Bundesgericht
Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal

{T 0/2}

8C 685/2015

Arrêt du 13 septembre 2016

Ire Cour de droit social

Composition
MM. et Mme les Juges fédéraux Maillard, Président, Frésard et Heine.
Greffière : Mme von Zwehl.

Participants à la procédure
Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents,
Fluhmattstrasse 1, 6004 Lucerne,
recourante,

contre

A.________,
représentée par Me Anne-Marie Jacopin-Grimonprez, avocate,,
intimée.

Objet
Assurance-accidents (affection psychique; causalité naturelle; causalité adéquate),

recours contre le jugement du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Cour de droit public, du 26 août 2015.

Faits :

A.
A.________ travaillait en qualité d'opératrice en horlogerie au service de l'entreprise B.________ SA et était, à ce titre, assurée obligatoirement contre le risque d'accidents à la Caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (CNA).
Le 29 janvier 2010, A.________ a été victime d'un accident de la circulation sur une route verglacée. La conductrice de la voiture dans laquelle elle avait pris place comme passagère à l'arrière a perdu la maîtrise de son véhicule, lequel a dérapé de la droite vers la gauche avant de finir sa course dans un champ en contrebas d'un talus. Au cours de cette manoeuvre, A.________ a heurté sa tête contre le siège avant et son bras droit contre la portière, ce qui lui a occasionné une fracture pluri-fragmentaire sous-capitale de l'humérus droit. La CNA a pris en charge le cas.
Le traitement a d'abord été conservateur, puis, en raison d'un déplacement de la fracture, une intervention chirurgicale s'est avérée nécessaire. Cette opération, réalisée le 18 février 2010 par le docteur C.________ à l'Hôpital D.________, a été suivie de séances de physiothérapie. Une tentative de reprise du travail a échoué le 19 mai 2010.
L'évolution s'est révélée défavorable tant sur le plan de la mobilité que celui des douleurs. Cette situation a perduré en dépit de l'ablation du matériel d'ostéosynthèse pratiquée le 30 août 2010, de la poursuite de la physiothérapie et du traitement médicamenteux, ainsi de la thérapie par blocs stellaires prodiguée durant plusieurs mois par le docteur E.________, de l'Unité d'antalgie de l'Hôpital F.________. Ce médecin a posé le diagnostic de syndrome complexe du membre supérieur droit de type CRPS 1 sympatico-dépendant (complexe regional pain syndrome). Sur recommandation du docteur H.________, médecin d'arrondissement de la CNA, l'assurée a accompli un séjour à la Clinique G.________ du 27 avril au 27 mai 2011 pour suivre des thérapies physiques et fonctionnelles. Dans leur rapport du 27 juin 2011, les médecins de la Clinique G.________ n'ont pas repris le diagnostic de CRPS 1 mais posé ceux de capsulite rétractile de l'épaule droite et de tendinopathie insertionnelle du supra-épineux associée à une bursite sous-acromio-deltoïdienne à droite. Ils ont indiqué que l'assurée excluait la plupart du temps son membre supérieur droit et qu'un consilium psychiatrique avait mis en évidence un trouble de l'adaptation avec une réaction
dépressive prolongée. Une nouvelle tentative de travail le 26 septembre 2011 s'est soldée par un échec. Selon le rapport de consultation du service d'orthopédie et de traumatologie de l'Hôpital I.________ du 30 juillet 2012, il n'y avait pas d'indication à une approche chirurgicale dans le cas de l'assurée.
Le 22 décembre 2012, A.________ a subi un second accident. Elle a trébuché sur une palette dans un centre commercial et fait une chute, qui a entraîné une fracture de l'extrémité distale du radius au poignet droit. Cette fracture a été soignée de manière conservatrice.
Le 5 juin 2013, le docteur H.________ a procédé à l'examen médical final. Ce médecin a retenu qu'à la suite de l'ostéosynthèse effectuée après le premier accident, l'assurée avait développé un syndrome régional complexe de type I de l'épaule droite rebelle à toute thérapie et que la chute sur le poignet droit avait amplifié les signes d'algodystrophie préexistants, si bien que la situation résultant des deux accidents correspondait - au jour de l'examen - à une perte fonctionnelle complète du membre supérieur droit. Dans ces conditions, l'exercice d'une activité mono-manuelle exclusivement réalisée de la main gauche était exigible à hauteur de 70 %. Le taux d'atteinte à l'intégrité s'élevait à 50 % (dont 80 % pour l'épaule droite et 20 % pour le poignet droit). Par décision du 13 novembre 2013, confirmée sur opposition le 26 mars 2014, la CNA a alloué à l'assurée une rente d'invalidité d'un taux de 45 % ainsi qu'une indemnité pour atteinte à l'intégrité de 50 %. L'assureur-accidents a refusé de prendre en charge une éventuelle incapacité de travail sur le plan psychique, faute d'un rapport de causalité adéquate.

B.
Saisie d'un recours de l'assurée, la Cour de droit public du Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel l'a admis. Elle a annulé la décision litigieuse, et renvoyé la cause à la CNA pour complément d'instruction et nouvelle décision au sens des considérants (jugement du 26 août 2015).

C.
La CNA interjette un recours en matière de droit public et demande l'annulation du jugement cantonal.
A.________ conclut au rejet du recours. De son côté, l'Office fédéral de la santé publique a renoncé à se déterminer.

Considérant en droit :

1.

1.1. En tant que la juridiction cantonale renvoie la cause à la CNA pour nouvelle décision, son jugement doit être qualifié de décision incidente, laquelle ne peut être attaquée qu'aux conditions de l'art. 93
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
LTF (ATF 140 V 321 consid. 3.1 p. 325; 133 V 477 consid. 4.2 p. 482).

1.2. Selon la jurisprudence, une autorité qui devrait, à la suite d'une décision de renvoi, rendre une nouvelle décision qui, de son point de vue, serait contraire au droit sans pouvoir par la suite la remettre en cause devant l'instance supérieure, est réputée subir un préjudice irréparable au sens de l'art. 93 al. 1 let. a
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
LTF (cf. ATF 141 V 330 consid. 1.2 p. 332; 133 V 477 précité consid. 5.2 p. 483).

1.3. Cette éventualité est en l'espèce réalisée. En effet, l'arrêt attaqué invite de manière contraignante la CNA à compléter l'instruction sur le plan psychique et à procéder ensuite à une nouvelle évaluation de l'invalidité de l'assurée en tenant compte à la fois des atteintes physiques et psychiques ainsi que de leurs répercussions sur la capacité de travail, tout en étant liée par le jugement de renvoi par lequel les premiers juges ont d'ores et déjà reconnu l'existence d'un lien de causalité adéquate entre l'atteinte psychique et les accidents en cause. Le jugement cantonal peut donc être déféré immédiatement au Tribunal fédéral.

1.4. Pour le surplus, le recours est dirigé contre un arrêt rendu en matière de droit public (art. 82 ss
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 82 Principe - Le Tribunal fédéral connaît des recours:
a  contre les décisions rendues dans des causes de droit public;
b  contre les actes normatifs cantonaux;
c  qui concernent le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires.
LTF) par une autorité cantonale de dernière instance (art. 86 al. 1 let. d
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 86 Autorités précédentes en général - 1 Le recours est recevable contre les décisions:
1    Le recours est recevable contre les décisions:
a  du Tribunal administratif fédéral;
b  du Tribunal pénal fédéral;
c  de l'Autorité indépendante d'examen des plaintes en matière de radio-télévision;
d  des autorités cantonales de dernière instance, pour autant que le recours devant le Tribunal administratif fédéral ne soit pas ouvert.
2    Les cantons instituent des tribunaux supérieurs qui statuent comme autorités précédant immédiatement le Tribunal fédéral, sauf dans les cas où une autre loi fédérale prévoit qu'une décision d'une autre autorité judiciaire peut faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral.
3    Pour les décisions revêtant un caractère politique prépondérant, les cantons peuvent instituer une autorité autre qu'un tribunal.
LTF). Il a été déposé dans le délai (art. 100
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 100 Recours contre une décision - 1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.
1    Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.
2    Le délai de recours est de dix jours contre:
a  les décisions d'une autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et de faillite;
b  les décisions en matière d'entraide pénale internationale et d'assistance administrative internationale en matière fiscale;
c  les décisions portant sur le retour d'un enfant fondées sur la Convention européenne du 20 mai 1980 sur la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière de garde des enfants et le rétablissement de la garde des enfants92 ou sur la Convention du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants93.
d  les décisions du Tribunal fédéral des brevets concernant l'octroi d'une licence visée à l'art. 40d de la loi du 25 juin 1954 sur les brevets95.
3    Le délai de recours est de cinq jours contre:
a  les décisions d'une autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour effets de change;
b  les décisions d'un gouvernement cantonal sur recours concernant des votations fédérales.
4    Le délai de recours est de trois jours contre les décisions d'un gouvernement cantonal sur recours touchant aux élections au Conseil national.
5    En matière de recours pour conflit de compétence entre deux cantons, le délai de recours commence à courir au plus tard le jour où chaque canton a pris une décision pouvant faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral.
6    ...96
7    Le recours pour déni de justice ou retard injustifié peut être formé en tout temps.
LTF) et la forme (art. 42
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 42 Mémoires - 1 Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
1    Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
2    Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Si le recours n'est recevable que lorsqu'il soulève une question juridique de principe ou qu'il porte sur un cas particulièrement important pour d'autres motifs, il faut exposer en quoi l'affaire remplit la condition exigée.15 16
3    Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu'elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée si le mémoire est dirigé contre une décision.
4    En cas de transmission électronique, le mémoire doit être muni de la signature électronique qualifiée de la partie ou de son mandataire au sens de la loi du 18 mars 2016 sur la signature électronique17. Le Tribunal fédéral détermine dans un règlement:
a  le format du mémoire et des pièces jointes;
b  les modalités de la transmission;
c  les conditions auxquelles il peut exiger, en cas de problème technique, que des documents lui soient adressés ultérieurement sur papier.18
5    Si la signature de la partie ou de son mandataire, la procuration ou les annexes prescrites font défaut, ou si le mandataire n'est pas autorisé, le Tribunal fédéral impartit un délai approprié à la partie pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
6    Si le mémoire est illisible, inconvenant, incompréhensible ou prolixe ou qu'il n'est pas rédigé dans une langue officielle, le Tribunal fédéral peut le renvoyer à son auteur; il impartit à celui-ci un délai approprié pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
7    Le mémoire de recours introduit de manière procédurière ou à tout autre égard abusif est irrecevable.
LTF) prévus par la loi. Il est donc recevable.

2.
Le litige porte sur le point de savoir si l'intimée peut prétendre une rente d'un taux supérieur à 45 % en raison d'éventuels troubles psychiques. S'agissant d'une procédure concernant l'octroi ou le refus d'une prestation en espèces de l'assurance-accidents, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par la juridiction précédente (art. 105 al. 3
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 105 Faits déterminants - 1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente.
1    Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente.
2    Il peut rectifier ou compléter d'office les constatations de l'autorité précédente si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95.
3    Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente.99
LTF).

3.

3.1. Le droit à des prestations découlant d'un accident suppose tout d'abord, entre l'événement dommageable de caractère accidentel et l'atteinte à la santé, un lien de causalité naturelle. L'exigence d'un lien de causalité naturelle est remplie lorsqu'il y a lieu d'admettre que, sans l'événement accidentel, le dommage ne se serait pas produit du tout, ou qu'il ne serait pas survenu de la même manière. Savoir s'il existe un rapport de causalité naturelle est une question de fait, généralement d'ordre médical, qui doit être résolue en se conformant à la règle du degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit pas que l'existence d'un rapport de cause à effet soit simplement possible; elle doit pouvoir être qualifiée de probable dans le cas particulier, sans quoi le droit aux prestations fondées sur l'accident doit être nié (ATF 129 V 177 consid. 3.1 p. 181, 402 consid. 4.3.1 p. 406; 119 V 335 consid. 1 p. 337).

3.2. Le droit à des prestations suppose en outre un rapport de causalité adéquate entre l'accident et l'incapacité de travail, question de droit qu'il appartient à l'administration et, en cas de recours, au juge de trancher. En présence d'une affection psychique additionnelle à une atteinte à la santé physique, le caractère adéquat du lien de causalité ne peut être admis que si l'accident revêt une importance déterminante dans déclenchement de l'affection psychique. Ainsi, lorsque l'événement accidentel est insignifiant, l'existence du lien en question peut d'emblée être niée, tandis qu'il y a lieu de le considérer comme établi, lorsque l'assuré est victime d'un accident grave. Par contre, lorsque la gravité de l'événement est qualifiée de moyenne, la jurisprudence a dégagé un ensemble de critères objectifs à prendre en considération pour l'examen du caractère adéquat du lien de causalité (sur ces critères, voir ATF 115 V 133 consid. 6 p. 138 ss et 403 consid. 5 p. 407 ss).

4.

4.1. En l'espèce, la CNA n'a procédé à aucune instruction médicale sur l'état de santé de l'assurée au plan psychique, considérant que, quoi qu'il en fût à cet égard, un rapport de causalité adéquate entre d'éventuels troubles psychiques et les accidents - qualifiés de gravité moyenne pour le premier et de gravité moyenne à la limite inférieure pour le second - devait être nié. De leur côté, les juges cantonaux ont retenu que l'assurée présentait selon toute vraisemblance une affection psychique, estimant qu'il y avait suffisamment d'indices allant dans ce sens dans les documents médicaux versés à la procédure (voir les rapports de la Clinique G.________ du 27 juin 2011 et du docteur J.________, médecin généraliste, du 4 janvier 2014). Bien que le dossier ne contienne cependant aucun avis d'un médecin spécialisé en psychiatrie se prononçant sur la nature, l'ampleur et le caractère invalidant de cette affection et, surtout, sur l'existence d'un rapport de causalité naturelle avec les accidents en cause, les juges cantonaux ont admis le caractère adéquat de celle-ci en se fondant sur les critères jurisprudentiels applicables en cas de troubles psychiques consécutifs à un accident de gravité moyenne. Le jugement attaqué est ainsi
totalement muet sur la question de la causalité naturelle sans que l'on puisse déduire de ce silence que les juges cantonaux y auraient implicitement répondu par l'affirmative, une expertise psychiatrique faisant défaut à ce stade de la procédure (d'après les pièces au dossier, il semble qu'une expertise psychiatrique est prévue dans le cadre de l'instruction de la demande de prestations de l'assurée auprès de l'Office de l'assurance-invalidité du canton de Neuchâtel, mais l'on ignore ce qu'il en est).

4.2. Dans la mesure où le caractère naturel et le caractère adéquat de la relation de causalité doivent être cumulés pour octroyer des prestations d'assurance-accidents, la jurisprudence admet de laisser ouverte la question du rapport de causalité naturelle dans les cas où ce lien de causalité ne peut de toute façon pas être qualifié d'adéquat (ATF 135 V 465 consid. 5.1 p. 472). En revanche, la façon de faire des juges cantonaux consistant à reconnaître un rapport de causalité adéquate avant que les questions de fait relatives à la nature des troubles psychiques en cause et à leur causalité naturelle ne soient élucidées pose problème et ne peut être confirmée. D'une part, il est contraire à la logique du système de retenir qu'un accident est propre, sous l'angle juridique, à provoquer une incapacité de travail d'origine psychique chez la personne assurée alors que l'on ignore de quels troubles psychiques celle-ci est atteinte et si cet accident en constitue la cause naturelle. D'autre part, la reconnaissance préalable d'un lien de causalité adéquate est un élément de nature à influencer, consciemment ou non, le médecin psychiatre dans son appréciation du cas, et donc le résultat d'une expertise psychiatrique réalisée après coup
s'en trouverait biaisé.

4.3. Pour ces mêmes raisons, il est en l'occurrence prématuré que la Cour de céans se prononce sur les griefs soulevés par la CNA quant à la manière dont les juges cantonaux ont apprécié les critères déterminants de l'ATF 155 V 133, supposés applicables, pour admettre le caractère adéquat des (éventuels) troubles psychiques de l'assurée. Un tel examen n'aurait de sens que si l'on pouvait d'emblée nier l'existence d'un rapport de causalité adéquate, ce qui n'est pas le cas en l'espèce. Sans préjuger de cette question, il convient donc d'annuler le jugement cantonal et de renvoyer la cause à la CNA pour qu'elle mette en oeuvre une expertise psychiatrique - le cas échéant, en coordination avec l'assurance-invalidité - et, en fonction du résultat de celle-ci, se prononce à nouveau sur le lien de causalité adéquate. Après quoi, elle rendra une nouvelle décision sur le droit à la rente de l'assurée.

4.4. Le recours doit être admis dans ce sens.

5.
L'intimée, qui succombe, supportera les frais judiciaires (art. 66 al. 1
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
1    En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
2    Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis.
3    Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés.
4    En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours.
5    Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement.
LTF).

Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :

1.
Le recours est partiellement admis. L'arrêt attaqué et la décision sur opposition du 26 mars 2014, en tant que cette dernière porte sur le refus d'une rente supérieure à 45 %, sont annulées. La cause est renvoyée à la CNA pour qu'elle procède à une instruction complémentaire et rende une nouvelle décision concernant le droit à une rente LAA de l'intimée. Pour le surplus, le recours est rejeté.

2.
Les frais judiciaires, arrêtés à 800 fr., sont mis à la charge de l'intimée.

3.
Le présent arrêt est communiqué aux parties, au Tribunal cantonal de la République et canton de Neuchâtel, Cour de droit public, et à l'Office fédéral de la santé publique.

Lucerne, le 13 septembre 2016

Au nom de la Ire Cour de droit social
du Tribunal fédéral suisse

Le Président : Maillard

La Greffière : von Zwehl
Information de décision   •   DEFRITEN
Document : 8C_685/2015
Date : 13 septembre 2016
Publié : 01 octobre 2016
Source : Tribunal fédéral
Statut : Non publié
Domaine : Assurance-accidents
Objet : Assurance-accidents (affection psychique; causalité naturelle; causalité adéquate)


Répertoire des lois
LTF: 42 
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 42 Mémoires - 1 Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
1    Les mémoires doivent être rédigés dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signés.
2    Les motifs doivent exposer succinctement en quoi l'acte attaqué viole le droit. Si le recours n'est recevable que lorsqu'il soulève une question juridique de principe ou qu'il porte sur un cas particulièrement important pour d'autres motifs, il faut exposer en quoi l'affaire remplit la condition exigée.15 16
3    Les pièces invoquées comme moyens de preuve doivent être jointes au mémoire, pour autant qu'elles soient en mains de la partie; il en va de même de la décision attaquée si le mémoire est dirigé contre une décision.
4    En cas de transmission électronique, le mémoire doit être muni de la signature électronique qualifiée de la partie ou de son mandataire au sens de la loi du 18 mars 2016 sur la signature électronique17. Le Tribunal fédéral détermine dans un règlement:
a  le format du mémoire et des pièces jointes;
b  les modalités de la transmission;
c  les conditions auxquelles il peut exiger, en cas de problème technique, que des documents lui soient adressés ultérieurement sur papier.18
5    Si la signature de la partie ou de son mandataire, la procuration ou les annexes prescrites font défaut, ou si le mandataire n'est pas autorisé, le Tribunal fédéral impartit un délai approprié à la partie pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
6    Si le mémoire est illisible, inconvenant, incompréhensible ou prolixe ou qu'il n'est pas rédigé dans une langue officielle, le Tribunal fédéral peut le renvoyer à son auteur; il impartit à celui-ci un délai approprié pour remédier à l'irrégularité et l'avertit qu'à défaut le mémoire ne sera pas pris en considération.
7    Le mémoire de recours introduit de manière procédurière ou à tout autre égard abusif est irrecevable.
66 
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
1    En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties.
2    Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis.
3    Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés.
4    En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours.
5    Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement.
82 
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 82 Principe - Le Tribunal fédéral connaît des recours:
a  contre les décisions rendues dans des causes de droit public;
b  contre les actes normatifs cantonaux;
c  qui concernent le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires.
86 
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 86 Autorités précédentes en général - 1 Le recours est recevable contre les décisions:
1    Le recours est recevable contre les décisions:
a  du Tribunal administratif fédéral;
b  du Tribunal pénal fédéral;
c  de l'Autorité indépendante d'examen des plaintes en matière de radio-télévision;
d  des autorités cantonales de dernière instance, pour autant que le recours devant le Tribunal administratif fédéral ne soit pas ouvert.
2    Les cantons instituent des tribunaux supérieurs qui statuent comme autorités précédant immédiatement le Tribunal fédéral, sauf dans les cas où une autre loi fédérale prévoit qu'une décision d'une autre autorité judiciaire peut faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral.
3    Pour les décisions revêtant un caractère politique prépondérant, les cantons peuvent instituer une autorité autre qu'un tribunal.
93 
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 93 Autres décisions préjudicielles et incidentes - 1 Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
1    Les autres décisions préjudicielles et incidentes notifiées séparément peuvent faire l'objet d'un recours:
a  si elles peuvent causer un préjudice irréparable, ou
b  si l'admission du recours peut conduire immédiatement à une décision finale qui permet d'éviter une procédure probatoire longue et coûteuse.
2    En matière d'entraide pénale internationale et en matière d'asile, les décisions préjudicielles et incidentes ne peuvent pas faire l'objet d'un recours.88 Le recours contre les décisions relatives à la détention extraditionnelle ou à la saisie d'objets et de valeurs est réservé si les conditions de l'al. 1 sont remplies.
3    Si le recours n'est pas recevable en vertu des al. 1 et 2 ou qu'il n'a pas été utilisé, les décisions préjudicielles et incidentes peuvent être attaquées par un recours contre la décision finale dans la mesure où elles influent sur le contenu de celle-ci.
100 
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 100 Recours contre une décision - 1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.
1    Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète.
2    Le délai de recours est de dix jours contre:
a  les décisions d'une autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et de faillite;
b  les décisions en matière d'entraide pénale internationale et d'assistance administrative internationale en matière fiscale;
c  les décisions portant sur le retour d'un enfant fondées sur la Convention européenne du 20 mai 1980 sur la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière de garde des enfants et le rétablissement de la garde des enfants92 ou sur la Convention du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants93.
d  les décisions du Tribunal fédéral des brevets concernant l'octroi d'une licence visée à l'art. 40d de la loi du 25 juin 1954 sur les brevets95.
3    Le délai de recours est de cinq jours contre:
a  les décisions d'une autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour effets de change;
b  les décisions d'un gouvernement cantonal sur recours concernant des votations fédérales.
4    Le délai de recours est de trois jours contre les décisions d'un gouvernement cantonal sur recours touchant aux élections au Conseil national.
5    En matière de recours pour conflit de compétence entre deux cantons, le délai de recours commence à courir au plus tard le jour où chaque canton a pris une décision pouvant faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral.
6    ...96
7    Le recours pour déni de justice ou retard injustifié peut être formé en tout temps.
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SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire
LTF Art. 105 Faits déterminants - 1 Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente.
1    Le Tribunal fédéral statue sur la base des faits établis par l'autorité précédente.
2    Il peut rectifier ou compléter d'office les constatations de l'autorité précédente si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte ou en violation du droit au sens de l'art. 95.
3    Lorsque la décision qui fait l'objet d'un recours concerne l'octroi ou le refus de prestations en espèces de l'assurance-accidents ou de l'assurance militaire, le Tribunal fédéral n'est pas lié par les faits établis par l'autorité précédente.99
Répertoire ATF
115-V-133 • 119-V-335 • 129-V-177 • 133-V-477 • 135-V-465 • 140-V-321 • 141-V-330
Weitere Urteile ab 2000
8C_685/2015
Répertoire de mots-clés
Trié par fréquence ou alphabet
lien de causalité • tribunal fédéral • affection psychique • droit public • expertise psychiatrique • incapacité de travail • tribunal cantonal • calcul • décision • droit social • question de fait • physique • frais judiciaires • office fédéral de la santé publique • médecin généraliste • atteinte à la santé • matériau • suva • causalité naturelle • preuve facilitée • causalité adéquate • établissement hospitalier • directeur • décision de renvoi • titre • neuchâtel • exclusion • recours en matière de droit public • annulabilité • bénéfice • demande de prestation d'assurance • condition • formation continue • traitement médicamenteux • question de droit • accident de la circulation • juge de renvoi • pain • participation à la procédure • tennis • décision incidente • bursite • accident de gravité moyenne • assureur-accidents • mois • prestation d'assurance • vue • indemnité pour atteinte à l'intégrité • dernière instance • décision sur opposition • centre commercial • atteinte à l'intégrité • autorité cantonale • quant • atteinte à la santé physique • accident grave • rente d'invalidité
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