288 A. staats-rechtliche Entscheidungen. I. Abschnitt. Bundesverfassung.

sondern der gegenwärtigen Niederlassung des Rekurrenten in St. Gallen
handelt. Anders verhielte es sich wohl, wenn der Rekurrent die frühere
Niederlassung nur deshalb formell aufgegeben hatte, um der drohenden
Ausweisung zu entgehen und gestützt auf Art. 45 Abs. 2 BV neuerdings
Niederlassung in St, Gallen zu nehmen Etwas derartiges wird aber von
den st. gallischen Behörden nicht behauptet

Der Reims ist-daher gutzuhelsseu unter Aufhebung der angefochtenen
Entscheide.

Demnach hat das Bundesgericht erkannt:

Der Rekurs wird gutgeheissen. Demgemäss werden der Entscheid
des Regierungsrates von St. Gallen vom 12. März 1907 und der
Ausweisnngsbeschluss des Gemeinderates St. Gallen vom 10. Januar 1907
aufgehoben.

45. Arrèt du 30 mai 1907, dans la cause Bertoni contre Conseil d'Etat
de Genève.

Légitimation au recours pour retrait d'établissement. Art-. 45 al. 3 OF:
délits graves .

A. Par arrété du ? janvier 1907, le Département de Justice et Police
de Genève a retiré à Louis Bertoni, type graphe, en dite ville,
l'autorisation de séjourner dans le canton de Genève et lui a enjoint
de se retirer du canton des le 26 janvier 1907. Cet arrété, rendu en
application de l'art. 19 § 1 de la Ioi genevoise du 14 octobre 1905
sur les permis de séjour et d'établissement et de l'art. 45 al. 3 CF,
est basé sur ce que Bertoni a subi les deux eondamnations suivantes:

of} condamnation prononcée le 13 novembre 1902 par la Cour de Justice
correctionnelle de Genève à une année d'emprisonnement, pour avoir été
le provocateur de personnes qui ont tenté de s'opposer avec violence
à l'exécution

Ill. Verweigerung und Entzug der Niederlassung. N° 45. 289

de la loi; pour atteinte au libre exercice du travail; pour contravention
au reglement de police sur la tranquillité publique;

b) condamnation prononcée 'le 27 novembre 1908 par 1a Cour pénale du
Tribunal fédéral à un mois d'emprisonnement pour le délit prévu per la
loi fédérale du 30 mars 1906 sur les crimes anarchistes.

Ensuite de recours de Bertoni, le Conseil d'Etat de Genève 3, en date
du 5 février 1907, décidé de suspendre l'exécution de l'arrété pris par
le Département de Justice et Police, Bertoni bénéficiant jusqu'ä nouvel
ordre d'ant0risati0ns de séjour renouvelables tous les trois mois.

Bertoni ayant demandé au Conseil d'Etat si son arrété du 43 février 1907
constituait un retrait définitif d'établissement, il lui a été répondu,
per lettre du 19 février 1907, que cet arrété n'avait pas rapporté la
décision du Département de Justice et Police en date du 7 janvier 1907,
mais en avait simplement suspendu les effets.

B. Bertoni a, en temps utile, formé un recours de droit public aupres
du Tribunal fédéral, concluant à ce que celuici annule l'arrété du
Département de Justice et Police du 7 janvier 1907 et l'arrété du Conseil
d'Etat du ò février 1907 et subsidiairement pour le cas où son recean
serait écarté à ce que l'Etat de Genève ne puisse porter aucune entrave
au séjour de Bertoni sur son territoire.

Ce recours est motivé en résumé comme suit:

Bertoni conteste le caractère grave des délits qui ont entraine ses deux
condamnations. En ce qui concerne la première, il cherche à montrer que
c'est par une application extensive des art. 87, 91 et 106 du Code pénal
genevois qu'elle a été prononcée contre lui: il n'aurait an etre con-

damné que pour contravention au Reglement de Police exi-

geant pour tout cortège sur la. voie publique une antorisation
préalable. Ce n'est incontestablement pas un délit grave, au sens de
l'art. 45 GF. D'une faqon générale, un delit de grève ne peut avoir une
portée assez grave pour entraîner l'expulsion d'un citoyen suisse.

290 A. Stantsrechtliche Entscheidungen. I. Abschnitt. Bundesverfassung.

Quant a la deuxième eondamnation, elle & été prononcée en vertu d'une
loi d'exception dont il convient de ne pas aggraver les effets par un
arrété d'expulsion. Si le délit avait; été jugé grave, la Cour pénale
anrait sans deute privé Bertoni de ses droits civiques, ee qu'elle n'a
pas fait. An surplus il est douteux qu'une condamnation prononcée par
la justice fédérale puisse justifier une expulsion cantonale.

Enfiu les articles 25 et 26 de la loi genevoise du 14 octobre 1905 sur
la Police des étrangers qui prévoient des peines contre les personnes
expuisées qui rentreraient dans le canton violent le principe de la
garantie de libre circulation accordée à tout citoyen suisse.

C. Dans sa réponse au recours, le Conseil d'Etat constate que deux des
faits reconnus constants par le jury et qui ont entraîné la première
condamnation de Bertoui démontrent de la part du recourant un mépris
marqué des lois et doivent donc étre qualifiés de graves, au sens
donné à. ce mot par la jurisprudence du Tribunal federal relative a
l'art. 45 CF. L'apologie du crime pour laquelle la Cour penale federale
a condamné Bertoni est également un délit grave. Le message du Conseil
federal concernant la loi du 30 mars 1906 (F. f., 1905, 5, p. 810 et
suiv.) qualifie le délit de particulièrement dangereux . L'expnlsion
prononcée parle Département de Justice et Police et motivée par les deux
condamnations graves ne viole pas l'art. 45 CF; cette mesure a d'ailleurs
été accompagnée par le Conseil d'Etat d'un tempérament justifié par les
renseignements favorables reeueiiljs sur la vie privèe de Bertoni; mais le
Conseil d'Etat doit pouvoir exécuter l'arrèté d'expulsion d'un instant à
l'antro si Bertoui se livre de nouveau à des act-es répréhensibles. Quant
à la conclusion subsidiaire du recourant, elle doit ètre écartée, Bertoni
ne pouvant recourir par avance contre l'application eventuelle des art. 25
et 26, qui contiennent la sanction indispensable de l'arrété d'expulsion.

Siatncmt sur ces faits ei considé'ranl en droit : 1. Le recours est
recevable en la forme, ayant été exercé dans les 60 jours dès la
communication de l'an-été du

lll. Verweigerung und Entzug der Niederlassung. N° 45. 291

Conseil d'Etat. Et l'on ne sanrait dénier à Bertoni le droit de reconrir
contre l'expulsion prononcée contre lui, sous prétexte que cette
mesure n'a pas encore été mise à execution. Le prononcé d'expulsion
a en eflet été maintenu parle Conseil d'Etat qui s'est borné à en
suspendre les effets ; Bertoni est au bénéfice d'une autorisation de
séjourner toute précaire et qui peut lui étre retirée d'un instant à
l'autre. L'établissement, au sens de l'art. 45 GF, lui a été retiré et
il convient donc de rechercher si les conditions auxquelles le retrait
d'établissement est subordonné sont réunies en l'espece.

2. Bertoni est en droit d'invoquer la garantie de l'art. 45 CF quoique,
"avant l'expulsion, il fùt muni d'un simple permis de séjour et non d'un
permis d'établissement. Le Tribunal federal a déjà eu l'occasion de
décider (arrét Alchenberger du 25 octobre 1894, R0 20, p. 734) que le
retrait du permis de séjour d'un citoyen suisse est soumis aux meines
conditions que le retrait d'un permis d'établissement. Sinon il est
bien evident que la garantie de l'art. 45 serait illusoire. D'ailleurs,
en vertu de la loi genevoise du 14 octobre 1905, le requérant peut
à son choix dem-ander l'un ou l'autre de ces permis, sauf certains
cas énumérés à l'art. 7 et dans lesquels il doit prendre un permis d
établissement. Or il semble que Bertoni se trouvait justement dans l'un
de ces cas (lettre c: celui qui domicilié dans le canton de Genève ? est
employé à poste fixe dans une entreprise particulière ). Ainsi Bertoni
aurait certainement pu et peutètre aurait-il meme du exiger un permis
d'établissement.' Le fait qu'il s'est contenté d'un permis de séjour
ne saurait modifier en rien sa situation au regard de l'art. 45 al. 3
CF. An surplus, le Conseil d'Etat n'a pas invoqué cette circonstance à
l'appui du prononcé d'expulsion. . _

3. La question qui se pose est donc celle de savmr Sl Bertoni a été à
réitérées fois puni pour des délits graves (art. 45 al. 3 CF). L'arrété
d'expulsion invoque les denx condamnations prononcées par la Cour de
Justice correctionnelle de Genève et par la Cour penale federale. Quoique

292 A. Staatsrechtliche Entscheidungen. I. Abschnitt. Bundesverfassung.

cette dernière condamnation ait été prononcée par une autorité judiciaire
fédérale, elle peut évidemment entrer en ligne de compte pour légitirner
l'expulsion du territoire genevois, cela d'autant plus que le délit qui
l'a motivée a été commis à Genève.

Il reste donc simplement à examiner si les délits pour lesquels Bertoni a
été condamué peuvent étre qualifiés de delits graves . Il résulte de la
jurisprudence constante tant du Conseil fédéral que du Tribunal federal
(voir entre autres Salis, 2 n° 623; erréts du Tribunal federal dans les
affaires Kampf, 10 juillet 1895, RO 21, p. 671 ; Kost, 18 mars 1896,
22, p. 16; Eglauf, 8 avril 1897, 23, p. 508; Haist, 14 septembre 1898,
221 I, p. 452) que dans cet examen l'instance de recours ne doit pas se
laisser guider par des distinctions empruutées aux législations pénales
cantonales, ni per l'importance de la peine qui est prévue pour le
délit ou dont le delinquant a été frappè en l'espèce. Elie doit bien
plutöt rechercher si les delits commis sont objectivement dangereux,
s'ils portent une atteinte grave à la moralité ou à la sécurité publiques.

si l'on applique ce critère aux deux condamnatîons encourues per Bertoni,
il n'est pas douteux que les délits qui les ont entrainés n'apparaissent
comme graves.

En ce qui concerne la, première condamnation prononcée en 1902 à la
suite de la greve générale de Genève, il est clair que le Tribunal
fédéral n'a pas à rechercner, comme semble le demander le recourant,
si c'est à bon droit qu'elle a été prononcée; il ne peut que s'en tenir
aux fails admis comme constants par la Cour correctionnelle. Dès lors il
ya lieu de reconnaître que le fait de provoquer à i'émeute et d'exciter
des grévistes à porter atteiute au libre exercice du travail des ouvriers
non grévistes constitue un délit de nature tout spécialement dangereuse
pour l'ordre et la sécurité publics et par conséquent un délit grave,
au sens de l'art. 45 al. 3 CF.

Ce caractère de gravité se retrouve également dans le délit qui a entraine
la seconde condamnation de Bertoni.lll. Verweigerung und Entzug der
Niederlassung. N° 4-5. 293

Gelui-ci a été reconnu coupable d'avoir incité à commettre des crimes
anarchistes et d'avoir publiquement fait i'apologie de ces crimes. La
gravité d'actes de ce genre, qui se caractérisent comme des provocatious
à l'assassinat et qui tendent au bouleversement de l'ordre social, est
suffisamment attestée par le fait qu'on a juge nécesseire de consacrer une
loi spéciale à leur répressiou. Sans doute la peine dont Bertoni a été
frappè est reletivement faible ; mais on ne saurait prendre la quotité
de la peine comme mesure de la gravità du délit: la considération de
la vie privé-e irréprochabie de Bertoni et du désintéressement de ses
mobiles a pu militer en faveur de l'indulgence dans l'application de la
peine ; mais ce sont là, des circonstances qui ne diminuent en rien la
dangereuse signification antisociale des actes commis par lui.

Les délits pour lesquels Bertoni a été condamné à deux reprises se
révélant comme graves, la conclusion principale du recours tendant à ce
que l'arrété d'expulsion seit annulé doit etre écartée comme mal fondée.

4. Il n'y a pas lieu d'entrer en matière sur la conclusion subsidiaire du
recourent qui n'a pas d'intérét actuel ; en ekket les art. 25 et 26 de
la loi du 14 octobre 1905 dont il conteste la constitutionnalité n'ont
encore recu aucune application en ce qui le concerne.

Par ces motifs, Le Tribunal federal

pronunce : I. La conclusion principale du recours est écartée. II. -Il
n'est pas entre en matière sur la conclusiou sub-

sidiaire.
Entscheidinformationen   •   DEFRITEN
Dokument : 33 I 288
Datum : 12. März 1907
Publiziert : 31. Dezember 1908
Quelle : Bundesgericht
Status : 33 I 288
Sachgebiet : BGE - Verfassungsrecht
Gegenstand : 288 A. staats-rechtliche Entscheidungen. I. Abschnitt. Bundesverfassung. sondern


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