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4. Extrait de l'arrêt de la Ire Cour de droit public du 2 mai 1984 dans la cause Paroisse réformée d'Estavayer-le-Lac contre Conseil d'Etat du canton de Fribourg (recours de droit public)
Regeste (de):
- Art. 22ter BV; Umzonung einer Parzelle in eine Zone mit Bauverbot, Verhältnismässigkeit.
- Voraussetzungen der gesetzlichen Grundlage und des öffentlichen Interesses im konkreten Fall erfüllt (E. 3).
- Berücksichtigung der Natur der von der Beschwerdeführerin als öffentlichrechtlicher Körperschaft mit eigener Rechtspersönlichkeit geltend gemachten Interessen bei der Interessenabwägung. Unverhältnismässigkeit der geplanten Massnahme, weil die sich gegenüberstehenden öffentlichen Interessen durch eine andere Massnahme in Einklang gebracht werden können (E. 4).
Regeste (fr):
- Art. 22ter Cst.; transfert d'une parcelle dans une zone frappée d'une interdiction de bâtir. Proportionnalité.
- Exigences d'une base légale et d'un intérêt public réalisées en l'espèce (consid. 3).
- Prise en considération, pour la pesée des intérêts en présence, de la nature de ceux que défend la recourante en sa qualité de corporation de droit public dotée de la personnalité juridique. Restriction jugée excessive sous l'angle de la proportionnalité, une conciliation des intérêts opposés étant possible (consid. 4).
Regesto (it):
- Art. 22ter Cost.; trasferimento di un fondo in una zona non edificabile. Proporzionalità.
- Presupposti della base legale e dell'interesse pubblico adempiuti nella fattispecie (consid. 5).
- Rilevanza, nella ponderazione degli interessi esistenti, di quelli perseguiti dalla ricorrente quale ente di diritto pubblico dotato di personalità giuridica. Restrizione ritenuta eccessiva sotto il profilo della proporzionalità, essendo possibile conciliare in altra guisa gli opposti interessi (consid. 4).
Sachverhalt ab Seite 30
BGE 110 Ia 30 S. 30
La paroisse réformée d'Estavayer-le-Lac est propriétaire des parcelles Nos 1168 et 2098 du registre foncier de la commune d'Estavayer-le-Lac, sises dans la vieille ville, et dont la surface
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s'élève respectivement à 1372 m2 et à 1481 m2. Ces parcelles, formant ensemble approximativement un trapèze régulier, constituent l'esplanade comprise dans l'angle nord d'un promontoire qui s'élève immédiatement au-dessus des falaises d'Estavayer et d'où l'on domine le lac de Neuchâtel, le port de plaisance local et une partie de la vieille ville. La parcelle No 2098 a été acquise en 1965, avec l'aide de la Fédération des Eglises protestantes de Suisse, en vue de l'édification d'un centre paroissial à proximité du temple protestant sis sur la parcelle No 1168. En vertu d'une convention passée, en 1972, entre la paroisse réformée et la commune d'Estavayer-le-Lac, l'usage de la parcelle No 2098 est réservé à une place publique et un jardin d'enfants et un passage public est maintenu pour les piétons sur l'espace non bâti de la parcelle No 1168. Le plan d'aménagement de la vieille ville d'Estavayer-le-Lac, mis à l'enquête publique en 1978, comporte un plan de zones qui prévoit un classement diversifié pour les parcelles Nos 1168 et 2098 (cf. consid. 3 ci-après) ainsi que, à titre indicatif, la réalisation de deux accès piétonniers à l'esplanade. La paroisse réformée a fait opposition à ce plan en invoquant la nécessité dans laquelle elle se trouve de construire son centre paroissial sur la parcelle No 2098, que le plan litigieux interdit à la construction. La procédure de conciliation ayant échoué, le plan d'aménagement a été transmis au Conseil d'Etat du canton de Fribourg, conformément à la loi fribourgeoise du 15 mai 1962 sur les constructions (LC). Par arrêté du 15 juillet 1983, le Conseil d'Etat a approuvé le plan des zones de la vieille ville ainsi que le règlement particulier y relatif et a rejeté l'opposition de la paroisse réformée. Agissant par la voie du recours de droit public, la paroisse réformée d'Estavayer-le-Lac demande au Tribunal fédéral d'annuler l'arrêté du Conseil d'Etat du canton de Fribourg du 15 juillet 1983 et de renvoyer l'affaire à l'autorité intimée pour nouvelle décision. Elle invoque une violation des art. 4
SR 101 Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft vom 18. April 1999 BV Art. 4 Landessprachen - Die Landessprachen sind Deutsch, Französisch, Italienisch und Rätoromanisch. |
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Erwägungen
motifs suivants:
3. Dans le plan d'aménagement local de la commune d'Estavayer-le-Lac, adopté par le Conseil communal le 21 juin 1977 et approuvé par le Conseil d'Etat le 11 juillet 1978, la vieille ville constituait une zone d'affectation uniforme. Le plan litigieux a pour objectif général d'affiner la planification de ce secteur de la localité en vue d'assurer la conservation de sa substance historique et de son caractère, tout en permettant son intégration dans le développement de l'ensemble du territoire communal et en facilitant la restauration et le renouvellement des constructions (cf. art. 1er du règlement particulier du plan d'aménagement de la vieille ville). Il n'est pas contesté que, sous l'empire de l'ancienne réglementation, la recourante pouvait édifier sur la parcelle No 2098 le centre paroissial que, depuis de nombreuses années, elle projette de bâtir à proximité du temple construit sur sa parcelle voisine No 1168. Or le nouveau plan transfère la parcelle No 1168 dans une zone de bâtiments publics (zone bleue) et la parcelle No 2098 dans une zone verte d'aménagements publics (zone vert foncé). L'affectation de ces zones est définie par les art. 18 et 19 du règlement particulier du plan d'aménagement de la vieille ville, dispositions qui ont la teneur suivante: "Art. 18 Zone de bâtiments publics
a) Destination
Cette zone est destinée exclusivement aux constructions d'utilité publique. On peut également y aménager des îlots de verdure, des places de jeux et de sport. b) Plan d'îlot
Tout projet modifiant l'état actuel doit faire l'objet d'un plan spécial englobant l'ensemble de l'îlot en question. Art. 19 Zone verte d'aménagements publics
a) Destination
Cette zone est destinée à l'aménagement de zones de verdure accessibles au public (parcs publics, jeux, etc.). b) Interdiction de bâtir
La zone verte d'aménagements publics est frappée d'une interdiction de bâtir, à l'exception de constructions de minime importance et dont l'aménagement est imposé par la destination." Selon ces nouvelles dispositions, la parcelle No 1168 est désormais réservée aux constructions d'utilité publique, alors que la parcelle No 2098 est en principe interdite à la construction. Pour
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justifier cette importante restriction au droit de propriété de la recourante, l'autorité intimée a fait sienne l'argumentation développée au cours de la procédure de conciliation par l'autorité communale, qui l'a exposée à nouveau devant la délégation du Tribunal fédéral. Il s'agit, d'une part, de sauvegarder l'un des rares îlots de verdure qui subsistent à l'intérieur du périmètre de la vieille ville et, d'autre part, de maintenir l'affectation au délassement collectif consentie par la paroisse réformée selon convention du 1er octobre 1972. L'inspection des lieux a en effet révélé que les espaces verts sont pratiquement inexistants dans la vieille ville, sous la seule réserve de deux petites zones dont l'une est, au demeurant, généralement occupée par les élèves d'un jardin d'enfants. Il en va de même des lieux de promenade, ce qui explique l'intention de la commune de créer deux chemins piétonniers permettant d'accéder à l'esplanade du temple. Les buts poursuivis par l'affectation projetée des parcelles de la recourante ressortissent donc, de toute évidence, à un intérêt public, tel qu'il est d'ailleurs défini par le législateur fédéral soit à l'art. 1er al. 2
SR 700 Bundesgesetz vom 22. Juni 1979 über die Raumplanung (Raumplanungsgesetz, RPG) - Raumplanungsgesetz RPG Art. 1 Ziele - 1 Bund, Kantone und Gemeinden sorgen dafür, dass der Boden haushälterisch genutzt und das Baugebiet vom Nichtbaugebiet getrennt wird.5 Sie stimmen ihre raumwirksamen Tätigkeiten aufeinander ab und verwirklichen eine auf die erwünschte Entwicklung des Landes ausgerichtete Ordnung der Besiedlung. Sie achten dabei auf die natürlichen Gegebenheiten sowie auf die Bedürfnisse von Bevölkerung und Wirtschaft. |
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1 | Bund, Kantone und Gemeinden sorgen dafür, dass der Boden haushälterisch genutzt und das Baugebiet vom Nichtbaugebiet getrennt wird.5 Sie stimmen ihre raumwirksamen Tätigkeiten aufeinander ab und verwirklichen eine auf die erwünschte Entwicklung des Landes ausgerichtete Ordnung der Besiedlung. Sie achten dabei auf die natürlichen Gegebenheiten sowie auf die Bedürfnisse von Bevölkerung und Wirtschaft. |
2 | Sie unterstützen mit Massnahmen der Raumplanung insbesondere die Bestrebungen: |
a | die natürlichen Lebensgrundlagen wie Boden, Luft, Wasser, Wald und die Landschaft zu schützen; |
abis | die Siedlungsentwicklung nach innen zu lenken, unter Berücksichtigung einer angemessenen Wohnqualität; |
b | kompakte Siedlungen zu schaffen; |
bbis | die räumlichen Voraussetzungen für die Wirtschaft zu schaffen und zu erhalten; |
c | das soziale, wirtschaftliche und kulturelle Leben in den einzelnen Landesteilen zu fördern und auf eine angemessene Dezentralisation der Besiedlung und der Wirtschaft hinzuwirken; |
d | die ausreichende Versorgungsbasis des Landes zu sichern; |
e | die Gesamtverteidigung zu gewährleisten; |
f | die Integration von Ausländerinnen und Ausländern sowie den gesellschaftlichen Zusammenhalt zu fördern. |
SR 700 Bundesgesetz vom 22. Juni 1979 über die Raumplanung (Raumplanungsgesetz, RPG) - Raumplanungsgesetz RPG Art. 3 Planungsgrundsätze - 1 Die mit Planungsaufgaben betrauten Behörden achten auf die nachstehenden Grundsätze. |
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1 | Die mit Planungsaufgaben betrauten Behörden achten auf die nachstehenden Grundsätze. |
2 | Die Landschaft ist zu schonen. Insbesondere sollen: |
a | der Landwirtschaft genügende Flächen geeigneten Kulturlandes, insbesondere Fruchtfolgeflächen, erhalten bleiben; |
b | Siedlungen, Bauten und Anlagen sich in die Landschaft einordnen; |
c | See- und Flussufer freigehalten und öffentlicher Zugang und Begehung erleichtert werden; |
d | naturnahe Landschaften und Erholungsräume erhalten bleiben; |
e | die Wälder ihre Funktionen erfüllen können. |
3 | Die Siedlungen sind nach den Bedürfnissen der Bevölkerung zu gestalten und in ihrer Ausdehnung zu begrenzen. Insbesondere sollen: |
a | Wohn- und Arbeitsgebiete einander zweckmässig zugeordnet sein und schwergewichtig an Orten geplant werden, die auch mit dem öffentlichen Verkehr angemessen erschlossen sind; |
abis | Massnahmen getroffen werden zur besseren Nutzung der brachliegenden oder ungenügend genutzten Flächen in Bauzonen und der Möglichkeiten zur Verdichtung der Siedlungsfläche; |
b | Wohngebiete vor schädlichen oder lästigen Einwirkungen wie Luftverschmutzung, Lärm und Erschütterungen möglichst verschont werden; |
c | Rad- und Fusswege erhalten und geschaffen werden; |
d | günstige Voraussetzungen für die Versorgung mit Gütern und Dienstleistungen sichergestellt sein; |
e | Siedlungen viele Grünflächen und Bäume enthalten. |
4 | Für die öffentlichen oder im öffentlichen Interesse liegenden Bauten und Anlagen sind sachgerechte Standorte zu bestimmen. Insbesondere sollen: |
a | regionale Bedürfnisse berücksichtigt und störende Ungleichheiten abgebaut werden; |
b | Einrichtungen wie Schulen, Freizeitanlagen oder öffentliche Dienste für die Bevölkerung gut erreichbar sein; |
c | nachteilige Auswirkungen auf die natürlichen Lebensgrundlagen, die Bevölkerung und die Wirtschaft vermieden oder gesamthaft gering gehalten werden. |
4. L'existence d'une base légale et celle d'un intérêt public ne justifient toutefois pas, à elles seules, n'importe quelle restriction de droit public à la propriété privée. Il faut encore que soit respecté le principe de la proportionnalité. La restriction ne doit donc pas seulement être nécessaire, mais doit en outre ne pas aller au-delà de ce qu'il faut pour atteindre le but d'intérêt public recherché, l'autorité concernée ayant l'obligation d'adopter la mesure la moins incisive, c'est-à-dire celle qui est la moins préjudiciable aux
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particuliers pour parvenir au but d'intérêt public visé (ATF 108 Ia 219 /220 consid. d). L'inspection locale a démontré que la recourante ne dispose pas de locaux satisfaisants pour l'exécution des tâches sociales auxquelles elle se voue. On peut dès lors admettre avec elle que la construction d'un centre paroissial à proximité immédiate du temple est nécessaire à la réalisation de ses tâches, inhérentes aux fonctions collectives qu'elle assume, et en raison desquelles le législateur cantonal lui a accordé la personnalité juridique de droit public. Il ne s'agit donc guère, en l'espèce, de comparer l'intérêt public de la collectivité à l'intérêt privé d'un particulier, mais bien plutôt de peser deux intérêts publics, dont l'un a été sacrifié à l'autre par la planification litigieuse. Or une conciliation de ces intérêts n'apparaît pas exclue en l'occurrence. Les précisions abondantes données par les parties à la délégation du Tribunal fédéral, lors de l'inspection des lieux, ont en effet démontré qu'une construction rationnelle du centre paroissial projeté par la recourante n'est matériellement pas réalisable sur la seule parcelle No 1168. Elle le serait pourtant du point de vue juridique, si l'on met en parallèle l'art. 18 du règlement particulier de la vieille ville et l'art. 51 al. 2 de la nouvelle loi cantonale sur les constructions et l'aménagement du territoire du 9 mai 1983, qui entrera en vigueur le 1er juillet 1984. Le centre paroissial projeté pourrait en effet être considéré comme une construction d'intérêt général au sens de cette dernière disposition et, partant, comme une construction conforme à l'affectation de la zone de bâtiments publics. Le responsable cantonal de l'aménagement du territoire l'a confirmé sur interpellation du juge délégué lors de l'inspection des lieux. L'examen des lieux a révélé également que cette construction était par contre réalisable matériellement à la condition d'empiéter sur la parcelle No 2098, ce qu'ont reconnu clairement les représentants des parties. Un tel empiétement n'empêcherait manifestement pas d'emblée toute affectation du solde non bâti des parcelles litigieuses aux fins d'intérêt public pour lesquelles le classement discuté a été projeté. L'art. 18 du règlement précité prévoit d'ailleurs expressément qu'une zone de bâtiments publics permet l'aménagement d'îlots de verdure, de places de jeux et de sports, les détails d'un tel aménagement devant être précisés dans un plan d'îlot. Or le plan litigieux exclut, sans équivoque, une solution qui reviendrait à harmoniser ainsi les intérêts en jeu. Force est donc de retenir que l'étendue - excessive - de la restriction
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critiquée est en contradiction avec le principe de la proportionnalité et qu'elle viole par conséquent l'art. 22ter Cst.