Tribunal federal
{T 0/2}
1B 152/2008/col
Arrêt du 30 juin 2008
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges Féraud, Président, Reeb et Eusebio.
Greffier: M. Kurz.
Parties
A.________,
recourant, représenté par Me Jean-Luc Marsano, avocat,
contre
Vice-président du Tribunal de première instance du canton de Genève, case postale 3736, 1211 Genève 3.
Objet
assistance judiciaire pénale,
recours contre la décision du Vice-Président de la Cour de justice du canton de Genève du 5 mai 2008.
Faits:
A.
A.________ est détenu à Genève depuis le 17 octobre 2007 sous l'inculpation d'escroquerie, abus de confiance et faux dans les titres, puis de blanchiment d'argent. Le 11 février 2008, l'avocat genevois Jean-Luc Marsano a été désigné comme défenseur d'office. L'inculpé a ensuite déposé une demande d'assistance juridique auprès du Tribunal de première instance de Genève. Par décision du 10 mars 2008, le Vice-président de ce tribunal a rejeté la requête en considérant que le requérant avait, lors d'une audience d'instruction du 29 novembre 2007, reconnu disposer de un à trois millions d'euros sur un compte bancaire au Luxembourg.
B.
Par décision du 5 mai 2008, le Vice-président de la Cour de justice genevoise a confirmé cette décision. Dans ses déclarations du 29 novembre 2007, le requérant évoquait des commissions déjà encaissées; l'existence des fonds ressortait également d'une lettre du 22 octobre 2007. Le requérant n'expliquait pas ce qui l'aurait conduit à des déclarations inexactes devant le juge d'instruction; il n'avait fourni aucun élément permettant d'identifier son compte bancaire. Faute d'indigence démontrée, l'assistance juridique ne pouvait lui être accordée.
C.
A.________ forme un recours en matière pénale, avec une demande d'assistance judiciaire. Il conclut à l'annulation de la décision du 5 mai 2008 et à l'octroi de l'assistance juridique, subsidiairement au renvoi de la cause à l'autorité cantonale pour nouvelle décision au sens des considérants.
Le Vice-président se réfère à sa décision.
Considérant en droit:
1.
Le recours en matière pénale est ouvert contre une décision par laquelle l'assistance judiciaire gratuite est refusée à une partie à la procédure pénale (ATF 133 IV 335 consid. 2 p. 337).
1.1 La décision attaquée est rendue en dernière instance cantonale (art. 80
![](media/link.gif)
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 80 Autorités précédentes - 1 Le recours est recevable contre les décisions prises par les autorités cantonales de dernière instance ou par la Cour des plaintes et la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral.50 |
|
1 | Le recours est recevable contre les décisions prises par les autorités cantonales de dernière instance ou par la Cour des plaintes et la Cour d'appel du Tribunal pénal fédéral.50 |
2 | Les cantons instituent des tribunaux supérieurs comme autorités cantonales de dernière instance. Ces tribunaux statuent sur recours. Sont exceptés les cas dans lesquels le code de procédure pénale (CPP)51 prévoit un tribunal supérieur ou un tribunal des mesures de contrainte comme instance unique.52 |
![](media/link.gif)
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours: |
|
1 | Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours: |
a | si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou |
b | si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse. |
2 | En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.89 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies. |
3 | Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci. |
1.2 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente (art. 105 al. 1
![](media/link.gif)
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 105 Faits déterminants - 1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente. |
|
1 | Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente. |
2 | Il peut rectifier ou compléter d'office les constatations de l'autorité précédente si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95. |
3 | Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente.100 |
![](media/link.gif)
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 95 Droit suisse - Le recours peut être formé pour violation: |
|
a | du droit fédéral; |
b | du droit international; |
c | de droits constitutionnels cantonaux; |
d | de dispositions cantonales sur le droit de vote des citoyens ainsi que sur les élections et votations populaires; |
e | du droit intercantonal. |
![](media/link.gif)
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 105 Faits déterminants - 1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente. |
|
1 | Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente. |
2 | Il peut rectifier ou compléter d'office les constatations de l'autorité précédente si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95. |
3 | Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente.100 |
2.
Le recourant invoque son droit d'être entendu. Il reproche à l'autorité cantonale de ne pas s'être prononcée sur l'argument consistant à dire que si le recourant détenait des fonds au Luxembourg, ceux-ci devraient de toute façon être saisis dès leur découverte en raison de leur provenance illicite.
2.1 Le droit d'être entendu consacré à l'art. 29 al. 2
![](media/link.gif)
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. |
|
1 | Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. |
2 | Les parties ont le droit d'être entendues. |
3 | Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert. |
2.2 En l'espèce, l'autorité cantonale a répondu à l'argument du recourant en relevant que celui-ci ne soutenait pas que les fonds étaient d'origine illicite. Quoique succincte, cette indication permet de comprendre pourquoi la possibilité d'une confiscation a été écartée, et le recourant se trouve à même d'en contester le bien-fondé - ce qu'il ne fait d'ailleurs pas dans son recours. L'obligation minimale de motivation est par conséquent satisfaite.
3.
Sur le fond, le recourant invoque son droit à l'assistance judiciaire tel qu'il découle de l'art. 29 al. 3
![](media/link.gif)
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. |
|
1 | Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. |
2 | Les parties ont le droit d'être entendues. |
3 | Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert. |
3.1 L'autorité intimée s'est fondée sur les déclarations faites par le recourant devant le Juge d'instruction, selon lesquelles celui-ci percevait régulièrement des commissions non déclarées, avait fait l'objet d'un redressement fiscal en France pour trois millions de francs français en 1998 et 1999, et gagnait environ 15'000 fr. suisses par mois durant les cinq dernières années. Dans une lettre du 22 octobre 2007, le recourant priait un tiers de "récupérer" sur un compte au Luxembourg la somme de trois millions d'euros. Le recourant a précisé qu'il s'agissait des commissions précitées, qui devaient être partagées avec deux partenaires dont il donnerait les noms ultérieurement.
Le recourant soutient qu'il se serait mal exprimé: les commissions n'avaient pas pu être encaissées en raison de son incarcération. On ne saurait toutefois reprocher à l'autorité intimée d'avoir arbitrairement interprété les déclarations faites à l'instruction, puisqu'il est question de sommes "créditées" et "encaissées", et non de simples créances; la lettre du 22 octobre 2007 évoque aussi clairement la récupération de fonds déjà versés sur un compte au Luxembourg. Le recourant n'explique pas pour quelle raison il aurait présenté sa situation financière, y compris ses revenus mensuels, sous un angle faussement favorable.
3.2 Le refus de collaborer à l'établissement des faits ne constitue certes pas un motif de refus spécialement prévu à l'art. 29 al. 3
![](media/link.gif)
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. |
|
1 | Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. |
2 | Les parties ont le droit d'être entendues. |
3 | Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert. |
![](media/link.gif)
SR 210 Code civil suisse du 10 décembre 1907 CC Art. 8 - Chaque partie doit, si la loi ne prescrit le contraire, prouver les faits qu'elle allègue pour en déduire son droit. |
3.3 Le recourant invoque également en vain le principe de la proportionnalité: dans la mesure où ses conditions d'octroi n'étaient pas réunies, l'assistance judiciaire ne pouvait être accordée pour une durée limitée.
4.
Le recours doit par conséquent être rejeté. Le recourant n'ayant pas démontré son indigence, l'assistance judiciaire ne peut lui être accordée pour la présente procédure. Il y a donc lieu de percevoir des frais judiciaires (art. 66 al. 1
![](media/link.gif)
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
|
1 | En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
2 | Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis. |
3 | Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés. |
4 | En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours. |
5 | Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement. |
![](media/link.gif)
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 68 Dépens - 1 Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe. |
|
1 | Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe. |
2 | En règle générale, la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige. |
3 | En règle générale, aucuns dépens ne sont alloués à la Confédération, aux cantons, aux communes ou aux organisations chargées de tâches de droit public lorsqu'ils obtiennent gain de cause dans l'exercice de leurs attributions officielles. |
4 | L'art. 66, al. 3 et 5, est applicable par analogie. |
5 | Le Tribunal fédéral confirme, annule ou modifie, selon le sort de la cause, la décision de l'autorité précédente sur les dépens. Il peut fixer lui-même les dépens d'après le tarif fédéral ou cantonal applicable ou laisser à l'autorité précédente le soin de les fixer. |
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce:
1.
Le recours est rejeté.
2.
La demande d'assistance judiciaire est rejetée.
3.
Les frais judiciaires, arrêtés à 1000 fr., sont mis à la charge du recourant.
4.
Le présent arrêt est communiqué au mandataire du recourant, au Vice-président du Tribunal de première instance et au Vice-Président de la Cour de justice du canton de Genève.
Lausanne, le 30 juin 2008
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président: Le Greffier:
Féraud Kurz