d'autre but que de
provoquer la confusion entre les produits des deux maisons. L'opinion du
recourant que la raison de commerce J .-A. Moser & Cie était régulièrement
constituée est indifferente a cet égard, puisque les principes régissant
la protection des raisons de commerce comme telles ne sont pas en jeu ici.

7. En ce qui concerne les dispositions de la convention de Paris que le
recourant a invoquées, les art. 2 et 3 ne sont pas applicables dans la
présente espèce. Ils concernent l'égalité de traitement en ce qui touche
les marques de fabrique des ressortissants des Etats signataires de la
convention. On est, il est vrai, en présence de deux marques de maisons
faisant partie d'Etats signataires différents, mais laI. Markenrecht. N°
27. 185

marque francaise n'a pas été enregistrée en Suisse; aux termes
des articles cités, elle n'a donc pas droit à la protection en
Suisse. D'ailleurs Baumann lui-meme n'indique pas en quoi et comment
ces dispositions ont été Violées. Nulle part il ne fournit la preuve
qu'il a rempli les conditions et les formalités imposées par la loi et
la convention pour que la reisen commerciale .I.-A. Moser & Cie doive
étre protégée en tant que marque de fabrique.

En ce qui concerne la violation de l'art. 8 de la convention, invoquée
parle recourant, il est à remarqner que cette disposition n'a trait qu'à
la raison de commerce et non a la marque de fabrique. Elle n'a en vue
que la protection du nom commercial comme tel, sans se préoccuper de
la question de savoir si cette raison fait partie ou non d'une marque
de fabrique. Le jury pouvait donc parfaitemeut rendre un verdict de
culpabilité sans prendre en considération cette protection due au seui nom
commercial. En effet, le prononcé du jury peut parfaitement se justifier,
ainsi que l'indique le considérant 5 ci-dessus, si l'on part de l'opinion
qu'on est en présence d'une imitation de la marque des plaignants, car
dans ce cas la protection due aux deux raisons oommercéales, comme telles,
ainsi que la relation existant entre ces raisons sont sans importance.

Par ces motifs,

Le Tribunal fédéral prononce:

I. Il n'est pas entré en matière snr le recours de .I.-A. Moser & Cie.
II. Le recours de H. Baumann est écarte.
Decision information   •   DEFRITEN
Document : 35 I 172
Date : 23. März 1909
Published : 31. Dezember 1909
Source : Bundesgericht
Status : 35 I 172
Subject area : BGE - Verfassungsrecht
Subject : B. STRAFREGHTSPFLEGE ADMINISTRATlON DE LA JUSTICE PÉNALEI. Markenrecht. Marques de


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OR: 2  50  868
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