Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

6B 1309/2018, 6B 1315/2018

Arrêt du 28 mars 2019

Cour de droit pénal

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Denys, Président, Jacquemoud-Rossari et Oberholzer.
Greffière : Mme Kistler Vianin.

Participants à la procédure
6B 1309/2018
X.________,
représenté par Me Léonie Spreng, avocate,
recourant,

et

6B 1315/2018
Y.________,
représenté par Me Vincent Demierre, avocat,
recourant,

contre

1. Ministère public central du canton de Vaud,
2. A.________,
représenté par Me Eric Stauffacher, avocat,
intimés.

Objet
6B 1309/2018
Lésions corporelles par négligence; arbitraire, violation du principe in dubio pro reo,

6B 1315/2018
Lésions corporelles par négligence; arbitraire,

recours contre le jugement de la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud du 8 octobre 2018 (n° 339 PE13.0022035-LGN).

Faits :

A.
Par jugement du 3 avril 2018, le Tribunal de police de l'arrondissement de La Côte a condamné Y.________ pour lésions corporelles graves par négligence à une peine pécuniaire de trente jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 30 fr., l'exécution de cette peine étant suspendue pendant deux ans, ainsi qu'à une amende de 300 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif de l'amende étant de dix jours. Il a condamné X.________ pour lésions corporelles graves par négligence à une peine pécuniaire de cinquante jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à 40 fr., l'exécution de cette peine étant suspendue pendant deux ans, ainsi qu'à une amende de 400 fr., la peine privative de liberté de substitution en cas de non-paiement fautif de l'amende étant de dix jours. Sur le plan civil, il a condamné les deux intéressés, solidairement entre eux, à verser à A.________ la somme de 10'000 fr. plus intérêt à 5% l'an dès le 6 juin 2013 à titre de réparation morale.

B.
Par jugement du 8 octobre 2018, la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal vaudois a rejeté les appels formés par Y.________ et X.________.

Elle a retenu les faits suivants:

B.a. B.________ SA a mandaté la société C.________ SA pour la pose d'échafaudages à l'intérieur de la cage d'escaliers de l'immeuble sis à la rue D.________, à E.________.

F.________, administrateur de C.________ SA, a demandé à son contremaître, X.________, de s'occuper du chantier en question. Y.________, employé de C.________ SA et chef d'équipe, s'est occupé du montage de l'échafaudage, aidé par deux autres collègues.

Les échafaudages ont été installés le 27 mai 2013 et démontés le 26 juin 2013.

B.b. A E.________, le 27 mai 2013, alors qu'ils savaient - ou devaient savoir - que des ouvriers allaient travailler dans la cage d'escaliers et que des locataires logeaient toujours dans l'immeuble, Y.________, en accord avec son contremaître X.________, a monté l'échafaudage et a laissé, comme soutien, malgré le mauvais éclairage, une barre transversale au niveau de la dernière marche de l'escalier menant au premier étage, barre placée à une dizaine de centimètres au-dessus de la marche, empêchant ainsi un cheminement sûr dans ladite cage d'escaliers. En outre, la présence de cette barre, de la même couleur que le sol, n'a pas été indiquée.

Le 6 juin 2013, A.________, l'un des locataires de l'immeuble, alors qu'il montait les escaliers menant au premier étage, a perdu l'équilibre en voulant enjamber ou en heurtant ladite barre et a chuté en arrière.

B.c. Cette chute lui a occasionné une fracture périprothétique Vancouver B1 fémur gauche et des contusions dorsales et lombaires, ce qui a nécessité une intervention chirurgicale. A.________ a été hospitalisé à l'hôpital de E.________ entre le 6 et le 19 juin 2013, date à laquelle il a été transféré au Centre de traitement et de réadaptation à l'hôpital de G.________. Il a pu quitter ce dernier établissement le 2 juillet 2013.

B.d. A.________ s'est constitué partie plaignante, demandeur au pénal et au civil, le 14 octobre 2013.

C.
Contre ce dernier jugement, Y.________ dépose un recours en matière pénale devant le Tribunal fédéral. Il conclut, principalement, à la réforme du jugement attaqué en ce sens qu'il est acquitté du chef d'accusation de lésions corporelles graves par négligence, qu'une indemnité équitable au sens de l'art. 429
SR 312.0 Schweizerische Strafprozessordnung vom 5. Oktober 2007 (Strafprozessordnung, StPO) - Strafprozessordnung
StPO Art. 429 Ansprüche - 1 Wird die beschuldigte Person ganz oder teilweise freigesprochen oder wird das Verfahren gegen sie eingestellt, so hat sie Anspruch auf:
1    Wird die beschuldigte Person ganz oder teilweise freigesprochen oder wird das Verfahren gegen sie eingestellt, so hat sie Anspruch auf:
a  eine nach dem Anwaltstarif festgelegte Entschädigung ihrer Aufwendungen für die angemessene Ausübung ihrer Verfahrensrechte, wobei beim Anwaltstarif nicht unterschieden wird zwischen der zugesprochenen Entschädigung und den Honoraren für die private Verteidigung;
b  Entschädigung der wirtschaftlichen Einbussen, die ihr aus ihrer notwendigen Beteiligung am Strafverfahren entstanden sind;
c  Genugtuung für besonders schwere Verletzungen ihrer persönlichen Verhältnisse, insbesondere bei Freiheitsentzug.
2    Die Strafbehörde prüft den Anspruch von Amtes wegen. Sie kann die beschuldigte Person auffordern, ihre Ansprüche zu beziffern und zu belegen.
3    Hat die beschuldigte Person eine Wahlverteidigung mit ihrer Verteidigung betraut, so steht der Anspruch auf Entschädigung nach Absatz 1 Buchstabe a ausschliesslich der Verteidigung zu unter Vorbehalt der Abrechnung mit ihrer Klientschaft. Gegen den Entschädigungsentscheid kann die Verteidigung das Rechtsmittel ergreifen, das gegen den Endentscheid zulässig ist.275
CPP lui est allouée et que les conclusions civiles de A.________ sont rejetées. A titre subsidiaire, il demande l'annulation du jugement attaqué et le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouveau jugement.

X.________ forme également un recours en matière pénale au Tribunal fédéral. Il conclut, principalement, à la réforme du jugement attaqué en ce sens qu'il est libéré du chef d'accusation de lésions corporelles graves par négligence, qu'une indemnité au sens de l'art. 429
SR 312.0 Schweizerische Strafprozessordnung vom 5. Oktober 2007 (Strafprozessordnung, StPO) - Strafprozessordnung
StPO Art. 429 Ansprüche - 1 Wird die beschuldigte Person ganz oder teilweise freigesprochen oder wird das Verfahren gegen sie eingestellt, so hat sie Anspruch auf:
1    Wird die beschuldigte Person ganz oder teilweise freigesprochen oder wird das Verfahren gegen sie eingestellt, so hat sie Anspruch auf:
a  eine nach dem Anwaltstarif festgelegte Entschädigung ihrer Aufwendungen für die angemessene Ausübung ihrer Verfahrensrechte, wobei beim Anwaltstarif nicht unterschieden wird zwischen der zugesprochenen Entschädigung und den Honoraren für die private Verteidigung;
b  Entschädigung der wirtschaftlichen Einbussen, die ihr aus ihrer notwendigen Beteiligung am Strafverfahren entstanden sind;
c  Genugtuung für besonders schwere Verletzungen ihrer persönlichen Verhältnisse, insbesondere bei Freiheitsentzug.
2    Die Strafbehörde prüft den Anspruch von Amtes wegen. Sie kann die beschuldigte Person auffordern, ihre Ansprüche zu beziffern und zu belegen.
3    Hat die beschuldigte Person eine Wahlverteidigung mit ihrer Verteidigung betraut, so steht der Anspruch auf Entschädigung nach Absatz 1 Buchstabe a ausschliesslich der Verteidigung zu unter Vorbehalt der Abrechnung mit ihrer Klientschaft. Gegen den Entschädigungsentscheid kann die Verteidigung das Rechtsmittel ergreifen, das gegen den Endentscheid zulässig ist.275
CPP lui est octroyée et que les conclusions civiles de A.________ sont rejetées. A titre subsidiaire, il demande la réforme du jugement attaqué en ce sens que les conclusions civiles de A.________ sont rejetées. A titre plus subsidiaire, il sollicite l'annulation du jugement attaqué et le renvoi de la cause à la cour cantonale pour nouveau jugement.
Invités à présenter des observations, le ministère public vaudois et la cour cantonale ont renoncé à se déterminer. L'intimé A.________ a conclu au rejet des recours, tout en se référant aux considérants du jugement attaqué.

Considérant en droit :

1.
Les deux recours ont pour objet la même décision. Ils ont trait au même complexe de faits. Il y a lieu de joindre les causes et de les traiter dans un seul arrêt (art. 24 al. 2
SR 273 Bundesgesetz vom 4. Dezember 1947 über den Bundeszivilprozess
BZP Art. 24 - 1 Mehrere Ansprüche des Klägers gegen denselben Beklagten können in der gleichen Klage geltend gemacht werden, wenn das Bundesgericht für jeden einzelnen Anspruch zuständig ist. Dieses Erfordernis gilt nicht für Nebenansprüche.
1    Mehrere Ansprüche des Klägers gegen denselben Beklagten können in der gleichen Klage geltend gemacht werden, wenn das Bundesgericht für jeden einzelnen Anspruch zuständig ist. Dieses Erfordernis gilt nicht für Nebenansprüche.
2    Mehrere Personen können in der gleichen Klage als Kläger auftreten oder als Beklagte belangt werden:
a  wenn sie mit Rücksicht auf den Streitgegenstand in Rechtsgemeinschaft stehen oder aus dem gleichen tatsächlichen und rechtlichen Grunde berechtigt oder verpflichtet sind. Der Richter kann einen Dritten, der in der Rechtsgemeinschaft steht, zum Streite beiladen. Der Beigeladene wird Partei.
b  wenn gleichartige, auf einem im Wesentlichen gleichartigen tatsächlichen und rechtlichen Grunde beruhende Ansprüche den Streitgegenstand bilden und die Zuständigkeit des Bundesgerichts für jeden einzelnen Anspruch begründet ist.
3    Der Richter kann jederzeit verbundene Klagen trennen, wenn er es für zweckmässig hält.
PCF et 71 LTF).

I. Recours de Y.________

2.
Y.________ (recourant 1) critique l'établissement des faits qu'il qualifie de manifestement inexact sur plusieurs points.

2.1. Le Tribunal fédéral n'est pas une autorité d'appel, auprès de laquelle les faits pourraient être rediscutés librement. Il est lié par les constatations de fait de la décision entreprise (art. 105 al. 1
SR 173.110 Bundesgesetz vom 17. Juni 2005 über das Bundesgericht (Bundesgerichtsgesetz, BGG) - Bundesgerichtsgesetz
BGG Art. 105 Massgebender Sachverhalt - 1 Das Bundesgericht legt seinem Urteil den Sachverhalt zugrunde, den die Vorinstanz festgestellt hat.
1    Das Bundesgericht legt seinem Urteil den Sachverhalt zugrunde, den die Vorinstanz festgestellt hat.
2    Es kann die Sachverhaltsfeststellung der Vorinstanz von Amtes wegen berichtigen oder ergänzen, wenn sie offensichtlich unrichtig ist oder auf einer Rechtsverletzung im Sinne von Artikel 95 beruht.
3    Richtet sich die Beschwerde gegen einen Entscheid über die Zusprechung oder Verweigerung von Geldleistungen der Militär- oder Unfallversicherung, so ist das Bundesgericht nicht an die Sachverhaltsfeststellung der Vorinstanz gebunden.95
LTF), à moins que celles-ci n'aient été établies en violation du droit ou de manière manifestement inexacte au sens des art. 97 al. 1
SR 173.110 Bundesgesetz vom 17. Juni 2005 über das Bundesgericht (Bundesgerichtsgesetz, BGG) - Bundesgerichtsgesetz
BGG Art. 97 Unrichtige Feststellung des Sachverhalts - 1 Die Feststellung des Sachverhalts kann nur gerügt werden, wenn sie offensichtlich unrichtig ist oder auf einer Rechtsverletzung im Sinne von Artikel 95 beruht und wenn die Behebung des Mangels für den Ausgang des Verfahrens entscheidend sein kann.
1    Die Feststellung des Sachverhalts kann nur gerügt werden, wenn sie offensichtlich unrichtig ist oder auf einer Rechtsverletzung im Sinne von Artikel 95 beruht und wenn die Behebung des Mangels für den Ausgang des Verfahrens entscheidend sein kann.
2    Richtet sich die Beschwerde gegen einen Entscheid über die Zusprechung oder Verweigerung von Geldleistungen der Militär- oder Unfallversicherung, so kann jede unrichtige oder unvollständige Feststellung des rechtserheblichen Sachverhalts gerügt werden.86
et 105 al. 2
SR 173.110 Bundesgesetz vom 17. Juni 2005 über das Bundesgericht (Bundesgerichtsgesetz, BGG) - Bundesgerichtsgesetz
BGG Art. 105 Massgebender Sachverhalt - 1 Das Bundesgericht legt seinem Urteil den Sachverhalt zugrunde, den die Vorinstanz festgestellt hat.
1    Das Bundesgericht legt seinem Urteil den Sachverhalt zugrunde, den die Vorinstanz festgestellt hat.
2    Es kann die Sachverhaltsfeststellung der Vorinstanz von Amtes wegen berichtigen oder ergänzen, wenn sie offensichtlich unrichtig ist oder auf einer Rechtsverletzung im Sinne von Artikel 95 beruht.
3    Richtet sich die Beschwerde gegen einen Entscheid über die Zusprechung oder Verweigerung von Geldleistungen der Militär- oder Unfallversicherung, so ist das Bundesgericht nicht an die Sachverhaltsfeststellung der Vorinstanz gebunden.95
LTF, à savoir, pour l'essentiel, de façon arbitraire au sens de l'art. 9
SR 101 Bundesverfassung der Schweizerischen Eidgenossenschaft vom 18. April 1999
BV Art. 9 Schutz vor Willkür und Wahrung von Treu und Glauben - Jede Person hat Anspruch darauf, von den staatlichen Organen ohne Willkür und nach Treu und Glauben behandelt zu werden.
Cst. Une décision n'est pas arbitraire du seul fait qu'elle apparaît discutable ou même critiquable; il faut qu'elle soit manifestement insoutenable et cela non seulement dans sa motivation mais aussi dans son résultat (ATF 143 IV 241 consid. 2.3.1 p. 244). En matière d'appréciation des preuves et d'établissement des faits, il n'y a arbitraire que lorsque l'autorité ne prend pas en compte, sans aucune raison sérieuse, un élément de preuve propre à modifier la décision, lorsqu'elle se trompe manifestement sur son sens et sa portée, ou encore lorsque, en se fondant sur les éléments recueillis, elle en tire des conclusions insoutenables (ATF 143 IV 500 consid. 1.1 p. 503; 140 III 264 consid. 2.3 p. 266 et les références citées).

Le Tribunal fédéral n'examine la violation des droits fondamentaux, dont l'interdiction de l'arbitraire, que si ce moyen est invoqué et motivé par le recourant (art. 106 al. 2
SR 173.110 Bundesgesetz vom 17. Juni 2005 über das Bundesgericht (Bundesgerichtsgesetz, BGG) - Bundesgerichtsgesetz
BGG Art. 106 Rechtsanwendung - 1 Das Bundesgericht wendet das Recht von Amtes wegen an.
1    Das Bundesgericht wendet das Recht von Amtes wegen an.
2    Es prüft die Verletzung von Grundrechten und von kantonalem und interkantonalem Recht nur insofern, als eine solche Rüge in der Beschwerde vorgebracht und begründet worden ist.
LTF), c'est-à-dire s'il a été expressément soulevé et exposé de manière claire et détaillée. Les critiques de nature appellatoire sont irrecevables (ATF 142 III 364 consid. 2.4 p. 368 et les références citées).

2.2. Le recourant 1 soutient qu'en l'absence d'expertise, la cour cantonale serait tombée dans l'arbitraire en retenant que la construction de l'échafaudage en forme de " H " constituait une violation des règles de l'art de construire.

2.2.1. La cour cantonale s'est référée aux déclarations de H.________, inspecteur des chantiers. Selon ce dernier, il n'y avait pas de cheminement sûr qui était assuré aux tiers, habitants et travailleurs, en raison de la présence de cette barre transversale sur le cadre de l'échafaudage. L'inspecteur des chantiers a considéré l'installation de l'échafaudage en " H " comme dangereuse et a ajouté que le pied du cadre de l'échafaudage aurait pu être fixé au sol par un moyen autre que cette barre transversale (PV aud. 9, l. 34 ss). D'après la cour cantonale, les autres intervenants ont admis que le même résultat aurait pu être obtenu avec d'autres systèmes (pose de barres de soutien contre les murs [PV aud. 5, l. 52 ss] ou fixation de l'échafaudage au sol avec des vis [PV aud. 9, l. 40 ss; PV aud. 10, l. 90 ss et 144 ss; PV aud. 11, l. 127 ss]) et que cette barre était dangereuse (PV aud. 8, l. 50-52 et 62-64).

2.2.2. Il ressort des déclarations de l'ensemble des professionnels qui sont intervenus sur le chantier que l'installation de l'élément en forme de " H " en travers de l'escalier était nécessaire pour la tenue de l'échafaudage et donc pour la sécurité des ouvriers.

F.________, administrateur de C.________ SA, a expliqué que la barre horizontale était une barre de soutien, qui évitait que les pieds de l'échafaudage ne bougent avec le passage des ouvriers et les travaux (PV aud. 5, l. 56-61). Il a ajouté qu'il n'avait reçu aucune plainte relative à l'échafaudage tel qu'il avait été posé (PV aud. 5, l. 65-66).

I.________, dessinateur en bâtiment et technicien employé par l'entreprise B.________ SA, a rapporté qu'" On n'aurait pas pu faire autrement et mieux que ça. Pour vous répondre, cette barre était indispensable. " (PV aud. 7, l. 59-60). Il a précisé qu'il n'avait jamais entendu quiconque parler de la dangerosité des échafaudages (PV aud. 7, l. 89).

J.________, architecte, a exposé qu'il n'y avait pas d'autre façon de poser la barre, vu qu'une cage d'escalier est confinée (PV aud. 8, l. 78). Un locataire de l'immeuble aurait rapporté que l'architecte avait estimé les barres transversales nécessaires pour maintenir la structure et qu'il lui avait affirmé catégoriquement qu'on ne pouvait pas les ôter (PV aud. 6, l. 36-37 et 39-40).

2.2.3. Si les personnes qui ont travaillé sur le chantier ont reconnu qu'il existait d'autres dispositifs pour stabiliser l'échafaudage, elles ont cependant expliqué que ceux-ci ne pouvaient pas être mis en place dans le cas d'espèce, compte tenu de la configuration des lieux.

Ainsi, F.________, administrateur de C.________ SA, a admis que les monteurs auraient pu mettre des barres de soutien contre les murs, mais a ajouté qu'il est courant que les entreprises les enlèvent car elles sont gênées pour effectuer leurs travaux. Or, si ces barres étaient enlevées, cela pouvait être dangereux, surtout lorsque les échafaudages étaient installés dans des escaliers (PV aud. 5, l. 52-56).

Concernant la possibilité de fixer l'échafaudage au sol, X.________, contremaître de C.________ SA et recourant 2, a admis qu'il s'agissait d'une possibilité lorsqu'il y avait des locataires dans l'immeuble; dans ce cas, en tant que responsable du chantier, il lui incombait de demander une autorisation à l'architecte (PV aud. 10, l. 90 ss, 146). Le recourant 1 a déclaré que, selon lui, il n'aurait pas été possible de faire des trous dans les marches, car le béton de celles-ci se serait effrité (PV aud. 11, l. 125 ss).

Enfin, l'architecte J.________ a expliqué qu'il n'existait pas de possibilité de mettre la barre ailleurs et que, au départ, cette barre était nécessaire pour faire tenir l'ensemble (PV aud. 8, l. 54-56 et 60-61). F.________ indique également que la barre de soutien ne pouvait être installée qu'en haut des escaliers, car le sol y était plat (PV aud. 5, l. 57-58).

2.2.4. La cour cantonale a retenu que l'utilisation d'un élément en forme de " H " constituait une violation des règles de l'art de construire, en se fondant uniquement sur les déclarations de l'inspecteur des chantiers, qui ne précise pas au demeurant comment il aurait fallu installer l'échafaudage. Elle écarte sans motivation l'avis exprimé par les personnes intervenues sur le chantier, qui ont affirmé que la pose de la barre transversale était nécessaire pour assurer la stabilité de l'échafaudage pour la sécurité des ouvriers et que les autres systèmes pour stabiliser l'échafaudage n'entraient pas en ligne de compte en l'espèce. En ignorant ces déclarations et en se fondant sur la seule opinion de l'inspecteur des chantiers, au demeurant peu précise, les juges cantonaux ont versé dans l'arbitraire. Le recours doit donc être admis, le jugement attaqué annulé et la cause renvoyée à la cour cantonale pour qu'elle détermine, au besoin en ordonnant une expertise, si l'utilisation d'un élément en forme de " H " était conforme aux règles de l'art de construire, compte tenu des contraintes imposées par la configuration des lieux.

2.3. Le recourant 1 reproche à la cour cantonale d'avoir arbitrairement retenu qu'il savait ou devait savoir que l'immeuble était occupé. Il fait valoir qu'il n'a été présent sur ce chantier qu'à une seule reprise pour un maximum de six heures pour installer l'échafaudage et que même ses supérieurs ignoraient la présence de locataires dans l'immeuble durant les travaux. Il s'agissait d'un chantier d'une grande ampleur, durant lequel il n'y aurait pas dû y avoir de résidents dans l'immeuble.

2.3.1. La cour cantonale a retenu que même si le recourant 1 n'avait pas été informé de la présence de locataires dans l'immeuble, il ne pouvait pas partir du principe que, n'ayant croisé personne durant les quelques heures qu'il avait passées sur le chantier, l'immeuble était inoccupé. Au surplus, selon la cour cantonale, même si les travaux étaient conséquents, le recourant 1 ne pouvait pas ignorer qu'il s'agissait d'une rénovation partielle et, donc, d'emblée exclure que d'autres personnes que les ouvriers circuleraient dans la cage d'escaliers durant les travaux. Selon la cour cantonale, c'est incontestable que le chantier était un chantier " ouvert ", accessible à tous, puisque des tiers y vivaient.

2.3.2. Il ressort des auditions des professionnels qui sont intervenus sur le chantier qu'ils ignoraient que l'immeuble était habité.

Le recourant 1 a lui-même déclaré: " Je ne savais pas qu'il y avait des locataires. Pour moi, le bâtiment était en rénovation, notamment en raison des escaliers en bois du 2e étage, à moitié cassés. Si j'avais su qu'il y avait des locataires, j'aurais pris contact avec mon patron " (PV aud. 4, l. 45-47).

Pour sa part, X.________, le contremaître du recourant 1 et recourant 2, a exposé: " J e ne savais pas qu'il y avait des locataires dans l'immeuble [...] Pour moi, il n'y en avait aucun. [...] Lors des travaux, je n'ai croisé dans l'immeuble que des personnes qui y travaillaient. Je me suis rendu dans l'appartement du dernier étage qui était inoccupé car il était en rénovation. Je n'ai pas pénétré dans d'autres logements " (PV aud. 3., l. 40-48).
F.________, administrateur de C.________ SA, a déclaré que M. X.________ et le chef monteur ne savaient pas qu'il y avait des locataires dans l'immeuble. Pour sa part, il ne le savait pas non plus (PV aud. 5, l. 38). Il a ajouté: " Lorsque je me suis rendu sur les lieux avant l'accident et avant qu'il y ait des échafaudages à l'intérieur, il y avait énormément de travaux. En voyant l'intérieur du bâtiment, j'étais certain qu'il n'y avait pas de locataires au vu des nombreux travaux en cours " (PV aud. 5, l. 89 ss.).

I.________, dessinateur en bâtiment et technicien chez B.________ SA, a expliqué qu'il avait su tardivement qu'il y avait des locataires dans l'immeuble, probablement en mai 2013. Pour lui, on ne devrait pas laisser des gens vivre dans un tel chantier; on ne pouvait pas imposer cela à quelqu'un d'aussi âgé que A.________ (PV aud. 7, l. 40 ss).

2.3.3. La cour cantonale semble admettre que le recourant 1 n'avait pas été informé de la présence de locataires dans l'immeuble et qu'il ne savait pas que l'immeuble était habité. Elle a toutefois retenu que, même si personne ne lui avait rien dit, il ne pouvait pas partir de l'idée qu'il n'y avait personne du moment qu'il ne s'agissait que d'une rénovation partielle. Cette constatation de fait va toutefois à l'encontre des déclarations des personnes interrogées. Ainsi, comme vu ci-dessus, les différents intervenants sur le chantier sont tous partis de l'idée que l'immeuble était vide. I.________, dessinateur en bâtiment et technicien chez B.________ SA a même déclaré: " lors de travaux d'une telle ampleur, les locaux doivent être vidés " (PV aud. 7, l. 99 ss). En écartant sans aucune motivation ces témoignages et en retenant que le recourant 1 devait admettre que l'immeuble était habité puisqu'il ne s'agissait que d'une rénovation partielle, la cour cantonale est tombée dans l'arbitraire. Cet élément est déterminant pour l'issue du litige dans la mesure où les règles de sécurité varient selon que le chantier est fermé ou ouvert au public. Le jugement attaqué doit donc être annulé sur ce point et renvoyé à la cour cantonale pour
nouvelle instruction.

2.4. Le recourant 1 reproche à la cour cantonale d'avoir omis de reprendre certains faits figurant dans le jugement de première instance, qui démontreraient qu'il n'était qu'un simple exécutant obéissant aux instructions de son supérieur hiérarchique.

2.4.1. La cour cantonale a retenu que le recourant 1 avait la qualité de chef d'équipe des monteurs et qu'il était chargé de diriger les autres employés avec lesquels il a installé l'échafaudage. A ce titre, il lui incombait d'effectuer ce travail conformément aux normes de sécurité reconnues dans la branche (jugement attaqué p. 17). Il aurait notamment dû s'enquérir si d'éventuels locataires étaient présents dans l'immeuble avant de choisir le type d'échafaudage qu'il allait installer (jugement attaqué p. 21).

2.4.2. Selon la jurisprudence, la responsabilité pénale d'un participant à la construction se détermine sur la base des prescriptions légales, des accords contractuels ou des fonctions exercées, ainsi que des circonstances concrètes (arrêt 6B 145/2015 du 29 janvier 2016 consid. 2.1.1 in SJ 2016 I 433). Chacun est tenu, dans son domaine de compétence, de déployer la diligence que l'on peut attendre de lui pour veiller au respect des règles de sécurité (BERNARD CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. II, 3e éd. 2010, p. 99 n° 17 ad art. 229
SR 311.0 Schweizerisches Strafgesetzbuch vom 21. Dezember 1937
StGB Art. 229 - 1 Wer vorsätzlich bei der Leitung oder Ausführung eines Bauwerks oder eines Abbruchs die anerkannten Regeln der Baukunde ausser Acht lässt und dadurch wissentlich Leib und Leben von Menschen gefährdet, wird mit Freiheitsstrafe bis zu fünf Jahren oder Geldstrafe bestraft.308
1    Wer vorsätzlich bei der Leitung oder Ausführung eines Bauwerks oder eines Abbruchs die anerkannten Regeln der Baukunde ausser Acht lässt und dadurch wissentlich Leib und Leben von Menschen gefährdet, wird mit Freiheitsstrafe bis zu fünf Jahren oder Geldstrafe bestraft.308
2    Lässt der Täter die anerkannten Regeln der Baukunde fahrlässig ausser Acht, so ist die Strafe Freiheitsstrafe bis zu drei Jahren oder Geldstrafe.
CP; MICHEL DUPUIS ET AL., Petit commentaire du Code pénale, 2e éd., 2017, n° 12a ad art. 229
SR 311.0 Schweizerisches Strafgesetzbuch vom 21. Dezember 1937
StGB Art. 229 - 1 Wer vorsätzlich bei der Leitung oder Ausführung eines Bauwerks oder eines Abbruchs die anerkannten Regeln der Baukunde ausser Acht lässt und dadurch wissentlich Leib und Leben von Menschen gefährdet, wird mit Freiheitsstrafe bis zu fünf Jahren oder Geldstrafe bestraft.308
1    Wer vorsätzlich bei der Leitung oder Ausführung eines Bauwerks oder eines Abbruchs die anerkannten Regeln der Baukunde ausser Acht lässt und dadurch wissentlich Leib und Leben von Menschen gefährdet, wird mit Freiheitsstrafe bis zu fünf Jahren oder Geldstrafe bestraft.308
2    Lässt der Täter die anerkannten Regeln der Baukunde fahrlässig ausser Acht, so ist die Strafe Freiheitsstrafe bis zu drei Jahren oder Geldstrafe.
CP).

Les faits retenus dans le jugement attaqué ne permettent toutefois pas de déterminer s'il incombait personnellement au recourant, compte tenu de son domaine de compétence et de la division du travail sur le chantier, de respecter la règle de l'art litigieuse. A défaut d'élément de fait plus précis, il n'est pas possible de déterminer si le recourant se trouvait dans une position de garant. Le jugement attaqué doit donc être également annulé sur ce point et renvoyé à la cour cantonale pour nouvelle décision.

2.5. En définitive, le recours doit être admis, le jugement attaqué annulé et la cause renvoyée à la cour cantonale pour qu'elle détermine, au besoin en ordonnant une expertise, si l'échafaudage a été installé conformément aux règles de l'art de construire compte tenu des circonstances de l'espèce (sécurité des ouvriers, configuration des lieux, chantier ouvert ou fermé, etc.). Il n'y a pas lieu d'examiner à ce stade les autres griefs du recourant (lien de causalité, tort moral).

II. Recours de X.________

3.

3.1. X.________ (recourant 2) critique l'établissement des faits, qu'il qualifie d'arbitraire sur plusieurs points. A l'instar du recourant 1, il reproche à la cour cantonale d'avoir versé dans l'arbitraire en retenant qu'il pouvait s'attendre à ce que l'immeuble soit encore occupé par des locataires lors de l'installation de l'échafaudage et que celui-ci avait été monté de manière contraire aux règles de l'art de construire.

3.2. Comme vu ci-dessus, ces deux critiques sont pertinentes.

Pour retenir que l'installation de l'échafaudage en forme de " H " constituait une violation des règles de l'art de construire, la cour cantonale se fonde uniquement sur les déclarations de H.________, inspecteur des chantiers (consid. 2.2.1 ci-dessus). Les professionnels qui sont intervenus sur le chantier ont déclaré que l'installation de l'échafaudage en forme de " H " était nécessaire pour maintenir la stabilité de l'échafaudage et garantir la sécurité des ouvriers (cf. consid. 2.2.2) et que d'autres dispositifs n'auraient pas pu être mis en place dans le cas d'espèce compte tenu de la configuration des lieux (cf. consid. 2.2.3). En faisant abstraction de ces déclarations, sans aucune explication, la cour cantonale a versé dans l'arbitraire (cf. consid. 2.2.4).

La cour cantonale a retenu que le recourant 2 devait s'attendre à ce que l'immeuble soit encore occupé par des locataires, dès lors qu'il ne s'agissait que d'une rénovation partielle (cf. consid. 2.3.1). Cette constatation va à l'encontre des déclarations des professionnels présents sur le chantiers: la plupart ont déclaré ignorer que l'immeuble était encore occupé et certains ont même précisé être sûrs qu'il n'y avait pas de locataire au vu des nombreux travaux en cours (cf. consid. 2.3.2). En passant sous silence ces déclarations et en retenant que le recourant 2 devait savoir que l'immeuble était occupé, la cour cantonale est tombée dans l'arbitraire (cf. consid. 2.3.3).

4.
Le recours doit donc être admis, le jugement attaqué annulé et la cause renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres griefs (notamment celui relatif à la réparation du tort moral).

III. Frais et dépens

5.
Les recourants qui obtiennent gain de cause ne supportent pas de frais (art. 66 al. 1
SR 173.110 Bundesgesetz vom 17. Juni 2005 über das Bundesgericht (Bundesgerichtsgesetz, BGG) - Bundesgerichtsgesetz
BGG Art. 66 Erhebung und Verteilung der Gerichtskosten - 1 Die Gerichtskosten werden in der Regel der unterliegenden Partei auferlegt. Wenn die Umstände es rechtfertigen, kann das Bundesgericht die Kosten anders verteilen oder darauf verzichten, Kosten zu erheben.
1    Die Gerichtskosten werden in der Regel der unterliegenden Partei auferlegt. Wenn die Umstände es rechtfertigen, kann das Bundesgericht die Kosten anders verteilen oder darauf verzichten, Kosten zu erheben.
2    Wird ein Fall durch Abstandserklärung oder Vergleich erledigt, so kann auf die Erhebung von Gerichtskosten ganz oder teilweise verzichtet werden.
3    Unnötige Kosten hat zu bezahlen, wer sie verursacht.
4    Dem Bund, den Kantonen und den Gemeinden sowie mit öffentlich-rechtlichen Aufgaben betrauten Organisationen dürfen in der Regel keine Gerichtskosten auferlegt werden, wenn sie in ihrem amtlichen Wirkungskreis, ohne dass es sich um ihr Vermögensinteresse handelt, das Bundesgericht in Anspruch nehmen oder wenn gegen ihre Entscheide in solchen Angelegenheiten Beschwerde geführt worden ist.
5    Mehrere Personen haben die ihnen gemeinsam auferlegten Gerichtskosten, wenn nichts anderes bestimmt ist, zu gleichen Teilen und unter solidarischer Haftung zu tragen.
LTF). Ils peuvent prétendre à de pleins dépens à charge du canton de Vaud. Dans les circonstances d'espèce, il est statué sans frais ni dépens à charge de l'intimé.

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1.
Les causes 6B 1309/2018 et 6B 1315/2018 sont jointes.

2.
Les recours sont admis, le jugement attaqué est annulé et la cause est renvoyée à la cour cantonale pour nouvelle décision.

3.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.

4.
Le canton de Vaud versera au recourant X.________ une indemnité de 3'000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral.

5.
Le canton de Vaud versera au recourant Y.________ une indemnité de 3'000 fr. à titre de dépens pour la procédure devant le Tribunal fédéral.

6.
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour d'appel pénale du Tribunal cantonal du canton de Vaud.

Lausanne, le 28 mars 2019

Au nom de la Cour de droit pénal
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Denys

La Greffière : Kistler Vianin
Decision information   •   DEFRITEN
Document : 6B_1309/2018
Date : 28. März 2019
Published : 15. April 2019
Source : Bundesgericht
Status : Unpubliziert
Subject area : Straftaten
Subject : Lésions corporelles par négligence; arbitraire, violation du principe in dubio pro reo (6B_1309/2018); lésions corporelles par négligence; arbitraire (6B_1315/2018)


Legislation register
BGG: 66  97  105  106
BV: 9
BZP: 24
StGB: 229
StPO: 429
BGE-register
140-III-264 • 142-III-364 • 143-IV-241 • 143-IV-500
Weitere Urteile ab 2000
6B_1309/2018 • 6B_1315/2018 • 6B_145/2015
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SJ
2016 I S.433