Tribunal fédéral
Tribunale federale
Tribunal federal
1C 338/2018
Arrêt du 10 avril 2019
Ire Cour de droit public
Composition
MM. les Juges fédéraux Chaix, Président,
Merkli, Fonjallaz, Kneubühler et Muschietti.
Greffière : Mme Tornay Schaller.
Participants à la procédure
Claude Béglé, représenté par Maîtres Christophe de Kalbermatten et Benoît Lambercy, avocats,
recourant,
contre
Conseil d'Etat du canton de Vaud, Château cantonal, 1014 Lausanne,
Conseil fédéral, Palais fédéral ouest, 3003 Berne,
Chancellerie fédérale, Palais fédéral ouest, 3003 Berne.
Objet
Votation fédérale du 28 février 2016 sur l'initiative populaire du 5 novembre 2012 "Pour le couple et la famille - Non à la pénalisation du mariage", état d'information du corps électoral,
recours contre la décision du Conseil d'Etat du canton de Vaud du 27 juin 2018 (R9 169/2018).
Faits :
A.
Le 28 février 2016 a eu lieu la votation fédérale sur l'initiative populaire "Pour le couple et la famille - Non à la pénalisation du mariage". L'initiative prévoyait de modifier la Constitution fédérale de la manière suivante:
Art. 14 al. 2 (nouveau)
2 Le mariage est l'union durable et réglementée par la loi d'un homme et d'une femme. Au point de vue fiscal, le mariage constitue une communauté économique. Il ne peut pas être pénalisé par rapport à d'autres modes de vie, notamment en matière d'impôts et d'assurances sociales.
Il ressortait des explications du Conseil fédéral - que les citoyens avaient reçues avant la votation - que "environ 80'000 couples mariés à deux revenus et de nombreux retraités mariés continuent de subir, en matière d'impôt fédéral direct, une charge supplémentaire (d'où le terme de «pénalisation du mariage») jugée contraire à la Constitution"; les baisses de recettes pour la Confédération étaient chiffrées à environ 1,2 milliard de francs par an (si le modèle d'imposition était le calcul alternatif d'impôt) et entre 1,2 et 2,3 milliards de francs par an (si le modèle d'imposition était le splitting). Le Conseil fédéral recommandait de rejeter l'initiative.
Par arrêté du 19 avril 2016, le Conseil fédéral a constaté que l'initiative populaire avait été rejetée par 50.8% des votants (par 1'664'224 non contre 1'609'152 oui) et acceptée par les cantons (par 15 3/2 oui contre 5 3/2 non). L'initiative avait ainsi été rejetée (FF 2016 3557).
Dans un communiqué de presse daté du 15 juin 2018, intitulé "Pénalisation du mariage: rectification d'une erreur dans l'estimation du nombre des couples mariés à deux revenus", le Conseil fédéral a informé que le nombre des couples mariés à deux revenus concernés par la pénalisation fiscale du mariage était nettement plus élevé que ce qu'avait estimé l'Administration fédérale des contributions (AFC); selon les estimations corrigées, quelque 454'000 couples mariés à deux revenus étaient concernés par la pénalisation fiscale du mariage; l'AFC avait estimé ce nombre à environ 80'000, mais n'avait pas tenu compte des couples mariés à deux revenus avec enfants; l'estimation du nombre des couples de rentiers mariés concernés par cette pénalisation restait valable (quelque 250'000 couples); au total, c'étaient donc environ 704'000 couples mariés qui étaient pénalisés sur le plan fiscal; s'agissant de l'estimation des conséquences financières du projet de réforme du Conseil fédéral, les couples mariés à deux revenus avec enfants avaient été pris en compte; cette estimation était donc correcte (diminution annuelle des recettes fiscales de l'ordre de 1,15 milliard de francs). Le porte-parole de l'Administration fédérale des contributions a
déclaré, lors du journal télévisé du 15 juin 2018, qu'une erreur avait déjà été commise lors de la votation du 28 février 2016.
B.
Le 18 juin 2018, Claude Béglé, citoyen vaudois, a formé un recours en matière de droits politiques auprès du Conseil d'Etat du canton de Vaud (ci-après: le Conseil d'Etat) contre la votation fédérale susmentionnée. Il s'est plaint d'une violation de la liberté de vote (art. 34 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 34 Droits politiques - 1 Les droits politiques sont garantis. |
|
1 | Les droits politiques sont garantis. |
2 | La garantie des droits politiques protège la libre formation de l'opinion des citoyens et des citoyennes et l'expression fidèle et sûre de leur volonté. |
C.
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, Claude Béglé demande principalement au Tribunal fédéral d'annuler la décision du Conseil d'Etat vaudois du 27 juin 2018, d'annuler la votation fédérale du 28 février 2016 portant sur l'initiative précitée et de la renvoyer au vote dans tous les cantons, subsidiairement dans le canton de Vaud uniquement. A titre subsidiaire, il conclut à la constatation que la votation fédérale litigieuse a été entachée d'irrégularités au sens de l'art. 77
SR 161.1 Loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques (LDP) LDP Art. 77 Recours - 1 Le recours au gouvernement cantonal est recevable contre: |
|
1 | Le recours au gouvernement cantonal est recevable contre: |
a | la violation des dispositions sur le droit de vote selon les art. 2 à 4, l'art. 5, al. 3 et 6, et les art. 62 et 63 (recours touchant le droit de vote); |
b | des irrégularités affectant les votations (recours touchant les votations); |
c | des irrégularités affectant la préparation et l'exécution des élections au Conseil national (recours touchant les élections). |
2 | Le recours doit être déposé par lettre recommandée dans les trois jours qui suivent la découverte du motif du recours, mais au plus tard le troisième jour après la publication des résultats dans la feuille officielle du canton.167 |
Invité à se déterminer, le Conseil d'Etat s'en remet à justice. Le Conseil fédéral conclut à l'irrecevabilité du recours, éventuellement à son rejet dans la mesure de sa recevabilité. Le recourant a répliqué. Le Conseil fédéral a dupliqué, par courrier du 30 novembre 2018.
D.
Le Tribunal fédéral a rendu son jugement en séance publique le 10 avril 2019.
Considérant en droit :
1.
Le Tribunal fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis.
1.1. La loi fédérale sur les droits politiques du 17 décembre 1976 (LDP; RS 161.1) ne prévoit pas de voie de droit permettant de faire valoir des irrégularités connues seulement après une votation fédérale. D'après la jurisprudence, un droit à un contrôle de la régularité d'une votation fédérale se déduit directement de l'art. 29 al. 1
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 29 Garanties générales de procédure - 1 Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. |
|
1 | Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. |
2 | Les parties ont le droit d'être entendues. |
3 | Toute personne qui ne dispose pas de ressources suffisantes a droit, à moins que sa cause paraisse dépourvue de toute chance de succès, à l'assistance judiciaire gratuite. Elle a en outre droit à l'assistance gratuite d'un défenseur, dans la mesure où la sauvegarde de ses droits le requiert. |
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 29a Garantie de l'accès au juge - Toute personne a droit à ce que sa cause soit jugée par une autorité judiciaire. La Confédération et les cantons peuvent, par la loi, exclure l'accès au juge dans des cas exceptionnels. |
Le Tribunal fédéral est compétent, en dernière instance, pour connaître des recours dans lesquels la conformité d'une votation fédérale à la Constitution et à la législation fédérale est mise en cause en raison d'irrégularités graves découvertes ultérieurement (art. 189 al. 1 let. f
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 189 Compétences du Tribunal fédéral - 1 Le Tribunal fédéral connaît des contestations pour violation: |
|
1 | Le Tribunal fédéral connaît des contestations pour violation: |
a | du droit fédéral; |
b | du droit international; |
c | du droit intercantonal; |
d | des droits constitutionnels cantonaux; |
e | de l'autonomie des communes et des autres garanties accordées par les cantons aux corporations de droit public; |
f | des dispositions fédérales et cantonales sur les droits politiques. |
1bis | ...134 |
2 | Il connaît des différends entre la Confédération et les cantons ou entre les cantons. |
3 | La loi peut conférer d'autres compétences au Tribunal fédéral. |
4 | Les actes de l'Assemblée fédérale et du Conseil fédéral ne peuvent pas être portés devant le Tribunal fédéral. Les exceptions sont déterminées par la loi. |
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 121 Violation de règles de procédure - La révision d'un arrêt du Tribunal fédéral peut être demandée: |
|
a | si les dispositions concernant la composition du tribunal ou la récusation n'ont pas été observées; |
b | si le tribunal a accordé à une partie soit plus ou, sans que la loi ne le permette, autre chose que ce qu'elle a demandé, soit moins que ce que la partie adverse a reconnu devoir; |
c | si le tribunal n'a pas statué sur certaines conclusions; |
d | si, par inadvertance, le tribunal n'a pas pris en considération des faits pertinents qui ressortent du dossier. |
SR 161.1 Loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques (LDP) LDP Art. 77 Recours - 1 Le recours au gouvernement cantonal est recevable contre: |
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1 | Le recours au gouvernement cantonal est recevable contre: |
a | la violation des dispositions sur le droit de vote selon les art. 2 à 4, l'art. 5, al. 3 et 6, et les art. 62 et 63 (recours touchant le droit de vote); |
b | des irrégularités affectant les votations (recours touchant les votations); |
c | des irrégularités affectant la préparation et l'exécution des élections au Conseil national (recours touchant les élections). |
2 | Le recours doit être déposé par lettre recommandée dans les trois jours qui suivent la découverte du motif du recours, mais au plus tard le troisième jour après la publication des résultats dans la feuille officielle du canton.167 |
d'irrecevabilité (cf. ATF 137 II 177 consid. 1.2.3 p. 180 s.). Un recours au Tribunal fédéral peut ensuite être interjeté à l'encontre d'une décision du gouvernement cantonal de rejeter un recours déposé au motif d'une irrégularité grave connue après la votation ou de refuser d'entrer en matière (art. 80 al. 1
SR 161.1 Loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques (LDP) LDP Art. 80 Recours devant le Tribunal fédéral - 1 Les décisions sur recours des gouvernements cantonaux (art. 77) peuvent faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral conformément à la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral173. |
|
1 | Les décisions sur recours des gouvernements cantonaux (art. 77) peuvent faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral conformément à la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral173. |
2 | Les décisions de la Chancellerie fédérale relatives au non-enregistrement d'un parti dans le registre des partis ou au non-aboutissement d'une initiative populaire ou d'un référendum peuvent faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral. Il n'est en revanche pas recevable contre la simple mention, dans la Feuille fédérale, que l'initiative populaire ou la demande de référendum n'a manifestement pas atteint le nombre de signatures visé aux art. 66, al. 1, et 72, al. 1.174 |
3 | Les membres du comité d'initiative peuvent également former recours devant le Tribunal fédéral contre les décisions de la Chancellerie fédérale relatives à la validité formelle de la liste de signatures (art. 69, al. 1) ou au titre de l'initiative (art. 69, al. 2). |
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 82 Principe - Le Tribunal fédéral connaît des recours: |
|
a | contre les décisions rendues dans des causes de droit public; |
b | contre les actes normatifs cantonaux; |
c | qui concernent le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires. |
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 88 Autorités précédentes en matière de droits politiques - 1 Le recours concernant le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires est recevable: |
|
1 | Le recours concernant le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires est recevable: |
a | en matière cantonale, contre les actes d'autorités cantonales de dernière instance; |
b | en matière fédérale, contre les décisions de la Chancellerie fédérale et des gouvernements cantonaux. |
2 | Les cantons prévoient une voie de recours contre tout acte d'autorité qui est susceptible de violer les droits politiques cantonaux des citoyens. Cette obligation ne s'étend pas aux actes du parlement et du gouvernement. |
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 82 Principe - Le Tribunal fédéral connaît des recours: |
|
a | contre les décisions rendues dans des causes de droit public; |
b | contre les actes normatifs cantonaux; |
c | qui concernent le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires. |
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 88 Autorités précédentes en matière de droits politiques - 1 Le recours concernant le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires est recevable: |
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1 | Le recours concernant le droit de vote des citoyens ainsi que les élections et votations populaires est recevable: |
a | en matière cantonale, contre les actes d'autorités cantonales de dernière instance; |
b | en matière fédérale, contre les décisions de la Chancellerie fédérale et des gouvernements cantonaux. |
2 | Les cantons prévoient une voie de recours contre tout acte d'autorité qui est susceptible de violer les droits politiques cantonaux des citoyens. Cette obligation ne s'étend pas aux actes du parlement et du gouvernement. |
1.2. Le recourant, citoyen suisse, dispose du droit de vote sur le plan fédéral et a ainsi qualité pour recourir (art. 89 al. 3
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 89 Qualité pour recourir - 1 A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque: |
|
1 | A qualité pour former un recours en matière de droit public quiconque: |
a | a pris part à la procédure devant l'autorité précédente ou a été privé de la possibilité de le faire; |
b | est particulièrement atteint par la décision ou l'acte normatif attaqué, et |
c | a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification. |
2 | Ont aussi qualité pour recourir: |
a | la Chancellerie fédérale, les départements fédéraux ou, pour autant que le droit fédéral le prévoie, les unités qui leur sont subordonnées, si l'acte attaqué est susceptible de violer la législation fédérale dans leur domaine d'attributions; |
b | l'organe compétent de l'Assemblée fédérale en matière de rapports de travail du personnel de la Confédération; |
c | les communes et les autres collectivités de droit public qui invoquent la violation de garanties qui leur sont reconnues par la constitution cantonale ou la Constitution fédérale; |
d | les personnes, organisations et autorités auxquelles une autre loi fédérale accorde un droit de recours. |
3 | En matière de droits politiques (art. 82, let. c), quiconque a le droit de vote dans l'affaire en cause a qualité pour recourir. |
1.3. Le délai de recours en cas d'irrégularités découvertes ultérieurement dans le cadre d'une votation fédérale doit respecter deux conditions cumulatives. D'une part, la décision du gouvernement cantonal doit être attaquée dans le délai prévu par l'art. 100 al. 3 let. b
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 100 Recours contre une décision - 1 Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète. |
|
1 | Le recours contre une décision doit être déposé devant le Tribunal fédéral dans les 30 jours qui suivent la notification de l'expédition complète. |
2 | Le délai de recours est de dix jours contre: |
a | les décisions d'une autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et de faillite; |
b | les décisions en matière d'entraide pénale internationale et d'assistance administrative internationale en matière fiscale; |
c | les décisions portant sur le retour d'un enfant fondées sur la Convention européenne du 20 mai 1980 sur la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière de garde des enfants et le rétablissement de la garde des enfants92 ou sur la Convention du 25 octobre 1980 sur les aspects civils de l'enlèvement international d'enfants93. |
d | les décisions du Tribunal fédéral des brevets concernant l'octroi d'une licence visée à l'art. 40d de la loi du 25 juin 1954 sur les brevets95. |
3 | Le délai de recours est de cinq jours contre: |
a | les décisions d'une autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour effets de change; |
b | les décisions d'un gouvernement cantonal sur recours concernant des votations fédérales. |
4 | Le délai de recours est de trois jours contre les décisions d'un gouvernement cantonal sur recours touchant aux élections au Conseil national. |
5 | En matière de recours pour conflit de compétence entre deux cantons, le délai de recours commence à courir au plus tard le jour où chaque canton a pris une décision pouvant faire l'objet d'un recours devant le Tribunal fédéral. |
6 | ...96 |
7 | Le recours pour déni de justice ou retard injustifié peut être formé en tout temps. |
SR 220 Première partie: Dispositions générales Titre premier: De la formation des obligations Chapitre I: Des obligations résultant d'un contrat CO Art. 60 - 1 L'action en dommages-intérêts ou en paiement d'une somme d'argent à titre de réparation morale se prescrit par trois ans à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la personne tenue à réparation et, dans tous les cas, par dix ans à compter du jour où le fait dommageable s'est produit ou a cessé.35 |
|
1 | L'action en dommages-intérêts ou en paiement d'une somme d'argent à titre de réparation morale se prescrit par trois ans à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la personne tenue à réparation et, dans tous les cas, par dix ans à compter du jour où le fait dommageable s'est produit ou a cessé.35 |
1bis | En cas de mort d'homme ou de lésions corporelles, elle se prescrit par trois ans à compter du jour où la partie lésée a eu connaissance du dommage ainsi que de la personne tenue à réparation et, dans tous les cas, par vingt ans à compter du jour où le fait dommageable s'est produit ou a cessé.36 |
2 | Si le fait dommageable résulte d'un acte punissable de la personne tenue à réparation, elle se prescrit au plus tôt à l'échéance du délai de prescription de l'action pénale, nonobstant les alinéas précédents. Si la prescription de l'action pénale ne court plus parce qu'un jugement de première instance a été rendu, l'action civile se prescrit au plus tôt par trois ans à compter de la notification du jugement.37 |
3 | Si l'acte illicite a donné naissance à une créance contre la partie lésée, celle-ci peut en refuser le paiement lors même que son droit d'exiger la réparation du dommage serait atteint par la prescription. |
1.4. Il est de surcroît nécessaire que les faits et les moyens de preuve avancés soient demeurés inconnus avant la votation et pendant le délai de recours qui l'a suivie, qu'ils n'aient pas pu être invoqués pour des raisons de droit ou de fait ou qu'ils n'aient pas dû être invoqués parce qu'il n'y avait pas motifs de le faire. Les faits et les moyens de preuve doivent par conséquent se rapporter à des faits existant déjà au moment de la votation, mais qui étaient alors inconnus ou qui ont pu rester inaperçus (faits nouveaux improprement dits; faux nova). La procédure ultérieure ne peut servir à réparer ni l'omission d'avoir interjeté un recours ni celle d'avoir recueilli les preuves pertinentes au moment de la votation (ATF 138 I 61 consid. 4.5 p. 76 et les références).
Dans ses déterminations, le Conseil fédéral soutient que le recourant ne se fonde pas sur des faux nova admissibles, mais sur des vrais nova lorsqu'il tient compte de la nouvelle estimation des couples mariés à deux revenus; la nouvelle estimation résulterait d'une nouvelle méthode d'évaluation qui ne devrait pas conduire à la remise en question des décisions antérieures prises sur la base des anciennes évaluations; en d'autres termes, la nouvelle méthode et les chiffres qui en résultent seraient nouveaux car la méthode modifiée n'avait pas encore été utilisée avant la votation.
Le Conseil fédéral méconnaît cependant que la critique du recourant ne se dirige pas contre la méthode d'estimation utilisée par les autorités fédérales mais contre l'information erronée des citoyens dans le contexte de la votation. Le recourant fait valoir en effet que le chiffre de 80'000 couples mariés avec un double revenu est erroné dans les explications du Conseil fédéral, tout comme dans le message du 23 octobre 2013 relatif à l'initiative populaire "Pour le couple et la famille - Non à la pénalisation du mariage" (FF 2013 7623) ainsi que dans les médias. Le nombre de 80'000, corrigé à 454'000, et non les raisons de cette correction, constitue le fait pertinent qui existait déjà au moment de la votation. Quoi qu'en dise le Conseil fédéral, l'erreur quant à ce nombre ne constitue pas un fait qui a surgi seulement après la votation (voir arrêt 1C 63/2015 du 24 août 2015 consid. 4.2, dans lequel des vrais nova ont été retenus). Il s'agit donc d'un faux novum dont la prise de connaissance s'est faite lors de la publication du communiqué de presse du 15 juin 2018, ce qui a ouvert la voie de recours. Savoir si le changement de méthode pour évaluer les personnes touchées par la pénalisation du mariage peut justifier l'erreur de
l'estimation initiale et savoir s'il s'agit d'une irrégularité au sens de la jurisprudence est une question de fond qui sera abordée ci-dessous (voir consid. 3).
1.5. Enfin, en vertu de l'art. 189 al. 4
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 189 Compétences du Tribunal fédéral - 1 Le Tribunal fédéral connaît des contestations pour violation: |
|
1 | Le Tribunal fédéral connaît des contestations pour violation: |
a | du droit fédéral; |
b | du droit international; |
c | du droit intercantonal; |
d | des droits constitutionnels cantonaux; |
e | de l'autonomie des communes et des autres garanties accordées par les cantons aux corporations de droit public; |
f | des dispositions fédérales et cantonales sur les droits politiques. |
1bis | ...134 |
2 | Il connaît des différends entre la Confédération et les cantons ou entre les cantons. |
3 | La loi peut conférer d'autres compétences au Tribunal fédéral. |
4 | Les actes de l'Assemblée fédérale et du Conseil fédéral ne peuvent pas être portés devant le Tribunal fédéral. Les exceptions sont déterminées par la loi. |
à disposition des électeurs. Dans ce contexte, il n'est dès lors pas exclu que les informations émanant du Conseil fédéral ou de Conseillers fédéraux soient de nature à influer sur l'information globale des citoyens. Tel est le cas notamment lorsque le Conseil fédéral a omis des informations importantes auxquelles seule l'administration fédérale avait accès (ATF 138 I 61 consid. 7 et les références citées, en particulier consid. 7.4 p. 86; arrêt 1C 455/2016 du 14 décembre 2016 consid. 2.4, non publié in ATF 143 I 78).
En l'occurrence, le recourant fait notamment valoir que le Conseil fédéral a donné une fausse information au corps électoral en se fondant sur des données, dont seule l'administration fédérale disposait. Il souligne que cette information a été relayée dans de nombreux médias et dans l'argumentaire de deux partis politiques. Il ne s'agit pas d'informations qui auraient pu être discutées et mises en cause dans le débat public précédant la votation (cf. arrêt 1C 455/2016 du 14 décembre 2016 consid. 2.4 non publié in ATF 143 I 78). Le grief du recourant est par conséquent recevable. L'art. 189 al. 4
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 189 Compétences du Tribunal fédéral - 1 Le Tribunal fédéral connaît des contestations pour violation: |
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1 | Le Tribunal fédéral connaît des contestations pour violation: |
a | du droit fédéral; |
b | du droit international; |
c | du droit intercantonal; |
d | des droits constitutionnels cantonaux; |
e | de l'autonomie des communes et des autres garanties accordées par les cantons aux corporations de droit public; |
f | des dispositions fédérales et cantonales sur les droits politiques. |
1bis | ...134 |
2 | Il connaît des différends entre la Confédération et les cantons ou entre les cantons. |
3 | La loi peut conférer d'autres compétences au Tribunal fédéral. |
4 | Les actes de l'Assemblée fédérale et du Conseil fédéral ne peuvent pas être portés devant le Tribunal fédéral. Les exceptions sont déterminées par la loi. |
1.6. Les autres conditions formelles de recevabilité sont remplies, de sorte qu'il y a lieu d'entrer en matière sur le recours.
2.
Le recourant fait valoir que le corps électoral a été induit en erreur par l'information selon laquelle seul un petit nombre de privilégiés (80'000 couples mariés à deux revenus) était visé par la pénalisation fiscale du mariage: le chiffre de 80'000 avait notamment été utilisé pour faire ressortir le caractère marginal des cas visés par l'initiative (2% de la population [5% des couples mariés]) par rapport au coût important qu'elle représentait (2,3 milliards de francs par année) : l'erreur sur le nombre de couples mariés n'ayant pas été reprise dans le calcul du coût de la réforme, cela avait eu pour effet d'accroître de manière disproportionnée le coût de l'initiative en rapport avec le nombre de personnes touchées. Le recourant soutient que l'initiative populaire a ainsi été présentée comme visant une situation bagatelle, ce qui aurait démotivé de nombreuses personnes favorables à l'initiative.
Le recourant déduit ensuite du communiqué de presse du Conseil fédéral du 15 juin 2018 qu'en réalité 66 % des couples mariés à deux revenus étaient concernés par l'initiative (374'000 couples mariés à deux revenus en plus de ce qui avait été annoncé) et que la majorité (52.29%) des couples suisses (y compris les couples à un seul revenu) était touchée. Il ajoute que la correction du chiffre représente une augmentation de 467.5% du nombre de couples mariés à deux revenus visés; l'erreur était particulièrement grave puisqu'il ne s'agissait pas d'une erreur d'estimation (ce qui peut arriver lorsque les méthodes de calcul divergent) mais bien d'une erreur d'information.
Le recourant souligne aussi que le chiffre de 80'000 a été abondamment relayé dans différents documents officiels, lors des débats parlementaires, dans de nombreux journaux, à la radio et à la télévision ainsi que dans l'argumentaire de partis politiques; compte tenu de l'importance donnée au chiffre erroné de 80'000 couples mariés dans le cadre de la campagne précédant la votation en question, l'impact de l'irrégularité sur le résultat de la votation ne peut être que significatif.
En définitive, le recourant soutient que la double erreur (nombre de couples visés et rapport entre le coût et l'impact sur la population) constitue une violation de l'art. 34 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 34 Droits politiques - 1 Les droits politiques sont garantis. |
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1 | Les droits politiques sont garantis. |
2 | La garantie des droits politiques protège la libre formation de l'opinion des citoyens et des citoyennes et l'expression fidèle et sûre de leur volonté. |
2.1. L'art. 34 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 34 Droits politiques - 1 Les droits politiques sont garantis. |
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1 | Les droits politiques sont garantis. |
2 | La garantie des droits politiques protège la libre formation de l'opinion des citoyens et des citoyennes et l'expression fidèle et sûre de leur volonté. |
A teneur de l'art. 11 al. 2
SR 161.1 Loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques (LDP) LDP Art. 11 - 1 La Confédération met à la disposition des cantons les textes soumis à la votation et les bulletins de vote. |
|
1 | La Confédération met à la disposition des cantons les textes soumis à la votation et les bulletins de vote. |
2 | Le texte soumis à la votation est accompagné de brèves explications du Conseil fédéral, qui doivent rester objectives et exposer également l'avis d'importantes minorités. Il doit contenir le libellé exact de la question qui figure sur le bulletin de vote. Dans le cas d'une initiative populaire ou d'un référendum, le comité fait part de ses arguments au Conseil fédéral, lequel les reprend dans ses explications. Le Conseil fédéral peut modifier ou refuser de reprendre des commentaires portant atteinte à l'honneur, manifestement contraires à la vérité ou trop longs. Il ne reprend les renvois à des sources électroniques que si leurs auteurs déclarent par écrit que ces sources ne contiennent pas d'indications illicites ni n'aiguillent l'internaute vers des publications électroniques au contenu illicite.22 |
3 | Les électeurs reçoivent, au plus tôt quatre semaines avant le jour de la votation mais au plus tard trois semaines avant cette date, les documents qui, au regard du droit cantonal, leur permettent d'exprimer valablement leur vote (bulletin de vote, carte de légitimation, enveloppe électorale, timbre de contrôle, ...23, etc.). Le texte soumis à la votation et les explications peuvent cependant leur être remis plus tôt. La Chancellerie fédérale publie, sur support électronique et au plus tard six semaines avant le jour de la votation, les textes soumis à la votation et les explications qui les accompagnent.24 25 |
4 | Les cantons peuvent, par une loi, habiliter les communes à n'envoyer qu'un seul exemplaire du texte soumis à la votation et des explications par ménage à moins qu'un membre de ce ménage ayant la qualité d'électeur ne demande à en recevoir un personnellement.26 |
SR 161.1 Loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques (LDP) LDP Art. 10a Information des électeurs - 1 Le Conseil fédéral informe les électeurs de manière suivie sur les objets soumis à la votation fédérale. |
|
1 | Le Conseil fédéral informe les électeurs de manière suivie sur les objets soumis à la votation fédérale. |
2 | Il respecte les principes de l'exhaustivité, de l'objectivité, de la transparence et de la proportionnalité. |
3 | Il expose les principaux avis exprimés lors de la procédure parlementaire. |
4 | Il ne défend pas de recommandation de vote différente de celle formulée par l'Assemblée fédérale. |
SR 161.1 Loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques (LDP) LDP Art. 10a Information des électeurs - 1 Le Conseil fédéral informe les électeurs de manière suivie sur les objets soumis à la votation fédérale. |
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1 | Le Conseil fédéral informe les électeurs de manière suivie sur les objets soumis à la votation fédérale. |
2 | Il respecte les principes de l'exhaustivité, de l'objectivité, de la transparence et de la proportionnalité. |
3 | Il expose les principaux avis exprimés lors de la procédure parlementaire. |
4 | Il ne défend pas de recommandation de vote différente de celle formulée par l'Assemblée fédérale. |
SR 161.1 Loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques (LDP) LDP Art. 10a Information des électeurs - 1 Le Conseil fédéral informe les électeurs de manière suivie sur les objets soumis à la votation fédérale. |
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1 | Le Conseil fédéral informe les électeurs de manière suivie sur les objets soumis à la votation fédérale. |
2 | Il respecte les principes de l'exhaustivité, de l'objectivité, de la transparence et de la proportionnalité. |
3 | Il expose les principaux avis exprimés lors de la procédure parlementaire. |
4 | Il ne défend pas de recommandation de vote différente de celle formulée par l'Assemblée fédérale. |
national a notamment précisé que le principe d'objectivité impose que "les incertitudes [doivent être] présentées comme telles" (rapport du 15 septembre 2006, FF 2006 8779, 8791).
Selon la jurisprudence, le résultat d'une votation est faussé lorsque les citoyens ont été informés de manière erronée sur le but et la portée du projet soumis au vote. Il est interdit de passer sous silence des éléments importants pour la décision du citoyen ou de reproduire de manière inexacte les arguments des adversaires du référendum ou de l'initiative (cf. ATF 139 I 2 consid. 6.2 p. 13 s. et les références citées; 138 I 61 consid. 6.2 p. 82).
Le principe de la transparence exige par ailleurs que s'il existe des incertitudes significatives lors de l'évaluation de la situation de départ, celles-ci soient clairement présentées comme telles (rapport de la Commission des institutions politiques du Conseil national du 15 septembre 2006 précité, FF 2006 8779, 8791; cf. arrêt 1C 385/2012 du 17 décembre 2012 consid. 2.5 et les références in ZBl 2013 p. 524, où il est essentiel que les citoyens, se fondant sur les données se trouvant à leur disposition, puissent reconnaître l'absence de fiabilité des prévisions et des chiffres; cf. aussi ATF 138 I 61 consid. 8.6 p. 92 ss.; voir aussi arrêt 1P.280/1999 du 7 décembre 1999, in DEP 2000 142, in RDAF 2001 I 513 où les informations précédant le vote avaient exposé certains pronostics quant au trafic aérien, pronostics qui se sont révélés par la suite largement insuffisants).
Ces principes constitutionnels valent d'autant plus pour les explications du Conseil fédéral avant une votation qu'ils sont désormais expressément prévus par la LDP (cf. ATF 138 I 61 consid. 6.3 p. 84 et les références).
2.2. Dans ses déterminations, le Conseil fédéral explique que le communiqué de presse du 15 juin 2018 était en lien avec la discussion du projet de modification de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct présenté dans le message du 21 mars 2018 (Message du 21 mars 2018 relatif à la modification de la loi fédérale sur l'impôt fédéral direct [Imposition équilibrée des couples et de la famille], FF 2018 2173); selon ce message, les couples mariés à double revenus avec enfants n'auraient pas été pris en compte par erreur dans le nombre de couples concernés par la pénalisation fiscale du mariage; le porte-parole de l'administration fédérale des contributions avait déclaré lors du journal télévisé du 15 juin 2018 qu'une erreur avait déjà été commise lors de la votation du 28 février 2016. Le Conseil fédéral estime que cette déclaration est fausse ( nicht zutreffend).
Le Conseil fédéral soutient que la différence entre le nombre de couples mariés avec deux revenus selon le message explicatif pour la votation du 28 février 2016 (80'000) et le nombre mentionné dans le communiqué de presse précité (454'000) résulte de deux circonstances. D'une part, une actualisation des chiffres avait eu lieu en juin 2018 à la suite de nouvelles données statistiques; en raison de l'augmentation tant du nombre de contribuables et de couples mariés à deux revenus que des revenus eux-mêmes, le nombre de couples mariés à deux revenus concernés était plus élevé; le chiffre de 80'000 se fondait sur une statistique datant de 2001. D'autre part, la méthode d'estimation du nombre de couples mariés concernés avait changé en lien avec le message du 21 mars 2018. Le Conseil fédéral décrit en détail les deux méthodes d'évaluation. Il fait valoir qu'avec le changement de méthode un nouveau point de référence pour la comparaison des charges de couples mariés avec enfants a été défini.
Le Conseil fédéral explique ensuite pourquoi, malgré cette différence de chiffres, il n'y a pas eu d'influence inadmissible dans la formation de la volonté des citoyens. Il fait remarquer que la Confédération ne dispose pas directement de données statistiques au sujet des couples mariés à deux revenus parce que l'impôt fédéral direct est prélevé par les cantons; les chiffres communiqués n'étaient donc que des estimations; la Confédération récoltait cependant auprès des cantons des données statistiques relatives à l'impôt fédéral direct, desquelles il résultait des informations ponctuelles portant sur les relations personnelles du contribuable et sa situation économique; la limitation de la statistique fiscale tenait à l'absence d'information concernant les revenus et les déductions de chaque époux (il était donc impossible de connaître la répartition des revenus au sein du couple) et au manque d'information sur le nombre d'enfants (enfants communs ou non communs).
Dans sa réplique du 30 novembre 2018, le Conseil fédéral produit deux rapports de l'Administration fédérale des contributions (AFC) avec des données détaillées sur l'ancienne et la nouvelle méthode d'évaluation. Il présente aussi une expertise externe des méthodes d'estimation et du matériel statistique de l'AFC relative à la question de la pénalisation fiscale du mariage, établie sur mandat du Département fédéral des finances (RAPHAËL PARCHET, Examen externe des méthodes d'estimation et du matériel statistique de l'AFC, rapport final du 8 octobre 2018). L'expert constate que, vu le manque de données concernant les revenus et les déductions individuels de chaque conjoint du couple, l'AFC n'est pas en mesure de calculer exactement le nombre de couples pénalisés fiscalement par le mariage ni de calculer les conséquences financières du projet d'imposition équilibrée des couples et de la famille, ces données pouvant cependant être recueillies auprès des cantons.
2.3. En réponse aux déterminations du Conseil fédéral, le recourant se déclare troublé et étonné par l'affirmation suivante du Conseil fédéral: la Confédération ne disposerait pas de données statistiques au sujet des couples mariés à deux revenus touchés par la pénalisation du mariage, de sorte que les chiffres communiqués n'étaient que des estimations; en effet, que ce soit dans le message explicatif, lors des débats parlementaires ou encore dans les communiqués de presse, le corps électoral n'a à aucun moment été informé de l'absence de données fiables à ce sujet et de ce que les chiffres communiqués ne reposaient que sur des estimations; un tel silence sur un élément de fait aussi essentiel ne peut être qualifié que de dissimulation; sachant que les électeurs sont tenus chaque année de déclarer de manière circonstanciée leurs revenus et fortune à l'administration fiscale, ils sont en droit de s'attendre à ce que les chiffres utilisés dans des explications ou communications du Conseil fédéral proviennent exclusivement de données fiscales fiables et précises; s'ajoute à cela qu'il est difficile de comprendre comment le résultat des estimations peut varier d'un facteur allant jusqu'à 5,675 fois plus.
Le recourant souligne encore que la mise en place par le Conseil fédéral d'un examen externe des méthodes d'estimation et du matériel statistique de l'AFC démontrerait que celui-ci a été surpris de ces différences significatives et qu'il entend faire la lumière sur l'origine et les causes des erreurs commises.
3.
La question à trancher est celle de savoir si le Conseil fédéral a informé de manière lacunaire le corps électoral sur des éléments de fait, dont seule l'administration fédérale disposait, et a ainsi faussé l'état d'information des citoyens avant la votation populaire du 28 février 2016.
L'information erronée ou lacunaire porte sur trois points. D'abord, le nombre de couples mariés à deux revenus touchés par la pénalisation du mariage était erroné (consid. 3.1). Les citoyens n'ont ensuite pas eu connaissance de ce que le nombre de 80'000 résultait d'une estimation (consid. 3.2). Enfin, le corps électoral n'a jamais su que le nombre de 80'000 se fondait sur des données datant de 2001 et que celles-ci n'avaient pas été actualisées (consid. 3.3).
3.1. Premièrement, les citoyens appelés au vote du 28 février 2016 ont reçu l'information que le nombre de couples mariés à deux revenus touchés par l'initiative était de 80'000. Ils ont appris, en juin 2018, que ce nombre était erroné et qu'en réalité 454'000 couples pouvaient être concernés. Le nombre initial a ainsi été multiplié par un facteur supérieur à 5. Si l'on compte les personnes et non les couples, environ 908'000 personnes - parmi les actifs - pouvaient être touchées par l'initiative en question.
3.2. Deuxièmement, les électeurs n'ont jamais été informés de ce que le chiffre de 80'000 résultait d'une estimation. Dans son message explicatif, le Conseil fédéral a toujours affirmé (en utilisant l'indicatif présent) que "quelque 80'000 couples mariés à deux revenus et de nombreux couples de retraités mariés doivent s'acquitter d'un impôt fédéral direct plus élevé que les couples non mariés se trouvant dans la même situation économique"; il a assuré que "environ 80'000 couples mariés à deux revenus et de nombreux retraités mariés continuent de subir, en matière d'impôt fédéral direct, une charge supplémentaire [...] jugée contraire à la Constitution". A aucun moment, il n'a dit que le chiffre de 80'000 ne provenait pas de statistiques, mais d'une estimation faite selon une méthode particulière et peu fiable. Pour garantir la libre formation de l'opinion des citoyens, il aurait fallu mentionner que le chiffre de 80'000 émanait d'une estimation et utiliser le conditionnel pour énoncer le nombre de couples touchés par la pénalisation fiscale du mariage. Ce chiffre a d'ailleurs systématiquement été repris dans les différents communiqués de presse officiels du Conseil fédéral et du Parlement, lors des débats parlementaires et dans
les différents médias lors du débat public précédant la votation. Les termes "quelque" et "environ" indiquaient certes que le nombre de 80'000 n'était pas un chiffre exact, mais ils ne pouvaient que signifier, dans l'esprit du public, que ce nombre avait sans doute été arrondi, par exemple, à la dizaine de milliers de couples touchés directement inférieure ou supérieure. Les citoyens ne pouvaient en tout cas pas imaginer, dans l'état d'information dans lequel ils se trouvaient avant la votation, que le nombre de couples touchés par la pénalisation fiscale du mariage pouvait être en réalité plus de 5 fois plus élevé que les 80'000 annoncés.
Ce manque de transparence ainsi que l'absence d'indication sur le défaut de fiabilité des données représentent une carence portant sur un élément essentiel dans la formation de l'opinion des électeurs. Cette carence est encore aggravée par le fait que la mention d'un nombre, certes approximatif mais apparemment exact, de "quelque 80'000" couples mariés à deux revenus se lit en parallèle avec la mention, quant à elle non chiffrée, de "nombreux" couples de retraités mariés: cela suscite l'impression que le nombre de couples mariés à deux revenus a, contrairement à celui des couples retraités, pu être établi de manière fiable et exacte.
Le Conseil fédéral a expliqué qu'une des raisons qui pouvait expliquer la différence de chiffres était le changement de la méthode d'estimation. Cet élément pourrait être pris en compte si, dans le message explicatif, il avait été mentionné que le chiffre de 80'000 résultait d'une méthode d'estimation. Les citoyens n'ayant pas reçu cette information, le changement de méthode d'estimation opéré après coup ne peut justifier l'information erronée qui leur a été donnée. Si, à en croire le Conseil fédéral, une estimation plus précise n'était pas possible, la transparence de l'information aurait exigé qu'il soit renoncé à la mention d'un quelconque nombre concret dans la brochure explicative ou qu'il soit fait mention de l'absence de fiabilité des estimations données, de façon à ce que les électeurs puissent se faire une idée correcte et fiable de la question.
Au demeurant, les citoyens n'ont jamais été mis au courant de ce que des écarts d'estimation si importants pouvaient exister selon les différentes méthodes utilisées, à savoir entre 80'000 et 454'000 couples mariés à deux revenus touchés.
3.3. S'y ajoute qu'une partie non négligeable de la différence entre les anciennes et les nouvelles données relatives au nombre de couples mariés à deux revenus concernés ne découle pas de la modification de la méthode d'estimation mais de l'actualisation des données statistiques. Le Conseil fédéral explique à cet égard que le nombre de 80'000 se fondait sur des données datant de l'année 2001, soit quinze ans avant la votation: l'Administration fédérale des contributions aurait estimé que les inconvénients d'une actualisation des données l'emportaient sur ses avantages: une actualisation des données n'aurait pas ajouté de valeur supplémentaire importante après qu'une évaluation datant de 2009 (sur la base des statistiques fiscales de l'année 2006) aurait rendu plausible que le cercle des personnes concernées était d'environ 100'000 couples mariés à deux revenus; de plus les discussions de projets de réforme sur l'imposition fiscale des couples mariés duraient depuis longtemps et une actualisation aurait eu tendance à rendre plus difficile la comparaison des projets de réforme.
L'explication du Conseil fédéral ne convainc pas. En effet, la comparaison des différents projets de réformes n'était pas en discussion lors de la votation du 28 février 2016 : on ne trouve d'ailleurs aucune mention d'autres projets de réforme dans le message explicatif du Conseil fédéral. De même, l'argument selon lequel une actualisation du nombre aurait donné la fausse impression que le nombre de couples mariés concernés pouvait être calculé précisément est aussi erroné. Une telle impression aurait facilement pu être évitée par une clarification. Il y a ainsi lieu de retenir que les autorités fédérales savaient que le chiffre de 80'000 n'était plus d'actualité et qu'elles ont renoncé à en informer le corps électoral.
3.4. Par conséquent, il y a lieu de constater que l'indication de "quelque 80'000" couples mariés à deux revenus touchés par la pénalisation fiscale du mariage viole le devoir d'information objective et l'obligation de transparence, dans la mesure où elle est inexacte et ne mentionne ni son absence de fiabilité significative ni son manque d'actualité. Comme le démontre le recourant avec de nombreux renvois à des articles de presse, des déclarations de politiciens, des communiqués de presse d'autorités fédérales et de partis politiques, cette donnée a constitué une part importante du débat public précédant la votation. Elle représentait une information essentielle dans la prise de décision et ne concernait pas un point secondaire (cf. arrêt 1P.131/2004 du 14 juin 2004 consid. 3). La situation avant la votation montre ainsi que le corps électoral était privé d'éléments importants pour former et exprimer son opinion. Le caractère incomplet et le manque de transparence des explications du Conseil fédéral ont donc eu des conséquences sur l'état d'information précédant la votation du 28 février 2016, conséquences qui ne sont pas compatibles avec la liberté de vote. L'art. 34 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 34 Droits politiques - 1 Les droits politiques sont garantis. |
|
1 | Les droits politiques sont garantis. |
2 | La garantie des droits politiques protège la libre formation de l'opinion des citoyens et des citoyennes et l'expression fidèle et sûre de leur volonté. |
4.
Il s'agit enfin de déterminer si les irrégularités constatées ont pu influencer le résultat du scrutin de façon déterminante.
4.1. En matière de recours contre les votations, la jurisprudence distingue ceux qui sont déposés avant ou peu après la votation des recours qui sont interjetés bien après la votation lorsque des irrégularités ont été connues ultérieurement. Dans le premier cas, la votation n'est annulée qu'à la double condition que la violation constatée est grave et qu'elle a pu avoir une influence sur le résultat du vote; il y a lieu de tenir compte notamment de l'écart de voix, de la gravité des vices de procédure et de leur portée sur le vote dans son ensemble. Si la possibilité d'un résultat différent au cas où la procédure n'avait pas été viciée apparaît à ce point minime qu'elle ne puisse pas entrer sérieusement en considération, il y a lieu de renoncer à l'annulation du vote; dans le cas contraire, il faut considérer le vice comme important et annuler la votation (ATF 145 I 1 consid. 4.2 p. 5; 143 I 78 consid. 7.1 p. 90 s. et les arrêts cités).
Dans le second cas, les exigences pour l'annulation d'une votation sont plus élevées. Le principe de la sécurité du droit exige en effet la stabilité de la législation en vigueur (art. 5
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 5 Principes de l'activité de l'État régi par le droit - 1 Le droit est la base et la limite de l'activité de l'État. |
|
1 | Le droit est la base et la limite de l'activité de l'État. |
2 | L'activité de l'État doit répondre à un intérêt public et être proportionnée au but visé. |
3 | Les organes de l'État et les particuliers doivent agir de manière conforme aux règles de la bonne foi. |
4 | La Confédération et les cantons respectent le droit international. |
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 9 Protection contre l'arbitraire et protection de la bonne foi - Toute personne a le droit d'être traitée par les organes de l'État sans arbitraire et conformément aux règles de la bonne foi. |
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 8 Égalité - 1 Tous les êtres humains sont égaux devant la loi. |
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1 | Tous les êtres humains sont égaux devant la loi. |
2 | Nul ne doit subir de discrimination du fait notamment de son origine, de sa race, de son sexe, de son âge, de sa langue, de sa situation sociale, de son mode de vie, de ses convictions religieuses, philosophiques ou politiques ni du fait d'une déficience corporelle, mentale ou psychique. |
3 | L'homme et la femme sont égaux en droit. La loi pourvoit à l'égalité de droit et de fait, en particulier dans les domaines de la famille, de la formation et du travail. L'homme et la femme ont droit à un salaire égal pour un travail de valeur égale. |
4 | La loi prévoit des mesures en vue d'éliminer les inégalités qui frappent les personnes handicapées. |
Le Tribunal fédéral a annulé à différentes reprises des votations cantonales ou communales. Un recours avait été déposé deux ans après la votation sur le rattachement du Laufonnais au canton de Bâle-Campagne; en 1988, le Tribunal fédéral a annulé la votation en raison de l'intervention du gouvernement bernois dans le financement de la campagne (objet refusé par 56.7% des voix; ATF 114 Ia 427). En 2006, une votation cantonale dans le canton d'Appenzell Rhodes-Extérieures a été annulée au motif d'une violation grave du principe de l'unité de la matière de l'objet soumis au vote (objet accepté à 59.6% des voix; arrêt 1P.223/2006 du 12 septembre 2006 in ZBl 2007 p. 332, in PJA 2007 p. 112). En 2011, un arrêté de convocation des électeurs pour une votation cantonale neuchâteloise a été annulé quelques jours avant la votation pour violation de l'unité de la matière, faute de rapport intrinsèque entre les objets soumis ensemble au vote (ATF 137 I 200). En 2015, une votation communale a été annulée en raison d'irrégularités lors du dépouillement du scrutin (objet accepté par 51.4% des voix; ATF 141 I 221). En 2018, l'annulation d'une votation communale comprenant deux objets a été motivée par la présence d'un stand, avec banderoles de
propagande, aux abords du local de vote le jour du scrutin - ce qui constituait une violation manifeste de la loi cantonale pertinente interdisant clairement une telle activité - ayant pu influencer le sort du scrutin (objets refusés par 53.7% et 52.4% des voix; arrêt 1C 610/2017 du 7 mai 2018). En 2018 aussi, une votation communale comprenant deux objets a été annulée en raison de l'intervention massive et unilatérale de l'exécutif communal en faveur du projet (objets acceptés par 50.5% et 51.4% des voix, avec un écart respectivement de 7 voix et de 21 voix; arrêt 1C 521/2017 du 14 mai 2018).
4.2. A teneur de l'art. 15 al. 1
SR 161.1 Loi fédérale du 17 décembre 1976 sur les droits politiques (LDP) LDP Art. 15 Validation et publication du résultat de la votation - 1 Le Conseil fédéral constate le résultat définitif de la votation (validation) dès qu'il est établi qu'aucun recours n'a été déposé devant le Tribunal fédéral ou dès que les arrêts rendus sur de tels recours sont prononcés.34 |
|
1 | Le Conseil fédéral constate le résultat définitif de la votation (validation) dès qu'il est établi qu'aucun recours n'a été déposé devant le Tribunal fédéral ou dès que les arrêts rendus sur de tels recours sont prononcés.34 |
2 | L'arrêté de validation est publié dans la Feuille fédérale. |
3 | Les modifications de la Constitution entrent en vigueur dès leur acceptation par le peuple et les cantons, à moins que le projet n'en dispose autrement. |
4 | Si la modification du droit ne souffre aucun retard et que le résultat de la votation est incontestable, le Conseil fédéral ou l'Assemblée fédérale peut, avant que ne soit édicté l'arrêté de validation, faire entrer provisoirement en vigueur une loi ou un arrêté fédéral portant approbation d'un accord international ou encore maintenir en vigueur ou abroger provisoirement une loi déclarée urgente.35 |
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 189 Compétences du Tribunal fédéral - 1 Le Tribunal fédéral connaît des contestations pour violation: |
|
1 | Le Tribunal fédéral connaît des contestations pour violation: |
a | du droit fédéral; |
b | du droit international; |
c | du droit intercantonal; |
d | des droits constitutionnels cantonaux; |
e | de l'autonomie des communes et des autres garanties accordées par les cantons aux corporations de droit public; |
f | des dispositions fédérales et cantonales sur les droits politiques. |
1bis | ...134 |
2 | Il connaît des différends entre la Confédération et les cantons ou entre les cantons. |
3 | La loi peut conférer d'autres compétences au Tribunal fédéral. |
4 | Les actes de l'Assemblée fédérale et du Conseil fédéral ne peuvent pas être portés devant le Tribunal fédéral. Les exceptions sont déterminées par la loi. |
L'arrêté de validation du scrutin du Conseil fédéral constate seulement la validité de son résultat, alors que le Tribunal fédéral constate la régularité du scrutin, c'est-à-dire sa conformité à la garantie de la libre formation et de l'expression fidèle et sûre de la volonté des citoyens (art. 34 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 34 Droits politiques - 1 Les droits politiques sont garantis. |
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1 | Les droits politiques sont garantis. |
2 | La garantie des droits politiques protège la libre formation de l'opinion des citoyens et des citoyennes et l'expression fidèle et sûre de leur volonté. |
arrêtant les chiffres de la majorité et de la minorité (DUBEY, op. cit. p. 16). Il ne s'agit pas non plus d'une décision de nature politique contre laquelle le recours au Tribunal fédéral serait susceptible de violer le principe de la séparation des pouvoirs (cf. GORAN SEFEROVIC, Commentaire bâlois, Cst., 2015, n° 59 ad art. 189
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 189 Compétences du Tribunal fédéral - 1 Le Tribunal fédéral connaît des contestations pour violation: |
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1 | Le Tribunal fédéral connaît des contestations pour violation: |
a | du droit fédéral; |
b | du droit international; |
c | du droit intercantonal; |
d | des droits constitutionnels cantonaux; |
e | de l'autonomie des communes et des autres garanties accordées par les cantons aux corporations de droit public; |
f | des dispositions fédérales et cantonales sur les droits politiques. |
1bis | ...134 |
2 | Il connaît des différends entre la Confédération et les cantons ou entre les cantons. |
3 | La loi peut conférer d'autres compétences au Tribunal fédéral. |
4 | Les actes de l'Assemblée fédérale et du Conseil fédéral ne peuvent pas être portés devant le Tribunal fédéral. Les exceptions sont déterminées par la loi. |
Si le Tribunal fédéral, saisi d'un recours en raison d'irrégularités découvertes bien après la votation, constate une violation des droits politiques dont il juge qu'elle implique une annulation de la votation, le Conseil fédéral est tenu d'adapter son arrêté de validation d'office au nouvel arrêt du Tribunal fédéral. A défaut, le Conseil fédéral se trouverait en conflit avec le devoir que lui impose l'art. 182 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 182 Législation et mise en oeuvre - 1 Le Conseil fédéral édicte des règles de droit sous la forme d'une ordonnance, dans la mesure où la Constitution ou la loi l'y autorisent. |
|
1 | Le Conseil fédéral édicte des règles de droit sous la forme d'une ordonnance, dans la mesure où la Constitution ou la loi l'y autorisent. |
2 | Il veille à la mise en oeuvre de la législation, des arrêtés de l'Assemblée fédérale et des jugements rendus par les autorités judiciaires fédérales. |
4.3. En l'espèce, l'initiative litigieuse a été rejetée à une courte majorité par 50.8% des votants (1'664'224 non contre 1'609'152 oui). L'écart des voix entre le "oui" et le "non" apparaît ainsi faible. L'initiative en question a de plus été acceptée par une large majorité des cantons (par 15 cantons et 3 cantons disposant d'une demi-voix [contre 5 cantons et 3 cantons disposant d'une demi-voix]).
S'agissant de la gravité des irrégularités, l'ampleur de l'erreur doit être prise en considération. La correction a fait en effet passer le nombre de couple mariés à deux revenus touchés par l'initiative en question de 80'000 à 454'000 selon les indications des autorités fédérales. Le nombre initial a ainsi été multiplié par un facteur supérieur à 5.
Quant à l'influence possible des irrégularités sur la votation, il faut relever que celles-ci ont conduit à deux arguments erronés. D'une part, le chiffre de 80'000 a été utilisé pour faire ressortir le caractère marginal des cas visés par l'initiative par rapport au coût important qu'elle représentait (entre 1,2 et 2,3 milliards de francs par année). D'autre part, l'erreur sur le nombre de couples mariés n'a pas été reprise dans le calcul du coût de la réforme; cela a eu pour effet d'accroître de manière disproportionnée le coût de l'initiative en rapport avec le nombre de personnes touchées. Ces deux éléments ont pu avoir un poids important dans la formation de l'opinion des électeurs.
Le chiffre de 80'000 - issu des services de l'administration et dont l'absence de fiabilité et d'actualité était connue de celle-ci - a de surcroît été abondamment relayé. Il figure non seulement dans la brochure explicative du Conseil fédéral mais aussi dans le message du Conseil fédéral du 23 octobre 2013 (FF 2013 7623) et dans différents documents officiels (communications du Conseil fédéral, arguments développés par le Conseil fédéral et le Parlement, publications du Département fédéral des finances en réponse aux arguments du comité d'initiative). Ce chiffre a été repris dans les débats parlementaires par la Conseillère fédérale en charge du Département fédéral des finances (BO 2014 CN n° 2304) et a servi de référence dans les débats du Conseil national (BO 2014 CN n° 2273 ss et n° 2295 ss) et du Conseil des Etats (BO 2015 CE n° 43 ss). Ce chiffre a aussi été relayé dans de nombreux journaux, à la radio et à la télévision ainsi que dans l'argumentaire de partis politiques.
Quant à la sécurité du droit, elle a en l'espèce une importance moindre puisque l'initiative en question a été refusée lors de la votation litigieuse. Contrairement au recours formé contre l'acceptation de la deuxième réforme de l'imposition des entreprises - dans lequel le Tribunal fédéral avait pris en compte le fait que la réforme législative était entrée en vigueur, que de nombreuses entreprises avaient pris leurs dispositions en fonction de ce nouveau droit et que les possibilités ainsi offertes avaient d'ores et déjà été mises en oeuvre (ATF 138 I 61 consid. 8.7 p. 95) -, il n'est pas question ici d'annuler une loi en vigueur et déjà maintes fois appliquée. La votation en question n'a en effet introduit aucune norme qui ne pourrait être annulée. Dans de telles circonstances, l'intérêt à la sécurité du droit ne peut l'emporter (ATF 114 Ia 427 consid. 8b p. 451) face à l'intérêt à ce que l'opinion du corps électoral puisse être formée de manière complète sur la base d'informations exactes.
Le Conseil fédéral souligne encore le fait que la définition étroite du mariage proposée par l'initiative a été l'élément le plus important pour rejeter l'initiative (SCIARINI/FEDDERSEN/LANZ, Analyse de la votation fédérale du 28 février 2016, p. 3, disponible sous : https://www.gfsbern.ch [consulté le 10 avril 2019]). L'analyse politologique résultant d'un sondage, citée par le Conseil fédéral, précise cependant que si cet argument a été plébiscité par les personnes qui ont rejeté l'initiative, il est aussi soutenu par près de la moitié des personnes qui l'ont acceptée. Il ressort en outre de cette analyse que l'argument selon lequel "il est injuste que les couples mariés soient pénalisés par rapport aux couples non mariés en matière d'impôts et d'assurances sociales", qui était au coeur de l'initiative, est fortement soutenu tant par les votants qui ont accepté l'initiative que par ceux qui l'ont refusée. Le nombre de personnes fiscalement discriminées était ainsi un élément important dans le choix des électeurs. Quoi qu'il en soit, il n'est pas possible de déterminer quel argument a convaincu chaque citoyen de voter en faveur ou en défaveur de l'initiative. Si certains électeurs ont rejeté l'initiative en raison de la
définition étroite du mariage, il n'en demeure pas moins que des citoyens ont aussi pu refuser l'initiative parce qu'ils pensaient que seul un petit nombre de couples mariés à deux revenus était concerné. Le Tribunal fédéral ne peut donc prendre en compte de tels éléments résultant d'un sondage pour opérer la pesée des intérêts relative à l'annulation d'une votation.
Enfin, quoi qu'en dise le Conseil fédéral, le fait que le thème de la discrimination fiscale des couples mariés est toujours d'actualité dans le cadre de la révision en cours de l'imposition du couple et de la famille n'a pas d'incidence dans la présente procédure, tant qu'une telle réforme n'est pas entrée en vigueur (à l'échéance du délai référendaire). De plus, comme le relève le Conseil fédéral, seule une partie de l'initiative populaire litigieuse est concernée par le projet de réforme en cours.
Il ressort de ce qui précède que la sécurité du droit ne s'oppose pas à l'annulation du scrutin, que les irrégularités constatées sont crasses et que l'issue du scrutin - compte tenu de la double majorité prévue à l'art. 140 al. 1 let. a
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 140 Référendum obligatoire - 1 Sont soumises au vote du peuple et des cantons: |
|
1 | Sont soumises au vote du peuple et des cantons: |
a | les révisions de la Constitution; |
b | l'adhésion à des organisations de sécurité collective ou à des communautés supranationales; |
c | les lois fédérales déclarées urgentes qui sont dépourvues de base constitutionnelle et dont la durée de validité dépasse une année; ces lois doivent être soumises au vote dans le délai d'un an à compter de leur adoption par l'Assemblée fédérale. |
2 | Sont soumis au vote du peuple: |
a | les initiatives populaires tendant à la révision totale de la Constitution; |
abis | ... |
b | les initiatives populaires conçues en termes généraux qui tendent à la révision partielle de la Constitution et qui ont été rejetées par l'Assemblée fédérale; |
c | le principe d'une révision totale de la Constitution, en cas de désaccord entre les deux conseils. |
5.
Il s'ensuit que le recours est admis et que la décision attaquée est annulée. La votation fédérale du 28 février 2016 portant sur l'initiative populaire "Pour le couple et la famille - Non à la pénalisation du mariage" est annulée. Conformément à l'art. 182 al. 2
SR 101 Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 Cst. Art. 182 Législation et mise en oeuvre - 1 Le Conseil fédéral édicte des règles de droit sous la forme d'une ordonnance, dans la mesure où la Constitution ou la loi l'y autorisent. |
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1 | Le Conseil fédéral édicte des règles de droit sous la forme d'une ordonnance, dans la mesure où la Constitution ou la loi l'y autorisent. |
2 | Il veille à la mise en oeuvre de la législation, des arrêtés de l'Assemblée fédérale et des jugements rendus par les autorités judiciaires fédérales. |
Il n'est pas perçu de frais judiciaires (art. 66 al. 4
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 66 Recouvrement des frais judiciaires - 1 En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
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1 | En règle générale, les frais judiciaires sont mis à la charge de la partie qui succombe. Si les circonstances le justifient, le Tribunal fédéral peut les répartir autrement ou renoncer à les mettre à la charge des parties. |
2 | Si une affaire est liquidée par un désistement ou une transaction, les frais judiciaires peuvent être réduits ou remis. |
3 | Les frais causés inutilement sont supportés par celui qui les a engendrés. |
4 | En règle générale, la Confédération, les cantons, les communes et les organisations chargées de tâches de droit public ne peuvent se voir imposer de frais judiciaires s'ils s'adressent au Tribunal fédéral dans l'exercice de leurs attributions officielles sans que leur intérêt patrimonial soit en cause ou si leurs décisions font l'objet d'un recours. |
5 | Sauf disposition contraire, les frais judiciaires mis conjointement à la charge de plusieurs personnes sont supportés par elles à parts égales et solidairement. |
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 68 Dépens - 1 Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe. |
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1 | Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe. |
2 | En règle générale, la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige. |
3 | En règle générale, aucuns dépens ne sont alloués à la Confédération, aux cantons, aux communes ou aux organisations chargées de tâches de droit public lorsqu'ils obtiennent gain de cause dans l'exercice de leurs attributions officielles. |
4 | L'art. 66, al. 3 et 5, est applicable par analogie. |
5 | Le Tribunal fédéral confirme, annule ou modifie, selon le sort de la cause, la décision de l'autorité précédente sur les dépens. Il peut fixer lui-même les dépens d'après le tarif fédéral ou cantonal applicable ou laisser à l'autorité précédente le soin de les fixer. |
SR 173.110 Loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF) - Organisation judiciaire LTF Art. 68 Dépens - 1 Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe. |
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1 | Le Tribunal fédéral décide, dans son arrêt, si et dans quelle mesure les frais de la partie qui obtient gain de cause sont supportés par celle qui succombe. |
2 | En règle générale, la partie qui succombe est tenue de rembourser à la partie qui a obtenu gain de cause, selon le tarif du Tribunal fédéral, tous les frais nécessaires causés par le litige. |
3 | En règle générale, aucuns dépens ne sont alloués à la Confédération, aux cantons, aux communes ou aux organisations chargées de tâches de droit public lorsqu'ils obtiennent gain de cause dans l'exercice de leurs attributions officielles. |
4 | L'art. 66, al. 3 et 5, est applicable par analogie. |
5 | Le Tribunal fédéral confirme, annule ou modifie, selon le sort de la cause, la décision de l'autorité précédente sur les dépens. Il peut fixer lui-même les dépens d'après le tarif fédéral ou cantonal applicable ou laisser à l'autorité précédente le soin de les fixer. |
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :
1.
Le recours est admis et la décision attaquée est annulée. La votation fédérale du 28 février 2016 portant sur l'initiative populaire "Pour le couple et la famille - Non à la pénalisation du mariage" est annulée.
2.
Il n'est pas perçu de frais judiciaires.
3.
Une indemnité de dépens de 2'000 francs, allouée au recourant, est mise à la charge de la Confédération.
4.
Le présent arrêt est communiqué aux mandataires du recourant, au Conseil fédéral, à la Chancellerie fédérale et au Conseil d'Etat du canton de Vaud.
Lausanne, le 10 avril 2019
Au nom de la Ire Cour de droit public
du Tribunal fédéral suisse
Le Président : Chaix
La Greffière : Tornay Schaller