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6. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public dans la cause Société Coopérative Migros Neuchâtel-Fribourg contre Service public de l'emploi et Direction de l'économie et de l'emploi du canton de Fribourg (recours en matière de droit public) 2C_10/2013 du 10 janvier 2014
Regeste (de):
- Art. 18 Abs. 1, Art. 20a Abs. 1, Art. 27 Abs. 1 und Abs. 2 lit. c sowie Art. 71 lit. c ArG, Art. 5 Abs. 2 Bundesgesetz über die Förderung der Beherbergungswirtschaft, Art. 41 Abs. 2 aArGV 2, Art. 25 ArGV 2; Arbeitsverbot an Sonn- und Feiertagen; Ausnahmen zu Gunsten von Betrieben in Fremdenverkehrsgebieten, die der Befriedigung spezifischer Bedürfnisse der Touristen dienen.
- Bundesrechtliche Regelung: Verbot der Sonn- und Feiertagsarbeit; Ausnahmen zu Gunsten der Betriebe in Fremdenverkehrsgebieten (E. 2.1). Vorbehalt der kantonalen und kommunalen Polizeivorschriften über die Sonntagsruhe und über die Öffnungszeiten von Betrieben, die dem Detailverkauf dienen (E. 2.5). Begriff des Betriebs im Fremdenverkehrsgebiet, der der Befriedigung spezifischer Bedürfnisse der Touristen dient (E. 2.2, 2.3 und 5.1). Insbesondere zum Begriff Fremdenverkehrsgebiet (wo der Betrieb gelegen sein muss): Relevanz der statistischen Daten über die wirtschaftliche Bedeutung des Tourismus (E. 3 und 4) und Tragweite der Qualifikation als Fremdenverkehrsgebiet im Sinne des Bundesgesetzes über die Förderung der Beherbergungswirtschaft (E. 5.1). Fall der Zweigniederlassung Murten der Migros Genossenschaft (E. 5.2).
Regeste (fr):
- Art. 18 al. 1
, art. 20a al. 1
, art. 27 al. 1
et al. 2 let. c et art. 71 let. c
LTr, art. 5 al. 2
de la loi fédérale sur l'encouragement du secteur de l'hébergement, art. 41 al. 2
aOLT 2, art. 25
OLT 2; interdiction de travailler le dimanche et les jours fériés; dérogation en faveur des entreprises situées en région touristique et qui répondent aux besoins du tourisme.
- Réglementation fédérale: principe de l'interdiction de travailler le dimanche et les jours fériés et dérogation en faveur des entreprises situées en région touristique (consid. 2.1). Réserve des prescriptions de police cantonales et communales concernant le repos dominical et les heures d'ouverture des entreprises de vente au détail (consid. 2.5). Notion d'entreprise située en région touristique et répondant aux besoins des touristes (consid. 2.2, 2.3 et 5.1). S'agissant en particulier de la notion de région touristique (où l'entreprise doit être située): rôle des données statistiques concernant l'impact économique du tourisme (consid. 3 et 4) et portée de la qualification de région touristique au sens de la loi fédérale sur l'encouragement du secteur de l'hébergement (consid. 5.1). Cas de la succursale de Morat de la société coopérative Migros (consid. 5.2).
Regesto (it):
- Art. 18 cpv. 1, art. 20a cpv. 1, art. 27 cpv. 1 e cpv. 2 lett. c nonché art. 71 lett. c LL, art. 5 cpv. 2 della legge federale sulla promozione del settore alberghiero, art. 41 cpv. 2 vOLL 2, art. 25 OLL 2; divieto del lavoro domenicale e nei giorni festivi; deroga in favore delle aziende delle regioni turistiche, rispondenti ai bisogni specifici dei turisti.
- Regolamentazione federale: principio del divieto del lavoro domenicale e nei giorni festivi e deroga in favore delle aziende delle regioni turistiche (consid. 2.1). Riserva delle prescrizioni di polizia cantonali e comunali concernenti il riposo domenicale e l'orario d'apertura delle aziende di vendita al minuto (consid. 2.5). Nozione di azienda di una regione turistica, rispondente ai bisogni specifici dei turisti (consid. 2.2, 2.3 e 5.1). Trattandosi in particolare della nozione di regione turistica (ove dev'essere situata l'azienda): ruolo dei dati statistici concernenti l'impatto economico del turismo (consid. 3 e 4) e portata della qualifica quale regione turistica ai sensi della legge federale sulla promozione del settore alberghiero (consid. 5.1). Caso della succursale della società cooperativa Migros a Morat (consid. 5.2).
Sachverhalt ab Seite 47
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A. Le 24 mars 2011, la société coopérative Migros Neuchâtel-Fribourg (ci-après: Migros) a informé la Direction de l'économie et de l'emploi du canton de Fribourg de son intention d'ouvrir sa succursale de Morat (ci-après: la succursale) le lundi de Pâques 25 avril 2011, sans qu'il ait été nécessaire, à son avis, d'obtenir une autorisation pour ce faire. Le 11 avril 2011, l'Inspection du travail du canton de Fribourg a rendu une décision par laquelle elle a interdit à Migros d'occuper des travailleurs sans autorisation officielle à la date annoncée. A l'encontre de cette décision, Migros a formé une réclamation, assortie d'une requête de restitution de l'effet suspensif, auprès du Service public de l'emploi (ci-après: le SPE) du canton de Fribourg. Par décision du 15 avril 2011, le SPE a admis la requête de restitution de l'effet suspensif. A la suite de ce prononcé, la succursale a ouvert ses portes le lundi de Pâques 25 avril 2011. Par décision du 27 mai 2011, le SPE a rejeté la réclamation. Il s'est fondé en particulier sur des données statistiques concernant les emplois par branches d'activités dans la commune de Morat pour
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l'année 2008, provenant de l'Office fédéral de la statistique (ci-après: l'OFS). Selon ces données, les emplois potentiellement liés au tourisme représentaient respectivement 34,2 % de ceux du secteur tertiaire et 19,3 % du total (tous secteurs confondus). Et encore s'agissait-il d'un maximum, car ce pourcentage incluait certaines branches où seule "une infime partie" des emplois pouvait être rattachée au tourisme. Si l'on prenait en considération uniquement la catégorie "hébergement et restauration", qui seule concernait en très grande partie le tourisme, la proportion n'était plus que de 7,5 % de l'ensemble des emplois. Ainsi, les activités touristiques étaient loin de représenter la moitié des activités économiques de la commune, de sorte que le tourisme n'y jouait manifestement pas un rôle prépondérant et que la ville de Morat n'était pas située en région touristique.
B. Contre ce prononcé, Migros a recouru au Tribunal cantonal du canton de Fribourg. Elle a conclu principalement à ce que cette juridiction annule la décision attaquée et dise qu'elle peut ouvrir sa succursale de Morat et occuper des travailleurs, sans autorisation officielle, les jours fériés et les dimanches, entre le 1er avril et le 31 octobre de chaque année. Par arrêt du 13 novembre 2012, les juges cantonaux ont rejeté le recours. Ils ont considéré que les atouts de la ville de Morat (situation au bord du lac, centre historique préservé, activités culturelles et sportives spécialement durant l'été, grande piscine, rives du lac accessibles aux promeneurs et amateurs de sports nautiques, tours en bateaux, nombreux restaurants, dont beaucoup avec des terrasses) - qu'un "bon nombre d'autres lieux pittoresques en Suisse" possédaient aussi - ne contribuaient pas seulement à attirer les touristes, mais aussi à améliorer la qualité de vie de la population locale. Le point déterminant était de savoir si le tourisme jouait un rôle prépondérant au plan économique. Or, à cet égard, les données statistiques prises en compte par le SPE montraient qu'au maximum un tiers des emplois, voire moins de 20 % si l'on retenait une interprétation stricte des activités touristiques, était lié au tourisme. La ville de Morat ne constituait ainsi pas une région touristique au sens de la législation fédérale sur le travail, de sorte que Migros ne pouvait bénéficier d'une dispense d'autorisation pour occuper des travailleurs le dimanche et les jours fériés.
A l'encontre de cet arrêt, Migros interjette un recours en matière de droit public au Tribunal fédéral.
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L'autorité précédente, le SPE et le Département fédéral de l'économie, de la formation et de la recherche concluent au rejet du recours. La Direction de l'économie et de l'emploi du canton de Fribourg renonce à se déterminer. Le Tribunal fédéral a admis le recours et renvoyé la cause à l'autorité précédente pour qu'elle statue à nouveau. (résumé)
Erwägungen
Extrait des considérants:
2.
2.1 L'art. 18 al. 1








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partie du dimanche. Selon l'art. 25




2.2
2.2.1 L'art. 25 al. 2

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"localité isolée ou un ensemble de bâtiments construits hors de toute localité pour accueillir des touristes en particulier en montagne". Il a considéré plutôt que, au vu en particulier des textes allemand ("Orte") et italien ("località") de l'art. 25 al. 2


2.2.2 Le commentaire de la loi sur le travail et des ordonnances 1 et 2 édité par le Secrétariat d'Etat à l'économie SECO (disponible sur le site Internet du SECO, à l'adresse http://www.seco.admin.ch; ci-après: le commentaire du SECO), ad art. 25

- importance du tourisme dans l'économie locale ou régionale, autrement dit attribution d'une large part du revenu brut de la localité ou de la région toute entière à la branche du tourisme; selon une décision de l'ancienne Commission de recours du Département fédéral de l'économie (voir ci-après), les activités touristiques doivent représenter plus de la moitié des activités économiques d'une localité ou de toute une région; - saisonnalité marquée de l'afflux des touristes;
- spécificité de la motivation des touristes: repos, détente, divertissement, activités sportives, inspiration culturelle ou artistique. Dans sa décision MB/2002-1 du 14 mars 2003 - qui a fait l'objet de l'arrêt du Tribunal fédéral 2A.166/2003 du 7 août 2003 -, l'ancienne Commission de recours du Département fédéral de l'économie avait considéré que la notion de "rôle prépondérant" de l'art. 25 al. 2

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- concernant la ville de la Chaux-de-Fonds - relatives à la capacité d'accueil (nombre d'hôtels) et aux nuitées. Au vu du taux d'occupation des lits d'hôtel, du nombre de nuitées et de la durée moyenne de séjour, elle avait conclu - d'ailleurs sans effectuer aucune comparaison avec les valeurs d'autres localités ou des moyennes - que le tourisme ne jouait pas un rôle prépondérant dans cette ville. Le Tribunal de céans a pour sa part jugé qu'il était "constant que le tourisme ne [jouait] pas un rôle prépondérant pour la Ville de la Chaux-de-Fonds et sa région" (arrêt 2A.166/2003 précité, consid. 2.2) et n'a donc pas revu la question.
2.2.3 L'aOLT 2 prévoyait également un régime dérogatoire pour les entreprises des régions touristiques (art. 41


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elle mentionne 16 communes, dont celle de Morat, ainsi que, de façon générale, les communes riveraines des lacs de la Gruyère, de Morat et de Neuchâtel.
2.3 S'agissant de la condition que l'entreprise réponde aux besoins des touristes, le Tribunal fédéral a admis, en relation avec l'art. 41 al. 1 aOLT 2, que ces besoins pouvaient être aussi bien ceux qui sont propres aux touristes que ceux qui sont inhérents à la nature humaine et que les touristes doivent satisfaire où qu'ils se trouvent, tels que les besoins de nourriture et de boisson. Le tourisme étant défini comme le fait de voyager, de parcourir pour son plaisir un lieu autre que celui où l'on vit habituellement, les besoins propres aux touristes étaient ceux liés à cette activité, comme par exemple de disposer d'un guide de voyage ou d'acheter des souvenirs (ATF 126 II 106 consid. 4 p. 109). Une entreprise répondant aux besoins inhérents à la nature humaine - à l'exclusion des besoins spécifiques des touristes - en offrant essentiellement des biens de première nécessité (produits alimentaires ou hygiéniques) pouvait ainsi bénéficier d'une dispense d'autorisation pour occuper des travailleurs le dimanche. Il s'agissait en l'occurrence d'un centre commercial Coop à Saignelégier. Le Tribunal fédéral a relevé à cet égard les particularités du tourisme dans la région, les touristes n'étant pas logés à l'hôtel, mais dans des campings ou des appartements. Ils pouvaient arriver le samedi après la fermeture des magasins à 16h. Comme il n'était pas établi qu'ils aient pu se fournir ailleurs, il existait un besoin que le centre en question fût ouvert le dimanche (arrêt 2A.612/1999 du 30 juin 2000 consid. 5). Dans l'arrêt précité 2A.578/2000, qui concernait le quartier d'Ouchy, le Tribunal fédéral a considéré que la jurisprudence relative à la notion d'"entreprises qui satisfont aux besoins du tourisme" de l'art. 41 al. 1 aOLT 2 restait valable en relation avec l'art. 25 al. 1 OLT, qui mentionnait les entreprises "répondant aux besoins spécifiques des touristes". Il a relevé en particulier que la base légale, à savoir l'art. 27 al. 2 let. c


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2.4 Selon la jurisprudence, les exceptions à l'interdiction du travail dominical doivent être admises de façon restrictive, quand bien même les habitudes des consommateurs subissent une certaine évolution (ATF 139 II 49 consid. 6.1 p. 58; ATF 134 II 265 consid. 5.5 p. 271; ATF 126 II 106 consid. 5a p. 109 s.; arrêts 2C_892/2011 du 17 mars 2012 consid. 3.3, in SJ 2012 I p. 489; 2A.704/2005 précité, consid. 3.1).
2.5
2.5.1 L'art. 71 let. c


SR 101 Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft vom 18. April 1999 BV Art. 49 Vorrang und Einhaltung des Bundesrechts - 1 Bundesrecht geht entgegenstehendem kantonalem Recht vor. |

SR 101 Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft vom 18. April 1999 BV Art. 49 Vorrang und Einhaltung des Bundesrechts - 1 Bundesrecht geht entgegenstehendem kantonalem Recht vor. |
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celles qui satisfont aux besoins du tourisme (cf., dans ce sens, commentaire du SECO, op. cit., ad art. 25

2.5.2 Le canton de Fribourg a réglementé les heures d'ouverture des commerces dans sa loi du 25 septembre 1997 sur l'exercice du commerce (LCom; RSF 940.1), laquelle a pour but de garantir, par des mesures de police, notamment la tranquillité publique (art. 2 al. 1 LCom). Les dispositions sur les heures d'ouverture s'appliquent aux entreprises de commerce de détail, que l'art. 6 al. 1 LCom définit comme celles dont les locaux ou les installations sont accessibles au public et qui ont pour activité, de manière permanente ou occasionnelle, la vente, la location et la prise de commande de marchandises de toute nature ou la fourniture de services. L'art. 9 al. 1 LCom pose le principe selon lequel ces entreprises sont fermées le dimanche et les jours fériés, tout en réservant les exceptions prévues aux art. 10 et 11. Intitulée "Exceptions pour les sites touristiques", cette dernière disposition prévoit que, dans les sites touristiques, les communes peuvent autoriser, durant la saison, l'ouverture des commerces le dimanche et les jours fériés de 6 à 20 heures. Les sites touristiques sont énumérés dans le règlement du 14 septembre 1998 sur l'exercice du commerce (RCom; RSF 940.11), lequel distingue entre ceux qui le sont à l'année (art. 3) et les sites réputés touristiques seulement durant la saison estivale, soit d'avril à octobre (art. 4

SR 101 Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft vom 18. April 1999 BV Art. 49 Vorrang und Einhaltung des Bundesrechts - 1 Bundesrecht geht entgegenstehendem kantonalem Recht vor. |


3. La recourante reproche à l'autorité précédente d'avoir nié que le tourisme joue un rôle prépondérant à Morat en tombant dans
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l'arbitraire, en abusant de son pouvoir d'appréciation, en appréciant les preuves arbitrairement et en violant les art. 27 al. 2 let. c

4. La décision attaquée est fondée essentiellement sur la part des emplois liés au tourisme dans la commune de Morat, proportion qui constitue l'un des principaux critères de la notion de région touristique selon le commentaire du SECO. La recourante critique non seulement la façon dont cette proportion a été déterminée en l'espèce, mais encore, plus fondamentalement, le recours à ce critère, en soutenant qu'il est pratiquement impossible d'évaluer statistiquement l'importance des activités économiques liées au tourisme. Pourtant, des données statistiques existent quant à l'importance économique du tourisme en Suisse. Celles-ci ressortent notamment du compte satellite national du tourisme, établi par l'OFS (ci-après: consid. 4.1). Les travaux préparatoires de la législation fédérale dans le domaine du tourisme (consid. 4.2) livrent également des indications, de même que des études effectuées par des entreprises privées (consid. 4.3).
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4.1 Aux fins de déterminer l'impact économique du tourisme en Suisse, l'OFS établit le compte satellite du tourisme (CST). Celui-ci consiste en différents tableaux (voir la publication de l'OFS et du SECO intitulée "Compte satellite du tourisme de la Suisse, 2001 et 2005 - Principes, méthode et résultats", 2008 [disponible sur le site Internet de l'OFS, à l'adresse http://www.bfs.admin.ch], p. 14, 16, 18 ss et le glossaire p. 38) présentant les produits touristiques, lesquels comprennent les catégories et sous-catégories suivantes: - les produits spécifiques du tourisme (soit A.1 produits caractéristiques: services d'hébergement/services de restauration/services de transports de voyageurs/services d'agences, de voyagistes et de guides/services culturels/services de loisirs et de divertissements/services touristiques divers; A.2 produits connexes: commerce de détail/stations-services/santé/télécommunications/autres services touristiques), et - les produits non spécifiques, soit ceux qui sont issus du commerce de gros. Le tableau 6 indique, pour chacun de ces produits, l'emploi touristique et la part de celui-ci par rapport à l'emploi total, dite quote-part touristique de l'emploi. Tous produits confondus, celle-ci se montait en 2008 à 4,2 % pour l'ensemble du pays (cf. Encyclopédie statistique de la Suisse [disponible sur le site Internet de l'OFS], thème 10 Tourisme/sous-thème 10.2.1 Compte satellite du tourisme). L'OFS se base notamment sur l'analyse spatiale de la production touristique, rendue possible par la concentration spatiale du tourisme en Suisse: à côté des grandes villes, une part importante de l'utilisation touristique correspond à un petit nombre de lieux touristiques réputés. L'OFS évalue ainsi l'impact économique du tourisme en procédant à une comparaison entre ces communes et des communes non touristiques comparables du point de vue du nombre d'habitants. Pour ce faire, les communes sont réparties en trois catégories (à savoir communes rurales de moins de 10'000 habitants, petites villes de 10'000 à 30'000 habitants et villes de plus de 30'000 habitants). L'OFS dispose d'une liste d'environ 200 communes touristiques, qui appartiennent toutes, à l'exception d'Einsiedeln et de Davos, à la catégorie des communes rurales, leur nombre d'habitants étant en moyenne de 1'350 (cf. Compte satellite du tourisme de la Suisse, op. cit., p. 17 et encadré p. 18). Toutes les données relatives à l'emploi sont exprimées en équivalents plein temps, notion qui résulte de la conversion du volume de travail (mesuré en termes d'emplois ou d'heures de
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travail) en emplois à plein temps. Le nombre d'emplois équivalents plein temps se définit comme le nombre total d'heures travaillées divisé par la moyenne annuelle des heures travaillées dans les emplois à plein temps (cf. Définitions [document disponible sur le site Internet de l'OFS], sous "Emplois équivalents plein temps").
4.2 Le Message du 20 septembre 2002 relatif à l'amélioration de la structure et de la qualité de l'offre dans le domaine du tourisme suisse (FF 2002 6655 ss) renseigne également sur l'importance économique du tourisme. Selon ce texte, le tourisme a un impact direct en générant des emplois (entre 175'000 et 190'000 équivalents plein temps au total) dans les branches traditionnelles que sont l'hôtellerie et la restauration, les remontées mécaniques, les voyagistes ou compagnies aériennes, ainsi que dans d'autres branches comme le commerce de détail, la santé, l'éducation, les banques et les télécommunications. Il a en outre des effets indirects (80'000 à 90'000 emplois supplémentaires) du fait des prestations préalables des branches qui profitent directement du tourisme, des investissements requis par celles-ci, ainsi que des revenus salariaux générés dans le secteur touristique (FF 2002 6661 s. ch. 1.2.1 et 6664 ch. 1.2.3). Le Message indique en particulier la part du tourisme dans le produit intérieur brut d'une sélection de régions et de villes suisses pour 2002. Celle-ci s'élevait à 5,4 % pour la ville de Berne, 8,7 % pour celle de Lucerne, 25,4 % pour le canton du Valais dans son ensemble, 35,4 % pour le Haut-Valais et 71 % pour la région "Mittelbünden", comprenant notamment les stations touristiques de Lenzerheide et de Savognin (FF 2002 6678 tableau 10). Dans certains centres touristiques - qui ne sont pas cités nommément -, le pourcentage pouvait même avoisiner les 100 % (FF 2002 6679 ch. 1.4.3).
4.3 En décembre 2011, le service "Economic Research" de la banque Crédit Suisse a publié une étude intitulée "Swiss Issues Branches - Le tourisme en Suisse - Stations de ski en concurrence", basée notamment sur les données de l'OFS. Cette publication contient des données chiffrées sur l'importance du tourisme, ici limité aux branches de l'hôtellerie et de la restauration (cf. note de bas de page 1), pour l'économie régionale. Elle présente en particulier une carte de la Suisse indiquant la part des personnes travaillant dans le tourisme par rapport à l'ensemble des emplois d'une commune, pour l'année 2008 (figure 3, p. 7). Il ressort de cette étude que le tourisme revêt une très grande importance en particulier dans l'arc alpin. La branche touristique occupe plus de 25 % des personnes dans 335
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communes. Cette part atteint même entre 33 et 47 % dans les communes de Loèche-les-Bains, Weggis et Champéry et elle représente plus de la moitié des emplois (51 %) à Zermatt (p. 7). L'importance du tourisme varie en fonction du type de commune. L'étude distingue ainsi entre les centres, les communes périurbaines, les communes touristiques, celles hors des agglomérations avec un nombre important d'emplois ou de pendulaires et les communes à orientation agricole; la part des emplois touristiques y est respectivement de 4,4 %, 6,6 %, 34,3 %, 9,9 % et 17,2 % (p. 8).
5.
5.1 Alors que l'aOLT 2 définissait les régions touristiques en renvoyant à la législation sur l'encouragement du crédit à l'hôtellerie et aux stations de villégiature (cf. consid. 2.2.3 ci-dessus), l'OLT 2 contient à l'art. 25 al. 2 sa propre définition des entreprises situées en région touristique. Celle-ci est articulée autour du concept de station, dans laquelle l'entreprise doit être située. Il doit s'agir d'une station touristique, en ce sens que le tourisme y joue un rôle prépondérant et y est sujet à de fortes variations saisonnières. La loi fédérale sur l'encouragement du secteur de l'hébergement définit pour sa part les régions touristiques comme les régions et localités où le tourisme est un domaine d'activité essentiel et subit de profondes fluctuations saisonnières ("in denen der Fremdenverkehr von wesentlicher Bedeutung ist und erheblichen saisonalen Schwankungen unterliegt", art. 5 al. 2


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besoins du tourisme, au sens de l'art. 27 al. 2


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pour autant que celles-ci - établies généralement par commune - correspondent à la station telle qu'elle a été préalablement définie. Ces données peuvent concerner notamment la capacité d'accueil touristique (offre hôtelière et de parahôtellerie) et les nuitées (cf. décision de l'ancienne Commission de recours du Département fédéral de l'économie du 14 mars 2003, précitée), ainsi que la part des emplois liés au tourisme. Pour ce qui est de ces derniers, il est possible de s'inspirer de la méthode utilisée par l'OFS pour calculer la quote- part touristique de l'emploi, laquelle prend en compte l'impact économique à la fois direct et indirect du tourisme (cf. consid. 4 ci-dessus). Au regard des textes allemand et italien de l'art. 25 al. 2


5.2 Dans le cas particulier, l'autorité précédente s'est fondée sur les données statistiques du SPE, d'où il ressortait qu'au maximum un tiers des emplois de la commune de Morat, voire moins de 20 % si l'on définissait de manière stricte les activités touristiques, étaient liés au tourisme. Ce taux étant loin des 50 % exigés par le commentaire du SECO, elle a nié que le tourisme joue un rôle prépondérant dans cette commune et, partant, que la recourante soit une entreprise située en région touristique, au sens de l'art. 25

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Morat (plus de 6'000 habitants). Il convient de plus, dans un premier temps, de déterminer si tout ou partie de cette localité présente les caractéristiques d'une station, ce que l'autorité précédente a omis. Dans le cas où seule une partie (en l'occurrence essentiellement le bord du lac et la vieille ville) doit être considérée comme telle, il faut examiner si l'entreprise en cause se trouve dans ce quartier ou à proximité immédiate de celui-ci, puisque l'art. 25 al. 2

