105 Ia 362
64. Extrait de l'arrêt de la IIe Cour de droit public du 28 septembre 1979 dans la cause Cristin et Parti socialiste genevois contre Genève, Grand Conseil (recours de droit public)
Regeste (de):
- Art. 85 lit. a OG; Ungültigerklärung einer Volksinitiative.
- 1. Nicht formulierte Initiative im genferischen Recht; Zuständigkeit zur Ungültigerklärung einer bundesrechtswidrigen Initiative (E. 2).
- 2. Volle oder Teilungültigkeit einer Initiative; die Rechtsfolge muss verhältnismässig sein zur Nichtbeachtung der Norm; Abgrenzung des Problems der Teilungültigkeit von demjenigen der Einheit der Materie (E. 3).
- 3. Auslegung einer Initiative; die zulässige Weite der Auslegung hängt davon ab, ob es sich um eine formulierte oder nicht formulierte Initiative handelt; obwohl die nicht formulierte Initiative nur Wünsche enthält und somit anpassungsfähig ist, kann sie sich unter Umständen als verfassungswidrig erweisen (E. 4).
- 4. Gesamtwürdigung der Initiative; konkrete Folgen der Gutheissung der Beschwerde (E. 9).
Regeste (fr):
- Art. 85 let. a OJ; décision d'irrecevabilité d'une initiative populaire.
- 1. L'initiative non formulée en droit genevois; compétence pour déclarer irrecevable une initiative qui se révélerait contraire au droit fédéral (consid. 2).
- 2. Nullité ou invalidité partielle d'une initiative; la sanction doit demeurer proportionnée à l'inobservation de la norme juridique; distinction entre le problème de la nullité partielle et celui de l'unité de la matière (consid. 3).
- 3. Interprétation d'une initiative; la marge d'interprétation est plus ou moins étroite selon qu'il s'agit d'une initiative formulée ou non; bien que ne comportant que des voeux et étant par conséquent susceptible d'adaptation, une initiative non formulée peut dans certains cas se révéler contraire aux exigences constitutionnelles (consid. 4).
- 4. Appréciation globale de l'initiative; conséquences de l'admission du recours dans le cas particulier (consid. 9).
Regesto (it):
- Art. 85 lett. a OG; decisione d'inammissibilità di un'iniziativa popolare.
- 1. Iniziativa presentata in forma di proposta generale nel diritto ginevrino; competenza a dichiarare inammissibile un'iniziativa che si appalesa contraria al diritto federale (consid. 2).
- 2. Nullità parziale o totale di un'iniziativa; la sanzione dev'essere proporzionata all'inosservanza della norma giuridica; distinzione fra il problema della nullità parziale e quello dell'unità materiale (consid. 3).
- 3. Interpretazione di un'iniziativa; le possibilità d'interpretazione dipendono dalla forma in cui è stata presentata l'iniziativa (forma di proposta generale o progetto già elaborato); anche se comporta soltanto una proposta generale ed è quindi suscettibile d'adattamento, un'iniziativa non elaborata può rivelarsi in alcuni casi contraria all'ordine costituzionale (consid. 4).
- 4. Apprezzamento globale dell'iniziativa; conseguenze concrete dell'accoglimento del ricorso (consid. 9).
Sachverhalt ab Seite 363
BGE 105 Ia 362 S. 363
Le 9 mai 1977, le Parti socialiste genevois a déposé à la Chancellerie d'Etat du canton de Genève, munie du nombre de signatures nécessaire, une initiative populaire pour la protection de l'habitat et contre les démolitions abusives. Il s'agissait d'une initiative non formulée au sens de l'art. 67
SR 131.234 Constitution de la République et canton de Genève, du 14 octobre 2012 (Cst.-GE) Cst.-GE Art. 67 Référendum facultatif - 1 Les lois, ainsi que les autres actes du Grand Conseil prévoyant des dépenses, sont soumis au corps électoral si le référendum est demandé par 2 % des titulaires des droits politiques.10 |
|
1 | Les lois, ainsi que les autres actes du Grand Conseil prévoyant des dépenses, sont soumis au corps électoral si le référendum est demandé par 2 % des titulaires des droits politiques.10 |
2 | Sont également soumises au corps électoral si le référendum est demandé par 500 titulaires des droits politiques: |
a | les lois qui ont pour objet un nouvel impôt ou qui portent sur la modification du taux ou de l'assiette d'un impôt existant; |
b | les lois qui comportent une modification de la législation sur le logement, la protection des locataires et l'habitat, y compris les voies de droit en la matière. |
3 | Les objets visés au présent article sont également soumis au corps électoral si le Grand Conseil le décide à la majorité des deux tiers des voix exprimées, les abstentions n'étant pas prises en considération, mais au moins à la majorité de ses membres. |
BGE 105 Ia 362 S. 364
recours. Il soutient notamment que l'initiative du Parti socialiste genevois constituerait un moyen de pression politique contestable et qu'il serait douteux qu'une invalidation partielle d'une initiative soit conforme au principe de l'unité de la matière et au droit de vote du citoyen. Le Tribunal fédéral a admis le recours dans le sens des considérants.
Erwägungen
Extrait des motifs:
2. (L'initiative non formulée en droit genevois.)
L'art. 67
SR 131.234 Constitution de la République et canton de Genève, du 14 octobre 2012 (Cst.-GE) Cst.-GE Art. 67 Référendum facultatif - 1 Les lois, ainsi que les autres actes du Grand Conseil prévoyant des dépenses, sont soumis au corps électoral si le référendum est demandé par 2 % des titulaires des droits politiques.10 |
|
1 | Les lois, ainsi que les autres actes du Grand Conseil prévoyant des dépenses, sont soumis au corps électoral si le référendum est demandé par 2 % des titulaires des droits politiques.10 |
2 | Sont également soumises au corps électoral si le référendum est demandé par 500 titulaires des droits politiques: |
a | les lois qui ont pour objet un nouvel impôt ou qui portent sur la modification du taux ou de l'assiette d'un impôt existant; |
b | les lois qui comportent une modification de la législation sur le logement, la protection des locataires et l'habitat, y compris les voies de droit en la matière. |
3 | Les objets visés au présent article sont également soumis au corps électoral si le Grand Conseil le décide à la majorité des deux tiers des voix exprimées, les abstentions n'étant pas prises en considération, mais au moins à la majorité de ses membres. |
Ainsi que l'ont relevé les recourants en se référant à l'avis de droit qui a été déposé, ni la constitution genevoise, ni la loi du 23 juin 1961 sur les votations et élections ne confèrent au Grand Conseil la compétence de déclarer irrecevable une initiative populaire, au motif qu'elle serait contraire au droit fédéral. Le règlement du Grand Conseil ne contient également aucune disposition expresse à ce sujet (cf. art. 93). Cependant, lorsqu'une initiative cantonale ayant obtenu le nombre nécessaire de signatures est contraire à un droit de rang supérieur et notamment au droit fédéral et que le droit cantonal ne contient pas de règle de procédure à ce sujet, le droit fédéral autorise (ATF 102 Ia 134 consid. 3) mais n'oblige pas (ATF 102 Ia 550 consid. 2) l'autorité cantonale compétente à déclarer l'initiative irrecevable et à refuser de la soumettre au vote populaire (ATF 105 Ia 12 consid. 2a).
La jurisprudence autorise également l'autorité cantonale compétente à soumettre une initiative au vote populaire, en expliquant à l'électeur de quels vices elle est à son avis affectée, mais il est indispensable que l'exposé soit objectif (ATF 105 Ia 153, ATF 98 Ia 622). Le droit fédéral n'empêche donc
BGE 105 Ia 362 S. 365
pas l'autorité cantonale compétente qui tient tout ou partie d'une initiative pour contraire à une norme supérieure et en particulier au droit fédéral de la soumettre au peuple, en lui expliquant pour quelle raison elle la tient pour vicieuse.
3. (Nullité ou invalidité partielle d'une initiative.)
Les recourants estiment en substance que le droit de déclarer une initiative totalement irrecevable impliquerait aussi celui de la déclarer partiellement irrecevable - lorsque le vice ne frappe qu'une partie de l'initiative et que, pour le surplus, celle-ci peut avoir une existence propre - et que le droit fédéral destiné à protéger la volonté populaire commanderait une telle limitation. Dans l'arrêt BEBI (ATF 98 Ia 645 consid. 5), le Tribunal fédéral a considéré que l'on ne saurait déduire de façon générale du droit d'initiative un droit des citoyens actifs à ce que l'autorité compétente leur soumette la partie constitutionnelle d'une initiative qui, par ailleurs, est contraire à la constitution; cependant, un tel droit peut résulter, selon les circonstances, du type de l'initiative déposée. Il convient de relever à cet égard, tout d'abord, que la sanction doit demeurer proportionnée à l'inobservation de la norme juridique; Or, si le vice ne frappe qu'une partie mineure de l'initiative sans en atteindre le fondement ou la raison d'être, une déclaration d'irrecevabilité totale pourrait paraître une sanction excessive, au regard du droit fédéral. Il faut observer d'autre part que le respect de la volonté des signataires de l'initiative empêche qu'on soumette au vote populaire une initiative amputée d'une partie de son contenu sans leur accord exprès (sous forme de clause autorisant le comité d'initiative à retirer tout ou partie de l'initiative) ou présumé (lorsqu'on peut raisonnablement admettre que les signataires auraient donné leur accord à l'initiative, même sans sa partie viciée). Pour le surplus, les conséquences de l'informalité frappant certaines parties d'une initiative relèvent du droit cantonal (ATF 61 I 331, ATF 98 Ia 645 consid. 5 et références citées; ZBl 52 (1951), p. 22, 53 (1952), p. 284; KUTTLER, dans ZBl 78 (1977), p. 207; AUER, Les droits politiques dans les cantons suisses, p. 144), que le Tribunal fédéral ne peut revoir que dans le cadre de l'arbitraire. Par contre, il ne faut pas confondre, comme le fait l'Etat de Genève, le problème de la nullité partielle et celui de l'unité de
BGE 105 Ia 362 S. 366
la matière. En effet, même si l'initiative répond à l'exigence de l'unité de la matière, cela n'empêche pas nécessairement que, amputée de certaines parties viciées, elle puisse encore représenter un tout assez cohérent pour avoir une existence indépendante.
4. (Interprétation d'une initiative.)
Selon le Tribunal fédéral, lorsqu'il y a lieu à interprétation, le texte d'une initiative populaire doit s'interpréter pour lui-même et non d'après la volonté subjective des initiants (ATF 105 Ia 154 consid. 3a in fine). Une nombreuse jurisprudence rappelle aussi que, dans le cadre du contrôle abstrait des normes, une initiative doit s'interpréter dans un sens qui lui donne une signification (ATF 104 Ia 348, ATF 103 Ia 440, ATF 101 Ia 367 et références citées) et que les lois et arrêtés cantonaux ne sont annulés que s'ils ne peuvent pas être interprétés dans un sens conforme à la norme supérieure (ATF 104 Ia 250). Si cette règle vaut pour des textes déjà adoptés par le législateur cantonal, elle vaudra à fortiori pour des textes qu'une initiative propose à son acceptation (cf. ZBl 78 (1977), p. 213; ATF 104 Ia 348). Lorsqu'une initiative est rédigée sous forme de projet de loi, la marge d'interprétation est plus étroite: si l'initiative est acceptée, elle deviendra elle-même texte légal (sous réserve d'une annulation éventuelle par le Tribunal fédéral) et une adaptation aux exigences du droit de rang supérieur ne pourra avoir lieu qu'au stade de l'exécution de la loi. Au contraire, lorsque l'initiative ne comporte que des voeux, si elle est acceptée, il appartiendra au pouvoir législatif ordinaire de rédiger un texte respectant à la fois la volonté exprimée dans l'initiative et les exigences du droit en vigueur; les imperfections du texte de l'initiative pourront alors être corrigées dans la procédure d'adoption de la loi. On ne saurait pour autant en inférer que le contenu d'une initiative non formulée ne saurait jamais aller à l'encontre de la constitution, car étant toujours susceptible d'être adaptée à celle-ci dans la procédure législative proprement dite. Il se peut, en effet, que soit le but soit les moyens proposés dans l'initiative ne soient pas conformes aux exigences constitutionnelles. Lorsque le projet contenu dans l'initiative ne pourrait être reconnu conforme à la constitution que moyennant l'adjonction de réserves ou conditions supplémentaires qui en modifient profondément la nature, cette méthode
BGE 105 Ia 362 S. 367
d'interprétation entre en conflit avec le respect de la volonté des signataires de l'initiative et du peuple, dont la volonté ne doit pas être faussée par la présentation d'un projet constitutionnellement irréalisable comme tel, mais réalisable seulement dans d'autres conditions.
5. (L'interdiction de démolir et transformer proposée par l'initiative n'a de portée nouvelle que pour les bâtiments qui ne sont pas des maisons d'habitation au sens de la loi genevoise du 17 octobre 1962 restreignant les démolitions et transformations de maisons d habitation en raison de la pénurie de logements. Appliquée aux immeubles industriels, commerciaux et administratifs, une telle interdiction se révèle contraire à la constitution.)
6. (En ce qui concerne la composition de la Commission de recours, l'initiative propose une solution qui est contraire au principe d'égalité.)
7. (Le chap. II de l'initiative, intitulé "Rénovation de l'habitat", propose une réglementation qui n'apparaît pas exhaustive et pourrait au besoin être complétée par le législateur. Au demeurant, cette réglementation n est pas contraire au droit fédéral.)
8. (Le dépôt d'un projet de loi par des députés ne saurait priver les citoyens actifs de leur droit de former une initiative ayant un objet semblable ou voisin.)
9. (Appréciation globale.) En résumé, l'initiative apparaît contraire au droit fédéral], dans la mesure où elle applique l'interdiction de démolir et transformer aux bâtiments industriels, commerciaux et administratifs et en ce qui concerne la composition de la Commission de recours. Pour le surplus, elle n'apparaît pas contraire au droit fédéral; ses imprécisions et ses lacunes peuvent en outre faire l'objet d'une interprétation susceptible de lui donner un sens constitutionnel. On peut hésiter quant à la sanction. La composition de l'autorité de recours peut être considérée comme un point relativement secondaire. En revanche, l'invalidité de l'interdiction de démolir et transformer des immeubles industriels, commerciaux et administratifs est importante; elle vide de signification la plus grande partie du chap. 1 al. 1 de l'initiative; le fait que cette interdiction, pour les maisons d'habitation, n'aurait plus de limitation dans le temps n'a pas une grande portée
BGE 105 Ia 362 S. 368
pratique; au chap. I subsiste en outre le système de l'autorité de recours. Les chap. II et III ne sont pas contraires au droit fédéral. Si les signataires de l'initiative n ont pas autorisé un retrait ou une modification de celle-ci, en revanche les recourants ne voient pas d'inconvénient à une restriction de leur initiative dans la mesure reconnue constitutionnelle. En l'espèce, on peut supposer que cette attitude correspond à la pensée de la majorité des auteurs de l'initiative. Par ailleurs, la partie valide de cette dernière demeure malgré tout importante et l'on peut objectivement admettre que les signataires de l'initiative l'auraient également signée dans cette mesure restreinte. Aussi convient-il d'admettre le recours dans le sens des considérants et d'annuler la décision du Grand Conseil. Conformément à l'art. 67
SR 131.234 Constitution de la République et canton de Genève, du 14 octobre 2012 (Cst.-GE) Cst.-GE Art. 67 Référendum facultatif - 1 Les lois, ainsi que les autres actes du Grand Conseil prévoyant des dépenses, sont soumis au corps électoral si le référendum est demandé par 2 % des titulaires des droits politiques.10 |
|
1 | Les lois, ainsi que les autres actes du Grand Conseil prévoyant des dépenses, sont soumis au corps électoral si le référendum est demandé par 2 % des titulaires des droits politiques.10 |
2 | Sont également soumises au corps électoral si le référendum est demandé par 500 titulaires des droits politiques: |
a | les lois qui ont pour objet un nouvel impôt ou qui portent sur la modification du taux ou de l'assiette d'un impôt existant; |
b | les lois qui comportent une modification de la législation sur le logement, la protection des locataires et l'habitat, y compris les voies de droit en la matière. |
3 | Les objets visés au présent article sont également soumis au corps électoral si le Grand Conseil le décide à la majorité des deux tiers des voix exprimées, les abstentions n'étant pas prises en considération, mais au moins à la majorité de ses membres. |