Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
{T 0/2}
8C 90/2014
Arrêt du 19 décembre 2014
Ire Cour de droit social
Composition
Mme et MM. les Juges fédéraux Leuzinger, Présidente, Ursprung et Frésard.
Greffière : Mme Fretz Perrin.
Participants à la procédure
A.________,
représenté par Me Alain Ribordy, avocat,
recourant,
contre
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents, Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne,
intimée.
Objet
Assurance-accidents (traduction d'une pièce médicale),
recours contre le jugement du Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Cour des assurances sociales,
du 11 décembre 2013.
Faits :
A.
Par décision du 16 juillet 2010, la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA) a supprimé avec effet au 17 mai 2010 les prestations (indemnité journalière et frais de traitement) qu'elle versait à A.________ pour les suites d'un accident survenu le 26 février 2009. A.________ a formé opposition contre cette décision le 13 septembre 2010, complétée les 15 novembre 2010, 3 décembre 2010 et 9 février 2011. A l'appui de ses écritures, il a versé plusieurs rapports médicaux établis entre septembre 2010 et février 2011. Par lettre du 29 mars 2011, la CNA l'a informé qu'après examen approfondi du dossier et des documents médicaux complémentaires fournis, un nouvel avis médical était nécessaire en l'état. Elle a mandaté le docteur B.________ (spécialiste FMH en chirurgie) de sa division Médecine des assurances en lui demandant de répondre à un certain nombre de questions. Par lettre du 13 mai 2011, la CNA a fait parvenir à l'assuré une copie du rapport établi par le docteur B.________ le 28 avril 2011, lequel était rédigé en allemand. Elle a par ailleurs informé l'assuré qu'elle renonçait à mettre en oeuvre une expertise. Par requête du 19 mai 2011, renouvelée le 28 juin 2011, l'assuré a requis de la CNA une traduction
en français dudit rapport, ce qui lui a été refusé. Par une nouvelle décision du 15 septembre 2011, la CNA a rejeté l'opposition formée par l'assuré.
B.
Se plaignant notamment d'une violation de son droit à obtenir la traduction d'une pièce essentielle du dossier, A.________ a formé recours contre la décision sur opposition du 15 septembre 2011 devant la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal du canton de Fribourg. Statuant le 11 décembre 2013, la juridiction cantonale a rejeté le recours. Elle a notamment considéré que l'avis du docteur B.________ n'était pas à lui seul déterminant pour fonder ou non le droit à prestations. Par ailleurs, les conclusions de cette expertise étaient libellées en termes clairs et facilement compréhensibles au recourant représenté par un avocat sans qu'il soit nécessaire de les faire traduire.
C.
A.________ interjette un recours en matière de droit public contre ce jugement dont il demande l'annulation, en concluant au renvoi de la cause à la juridiction cantonale afin qu'elle mette en oeuvre une expertise pluridisciplinaire. A titre subsidiaire, il demande que la CNA lui verse des indemnités journalières et rembourse ses frais de traitement postérieurement au 17 mai 2010, le tout sous suite de frais et dépens.
La CNA conclut au rejet du recours, tandis que l'Office fédéral des assurances sociales a renoncé à se déterminer.
Considérant en droit :
1.
Invoquant les art. 70 al. 1

SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 70 Langues - 1 Les langues officielles de la Confédération sont l'allemand, le français et l'italien. Le romanche est aussi langue officielle pour les rapports que la Confédération entretient avec les personnes de langue romanche. |
|
1 | Les langues officielles de la Confédération sont l'allemand, le français et l'italien. Le romanche est aussi langue officielle pour les rapports que la Confédération entretient avec les personnes de langue romanche. |
2 | Les cantons déterminent leurs langues officielles. Afin de préserver l'harmonie entre les communautés linguistiques, ils veillent à la répartition territoriale traditionnelle des langues et prennent en considération les minorités linguistiques autochtones. |
3 | La Confédération et les cantons encouragent la compréhension et les échanges entre les communautés linguistiques. |
4 | La Confédération soutient les cantons plurilingues dans l'exécution de leurs tâches particulières. |
5 | La Confédération soutient les mesures prises par les cantons des Grisons et du Tessin pour sauvegarder et promouvoir le romanche et l'italien. |
2.
2.1. Dans un arrêt rendu le 10 août 2001, publié aux ATF 127 V 219, le Tribunal fédéral des assurances, se fondant sur la garantie constitutionnelle de la non-discrimination du fait notamment de la langue (art. 8 al. 2

SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 8 Égalité - 1 Tous les êtres humains sont égaux devant la loi. |
|
1 | Tous les êtres humains sont égaux devant la loi. |
2 | Nul ne doit subir de discrimination du fait notamment de son origine, de sa race, de son sexe, de son âge, de sa langue, de sa situation sociale, de son mode de vie, de ses convictions religieuses, philosophiques ou politiques ni du fait d'une déficience corporelle, mentale ou psychique. |
3 | L'homme et la femme sont égaux en droit. La loi pourvoit à l'égalité de droit et de fait, en particulier dans les domaines de la famille, de la formation et du travail. L'homme et la femme ont droit à un salaire égal pour un travail de valeur égale. |
4 | La loi prévoit des mesures en vue d'éliminer les inégalités qui frappent les personnes handicapées. |

SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 18 Liberté de la langue - La liberté de la langue est garantie. |

SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 70 Langues - 1 Les langues officielles de la Confédération sont l'allemand, le français et l'italien. Le romanche est aussi langue officielle pour les rapports que la Confédération entretient avec les personnes de langue romanche. |
|
1 | Les langues officielles de la Confédération sont l'allemand, le français et l'italien. Le romanche est aussi langue officielle pour les rapports que la Confédération entretient avec les personnes de langue romanche. |
2 | Les cantons déterminent leurs langues officielles. Afin de préserver l'harmonie entre les communautés linguistiques, ils veillent à la répartition territoriale traditionnelle des langues et prennent en considération les minorités linguistiques autochtones. |
3 | La Confédération et les cantons encouragent la compréhension et les échanges entre les communautés linguistiques. |
4 | La Confédération soutient les cantons plurilingues dans l'exécution de leurs tâches particulières. |
5 | La Confédération soutient les mesures prises par les cantons des Grisons et du Tessin pour sauvegarder et promouvoir le romanche et l'italien. |
de nature à sceller le sort de la procédure.
2.2. Il y a lieu d'appliquer ces principes par analogie aux rapports établis par la division Médecine des assurances de la CNA. En effet, ces rapports généralement très détaillés et contenant souvent des références à la doctrine médicale, jouent un rôle important dans l'instruction des faits d'ordre médical. Bien qu'ils n'aient pas la même valeur probante qu'une expertise réalisée par un médecin indépendant selon la procédure de l'art. 44

SR 830.1 Loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA) LPGA Art. 44 Expertise - 1 Si l'assureur juge une expertise nécessaire dans le cadre de mesures d'instruction médicale, il en fixe le type selon les exigences requises; trois types sont possibles: |
|
1 | Si l'assureur juge une expertise nécessaire dans le cadre de mesures d'instruction médicale, il en fixe le type selon les exigences requises; trois types sont possibles: |
a | expertise monodisciplinaire; |
b | expertise bidisciplinaire; |
c | expertise pluridisciplinaire. |
2 | Si l'assureur doit recourir aux services d'un ou de plusieurs experts indépendants pour élucider les faits dans le cadre d'une expertise, il communique leur nom aux parties. Les parties peuvent récuser les experts pour les motifs indiqués à l'art. 36, al. 1, et présenter des contre-propositions dans un délai de dix jours. |
3 | Lorsqu'il communique le nom des experts, l'assureur soumet aussi aux parties les questions qu'il entend poser aux experts et leur signale qu'elles ont la possibilité de remettre par écrit des questions supplémentaires dans le même délai. L'assureur décide en dernier ressort des questions qui sont posées aux experts. |
4 | Si, malgré la demande de récusation, l'assureur maintient son choix du ou des experts pressentis, il en avise les parties par une décision incidente. |
5 | Les disciplines médicales sont déterminées à titre définitif par l'assureur pour les expertises visées à l'al. 1, let. a et b, et par le centre d'expertises pour les expertises visées à l'al. 1, let. c. |
6 | Sauf avis contraire de l'assuré, les entretiens entre l'assuré et l'expert font l'objet d'enregistrements sonores, lesquels sont conservés dans le dossier de l'assureur. |
7 | Le Conseil fédéral: |
a | peut régler la nature de l'attribution du mandat à un centre d'expertises, pour les expertises visées à l'al. 1; |
b | édicte des critères pour l'admission des experts médicaux et des experts en neuropsychologie, pour les expertises visées à l'al. 1; |
c | crée une commission réunissant des représentants des différentes assurances sociales, des centres d'expertises, des médecins, des neuropsychologues, des milieux scientifiques, ainsi que des organisations d'aide aux patients et aux personnes en situation de handicap qui veille au contrôle de l'accréditation, du processus, et du résultat des expertises médicales. Elle émet des recommandations publiques. |
2.3. Cette solution s'impose également au regard de l'art. 70 al. 1

SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 70 Langues - 1 Les langues officielles de la Confédération sont l'allemand, le français et l'italien. Le romanche est aussi langue officielle pour les rapports que la Confédération entretient avec les personnes de langue romanche. |
|
1 | Les langues officielles de la Confédération sont l'allemand, le français et l'italien. Le romanche est aussi langue officielle pour les rapports que la Confédération entretient avec les personnes de langue romanche. |
2 | Les cantons déterminent leurs langues officielles. Afin de préserver l'harmonie entre les communautés linguistiques, ils veillent à la répartition territoriale traditionnelle des langues et prennent en considération les minorités linguistiques autochtones. |
3 | La Confédération et les cantons encouragent la compréhension et les échanges entre les communautés linguistiques. |
4 | La Confédération soutient les cantons plurilingues dans l'exécution de leurs tâches particulières. |
5 | La Confédération soutient les mesures prises par les cantons des Grisons et du Tessin pour sauvegarder et promouvoir le romanche et l'italien. |
appelé à fournir un préavis, que ce soit en sa qualité d'autorité de surveillance de l'autorité administrative impliquée ou en sa qualité d'autorité invitée à fournir des renseignements au Tribunal fédéral. Le respect des différences linguistiques et culturelles commande qu'il s'exprime dans la langue de la procédure ou du moins dans la langue des parties. Cette réglementation vaut aussi pour les organismes ou institutions à caractère national chargés par le droit fédéral de l'exécution de tâches de droit public (par exemple la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents [CNA]) ou les autres assureurs admis à pratiquer l'assurance-accidents obligatoire ( JEAN-MAURICE FRÉSARD, in Commentaire de la LTF, 2 e éd., 2014, n° 11s. ad art. 54

SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 54 - 1 La procédure est conduite dans l'une des langues officielles (allemand, français, italien, rumantsch grischun), en règle générale dans la langue de la décision attaquée. Si les parties utilisent une autre langue officielle, celle-ci peut être adoptée. |
|
1 | La procédure est conduite dans l'une des langues officielles (allemand, français, italien, rumantsch grischun), en règle générale dans la langue de la décision attaquée. Si les parties utilisent une autre langue officielle, celle-ci peut être adoptée. |
2 | Dans les procédures par voie d'action, il est tenu compte de la langue des parties s'il s'agit d'une langue officielle. |
3 | Si une partie a produit des pièces qui ne sont pas rédigées dans une langue officielle, le Tribunal fédéral peut, avec l'accord des autres parties, renoncer à exiger une traduction. |
4 | Si nécessaire, le Tribunal fédéral ordonne une traduction. |
2.4. On ne saurait au demeurant, comme l'ont fait les premiers juges, minimiser la portée du rapport du docteur B.________. Ce dernier a été demandé par la CNA avant qu'elle ne rende sa décision sur opposition, en raison de doutes subsistant au sujet de la situation médicale du recourant (cf. lettre de la CNA adressée au recourant le 29 mars 2013 l'informant de la mise en oeuvre d'un nouvel avis médical auprès de sa division Médecine des assurances). Cette pièce a ainsi été déterminante pour la suppression du droit aux prestations du recourant. Dans cette mesure, elle constituait sans aucun doute une pièce essentielle du dossier, pour laquelle une traduction en langue française était nécessaire.
2.5. Le grief soulevé par le recourant est bien fondé. Il convient en conséquence d'annuler le jugement attaqué ainsi que la décision sur opposition du 15 septembre 2011 et d'inviter l'intimée à faire parvenir au recourant une traduction en français du rapport du docteur B.________. La CNA reprendra ensuite l'instruction de la cause au fond, après avoir donné au recourant l'occasion de s'exprimer sur le contenu de ce rapport médical. Il n'y a pas lieu à ce stade d'examiner les autres griefs invoqués par le recourant.
3.
L'intimée qui succombe supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1

SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
|
1 | En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
2 | Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis. |
3 | Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés. |
4 | En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours. |
5 | Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement. |

SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 68 Dépens - 1 Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe. |
|
1 | Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe. |
2 | En règle générale, la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige. |
3 | En règle générale, aucuns dépens ne sont alloués à la Confédération, aux cantons, aux communes ou aux organisations chargées de tâches de droit public lorsqu'ils obtiennent gain de cause dans l'exercice de leurs attributions officielles. |
4 | L'art. 66, al. 3 et 5, est applicable par analogie. |
5 | Le Tribunal fédéral confirme, annule ou modifie, selon le sort de la cause, la décision de l'autorité précédente sur les dépens. Il peut fixer lui-même les dépens d'après le tarif fédéral ou cantonal applicable ou laisser à l'autorité précédente le soin de les fixer. |
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis. Le jugement du 11 décembre 2013 du Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, et la décision sur opposition de la CNA du 15 septembre 2011 sont annulés, la cause étant renvoyée à cette dernière pour nouvelle décision.
2.
Les frais de justice, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de l'intimée.
3.
L'intimée versera au recourant la somme de 2'800 fr. à titre de dépens pour l'instance fédérale.
4.
Le Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, statuera sur les dépens pour la procédure de première instance au regard de l'issue du procès de dernière instance.
5.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal du canton de Fribourg, Cour des assurances sociales, et à l'Office fédéral de la santé publique.
Lucerne, le 19 décembre 2014
Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse
La Présidente : Leuzinger
La Greffière : Fretz Perrin